Plainte déposée par le président et enquête d’intérêt public concernant le maintien de l’ordre dans le nord de la Colombie-Britannique

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Résumé

Contexte

La GRC offre des services de police contractuels à la province de la Colombie-Britannique, agissant comme force de police provinciale. La Colombie-Britannique est la plus grande division de la GRC, offrant des services de police locaux à plusieurs grandes municipalités ainsi qu'à toutes les municipalités de moins de 5 000 habitants et à tous les secteurs non constitués en municipalités partout dans la province, y compris de nombreuses collectivités des Premières Nations. La GRC assure le maintien de l'ordre dans le nord de la province, appelé « district du Nord », au moyen de 35 détachements et de bureaux satellites.

Pendant un certain nombre d'années, des personnes et diverses organisations de défense des droits de la personne et des libertés civiles ont soulevé des préoccupations au sujet du maintien de l'ordre dans le nord de la Colombie-Britannique, notamment le rapport de 2011 de la British Columbia Civil Liberties AssociationNote de bas de page 1, le rapport de 2012 de la Commission d'enquête sur les femmes portées disparues, dirigée par l'honorable Wally T. OppalNote de bas de page 2, et un rapport de 2013 de Human Rights WatchNote de bas de page 3. Ces rapports, de même que des incidents particuliers ayant trait aux services de policeNote de bas de page 4 s'étant produits dans le nord de la Colombie-Britannique, ont grandement suscité l'intention des médias et du public.

Enquête d'intérêt public

La responsabilisation des services de police contribue à la légitimité du maintien de l'ordre, sur laquelle repose l'appui du public à l'égard de l'application de la loi. C'est pourquoi le président intérimaire (maintenant président) de la Commission civile d'examen et de traitement des plaintes relatives à la GRCNote de bas de page 5 (la Commission) a examiné les préoccupations formulées dans ces divers rapports et a décidé qu'il était d'intérêt public de déposer une plainte et de lancer une enquête relativement à la conduite des membres de la GRC qui exercent leurs fonctions dans le nord de la Colombie-Britannique.

L'enquête d'intérêt public s'est attachée exclusivement au district du Nord de la GRC, puisqu'il s'agit de la région visée par bon nombre des préoccupations soulevées. La Commission a examiné la conduite des membres de la GRC relativement au maintien de l'ordre concernant des personnes en état d'ébriété dans un lieu public, l'incidence des fouilles de personnes effectuées par un membre de sexe opposé, le traitement des rapports de personnes disparues, le traitement des rapports de violence familiale, le recours à la force et le traitement des dossiers impliquant des jeunesNote de bas de page 6.

QUI SOMMES-NOUS?

La Commission est un organisme indépendant créé par le Parlement qui veille à ce que des plaintes déposées par le public à l'égard de membres de la GRC soient examinées de façon juste et impartiale.

La Commission ne fait pas partie de la GRC.

Dans ses rapports, la Commission formule des conclusions et des recommandations qui visent à régler et à prévenir des problèmes récurrents liés au maintien de l'ordre. La Commission a pour objectif de promouvoir l'excellence en ce qui concerne le maintien de l'ordre grâce à la responsabilisation.

Afin de déterminer s'il existait quelque problème systémique lié au maintien de l'ordre dans le nord de la Colombie-Britannique, la Commission a mené des enquêtes distinctes pour chacun des domaines précisés, à l'exception des dossiers relatifs aux jeunesNote de bas de page 7, dans le but de déterminer si les politiques, les procédures et la formation de la GRC sont adéquates. De plus, une étude approfondie des rapports d'incident et des rapports sur le recours à la force dans le district du Nord de la GRC a été effectuée.

Résultats d'enquête

Comme le mandat de la Commission est de nature corrective, il a pour objectif de déterminer toute amélioration qui pourrait être apportée, le cas échéant, dans le but de satisfaire l'intérêt public, notamment accroître et maintenir la confiance du public à l'égard du service de police national. À la suite d'une enquête approfondie, à laquelle ont participé plusieurs enquêteurs, de nombreuses entrevues et d'un examen de plus de 100 000 pages de documents, la Commission a donc formulé 45 conclusions et 31 recommandations :

  • Dix recommandations concernant les fouilles d'une personne;
  • Six recommandations concernant les personnes en état d'ébriété dans un lieu public;
  • Quatre recommandations concernant les rapports sur le recours à la force;
  • Cinq recommandations concernant la violence familiale;
  • Six recommandations concernant les personnes disparues.

L'annexe A présente une liste complète des conclusions et des recommandations de la Commission.

En résumé, la Commission a constaté des déficiences ou un manque de clarté en ce qui a trait aux politiques relatives aux fouilles d'une personne, au maintien de l'ordre lié à des personnes en état d'ébriété dans un lieu public et aux personnes disparues. Elle a aussi constaté qu'il y avait des améliorations à apporter en ce qui concerne les politiques relatives aux rapports sur la violence familiale et aux rapports sur le recours à la force.

Des recommandations visant à renforcer et à améliorer les politiques ont été formulées, notamment les suivantes :

  • modifier les politiques nationale et divisionnaire se rapportant aux fouilles d'une personne afin de les rendre plus claires, de refléter la jurisprudence actuelle et d'améliorer la transparence;
  • modifier la politique nationale relative à l'arrestation des adolescents pour qu'elle comprenne une orientation à l'intention des membres de la GRC sur les exigences en matière de signification des avis au moment de l'arrestation de jeunes et de leur détention en l'absence d'accusations;
  • modifier la politique divisionnaire qui oriente les membres de la GRC au sujet des conditions de mise en liberté dans les cas de personnes en état d'ébriété dans un lieu public, y compris la prise en considération des solutions de rechange à la détention;
  • modifier la politique nationale touchant les personnes disparues pour que les dossiers opérationnels comprennent une évaluation complète des risques, et pour que les observations et directives formulées par les superviseurs y soient consignées.

Au cours de l'examen des rapports d'incident et des rapports sur le recours à la force, la Commission a également constaté des problèmes quant à la conformité avec les politiques, y compris de nombreux cas où l'incident n'avait pas été exposé adéquatement, ce qui est un élément essentiel de la responsabilisation des services de police. Par exemple, près de la moitié des rapports visant des personnes disparues examinés par la Commission ne montrait pas que la GRC dans le district du Nord avait, conformément à la politique, réalisé des enquêtes rapides et rigoureuses. Cela ne revient pas à dire que ces cas n'ont pas fait l'objet d'une enquête adéquate, mais que la Commission n'a pu déterminer si la politique a été respectée en raison de l'absence de notes adéquates consignées dans les rapports d'incident.

De façon générale, la plupart des recommandations de la Commission visent à renforcer la transparence et la responsabilisation au moyen de politiques et de procédures améliorées, d'un examen de supervision accru, de meilleurs rapports et d'une formation améliorée.

Mobilisation des collectivités et de la GRC

Dans le cadre de son mandat établi, la Commission a également entrepris de mobiliser les collectivités et les membres de la GRC dans le nord de la Colombie-Britannique pour leur permettre de faire entendre leur voix. Les représentants de collectivités et les membres de la GRC qui le souhaitaient ont été invités à communiquer leurs points de vue et leur expérience ayant trait aux domaines particuliers cernés (personnes en état d'ébriété dans un lieu public, fouilles d'une personne, personnes disparues, violence familiale, recours à la force et jeunes) et au maintien de l'ordre en général dans le nord de la province.

À la suite de nombreuses préoccupations soulevées par des groupes de défense des droits de la personne et des libertés civiles au sujet du traitement d'Autochtones par des membres de services de police, nous nous sommes attachés à réaliser des entrevues auprès de dirigeants autochtones. La Commission s'est rendue dans 21 collectivités du nord de la Colombie-Britannique, menant des entrevues auprès de 64 membres des collectivités (y compris auprès de certains représentants d'organisations de défense des droits de la personne et des libertés civiles) et de 32 membres de la GRC. Les déclarations ont été faites de manière confidentielle, permettant ainsi aux participants de parler librement et en toute franchise. Les observations formulées reflètent les expériences ou les perceptions de personnes, mais ne représentent pas nécessairement les points de vue communs des collectivités, de la GRC ni de la Commission.

Les efforts de mobilisation ont permis à des personnes de soulever des préoccupations particulières, le cas échéant, concernant la conduite de membres de la GRC ainsi que de faire mieux connaître le rôle de la Commission et le processus de plaintes du public en général. Toute plainte déposée par des personnes dans le cadre de ce processus aurait été traitée séparément de l'enquête d'intérêt public; cependant, aucune plainte de ce genre n'a été déposée.

Étant donné qu'une grande partie de l'information recueillie dans le cadre des efforts de mobilisation des collectivités et des membres de la GRC était anecdotique et non fondée, la Commission n'a formulé aucune conclusion ni recommandation à la suite du processus de mobilisation des collectivités. Il convient cependant de souligner les résultats de ces efforts de mobilisation, puisqu'ils représentent les points de vue et les propositions de certains résidents du nord de la Colombie-Britannique ainsi que de membres de la GRC assurant les services de police dans la région.

D'après de nombreux membres des collectivités ayant répondu aux questions de la Commission, la perception générale à l'égard de la GRC dans les petites collectivités ou les collectivités rurales était positive. Les personnes interviewées ont dit qu'il existait une bonne relation entre les membres de la GRC et les collectivités où ils assurent le maintien de l'ordre, en particulier dans les collectivités auxquelles un membre du service de police des Premières Nations était expressément affecté. On a souvent attribué l'impression largement favorable à l'égard de la GRC aux efforts déployés par les membres de la GRC dans les petites collectivités pour établir des liens avec les résidents et pour s'intégrer dans la collectivité. Pour ce qui est de la GRC dans les grandes collectivités urbaines, les personnes interrogées avaient une autre perception : les membres de la GRC ne consacrent pas le temps nécessaire pour créer des liens. Des membres de la GRC ont également souligné l'importance de bonnes relations avec les collectivités, et certains d'entre eux ont proposé la mise sur pied dans les villes d'un programme des services de police des Premières Nations ou d'une stratégie sur les services de police autochtones, lesquels pourraient assurer une forme de services de police améliorés dans les régions urbaines du nord de la Colombie-Britannique.

Des membres de collectivités et de la GRC ont également dit que le leadership exercé par les services de police était un facteur décisif en ce qui concerne la qualité des relations entre les collectivités et la GRC. Il a été souligné que les chefs de détachement exerçaient un rôle de leadership dans l'établissement de liens dans les petites collectivités. Dans les grandes collectivités, on était d'avis que le personnel de direction donne la voie à suivre pour les membres de la GRC dans leurs interactions avec le public, laissant à chaque membre de la GRC le soin de créer des liens.

À cet égard, la Commission a recueilli des témoignages démontrant que la GRC avait réalisé des progrès afin d'affecter des membres compétents à des postes de direction dans le district du Nord, selon les nombreux commentaires positifs au sujet de chefs de détachement locaux formulés par des collectivités des Premières Nations. En particulier, la GRC semble avoir pris des mesures pour nommer des chefs de détachement sensibilisés aux différences culturelles possédant une grande expérience des relations avec les collectivités des Premières Nations dans les régions où se trouve une grande population d'Autochtones. Toutefois, les membres des collectivités ont communément critiqué le remplacement fréquent des membres de la GRC, y compris des chefs de détachement.

Il convient de souligner un autre problème énoncé par plusieurs membres des collectivités, en particulier dans les grandes collectivités urbaines, à savoir la perception selon laquelle la GRC – et la société en général – fait preuve de racisme envers les Autochtones et les membres des Premières Nations. Certaines personnes ont parlé de la méfiance que des Autochtones entretiennent à l'égard des services de police, mentionnant, à titre de facteur général expliquant un manque de confiance envers la GRC, que celle-ci a participé, dans le passé, à appréhender des enfants devant être placés dans des pensionnats.

Enfin, certains représentants de collectivités ont formulé des propositions visant l'amélioration des services de police assurés par la GRC dans la région, notamment : offrir aux membres de la GRC des activités de sensibilisation culturelle axées sur les différences locales et consacrer d'autres ressources policières dans la région, comme un plus grand nombre d'agents et de groupes spécialisés (p. ex. violence familiale).

Plaintes du public dans le district du Nord

Comme il a été mentionné précédemment, aucune plainte du public n'a été reçue à la suite des efforts de mobilisation des collectivités déployés par la Commission dans le cadre de son enquête d'intérêt public. La Commission reconnaît que certains membres de collectivités pourraient éprouver une certaine réticence à déposer une plainte. Cela dit, un certain nombre de plaintes ont été déposées pendant la période à l'étude.
Selon l'information fournie par la GRC, 792 plaintes du public concernant des détachements du district du Nord de la GRC en Colombie-Britannique ont été reçues du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2012. Par comparaison, la Division de la Colombie-Britannique a reçu un total de 5 111 plaintes, et l'ensemble de la GRC a reçu 10 949 plaintes. Les plaintes visant le district du Nord représentaient 15,5 % des plaintes reçues par la Division pendant cette périodeNote de bas de page 8.

Les principales allégations soulevées dans les plaintes visant le district du Nord sont présentées dans le tableau ci-dessous et comparées à celles visant la Division de la Colombie-Britannique et l'ensemble de la GRC :

Tableau 1 : Plaintes du public déposées contre la GRC dans le district du Nord

Trois principales allégations

District du Nord de la GRC
(nombre | %)

Division de la Colombie-Britannique
(nombre | %)

Ensemble de la GRC
(nombre | %)

1

Négligence dans le devoir
670 | 25,7 %

Négligence dans le devoir
5 153 | 32 %

Négligence dans le devoir
11 231 | 32,9 %

2

Attitude répréhensible
481 | 18,4 %

Attitude répréhensible
3 089 | 19,2 %

Attitude répréhensible
6 560 | 19,2 %

3

Recours abusif à la force
422 | 16,2 %

Recours abusif à la force
2 236 | 13,9 %

Recours abusif à la force
4 194 | 12,3 %

À la suite des 792 plaintes déposées concernant le district du Nord, la GRC :

Le plaignant qui n'est pas satisfait de la réponse de la GRC à la suite de sa plainte (telle que formulée dans la lettre de règlement) peut renvoyer la plainte à la Commission à des fins d'examen. Sur les 418 plaintes à la suite desquelles une lettre de règlement a été envoyée, la Commission a reçu 38 demandes d'examen.

Pendant la période à l'étude, la Commission a également réalisé cinq enquêtes à la suite de plaintes déposées par le président ou d'enquêtes d'intérêt publicNote de bas de page 11 portant sur des incidents survenus dans le district du Nord. Par exemple, le président a déposé une plainte concernant la mort en 2008 de Mme Cheryl Anne Bouey alors qu'elle était en détention à Prince George et a réalisé une enquête à cet égard; il a fait de même pour la mort par balle de M. Valeri George survenue en 2009 à Fort St. John ainsi qu'à la suite d'un incident au cours duquel on a eu recours à une arme à impulsions contre un enfant en 2011 à Prince George. Une enquête d'intérêt public a également été réalisée à la suite d'un incident survenu en 2011 où on a eu recours à la force contre une fille de 17 ans à Williams Lake. Le président a aussi déposé une plainte à la suite de la mort par balle de M. Gregory Matters, survenue en 2012, et a lancé une enquête d'intérêt publicNote de bas de page 12.

Conclusion

L'enquête d'intérêt public a pour but de déterminer s'il existait des problèmes systémiques en ce qui a trait aux services de police relatifs aux dossiers de personnes disparues, au maintien de l'ordre concernant des personnes en état d'ébriété dans un lieu public, au recours la force, au traitement des rapports de violence familiale et aux fouilles de personnes par la GRC dans le nord de la Colombie-Britannique. La Commission a prêté une attention particulière aux questions de transparence et de responsabilisation dans son examen des politiques et des procédures opérationnelles, du rôle des superviseurs et de la consignation des mesures prises par les membres de la GRC.

Bien que nous ayons examiné des milliers de rapports d'incident et bon nombre de politiques et de procédures au cours de l'enquête, outre plusieurs entrevues réalisées auprès de membres de la GRC et d'autres intervenants, l'enquête n'a pas permis de dégager des conclusions relativement à des problèmes généraux et systémiques en ce qui concerne les mesures prises par la GRC dans le nord de la Colombie-Britannique relativement aux questions à l'examen.

Les éléments probants recueillis mettent néanmoins en lumière des lacunes sur le plan des politiques et de la production de rapports, des problèmes de conformité et le besoin de mettre en place une formation et une supervision plus rigoureuses. À cet égard, deux problèmes se sont constamment dégagés de l'enquête d'intérêt public : une consignation inadéquate des mesures prises par les agents de police dans les rapports d'incident ou dans les rapports sur le recours à la force, et l'inconstance de l'examen par le superviseur des dossiers. En outre, les enquêtes de la Commission effectuées sur les fouilles de personnes et le recours à la force ont permis de cerner d'importantes déficiences au chapitre des pratiques de production de rapports qui entravent ou restreignent grandement la tenue d'un examen indépendant.

Les politiques de la GRC énoncent clairement l'importance du caractère exhaustif et de la qualité du contenu des dossiers, y compris les explications du membre de la GRC, dans les systèmes de gestion des documents d'incidents (p. ex. l'environnement de gestion de l'information sur les dossiers de la police [PRIME], utilisé en Colombie-Britannique). Les membres de la GRC ont la responsabilité de consigner les données relatives aux incidents auxquels ils sont affectés, tandis que les superviseurs et les chefs doivent s'assurer du caractère exhaustif et de l'exactitude de ces données. La Commission a néanmoins constaté plusieurs cas de non-conformité avec les politiques touchant la tenue des documents dans les domaines examinés.

Un autre problème a été relevé, soit celui des examens par le superviseur. La part élevée de dossiers qui n'étaient pas entièrement conformes aux lignes directrices stratégiques ou l'absence générale de commentaires ou de directives du superviseur dans les dossiers, comme pour ceux relatifs aux personnes disparues, dénotaient un examen inadéquat des dossiers par le superviseur. Pendant toute l'enquête, la Commission a mis en lumière l'importance d'une supervision efficace.

Enfin, la Commission a fait face à des difficultés en ce qui a trait aux systèmes et aux procédures qui ne favorisaient pas ou ne facilitaient pas la tenue d'un examen externe. Par exemple, la Commission prévoyait réaliser un examen des dossiers pour vérifier la conformité des membres de la GRC avec les politiques et les procédures en matière de fouille des personnes, y compris les cas de fouilles à nu. Cependant, on a informé la Commission que le système de gestion des dossiers de la GRC en Colombie-Britannique ne permettait pas d'effectuer un suivi de la fréquence ou du type de fouilles effectuées, ni de les comptabiliser, et ne permettait pas non plus de rendre compte des fouilles de personnes effectuées par un membre de sexe opposé. Même si ces renseignements peuvent être consignés dans le calepin du membre de la GRC, l'absence d'une consignation ou d'un suivi systématique a grandement restreint la capacité de la Commission d'évaluer la conformité et de déterminer l'existence d'un problème systémique à ce sujet. La Commission avait auparavant constaté dans le cadre d'un rapport « […] l'importance d'une gestion et d'un entreposage adéquats des documents pour en faciliter l'examenNote de bas de page 13 ». Il s'agit cependant d'un problème continu, qui n'est pas sans importance, puisqu'il touche directement les obligations redditionnelles de la GRC. Plusieurs des recommandations formulées dans le présent rapport visent donc à améliorer la transparence et la responsabilisation de la GRC, lesquelles constituent les piliers de la confiance du public à l'égard des services de police.

Même si les activités de mobilisation des collectivités entreprises par la Commission ont fait ressortir un certain degré de satisfaction à l'égard de la GRC, en particulier dans les régions rurales, de nombreux membres de collectivités ont toujours l'impression que la GRC fait preuve de partialité à l'égard des Autochtones. Bien que la Commission ne soit pas en mesure d'étayer ce point de vue dans le cadre de son examen des politiques et des dossiers, elle reconnaît que les faiblesses relevées dans certaines politiques et procédures peuvent nuire à la transparence et à la responsabilisation générales de la GRC, ce qui peut favoriser la méfiance et nourrir, dans les collectivités, des perceptions qui reflètent souvent les expériences particulières de personnes.

Introduction

Conformément au mandat de la Commission, la présente enquête vise à cerner tout problème systémique au chapitre du maintien de l'ordre dans le nord de la Colombie-Britannique. Les résultats sont exposés dans le présent rapport, qui comprend cinq parties :

  • Partie I : Portée de l'enquête d'intérêt public
  • Partie II : Contexte
  • Partie III : Enquête
  • Partie IV : Mobilisation des collectivités et des membres de la GRC
  • Partie V : Conclusion

Le rapport a été rédigé à la suite d'une enquête approfondie réalisée par plusieurs enquêteurs, qui ont examiné :

  • les politiques et les procédures opérationnelles pertinentes de la GRC;
  • les documents de formation pertinents du Programme de formation des cadets de l'École de la GRC (Division Dépôt), du Centre de formation de la région du Pacifique de la GRC et du Programme de formation pratique, ainsi que d'autres ressources de formation et d'information accessibles aux membres de la GRC en Colombie-Britannique;
  • plus de 4 000 rapports d'incident de police et 301 rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent dans le district du Nord;
  • les lois et la jurisprudence applicables;
  • des rapports d'enquête, des rapports d'organisations de défense des droits de la personne et des libertés civiles, des politiques et des procédures d'autres services de police, des rapports d'enquête du coroner, des études universitaires ainsi que des documents stratégiques et de formation pertinents du gouvernement de la Colombie-Britannique.

De façon à évaluer la conformité avec les politiques et le caractère adéquat de la formation, la Commission a entrepris un examen des rapports d'incident relatifs aux personnes disparues, du maintien de l'ordre concernant des personnes en état d'ébriété dans un lieu public, des enquêtes sur la violence familiale ainsi que des rapports sur le recours à la force. On a analysé en détail les rapports afin de déterminer s'il existait des problèmes systémiques et si les documents prouvaient que les membres de la GRC suivaient les politiques et les procédures pertinentes. Dans la plupart des cas, la Commission a évalué le caractère complet des documents, la qualité de la consignation de l'information par les membres de la GRC et des mesures d'enquête, ainsi que des indicateurs de contrôle de la qualité, comme des éléments attestant la tenue d'un examen par le superviseur.

En complément de l'examen de politiques, de procédures, de la formation et des rapports d'incident de la GRC, la Commission a réalisé des entrevues auprès de 84 personnes, y compris des membres de la GRC rattachés :

  • à la Direction générale;
  • au quartier général de la Colombie-Britannique;
  • au district du Nord;
  • au Centre de formation de la région du Pacifique.

Des entrevues ont également été menées auprès d'autres experts en la matière, comme des chercheurs universitaires et des fonctionnaires du gouvernement de la Colombie-Britannique.

Partie I : Portée de l'enquête d'intérêt public

Le 15 mai 2013, compte tenu de préoccupations soulevées par des organisations de défense des droits de la personne et des libertés civiles en ce qui a trait au maintien de l'ordre dans le nord de la Colombie-Britannique, le président intérimaire (maintenant président) de la Commission civile d'examen et de traitement des plaintes relatives à la GRC (la Commission) a déposé une plainte et a lancé une enquête d'intérêt public relativement à la conduite de membres de la GRC qui exercent leurs fonctions dans le nord de la Colombie-Britannique, conformément aux pouvoirs conférés à la Commission en vertu des paragraphes 45.37(1) et 45.43(1) de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada (Loi sur la GRC), en vigueur avant le 28 novembre 2014.

Le mandat établi visait à examiner la conduite de membres de la GRC relativement aux domaines particuliers suivants et à en rendre compteNote de bas de page 14 :

  • le maintien de l'ordre concernant des personnes en état d'ébriété dans un lieu public;
  • l'incidence des fouilles de personnes effectuées par un membre de sexe opposé;
  • le traitement des rapports de personne disparue;
  • le traitement des rapports de violence familiale;
  • le recours à la force;
  • le traitement des dossiers impliquant des jeunes.

La Commission a mené des enquêtes distinctes pour chacun des domaines précisés, à l'exception des dossiers relatifs aux jeunesNote de bas de page 15. Chaque enquête avait pour but de déterminer si les politiques, les procédures et la formation de la GRC sont adéquates et si des problèmes systémiques peuvent être cernés.

Les politiques et les procédures liées au maintien de l'ordre concernant des personnes en état d'ébriété dans un lieu public, aux fouilles d'une personne, aux personnes disparues, à la violence familiale et au recours à la force ont été examinées en détail et ont été évaluées en fonction de ce qui suit :

  • la conformité avec les lois et la jurisprudence actuelle;
  • la clarté des directives à l'intention des membres de la GRC;
  • l'uniformité entre les politiques nationales et les politiques divisionnaires;
  • les modalités prises aux fins de la reddition des comptes et du contrôle de la qualité.

La Commission est un organisme indépendant du gouvernement du Canada dont le mandat consiste à réaliser un examen objectif des données probantes recueillies pendant ses enquêtes et à formuler, le cas échéant, des recommandations visant à améliorer la conduite des membres de la GRC. Un résumé des 45 conclusions et 31 recommandations de la Commission se trouve à l'annexe A. >

Aux fins de l'enquête d'intérêt public, la Commission a mené des entrevues auprès de membres de collectivités et d'employés de la GRC qui le souhaitaient dans le but d'obtenir de l'information concernant les domaines précis cernés dans le mandat de la Commission et, plus généralement, le maintien de l'ordre dans le nord de la Colombie-Britannique. Dans le cadre des entrevues, les personnes ont pu soulever des préoccupations particulières, le cas échéant, quant à la conduite de membres de la GRC. La mobilisation des collectivités et de la GRC a en outre permis de faire mieux connaître le rôle de la Commission et le processus de plaintes du public en général. Toute plainte particulière déposée par des personnes pendant la tenue de l'enquête aurait été traitée comme une plainte distincte du publicNote de bas de page 16. Pour de plus amples renseignements sur le processus de plaintes du public et les plaintes visant la GRC dans le district du Nord, veuillez consulter l'annexe B.

La Commission a examiné toutes les questions présentées ci-dessus, les documents et les points de vue fournis à cet égard. Comme le prévoient les paragraphes 45.76(1) et 45.76(3) de la Loi sur la GRC, le rapport de la Commission est établi de manière provisoire, et le commissaire de la GRC doit l'examiner et fournir une réponse avant qu'un rapport final ne soit transmis au ministre.

Partie II : Contexte

Préoccupations soulevées par des organisations de défense des droits de la personne et des libertés civiles

En 2011, la British Columbia Civil Liberties Association a publié un rapport sur le maintien de l'ordre dans le nord de la Colombie-Britannique intitulé SMALL TOWN JUSTICE : A report on the RCMP in Northern and Rural British Columbia. Dans le rapport, des préoccupations étaient soulevées au sujet de la différence de traitement des Autochtones, du recours excessif à la force, du traitement des adolescents, de mesures de représailles à la suite de plaintes, d'un manque de responsabilisation, d'un manque de personnel et d'un taux élevé de roulement du personnel dans les détachements de la GRCNote de bas de page 17.

Par la suite, le rapport de 2012 de la Commission d'enquête sur les femmes portées disparues, dirigée par l'honorable Wally T. Oppal, faisait état de domaines particuliers de défaillance systémique, notamment le défaut de suivre les lignes directrices en matière d'enquête et de gestion des cas, la coordination inefficace entre organismes et une faible reddition de comptes. L'enquête a permis de constater l'existence d'un préjugé systémique au sein des services de police eu égard aux femmes disparues, un manque de leadership et de surveillance, le caractère inadéquat de politiques et de pratiques en matière de maintien de l'ordre, et ainsi de suite Note de bas de page 18. Dans son rapport intitulé Missing and Murdered Indigenous Women in British Columbia, Canada (2014)Note de bas de page 19, la Commission interaméricaine des droits de l'homme a réitéré les préoccupations soulevées par la Commission d'enquête.

Dans son rapport de 2013 intitulé Ceux qui nous emmènent : Abus policiers et lacunes dans la protection des femmes et filles autochtones dans le nord de la Colombie-Britannique, CanadaNote de bas de page 20, Human Rights Watch a allégué que la police dans le nord de la Colombie-Britannique a, de façon générale, mené des interventions policières abusives à l'égard de femmes et de filles autochtones et ne les a pas protégées. Le groupe affirme également que les femmes et les filles autochtones n'ont pas confiance dans la capacité et la volonté de la police de les protéger, ce qui découle de mauvaises interventions policières ou de l'absence de celles-ci dans les cas de disparition et de meurtre, ainsi que des mesures inadéquates prises par la police pour intervenir en cas de violence familiale et d'agression sexuelle. Dans ce rapport, Human Rights Watch allègue également l'existence de lacunes apparentes au chapitre des mécanismes de surveillance destinés à assurer que des comptes soient rendus pour les abus commis par des policiers.

Maintien de l'ordre en Colombie-Britannique

Désignée à des fins administratives en tant que Division « E », la GRC en Colombie-Britannique compte plus de 9 500 employés et représente la plus grande division de la GRC au pays.

La Division « E »st divisée en quatre districts : district de l'île de Vancouver, district du Lower Mainland, district du Sud-Est et district du Nord.

L'enquête d'intérêt public de la Commission visait exclusivement le district du Nord, dont les bureaux sont situés à Prince George. Le district du Nord assure le maintien de l'ordre dans environ 70 % du territoire de la province. Il est composé de 35 détachements de la GRC, en plus de groupes de soutien, et compte 664 membres de la GRC et 75 employés de la fonction publiqueNote de bas de page 21.

Dans toute analyse du maintien de l'ordre dans le nord de la Colombie-Britannique, il faut prêter une attention particulière aux services de police auprès de la population autochtone et dans les collectivités des Premières Nations. Les Autochtones représentent 5,4 % de la population totale de la Colombie-Britannique et 17,5 % de la population du nord de la provinceNote de bas de page 22. La population autochtone, dans les centres urbains ainsi qu'à l'intérieur et à l'extérieur des réserves, compte pour une plus grande part de la population totale dans le nord de la Colombie-Britannique que dans les régions méridionales de la province. Dans les centres urbains dans le district du Nord et les régions rurales à l'extérieur des réserves, la GRC offre des services de police à la population autochtone faisant partie de l'ensemble de la population. À l'intérieur des réserves, des agents affectés au Service de police communautaire des Premières Nations assurent le maintien de l'ordre dans bon nombre de collectivités.

En 2012, le Service de police communautaire des Premières Nations disposait d'un effectif autorisé de 108,5 agents qui offraient des services de police exclusifs à 131 collectivités des Premières Nations en Colombie-Britannique au moyen de 53 ententes communautaires tripartites. Ces ententes sont négociées entre une collectivité inuite ou des Premières Nations, le gouvernement provincial ou territorial et le gouvernement fédéral. Dans le cadre d'une entente communautaire tripartite, des agents rattachés à un service de police existant, habituellement la GRC, sont affectés à une collectivité inuite ou des Premières NationsNote de bas de page 3. La majorité des détachements du district du Nord prévoient un ou plusieurs postes autorisés d'agents du service de police des Premières Nations.

Partie III : Enquête

Les sections suivantes résument l'enquête de la Commission pour ce qui est de chacun des domaines précisés dans son mandat (fouilles d'une personne, maintien de l'ordre concernant des personnes en état d'ébriété dans un lieu public, recours à la force, violence familiale et personnes disparues). Les relations des agents de police avec les femmes et les jeunes sont examinées dans chacune enquête, le cas échéant.

Fouilles d'upne ersonne

Contexte

Au Canada, le pouvoir des agents de police de fouiller une personne, de façon accessoire à une arrestation légale, est établi par la common lawNote de bas de page 24. Selon le type ou le degré de fouille d'une personne, sa justification et les aspects d'ordre constitutionnel soulevés sont plus ou moins importants. Plus la fouille est envahissante, plus sa justification et le degré de protection constitutionnelle requis sont importantsNote de bas de page 25.

La fouille corporelle (fouille par palpation) est la fouille minutieuse des vêtements d'une personne au moment de l'arrestationNote de bas de page 26. Au cours d'une fouille corporelle, un membre de la GRC pourrait demander à une personne de vider ses poches et pourrait par la suite palper les vêtements extérieurs d'une personne ou passer ses mains sur ceux-ci afin de trouver des armes ou des éléments de preuveNote de bas de page 27. On effectue des fouilles corporelles accessoires à une arrestation pour assurer la sécurité des agents de police et du public, pour éviter la destruction d'éléments de preuve ou pour trouver des éléments de preuve liés à l'infraction pour laquelle l'arrestation a été effectuéeNote de bas de page 28. On pourrait effectuer une fouille corporelle accessoire à une arrestation sur les lieux de l'infraction, avant que le sujet soit transporté dans un véhicule de police ou avant qu'il soit placé en cellule. Un sujet pourrait donc être soumis à deux fouilles corporelles accessoires à une arrestation légale (entre le moment de l'arrestation et son incarcération).

Le pouvoir des agents de police d'effectuer une fouille corporelle accessoire à une arrestation légale n'exige pas l'existence de motifs raisonnables ou probablesNote de bas de page 29. Dans l'arrêt Cloutier c Langlois, la Cour suprême du Canada a statué que « l'intrusion minimale que représente la fouille [par palpation] est nécessaire pour assurer une saine administration de la justice criminelleNote de bas de page 30 ». Le pouvoir d'effectuer une fouille corporelle accessoire à une arrestation est cependant discrétionnaire; il ne s'agit pas d'un devoir. Dans l'arrêt Cloutier, la Cour suprême a statué ce qui suit :

Les policiers jouissent d'une discrétion dans l'exercice de la fouille. Dans les cas où ils sont satisfaits que l'application de la loi peut s'effectuer d'une façon efficace et sécuritaire sans l'intervention d'une fouille, les policiers peuvent juger opportun de ne pas procéder à la fouille. Ils doivent être en mesure d'apprécier les circonstances de chaque cas afin de déterminer si la fouille répond aux objectifs sous-jacentsNote de bas de page 31.

Dans l'arrêt Cloutier,la Cour suprême a établi trois principes concernant le pouvoir des policiers d'effectuer une fouille accessoire à une arrestation :

  • a) les policiers ont le pouvoir d'effectuer une fouille; il ne s'agit pas d'un devoir;
  • b) la fouille doit viser un objectif valable dans la poursuite des fins de la justice criminelle;
  • c) la fouille ne doit pas être effectuée de façon abusiveNote de bas de page 32.

À l'intérieur de ces paramètres juridiques, les fouilles corporelles accessoires à une arrestation, comme les fouilles par palpation, sont légales et appropriéesNote de bas de page 33.

Bien que les fouilles corporelles soient une pratique relativement habituelle des services policiers au moment d'une arrestation, les fouilles à nu ne le sont pas. Une fouille à nu comprend l'action d'enlever en totalité ou en partie les vêtements d'une personne afin de permettre l'inspection visuelle de ses parties intimes, à savoir ses organes génitaux externes, ses fesses, ses seins (dans le cas d'une femme) ou ses sous-vêtementsNote de bas de page 34. Selon la Cour suprême du Canada, les fouilles à nu sont fondamentalement envahissantes et avilissantes; on ne peut y recourir systématiquement dans le cadre d'une politiqueNote de bas de page 35.

Dans l'arrêt R c Golden, la Cour suprême a déclaré ce qui suit :

Eu égard à l'atteinte grave à la vie privée et à la dignité de la personne qui découle inévitablement d'une fouille à nu, les fouilles de cette nature ne sont constitutionnelles en common law que lorsqu'elles sont effectuées accessoirement à une arrestation légale afin de découvrir des armes que la personne détenue a en sa possession ou des éléments de preuve liés au motif de l'arrestation. La police doit aussi établir l'existence de motifs raisonnables qui justifient la fouille à nu en plus des motifs raisonnables qui justifient l'arrestation. Une fois réunies ces conditions préalables à l'exécution d'une fouille à nu accessoire à une arrestation, il faut nécessairement s'assurer que la fouille à nu est effectuée d'une manière qui ne contrevient pas à l'art. 8 de la CharteNote de bas de page 36.

La common law exige que les fouilles à nu accessoires à une arrestation, en l'absence d'autorisation judiciaire préalable (p. ex. sans mandat), soient effectuées de manière à porter le moins possible atteinte au droit à la vie privée et à la dignité de la personne qui y est soumise et à atteindre un juste équilibre entre le droit à la vie privée de la personne soumise à la fouille et les intérêts qu'ont la police et le public à ce que les preuves pertinentes soient conservées et à ce que soit assurée la sécurité des agents de police, des personnes détenues et du publicNote de bas de page 37. Dans l'arrêt Golden,la Cour suprême a créé un important précédent juridique en permettant aux agents de police de décider du moment où il faut effectuer une fouille à nu accessoire à une arrestation afin de veiller au respect de la Charte canadienne des droits et libertés (la Charte).

La Cour suprême a aussi déclaré que la fouille à nu comprend l'« action d'enlever ou de déplacer en totalité ou en partie les vêtements d'une personne afin de permettre l'inspection visuelle de ses parties intimes, à savoir ses organes génitaux externes, ses fesses, ses seins (dans le cas d'une femme) ou ses sous-vêtementsNote de bas de page 38 » [c'est nous qui soulignons], adoptant clairement le point de vue selon lequel l'action par un sujet d'enlever ses sous-vêtements consiste en une fouille à nu. La Cour provinciale de la Colombie-Britannique (Chambre de la jeunesse) a appuyé cette position et a ajouté que la définition de la fouille à nu comprenait l'action d'enlever un soutien-gorgeNote de bas de page 39.

Désigné aussi comme un « examen des cavités corporelles », l'examen corporel comprend l'inspection physique d'orifices corporels. Ces examens sont généralement réalisés par des médecins en milieu hospitalier. Il s'agit du type d'examen qui est le plus invasif sur la vie privée et il constitue une très grande atteinte à l'intégrité d'une personne. Comme il a été mentionné précédemment, la common law prévoit que plus la fouille est envahissante, plus sa justification et le degré de protection constitutionnelle accordés doivent être importants. Par conséquent, une fouille corporelle exigerait une justification moins grande qu'une fouille à nu, qui, elle-même, exigerait une justification moins importante qu'un examen corporelNote de bas de page 40.

Dans un rapport de 2013, Human Rights Watch a soulevé des préoccupations concernant des femmes et des adolescentes ayant fait l'objet d'une fouille ou d'une fouille à nu par des membres de sexe opposé de la GRC. En particulier, Human Rights Watch formulait dans son rapport la recommandation suivante visant la GRC : « [é]liminer les fouilles et le contrôle des femmes et des jeunes filles pratiqués par des policiers masculins sauf circonstances extraordinaires, et exiger que ce type de fouilles soit documenté et examiné par les superviseurs et les commandants » et interdire les fouilles à nu effectuées par des membres de la GRC de sexe opposé quelles que soient les circonstancesNote de bas de page 41. Le groupe mentionne également les normes en matière de droits de la personne selon lesquelles les fouilles corporelles par les autorités gouvernementales ne devraient être menées que par des personnes du même sexeNote de bas de page 42.

La GRC a confirmé à la Commission que la répartition de ses membres selon le sexe dans le district du Nord est la suivante : 80 % d'hommes et 20 % de femmes. Ainsi, 32,5 % des détachements du district du Nord comptent donc uniquement des membres de sexe masculin (en date du 1er octobre 2014)Note de bas de page 43.

Politiques de la GRC

Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC – Politiques en matière de fouille d'une personne

Au chapitre des fouilles d'une personne, les politiques de la GRC mentionnent trois types de fouilles : fouille corporelle (fouille par palpation), fouille à (corps) nu et examen corporel (examen des cavités corporelles).

Dans le cadre de la présente enquête, la Commission a analysé ce qui suit :

  • Direction générale de la GRC, Manuel des opérations, chapitre 18.1. – « Arrestation et détention », article 5. – « Fouilles » (daté du 15 mai 2013);
  • Direction générale de la GRC, Manuel des opérations, chapitre 19.3. – « Garde des prisonniers et de leurs effets personnels » (daté du 21 août 2013);
  • Direction générale de la GRC, Manuel des opérations, chapitre 21.1. – « Pouvoir de perquisition » (daté du 28 mai 2013);
  • Direction générale de la GRC, Manuel des opérations, chapitre 21.2. – « Fouille d'une personne » (daté du 13 février 2013).

Le chapitre 21.2. – « Fouille d'une personne » du Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC porte en particulier sur les fouilles d'une personne. Il définit et décrit les types de fouilles d'une personne : fouille corporelle (palpation), fouille à corps nu et examen corporel.

La politique nationale définit la fouille corporelle comme « la fouille minutieuse des vêtements au moment de l'arrestation ». Elle précise que les fouilles corporelles « doivent être effectuées de façon à porter le moins possible atteinte à la vie privée et à la dignité de la personne faisant l'objet de la fouille et à ne pas enfreindre l'article 8 de la Charte canadienne des droits et libertés ».

La politique nationale définit une fouille à (corps) nu comme « la fouille minutieuse des vêtements d'une personne et l'examen visuel seulement de son corps, y compris de ses parties génitales et anale, sans contact physique ». La politique précise en outre que les fouilles à nu ne doivent pas être considérées comme une pratique policière habituelle et fournit des directives quant aux exigences juridiques qui doivent être respectées au moment d'effectuer une fouille à nu (c.-à-d. « ne doit être effectuée que lorsqu'il y a des motifs raisonnables de croire que le suspect dissimule des éléments de preuve relatifs à un crime ou des articles qui peuvent lui servir à s'évader ou à causer la mort ou des blessures »).

Dans l'examen de ces politiques, la Commission a demandé des précisions à la Direction générale de la GRC, à la division de la GRC en Colombie-Britannique et à la Division Dépôt de la GRC au sujet de la définition des termes « fouille corporelle » et « fouille à nu », et afin de déterminer si une fouille obligeant un sujet à ne garder que ses sous-vêtements serait considérée comme une fouille à nu ou une fouille corporelle. Les responsables de la Direction générale de la GRC et de la division de la GRC en Colombie-Britannique ont répondu que, conformément à la politique nationale, une telle fouille ne serait pas une fouille à nuNote de bas de page 44. Cependant, selon la Division Dépôt, l'action par un sujet d'enlever ses vêtements et de ne garder que ses sous-vêtements constitue une fouille à nuNote de bas de page 45.

Compte tenu des réponses mentionnées ci-dessus, il appert que les définitions des termes « fouille corporelle » et « fouille à (corps) nu » dans la politique nationale ne sont pas suffisamment claires pour aider les membres à déterminer si la fouille d'une personne est une fouille à nu ou une fouille corporelle. Cela soulève des préoccupations quant à l'application et à la formulation cohérentes de motifs raisonnables pour effectuer une fouille.

Conclusion no 1 : Les définitions des termes « fouille corporelle » et « fouille à (corps) nu » dans le Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC sont imprécises et ne permettent pas suffisamment d'orienter les membres afin de distinguer clairement les deux types de fouille.

Selon la Cour suprême, une fouille à nu comprend l'« action d'enlever ou de déplacer en totalité ou en partie les vêtements d'une personne afin de permettre l'inspection visuelle de ses parties intimes, à savoir ses organes génitaux externes, ses fesses, ses seins (dans le cas d'une femme) ou ses sous-vêtementsNote de bas de page 46 » [c'est nous qui soulignons]. Par conséquent, il semble que la définition du terme « fouille à (corps) nu » dans le Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC n'est pas conforme à cette définition.

Conclusion no 2 : La définition du terme « fouille à (corps) nu » dans la politique nationale de la GRC n'est pas conforme aux définitions de la jurisprudence actuelle.

Recommandation no 1 : Que la GRC modifie les définitions des termes « fouille corporelle » et « fouille à (corps) nu » dans le Manuel des opérations de la Direction générale pour éliminer toute ambiguïté et s'assurer que les définitions sont conformes à celles de la jurisprudence actuelle.

La politique nationale prévoit qu'une fouille à nu :

[...] doit être autorisée par un superviseur lorsqu'il y en a un de disponible, doit être effectuée par un membre du même sexe, doit être effectuée rapidement et, dans la mesure du possible, de façon à ce que le détenu ne soit en aucun temps complètement nu, doit être effectuée d'une manière qui n'est pas abusive et ne doit pas être effectuée par un plus grand nombre de membres que nécessaire afin d'assurer la protection des membres et du détenu [c'est nous qui soulignons]Note de bas de page 47.

À cet égard, des membres de la Direction des services de police contractuels et autochtones de la Direction générale de la GRC ont mentionné, au cours d'une entrevue avec des représentants de la Commission, qu'un superviseur peut être joint par téléphone, sinon en personne, dans la plupart des cas. Ils ont de plus fait remarquer qu'il devrait toujours y avoir un chef de veille ou un superviseur sur appel et, dans les plus petits détachements, on devrait pouvoir faire appel à un superviseur d'un détachement avoisinant, si le superviseur n'est pas disponible. Cela dit, la GRC a confirmé que, dans les situations urgentes, on pouvait effectuer une fouille à nu sans obtenir l'approbation d'un superviseurNote de bas de page 48. Des entrevues menées auprès de membres de la GRC en Colombie-Britannique ont confirmé que cela était bien le cas à la Division « E »Note de bas de page 49.

Bien que l'obtention de l'approbation d'un superviseur avant d'effectuer une fouille à nu soit une bonne façon d'assurer une surveillance à l'interne, la Commission est d'avis que l'ajout de la mention « lorsqu'il y en a un de disponible » réduit de façon considérable le caractère strict de la disposition.

Conclusion no 3 : L'exigence de la politique nationale de la GRC selon laquelle les membres doivent obtenir l'approbation d'un superviseur avant d'effectuer une fouille à nu « lorsqu'il y en a un de disponible » n'est pas suffisamment stricte pour que l'on puisse s'assurer qu'une telle approbation est obtenue dans toutes les situations, sauf les plus urgentes.

Exiger l'obtention de l'approbation d'un superviseur avant d'effectuer une fouille à nu, sauf en cas de circonstances urgentes (p. ex. une fouille à nu doit être effectuée immédiatement afin de préserver des éléments de preuve ou de garantir la sécurité de membres, du détenu ou du public), ne semblerait pas imposer un fardeau indu aux membres de la GRC.

Recommandation no 2 : Que la GRC modifie le chapitre 21.2. de sa politique nationale en ce qui a trait aux fouilles d'une personne afin de veiller à une surveillance plus rigoureuse par un superviseur en exigeant expressément l'approbation d'un superviseur avant que soit effectuée une fouille à nu, sauf en cas de circonstances urgentes.

La politique nationale prévoit aussi qu'un membre effectuant une fouille à nu « doit être prêt à démontrer [par écrit] comment chacun des critères établis dans l'affaire R c. Golden a été rempliNote de bas de page 50 » [c'est nous qui soulignons]. Cette exigence est beaucoup moins stricte que celle qui consiste à exiger d'un membre qu'il consigne dans un rapport ou dans ses notes comment ces critères sont respectés. La GRC a reconnu devant la Commission que même si la politique est floue, elle vise à enjoindre aux membres de formuler par écrit la façon dont les critères de la fouille à nu sont respectésNote de bas de page 51.

La politique nationale comprend en outre une section intitulée « Précautions », qui offre des conseils et une orientation supplémentaires aux membres, notamment l'article 4.3., qui précise ce qui suit : « Ne pas fouiller une personne de sexe opposé, à moins qu'il n'existe un risque immédiat de blessure ou d'évasion », et l'article 4.4., qui réitère que « [c]onformément à l'art. 2.4., n'effectuer une fouille à corps nu que sur une personne du même sexe, et qu'en privé ».

Compte tenu de ce qui précède, bien que les articles 2.4. et 4.4. prévoient qu'une fouille à nu « doit être effectuée par un membre du même sexe », il n'est pas certain que l'article 4.3. s'applique uniquement aux fouilles corporelles (palpation) ou si un membre peut effectuer une fouille à nu sur une personne de sexe opposé, à moins qu'il n'existe un risque immédiat de blessure ou d'évasion.

Conclusion no 4 : Les articles 4.3. et 4.4. du chapitre 21.2. du Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC manquent de clarté en ce qui concerne les situations où une fouille à nu effectuée par un membre de sexe opposé est autorisée.

À cet égard, des membres de la Direction des services de police contractuels et autochtones de la Direction générale de la GRC et de la GRC en Colombie-Britannique ont confirmé qu'une fouille à nu d'un sujet de sexe opposé peut être effectuée dans des circonstances urgentesNote de bas de page 52. Il convient également de noter que, au cours d'entrevues menées par l'enquêteur de la Commission, interrogés au sujet des politiques et des procédures relatives à la fouille d'une personne, des membres de la GRC du district du Nord de la Colombie-Britannique ont répondu de façon uniforme que, bien que des fouilles corporelles effectuées par un membre de sexe opposé ne soient pas inhabituelles, il n'y pas de fouilles à nu effectuées par un membre de sexe opposé. En outre, la plupart des membres interrogés ont dit que les fouilles à nu, y compris celles de personnes de même sexe, sont, en règle générale, extrêmement rares ou inexistantes. Les membres ont aussi dit que, dans de rares circonstances où des fouilles à nu de femmes se produisent, des gardiennes ou des employées de la GRC sont généralement disponibles pour les effectuerNote de bas de page 53.

Recommandation no 3 : Que la GRC modifie le chapitre 21.2. de sa politique nationale concernant la fouille d'une personne afin de clarifier les situations où une fouille à nu d'une personne de sexe opposé est autorisée. De plus, la politique devrait énoncer les circonstances ou les critères qui doivent être respectés avant que l'on puisse effectuer ou superviser une fouille à nu d'une personne de sexe opposé (c.-à-d. s'il existe un risque immédiat de blessure ou d'évasion ou dans des circonstances urgentes).

Le chapitre 21.2. du Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC aborde également les examens corporels. L'article 3. du chapitre 21.2. définit l'examen corporel comme étant la fouille des orifices corporels (sauf la bouche) et précise qu'une telle fouille comporte un « empiètement des plus poussés sur la vie privée de la personne ainsi qu'une atteinte à sa dignité » et qu'il ne doit être effectué que par un médecin. Même si la politique présente l'orientation générale, elle n'informe pas les membres du processus d'approbation obligatoire ou des exigences au chapitre de la production de rapports. Compte tenu de l'atteinte à la dignité personnelle inhérente à ce type de fouille, la politique devrait établir clairement les motifs obligatoires pour effectuer un examen corporel, les approbations appropriées qu'il faut obtenir et les exigences au chapitre de la production de rapports.

Conclusion no 5 : L'article 3. du chapitre 21.2. du Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC ne présente pas clairement aux membres les motifs obligatoires permettant d'effectuer un examen corporel, les approbations nécessaires ou les exigences au chapitre de la production de rapports.

Recommandation no 4 : Que la GRC modifie sa politique relative à l'examen corporel afin de s'assurer qu'elle précise clairement les motifs obligatoires permettant d'effectuer un examen corporel, de même que les approbations requises.

L'article 5. du chapitre 21.2. du Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC a trait aux exigences au chapitre de la production de rapports des membres en ce qui concerne les fouilles d'une personne. Il prévoit que les membres de la GRC doivent « verser au dossier » les notes où ils énoncent les motifs de la fouille et la façon dont elle a été effectuée. L'article 5.2. précise ce qui suit : « [l]orsqu'on ne peut pas articuler dans ses notes les modalités visées à l'art. 2.4., obtenir, dans la mesure du possible, l'autorisation d'un superviseur disponible » [c'est nous qui soulignons]Note de bas de page 54.

L'article 5.2. n'explique pas les circonstances dans lesquelles on pourrait considérer qu'un membre « ne peut pas articuler » ce qui est visé à l'article 2.4. ou celles où un superviseur serait tenu d'accorder son autorisation en vertu de cette disposition. À cet égard, les membres de la GRC de la Direction des services de police contractuels et autochtones n'ont pas été en mesure d'expliquer l'objet et l'application de cette dispositionNote de bas de page 55.

Compte tenu de la nature envahissante et humiliante des fouilles à nu, ainsi que des infractions potentielles à la Charte d'une fouille à nu effectuée de façon déraisonnable, la politique nationale de la GRC devrait être clarifiée et étayée en exigeant des membres qu'ils formulent, par écrit, la façon dont chacun des critères obligatoires est respecté. La politique devrait également préciser le support matériel où les renseignements doivent être consignés (p. ex. Rapport sur le prisonnier, rapport d'incident ou calepin du membre). Le fait de clarifier et de renforcer les exigences au chapitre des rapports permettra d'éliminer toute ambiguïté, d'accroître la transparence des rapports et la responsabilisation, et de fournir une façon d'évaluer et de mesurer la conformité avec les politiques et les procédures.

Conclusion no 6 : Le libellé actuel de l'article 5.2. du chapitre 21.2. du Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC est flou et ambigu en ce qui a trait à l'exigence prévue à l'article 2.4., selon laquelle il faut consigner les motifs de la tenue d'une fouille et la façon dont elle a été effectuée, et au support matériel où ces renseignements doivent être consignés.

Recommandation no 5 : Que la GRC modifie le chapitre 21.2. de sa politique nationale au sujet des fouilles d'une personne afin de s'assurer que la politique établit l'exigence selon laquelle le membre doit énoncer par écrit les motifs de la tenue d'une fouille et la façon dont elle a été effectuée, notamment les renseignements que les membres doivent inscrire et le support matériel où ils doivent être consignés.

Dans son examen des documents ayant trait aux politiques de la GRC, la Commission a remarqué que la politique nationale de la GRC n'offre aucune directive ni aucune orientation aux membres en ce qui concerne la fouille d'une personne transgenre ou intersexuée. Même si ce sujet particulier n'a pas été abordé dans le cadre de la présente enquête, la Commission est d'avis que les politiques, les procédures et la formation de la GRC devraient comprendre des dispositions visant à aborder la fouille d'une personne transgenre ou intersexuée.

La Commission a également noté que ni les politiques et procédures nationales de la GRC sur les fouilles d'une personne ni les politiques régissant l'usage et l'application d'un équipement vidéo en circuit fermé dans les blocs cellulairesNote de bas de page 56 n'exposent de lignes directrices ou une orientation aux membres quant à l'enregistrement de fouilles d'une personne au moyen de caméras ou à toute contrainte ou restriction à cet égard. Cela est particulièrement pertinent compte tenu d'un cas récent (R c Fine)Note de bas de page 57, où la Cour provinciale de la Colombie-Britannique a statué qu'un membre de la GRC à Kelowna avait violé un droit garanti par la Charte d'une femme à la protection contre les fouilles abusives en l'enregistrant sur une vidéo pendant qu'elle était partiellement nue et en diffusant l'enregistrement dans une salle de surveillance. La Commission estime donc que la GRC devrait modifier les politiques et les procédures pertinentes de façon à restreindre l'utilisation de l'équipement vidéo en circuit fermé au cours des fouilles à nu afin de s'assurer que les droits garantis par la Charte d'une personne faisant l'objet d'une fouille ne sont pas violés.

Manuel des opérations de la Division de la Colombie-Britannique de la GRC – Politiques en matière de fouille d'une personne

Les politiques du Manuel des opérations de la GRC en Colombie-Britannique sur les fouilles d'une personne sont consignées dans le chapitre 21.2. du Manuel des opérations de la Division « E » (Colombie-Britannique) de la GRC (daté du 28 juillet 2006). Comme il a été mentionné précédemment, les politiques divisionnaires visent à servir de complément et à préciser les politiques nationales et à offrir une orientation supplémentaire pour une Division « E »n particulier ou des éléments contextuels relatifs à une province donnée.

L'article 1. concerne la politique nationale sur les fouilles d'une personne et précise que tous les prisonniers doivent faire l'objet d'une fouille par un membre avant d'être placés en cellule et que des prisonniers pourraient faire l'objet d'une fouille par un membre de sexe opposé si un autre membre ou gardien est présent pendant toute la durée de la fouille, ou en situation d'urgence. Cet article souligne également que les membres doivent [TRADUCTION] « évaluer les circonstances et exercer leur jugement au moment d'effectuer la fouille d'un prisonnierNote de bas de page 58 ». L'article 1. du chapitre 21.2. du Manuel des opérations de la Division « E » (Colombie-Britannique) de la GRC est de portée générale et floue. L'article ne distingue pas la fouille corporelle d'une fouille à nu. En précisant qu'une fouille peut être effectuée par un membre de sexe opposé si [TRADUCTION] « un autre membre ou gardien est présent pendant toute la durée de la fouille ou en situation d'urgence », le chapitre ne permet pas de distinguer si cela s'applique à la fouille corporelle, à la fouille à nu ou aux deux.

Selon l'article 4. de la politique :

[TRADUCTION]

  • 4.1. S'il est établi à la suite d'une fouille par palpation qu'une prisonnière porte un soutien-gorge et que les critères permettant la tenue d'une fouille à corps nu ne sont pas respectés, et si la sécurité de l'agent n'est pas compromise, le membre de la GRC ou la surveillante devrait :
    • 4. 1. 1. donner à la prisonnière l'instruction de retirer son soutien-gorge sans ôter quelque vêtement que ce soit et de remettre le sous-vêtement au membre de la GRC ou à la surveillante;
    • 4. 1. 2. dans un endroit privé, aider la prisonnière à retirer son soutien-gorge;
    • 4. 1. 3. effectuer une fouille complète du soutien-gorge;
    • 4. 1. 4. en l'absence de préoccupations pouvant être consignées, redonner le sous-vêtement à la prisonnière pour qu'elle le remette.
  • 4. 2. La saisie du soutien-gorge ou sous-vêtement d'une prisonnière avant qu'elle soit placée en cellule n'est permise que lorsqu'on a formulé des préoccupations selon lesquelles :
    • 4. 2. 1. l'armature du soutien-gorge peut être utilisée comme arme ou pour faciliter une évasion;
    • 4. 2. 2. le sous-vêtement peut être utilisé pour faciliter un suicideNote de bas de page 59.

Au cours des entrevues menées auprès de responsables de la GRC en Colombie-Britannique, la Commission a appris qu'on procédait au retrait du soutien-gorge des prisonnières pour des raisons de sécurité et qu'il s'agit d'une pratique habituelle auprès des femmes extrêmement intoxiquées. Ces responsables ont également dit que le retrait du soutien-gorge est considéré comme faisant partie d'une fouille corporelle complète et non d'une fouille à nuNote de bas de page 60.

Comme il a été mentionné précédemment, selon la jurisprudence actuelle, l'obligation qu'a une prisonnière d'ôter son soutien-gorge relève de la définition de la fouille à nu. La Cour provinciale de la Colombie-Britannique (Chambre de la jeunesse) a statué que l'obligation de la GRC selon laquelle les prisonnières doivent enlever leur soutien-gorge conformément aux politiques générales constitue une fouille à nuNote de bas de page 61. De plus, en 2013, la Cour provinciale de la Saskatchewan et la Cour supérieure de justice de l'Ontario ont conclu que le fait d'exiger que les détenues enlèvent leur soutien-gorge (même de façon discrète sans exposer leurs seins) constitue une fouille à nu selon la définition de l'arrêt GoldenNote de bas de page 62. D'autres jugements des tribunaux ont également reconnu que cette pratique est envahissante et ne devrait pas être effectuée de façon habituelle sans un examen des circonstancesNote de bas de page 63.

Si un membre a des motifs raisonnables de croire que le soutien-gorge d'une détenue présente un risque pour la sécurité des membres des services de police, de la détenue ou du public, les politiques, les procédures et les exigences au chapitre de l'obtention d'approbations et d'établissement de rapports relatifs aux fouilles à nu devraient s'appliquer. Rien n'indique que le retrait du soutien-gorge est nécessaire dans tous les cas pour assurer la sécurité des membres, de la détenue et d'autres personnes. La nature prescriptive de la politique pourrait entraîner des fouilles inutiles et excessives de femmes, ce qui est contraire aux critères établis dans la common law. Compte tenu des décisions des tribunaux mentionnées précédemment, la Commission croit que le retrait du soutien-gorge d'une prisonnière ou le fait de lui imposer de le faire constitue une fouille à nu, qui exige des motifs raisonnables et prévus dans la politique.

Conclusion no 7 : L'obligation prévue dans la politique de la GRC en Colombie-Britannique d'enlever le soutien-gorge est contraire aux principes de la common law. En l'absence de motifs raisonnables d'effectuer une fouille à nu, le retrait du soutien-gorge d'une prisonnière est déraisonnable.

L'article 5. est le dernier article de la politique divisionnaire. Il précise qu'il incombe au commandant de s'assurer que les membres sont informés du contenu de la politique.

Compte tenu de ce qui précède, la Commission est d'avis que la politique de la GRC en Colombie-Britannique relative aux fouilles d'une personne doit être précisée et devrait être modifiée pour tenir compte de la jurisprudence actuelle.

Recommandation no 6 : Que la GRC en Colombie-Britannique modifie sa politique relative aux fouilles d'une personne (chapitre 21.2. du Manuel des opérations) pour tenir compte de la jurisprudence actuelle.

Formation de la GRC

Programme de formation des cadets

La Commission a examiné tous les modules du Programme de formation des cadets de la GRCNote de bas de page 64 qui portent en particulier sur les fouilles d'une personne, notamment :

  • a) Sciences policières appliquées – Module 6, séance 7 (version 8, 20 septembre 2012);
  • b) Sciences policières appliquées – Module 6, séance 9 (version 8, 19 juin 2014);
  • c) Sciences policières appliquées – Module 6, séance 10 (version 8, 26 février 2014);
  • d) Trousse de bienvenue, annexe 9, Tactiques de défense policières – Types de fouilles, DADAF, méthode « demander, regarder, toucher et serrer », et les 4 C (version 8, 18 janvier 2013);
  • e) Tactiques de défense policières de la GRC, séance 8 – Étapes DADAF : fouille d'un sujet en position debout (version 8, 1er avril 2012);
  • f) Tactiques de défense policières – séance 9.

Les responsables de la Division Dépôt de la GRC ont confirmé que, même si les modules et les séances ci-dessus sont consacrés en particulier aux fouilles d'une personne, on s'attend à ce que les cadets appliquent les connaissances et les habiletés pertinentes dans toutes les activités de formation et dans les scénarios ultérieurs dans le cadre du Programme de formation des cadetsNote de bas de page 65.

Dans les modules Sciences policières appliquées du Programme de formation des cadets, les cadets sont informés, entre autres sujets essentiels, de leur pouvoir de procéder à la fouille d'une personne qui est arrêtée légalement, des droits et libertés garantis par la Charte, de la jurisprudence pertinente, des garanties appropriées à prendre au moment d'effectuer une fouille d'un détenu et de l'escorter vers le détachement ainsi que des types de fouilles d'une personne et des procédures connexesNote de bas de page 66.

Ces modules et séances présentent également des renseignements au sujet de la politique nationale de la GRC concernant la fouille d'une personne, notamment une formation particulière sur la fouille d'une personne du sexe opposé. Les documents de formation précisent ce qui suit : « Un membre ne doit pas fouiller une personne du sexe opposé sauf en cas de danger immédiat, s'il existe des risques de blessures ou que la personne s'échappe. » On enseigne aux cadets que « sauf si une personne du même sexe est disponible dans un délai raisonnable, le membre ayant procédé à l'arrestation effectuera la fouille. Ce qui est considéré comme un délai raisonnable est laissé au jugement du membre qui en décidera, compte tenu de son évaluation des risquesNote de bas de page 67 » [c'est nous qui soulignons].

À cet égard, la Commission a appris que, au cours de la séance, le formateur met l'accent sur la disponibilité d'un membre et le temps, ainsi que sur d'autres facteurs comme la météo, l'environnement et des facteurs situationnels, qui influent tous sur l'évaluation des risques et les processus décisionnels de l'agent au moment de déterminer s'il doit effectuer une fouille corporelle d'un sujet du sexe opposé. La formation offerte a pour but d'aider les cadets à acquérir les habiletés et les compétences nécessaires pour évaluer le risque que comporte une situation donnée et pour prendre des décisions à cet égardNote de bas de page 68.

Dans le cadre des modules Sciences policières appliquées, les cadets participent à des mises en situation où ils escortent des prisonniers vers les blocs cellulaires, fouillent une cellule et le prisonnier et effectuent des tâches administratives obligatoires (p. ex. remplir le Rapport sur le prisonnier). Les cadets abordent aussi les motifs pour lesquels on peut procéder à la fouille et à la saisie d'effets personnels de prisonniers, y compris des articles qui pourraient avoir une signification religieuseNote de bas de page 69.

Dans le cadre de la formation sur les tactiques de défense policières du Programme de formation des cadets, ces derniers apprennent en outre les types de fouilles et suivent une formation approfondie sur la façon d'effectuer la fouille corporelle d'un sujet debout et à plat ventre. On rappelle aux cadets les politiques nationales particulières sur les fouilles d'une personne (notamment les motifs nécessaires pour effectuer une fouille à nu) et les précautions à prendre pour assurer une fouille complète et détaillée d'un sujetNote de bas de page 70.

Au cours de ces séances, les cadets apprennent aussi à effectuer une fouille sur une personne du sexe opposé. À cet égard, on enseigne aux cadets que ce pouvoir prévu par la common law ne distingue pas les sexes et que les membres peuvent effectuer une fouille sur quiconque à la suite d'une arrestation légale. Les cadets sont informés qu'ils doivent demander à un membre de la GRC du même sexe que celui du prisonnier d'effectuer la fouille et que la fouille d'une personne de sexe opposé est autorisée en vertu des politiques, en fonction de l'environnement de risque (c.-à-d. si un risque immédiat de blessure ou d'évasion existe)Note de bas de page 71. On présente également aux cadets une démonstration de diverses techniques utilisées lorsqu'un membre de la GRC, quel que soit son sexe, effectue la fouille d'une femme (c.-à-d. que, plutôt que d'inspecter la région de la poitrine ou des seins au moyen d'une main à plat, on enseigne aux membres d'inspecter la région de la poitrine ou des seins avec le bord de la main et de s'assurer que, dans la mesure du possible, la paume n'est pas orientée vers les seins). Les cadets doivent par la suite mettre en pratique les techniques et les processus d'arrestation et de fouille au moyen d'une simulationNote de bas de page 72.

Les cadets apprennent aussi qu'une fouille à nu peut être effectuée seulement « lorsqu'il y a des motifs raisonnables de croire que le suspect dissimule des éléments de preuve relatifs à un crime ou des articles qui peuvent lui servir à s'évader ou à causer la mort ou des blessuresNote de bas de page 73 ». On informe les cadets qu'une fouille à nu doit être effectuée par un membre du même sexe et que les conditions suivantes doivent également être respectées avant ou pendant une fouille à nu :

  • être autorisée par un superviseur s'il y en a un de disponible;
  • être effectuée rapidement et, dans la mesure du possible, de façon que le détenu n'est complètement dévêtu à aucun moment;
  • être effectuée d'une manière non abusive;
  • ne pas être effectuée par plus de membres qu'il n'en faut pour assurer la sécurité des membres ou du détenu.

Selon une analyse des documents de cours, la formation sur la fouille d'une personne est conforme aux lois ainsi qu'aux politiques et aux procédures nationales. De plus, la formation touchant en particulier les fouilles corporelles est exhaustive et détaillée. Les cadets reçoivent une formation et des démonstrations détaillées, et ils ont aussi le temps de mettre en pratique les habiletés et les compétences nécessaires. Les activités de formation comprennent une combinaison adéquate de documents de référence, d'exposés, d'exercices pratiques (y compris des mises en situation et des scénarios) et d'instructions sur vidéo, et permettent d'acquérir les connaissances requises sur les politiques pertinentes, la jurisprudence et l'article 8 de la Charte de façon à présenter aux cadets les fondements nécessaires afin d'effectuer des fouilles conformes aux lois.
La formation relative aux fouilles à nu est offerte d'un point de vue théorique seulement. Les cadets apprennent en théorie et au moyen de devoirs écrits les politiques et les procédures s'appliquant aux fouilles à nu, mais n'effectuent pas en pratique de fouilles à nu.

À cet égard, la Division Dépôt informe la Commission que le Programme de formation des cadets est conçu pour offrir une formation élémentaire. On a donc mis l'accent sur les fouilles corporelles puisque les cadets devront effectuer ce type de fouille peu après leur affectation sur le terrain et de façon régulière au fil de leur carrière. Les fouilles à nu ne sont pas une procédure policière habituelle et sont effectuées rarement. Dans le cadre des scénarios présentés au cours du Programme de formation des cadets, on ne présente pas de situations où l'on procède à une fouille à nu ni l'exigence de déterminer s'il existe des motifs raisonnables d'effectuer une fouille à nuNote de bas de page 74.

En outre, interrogés au sujet de la définition de fouille à (corps) nu dans le Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC et quant à savoir si le fait de demander à une personne d'enlever ses vêtements et de ne garder que ses sous-vêtements constitue une fouille à nu, des responsables de la Division Dépôt ont répondu que, à leur avis, c'était le cas. Cela dit, des responsables de la Division Dépôt ont aussi informé la Commission que la question de la nudité partielle n'est pas abordée dans la formation offerte aux cadets. Selon l'examen de la Commission, il semble que les ambiguïtés et les faiblesses cernées des politiques entraînent des lacunes sur le plan de la formation qui doivent être comblées. La Commission croit que le Programme de formation des cadets devrait comprendre une orientation précise offerte aux cadets sur la distinction à faire entre une fouille corporelle et une fouille à nu, sur le pouvoir prévu par la loi d'effectuer ces fouilles et sur l'établissement de motifs raisonnables pour effectuer une telle fouille. La formation devrait aussi offrir aux cadets des occasions d'exercer leur jugement au moment de déterminer s'il faut effectuer une fouille à nu.

Conclusion no 8 : En limitant la formation sur les fouilles à nu à l'examen des politiques, des procédures et des lois pertinentes et à des devoirs par écrit, le Programme de formation des cadets de la GRC n'offre pas une formation adéquate aux cadets sur ce qui constitue une fouille à nu.

Recommandation no 7 : Que la GRC améliore sa formation élémentaire à la Division Dépôt pour s'assurer que les cadets connaissent les obligations prévues par la loi ainsi que les politiques et procédures pertinentes pour tous les types de fouilles d'une personne.

Formation offerte par la Division « E » (Colombie-Britannique) de la GRC – Programme de formation pratique et Centre de formation de la région du Pacifique

Dans le cadre du Programme de formation pratique, le personnel de supervision offre une formation en cours d'emploi élémentaire. En plus de l'expérience acquise au moyen d'activités opérationnelles directes, les nouveaux membres doivent aussi effectuer des devoirs et se soumettre à des évaluations. Pour la GRC en Colombie-Britannique, cela comprend un module conçu spécialement pour permettre aux nouveaux membres de connaître les politiques nationales et divisionnaires ainsi que celles du détachement. Le module prévoit un examen des lois et des politiques de la GRC en matière de perquisition et de saisieNote de bas de page 75.

Outre la formation reçue dans le cadre du Programme de formation pratique, les membres ne reçoivent aucune formation particulière ou spécialisée sur les fouilles d'une personne de façon obligatoire ou continue. On a cependant informé la Commission que tous les membres réguliers de la GRC doivent renouveler leur accréditation obligatoire de maintien des compétences opérationnelles tous les trois ans au Centre de formation de la région du PacifiqueNote de bas de page 76. Selon les renseignements fournis par le Centre de formation de la région du Pacifique, ce processus de renouvellement de l'accréditation comprend un cours composé de mises en situation. Bien que les fouilles d'une personne ne fassent pas partie des éléments obligatoires du cours composé de mises en situation, les communications des membres avec le répartiteur sont surveillées afin que l'on puisse déterminer si les membres demandent la présence d'un membre du même sexe pour effectuer une fouille corporelle dans leur mise en situation, le cas échéantNote de bas de page 77.

Des responsables du Centre de formation de la région du Pacifique ont informé la Commission que, même si le processus de renouvellement de l'accréditation du maintien des compétences opérationnelles ne porte pas en particulier sur les fouilles d'une personne, si, au cours de ce processus de renouvellement, un membre veut obtenir des précisions ou pose une question, les formateurs utilisent les documents de formation relatifs aux tactiques de défense policières de la Division Dépôt pour orienter la réponse aux questionsNote de bas de page 78. Des responsables du Centre de formation ont également signalé que, en plus du renouvellement obligatoire de l'accréditation du maintien des compétences opérationnelles, les membres peuvent, à la demande d'un membre ou du détachement, suivre une formation d'appoint sur la façon d'effectuer une fouille d'une personne au détachement avec l'aide d'un instructeur en sécurité publique et policière en fonction des besoins et des habiletés des membres et de la disponibilité d'un instructeur localNote de bas de page 79

La Commission constate que la GRC en Colombie-Britannique ne dispose pas d'une formation pratique spécialisée, obligatoire ou continue sur les fouilles d'une personne. Lorsqu'une formation est offerte, à la demande d'un membre ou du détachement, elle serait fondée sur les politiques nationales de la GRC, la formation de la Division Dépôt et la jurisprudence pertinente, et conforme à celles-ci.

Même s'il ne serait pas pratique ou raisonnable de s'attendre à ce que des membres effectuent de réelles fouilles à nu sur des personnes à des fins de formation, la GRC devrait déterminer s'il faut élaborer une formation pratique particulière sur ce qui constitue une fouille à nu, le moment où il est indiqué de procéder à une telle fouille et la façon d'effectuer une fouille à nu dans le cadre du Programme de formation des cadets ou d'une formation ultérieure à l'échelon de la division. Le fait de restreindre la formation sur la fouille à nu à l'apprentissage en cours d'emploi expose la GRC à un degré plus élevé de risque et d'erreur. Cela a clairement été mis en évidence au cours de l'examen de la Commission alors que de nombreux membres ne savaient pas avec certitude si une fouille à nu entraînait le retrait des vêtements d'une personne à l'exception des sous-vêtements. Cela pourrait constituer un risque encore plus grand pour ce qui est des membres mutés dans des emplacements éloignés, qui doivent faire face à la nécessité ou à l'exigence d'effectuer une fouille à nu sans les avantages d'avoir suivi une formation officielle ou d'avoir acquis une expérience pratique ou sans pouvoir consulter des membres du personnel plus expérimentés pour qu'ils puissent leur offrir une orientation.

Par surcroît, même si les examens corporels sont susceptibles d'être effectués en de rares occasions, les membres devraient connaître les motifs exigés pour effectuer un tel examen, ainsi que la façon de s'assurer que l'examen est effectué de façon adéquate et en conformité avec les lois. Les membres devraient connaître les exigences au chapitre des approbations et des rapports.

Conclusion no 9 : Le fait qu'un membre ou que le détachement doive demander la tenue d'une formation pratique continue sur les fouilles corporelles ou toute autre formation sur les fouilles à nu à l'échelle de la division, plutôt que de rendre obligatoire une telle formation, ne permet pas de s'assurer que les membres ont une expérience et des connaissances adéquates dans ces domaines.

Recommandation no 8 : Que la GRC améliore la formation sur les fouilles d'une personne pour s'assurer que les membres des divisions connaissent les exigences prévues par la loi ainsi que les politiques et procédures pertinentes en matière de fouille corporelle, de fouille à nu et d'examen corporel, et qu'une telle formation fasse également partie du processus de renouvellement de l'accréditation du maintien des compétences opérationnelles.

Responsabilisation, conformité et transparence

La Commission voulait d'abord effectuer un examen des dossiers afin de vérifier dans quelle mesure les membres se conformaient aux politiques et aux procédures de la GRC relativement à la fouille d'une personne. Comme il a été mentionné précédemment, la Commission a appris que le système actuel de gestion des dossiers de la GRC en Colombie-Britannique (environnement de gestion des dossiers de police de la Colombie-Britannique, appelé aussi PRIME-BC) ne permet pas de déterminer la fréquence ou le type de fouilles effectuées, les approbations demandées, les résultats des fouilles ou si une fouille a été effectuée par un membre du sexe opposé, ni d'en rendre compte d'une autre manière.

De façon constante, les entrevues auprès des membres du district du Nord de la Colombie-Britannique ont révélé que les fouilles à nu se produisent rarement et qu'elles ne sont jamais effectuées par des membres du sexe opposé. Cependant, l'absence d'un système de suivi approprié fait en sorte que la GRC ne peut pas pleinement rendre compte des mesures prises par ses membres à ce chapitre et que la Commission ne peut pas vérifier les affirmations de la GRC à ce sujet. De plus, le manque d'une distinction claire dans la politique de la GRC entre la fouille corporelle et la fouille à nu, comme il a été précisé précédemment, pourrait signifier que des fouilles à nu sont désignées de façon erronée comme des fouilles corporelles et qu'elles ne sont pas consignées de façon appropriée. Bien que les membres doivent consigner ces renseignements dans leurs notes, l'absence de dossiers officiels ou de moyens appropriés d'assurer un suivi des fouilles à nu et de leurs résultats a grandement limité la capacité de la Commission d'évaluer dans quelle mesure les membres respectent les politiques et procédures ou de déterminer si un problème systémique pouvait exister.

Les détachements de la GRC en Colombie-Britannique doivent mener des examens de l'assurance de la qualité au sein des services et peuvent faire l'objet d'examens par la direction, ce qui comprend un examen des pratiques en matière de perquisition et de saisie. Ces examens visent à déterminer si la documentation appropriée a été établie, si la perquisition et la saisie d'articles étaient conformes aux exigences prévues par les lois et aux directives, et si la perquisition et la saisie d'articles avaient été jugées raisonnables dans le cadre de ces pouvoirs. Ces examens sont aussi conçus pour déterminer si les perquisitions et les saisies ont été effectuées seulement lorsqu'elles étaient clairement autorisées par les lois ou avec consentement expliciteNote de bas de page 80. Au cours d'un tel examen, on analyse un échantillon de dossiers afin d'évaluer si les politiques et procédures en matière de perquisition et de saisie ont été suivies dans la pratique. Le fait que ces examens comprennent la perquisition et la saisie donne à penser que la GRC considère qu'il s'agit d'un domaine comportant un risque élevé qui doit faire l'objet d'un examen régulier. Cependant, les examens portent principalement sur la perquisition et la saisie d'articles, plutôt que sur les fouilles d'une personne. De plus, en ce qui a trait aux fouilles à nu, même si le guide sur les perquisitions et les saisies renvoie aux exigences précisées au chapitre 21.2. du Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC (en particulier en ce qui concerne les articles 2.4. et 2.5., de même que l'article 5.1., au sujet des obligations des membres en matière de rapports), on ne sait pas comment il est possible d'extraire un échantillon de dossiers touchant les fouilles à nu puisque ces renseignements ne sont saisis que dans les notes des membres et ne peuvent pas faire normalement l'objet d'un suivi au moyen des systèmes de dossiers actuels.

Dans ce contexte, la Commission a obtenu les rapports des examens de la direction menés par la GRC en Colombie-Britannique pour les détachements du district du Nord entre 2008 et 2012. Dans les 20 rapports d'examen de la direction analysés, 4 d'entre eux comportaient des articles relatifs à la fouille d'une personne. De ces quatre rapports, un rapport révélait que la plupart des membres d'un détachement ne possédaient pas les connaissances appropriées pour étayer des motifs de fouilles sans mandat. Selon ce rapport, même si aucune fouille à nu n'avait été relevée lors de l'examen des dossiers, on a appris par la suite, dans le cadre d'entrevues avec des membres des détachements, que toutes les personnes arrêtées pour des saisies de drogues avaient fait l'objet d'une fouille à nu. À cet égard, l'examen a révélé que les membres ne consignaient pas adéquatement les événements ou les situations qui se produisaient au cours de leur enquête. Les auteurs de l'examen ont recommandé que le chef de service s'assure que tous les membres reçoivent une formation appropriée sur les pouvoirs prévus par les lois et sur les exigences des politiques concernant les fouilles sans mandat et les fouilles à nu, et sur la nécessité de consigner et de justifier adéquatement les mesures prises par les membres dans ces situations. Selon deux rapports, les membres ne consignaient pas toujours clairement ou de façon uniforme le fait qu'une fouille accessoire à une arrestation avait été effectuéeNote de bas de page 81.

Dans l'arrêt Golden, la Cour suprême du Canada a souligné l'importance pour les services de police de consigner adéquatement les motifs pour lesquels une fouille à nu a été effectuée, ainsi que la façon dont elle a été effectuée. Dans l'arrêt R c Muller, la Cour supérieure de justice de l'Ontario a déclaré ce qui suit :

[TRADUCTION]

Il doit y avoir une façon dont les autorités peuvent être responsables et être tenues responsables de tels processus. Le fait de ne pas consigner ces événements entraîne un certain nombre de problèmes. Il est impossible d'évaluer à quelle fréquence ces fouilles sont effectuées et la proportion des fouilles qui ne permettent pas de trouver d'élément de preuve. La capacité d'examiner et de réviser les pratiques est limitée. Les faits probants importants permettant de révéler des problèmes systémiques sont en effet éliminés. Aucun dossier n'est conservé à d'autres fins, par exemple une plainte déposée contre des services de police ou une poursuite civile. Des personnes comme l'accusé en l'espèce pourraient se voir privées d'éléments de preuve pertinents pour faire valoir leurs droits constitutionnels. De façon plus générale, l'absence de dossiers pourrait transmettre le message implicite ou subtil que les services de police participant à ces fouilles jouissent d'une impunité, étant donné que, s'il n'y a aucun dossier, il n'y aura aucun examen. Il s'agit d'une perspective dangereuse, que la Charte ne peut encourager. Aucun pouvoir étatique ne devrait être laissé sans contrôle, en particulier ceux permettant la fouille envahissante d'une personneNote de bas de page 82.

Même si le cas ci-dessus concernait en particulier les notes (ou plus précisément l'absence de notes) et que les lignes directrices touchant la tenue d'un « procès-verbal » établies dans l'arrêt Golden ne sont pas prévues dans la loi, il semble néanmoins raisonnable de s'attendre à ce que les services de police conservent un dossier officiel des mesures prises et de la conduite adoptée par ses agents au moment de soumettre une personne à une fouille à nu sans mandat.

Au Royaume-Uni, les codes de pratique de la Police and Criminal Evidence Act 1984 établissent un cadre régissant les pouvoirs des services de police et les précautions à prendre au chapitre des principales activités des services policiers (c.-à-d. en particulier en ce qui concerne l'arrestation et la fouille, l'arrestation, la détention, l'enquête, l'identification et l'interrogation des détenus). Dans ce domaine, le Code C de la Police and Criminal Evidence Act prévoit des lignes directrices claires et précises en ce qui concerne la détention, le traitement et l'interrogation de personnes par les agents de police. L'annexe A de ce code précise les exigences particulières touchant les situations où une fouille à nu devrait être effectuée et la façon dont elle devrait l'être, notamment l'exigence que certains renseignements soient consignés dans le dossier de garde, à savoir la justification, le nom des personnes présentes au moment de la fouille et les résultats de celle-ciNote de bas de page 83.

L'exigence particulière de consigner les détails de la fouille dans le dossier de garde est un élément primordial de ces lignes directrices, qui non seulement permet d'accroître la responsabilisation et la transparence des services de police, mais veille aussi à ce que la conformité avec les politiques et les processus puisse être mesurée.

De plus, bien que le suivi des fouilles d'une personne puisse ne pas constituer une pratique normalisée dans tous les services de police, cela n'est pas sans précédent au Canada. La Commission des services policiers de Toronto exige du chef de police qu'il fasse rapport annuellement à la Commission sur le nombre (la fréquence) de fouilles à nu, sur les motifs justifiant ces fouilles et sur les résultats des fouilles à nu et des examens corporels (examens des cavités/orifices corporels)Note de bas de page 84. Ces renseignements sont publiés sur le site Web de la Commission des services policiers de Toronto. En 2013, le Service de police de Toronto a signalé avoir effectué 20 152 fouilles à nu, ce qui représente 34 % des arrestations effectuées. Le rapport précise de plus que les agents de police ont découvert des éléments de preuve, par exemple des drogues, dans seulement un peu plus de 1 % des fouillesNote de bas de page 85.

D'autres services de police canadiens recueillent aussi des données et des statistiques sur la fréquence, les détails et les résultats de fouilles à nu. La Commission a communiqué avec 35 services de police canadiens pour enquêter sur les politiques et les processus de fouille d'une personne. Parmi les 18 services qui ont donné suite à la demande de la Commission, 4 services ont déclaré avoir recueilli des données et produit des statistiques sur les fouilles à nu (cela comprend des renseignements comme la fréquence des fouilles à nu, l'âge, le sexe et l'ethnie de la personne, ainsi que les résultats de la fouille)Note de bas de page 86.

La Commission a aussi obtenu des documents sur les politiques et les procédures relatives aux fouilles d'un service de police municipal en Colombie-Britannique. Ces documents prévoient entre autres des orientations et des procédures très précises sur les situations permettant d'effectuer une fouille à nu, et la façon de procéder, et sur l'obtention des autorisations nécessaires, ainsi que des instructions détaillées sur les renseignements qui doivent être consignés et le support physique où ces renseignements doivent être saisis. Ce service de police exige aussi de ses agents qu'ils consignent des renseignements obligatoires dans un document uniformisé particulier sur les fouilles à nu et dans un rapport d'arrestation, qui sont en fait deux formulaires électroniques que l'on retrouve dans le système PRIME-BC. Ce système de gestion des dossiers est aussi utilisé par la GRC en Colombie-Britannique, comme il a été mentionné précédemment.

Les politiques divisionnaires sur les fouilles d'une personne de la GRC en Saskatchewan établissent des procédures qui doivent être suivies en cas de fouille à nu, notamment l'exigence de consigner ce qui suit dans un dossier des opérations :

  1. Date, endroit et heure de l'arrestation.
  2. Nom et sexe du détenu.
  3. Pouvoir d'arrestation.
  4. Endroit et heure de la fouille à nu.
  5. Nom des agents de police qui ont effectué la fouille et nom des autres agents présents au moment de l'arrestation jusqu'à la fouille.
  6. Motifs raisonnables d'effectuer une fouille à nu. Faits vous ayant permis de tirer la conclusion selon laquelle il y avait une préoccupation concernant :
    1. la sécurité d'un agent, du détenu et d'autres personnes;
    2. l'objectif de découvrir des éléments de preuve liés au motif d'arrestation afin de les préserver et de prévenir leur destruction.
  7. Avis et consentement du superviseur. Dans des situations urgentes, cela pourrait ne pas être possible et, le cas échéant, cela devrait être noté.
  8. Offre au détenu la possibilité de produire les objets recherchés.
  9. A-t-on envisagé d'obtenir les conseils ou l'aide d'un agent des services de santé qualifié et, le cas échéant, ont-ils été consignés dans un dossier des opérations?
  10. Processus de la fouille à nu : la façon dont elle a été effectuée sur les lieux dans les circonstances urgentes. Préciser les mesures prises afin de permettre à la fouille d'être effectuée dans la mesure du possible et selon les circonstances données, d'une façon digne et loin des yeux du public.
  11. Façon dont la fouille à nu a été effectuée au détachement; indiquer l'endroit et les circonstances afin d'établir que la fouille a été effectuée de façon digne et privée.
  12. La fouille a-t-elle été effectuée par une personne du même sexe que celui du détenuNote de bas de page 87?

La Commission estime que les processus de fouilles à nu de la GRC en Saskatchewan permettent d'établir une norme rigoureuse conforme à celle d'autres corps policiers canadiens et que cette norme pourrait servir de modèle à la GRC en Colombie-Britannique. Cela dit, même si les processus obligent les membres à consigner dans un dossier des opérations les détails de la fouille et la façon dont celle-ci a été effectuée, la GRC en Saskatchewan ne dispose pas actuellement des moyens de recueillir des données ou d'extraire des statistiques sur les fouilles à nu.

En plus d'établir une responsabilisation quant à l'utilisation d'une procédure très envahissante, la consignation et la production systématiques de rapports sur les fouilles à nu accroissent la transparence et contribuent ainsi à la confiance du public à l'égard des services de police.

Conclusion no 10 : Au chapitre de la responsabilisation, la Commission constate que les pratiques et les politiques relatives aux fouilles d'une personne de la Division « E » (Colombie-Britannique) et de la Direction générale de la GRC ne sont pas adéquates.

Recommandation no 9 : Que la GRC modifie les politiques relatives aux fouilles d'une personne (Manuel des opérations) de la Direction générale et de la Division « E » (Colombie-Britannique) pour accroître la transparence et la responsabilisation en veillant à ce que les politiques comprennent une manière appropriée de documenter et d'évaluer la conformité, ainsi que d'en assurer le suivi, de façon à contribuer à la tenue d'un examen indépendant.

Femmes et adolescents

La Commission a examiné les politiques et la formation de la GRC sur la fouille d'une personne en ce qui concerne leur application particulière à l'égard des femmes et des adolescents, ainsi que les répercussions sur les interactions des membres des services de police avec ceux-ci. Selon la recommandation de l'organisme Human Rights Watch, la GRC doit « [é]liminer les fouilles et le contrôle des femmes et des jeunes filles pratiqués par des policiers masculins sauf circonstances extraordinaires, et exiger que ce type de fouilles soit documenté et examiné par les superviseurs et les commandants », et interdire les fouilles à nu effectuées par des membres de sexe opposé quelles que soient les circonstancesNote de bas de page 88.

Comme cela a été indiqué précédemment, les fouilles corporelles sont une pratique policière relativement courante et sont effectuées pour assurer la sécurité des membres de la GRC, du détenu et du public, pour éviter la destruction d'éléments de preuve ou pour trouver des éléments de preuve liés à l'infraction pour laquelle l'arrestation a été effectuéeNote de bas de page 89. C'est pourquoi les tribunaux ont distingué clairement « fouille corporelle » de « fouille à nu ».

La Commission a constaté que les définitions des termes « fouille corporelle » et « fouille à nu » de la GRC sont imprécises et incohérentes par rapport à celles de la Cour suprême en ce qui a trait aux fouilles effectuées par un membre de sexe opposé. La politique nationale de la GRC souligne que les membres ne devraient pas effectuer une fouille corporelle d'une personne de sexe opposé à moins qu'il n'existe un risque immédiat de blessure ou d'évasion. Les documents de formation précisent de plus ce qui suit : « Sauf si une personne du même sexe est disponible dans un délai raisonnable, le membre ayant procédé à l'arrestation effectuera la fouille. Ce qui est considéré comme un délai raisonnable est laissé au jugement du membre qui en décidera, compte tenu de son évaluation des risquesNote de bas de page 90. » La Commission est convaincue que l'approche de la GRC en ce qui concerne les fouilles corporelles d'une personne de sexe opposé respecte la common law.

Dans l'arrêt Golden, la Cour suprême a adopté les lignes directrices au chapitre de la fouille à nu qui figurent à l'annexe A du Code C de la Police and Criminal Evidence Act 1984 (Royaume-Uni), chapitre 60, lesquelles précisent les exigences particulières touchant les situations où une fouille à nu devrait être effectuée et la façon dont elle devrait l'être, notamment l'exigence de s'assurer que la fouille à nu est effectuée par une personne de même sexe. Cependant, la Cour suprême ne s'est pas penchée sur cette exigence d'effectuer une fouille à nu par une personne du même sexe; la jurisprudence est limitée à ce chapitre. Dans presque tous les cas signalés de fouilles à nu, celles-ci ont été effectuées par une personne de même sexe.

Cependant, dans Weatherall c Canada (Procureur général), la Cour fédérale a conclu que l'observation d'une fouille à nu par une personne de sexe opposé peut être justifiée dans une situation urgenteNote de bas de page 91. De plus, dans R c Mattis, la Cour de justice de l'Ontario (Division provinciale) a laissé place à la possibilité qu'une fouille à nu effectuée par une personne de sexe opposé pouvait être acceptable dans certaines circonstancesNote de bas de page 92.

Dans la partie de l'enquête de la Commission portant sur les politiques et les procédures relatives aux fouilles d'une personne, 12 services de police ont affirmé que les fouilles à nu de personnes de sexe opposé ne sont pas autorisées, tandis que 5 services de police ont déclaré permettre les fouilles à nu de personnes de sexe opposé dans des circonstances urgentes uniquementNote de bas de page 93.

Il pourrait être raisonnable de faire une exception à l'obligation d'effectuer une fouille à nu d'une personne de même sexe dans des situations urgentes et instables auxquelles font parfois face les services de police. Cela dit, il faut établir des définitions adéquates, ainsi que des mécanismes d'approbation et de reddition de comptes, afin de surveiller et d'évaluer la conformité avec les politiques et les procédures.

Si l'arrêt Golden ne distingue pas un adulte d'un adolescent, la Déclaration de principes à l'article 3 de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents LC 2002, chapitre 1 présente le fondement de cette différence de traitement. De plus, le paragraphe 26(1) de cette Loi prévoit que les services de police donnent un avis au père ou à la mère dans les meilleurs délais lorsqu'un adolescent est arrêté et détenu; le paragraphe 26(2) prévoit qu'un avis est donné au père ou à la mère lorsqu'un adolescent s'est vu remettre une sommation ou une citation à comparaître, et le paragraphe 146(2) prévoit que les services de police doivent informer l'adolescent de, entre autres, son droit de consulter son père ou sa mère avant de faire une déclaration. Outre l'obligation d'ordre général d'informer le père ou la mère lorsqu'un adolescent est arrêté, la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents ne prévoit aucune obligation explicite d'informer le père ou la mère avant d'effectuer une fouille à nu. Cependant, l'exigence explicite de la Loi d'informer un parent dans les meilleurs délais lorsqu'un adolescent est arrêté et détenu pourrait être élargie de façon raisonnable à l'attente qu'un parent soit informé de l'intention des services de police d'effectuer une fouille à nu de l'adolescent puisque celle-ci se produirait après une arrestation légale.

À ce chapitre, l'annexe A de la version modifiée du Code C de la Police and Criminal Evidence Act 1984 du Royaume-Uni précise, en date du 10 juillet 2012, des exigences particulières encadrant le moment et la façon dont une fouille à nu devrait être effectuée, notamment :

[TRADUCTION]

c) sauf en cas d'urgence, quand il y a un risque de blessure grave pour le détenu ou d'autres personnes, et lorsqu'une fouille à nu comprend l'exposition de parties intimes, il doit y avoir au moins deux personnes présentes en plus du détenu, et si la fouille est effectuée sur un adolescent, une personne atteinte de troubles mentaux ou une personne vulnérable sur le plan mental, l'une des personnes présentes doit être un adulte idoine. Sauf dans les situations urgentes précitées, la fouille d'un adolescent peut être effectuée en l'absence d'un adulte idoine seulement si l'adolescent affirme en présence de l'adulte idoine qu'il ne souhaite pas sa présence au cours de la fouille et que l'adulte en question en convient. La décision de l'adolescent doit être consignée et signée par l'adulte idoine. La présence de plus de deux personnes, hormis celle de l'adulte idoine, devrait être autorisée seulement dans les situations les plus exceptionnellesNote de bas de page 94.

La portion de l'enquête de la Commission effectuée auprès de services de police au sujet des politiques et des procédures relatives à la fouille d'une personne a révélé que, parmi les répondants, tous les services de police, à l'exception d'un seul, permettent les fouilles à nu sans mandat d'adolescents dans la mesure où la fouille est légale. De plus, trois services de police ont précisé que leurs politiques ou procédures en matière de fouille mentionnaient explicitement les fouilles à nu d'adolescents, dont deux services de police qui ont précisé que le ou les parents d'un adolescent devraient être présents au cours de la fouille. Selon les politiques d'un service de police, l'agent de police doit expliquer le motif de la fouille et la façon dont celle-ci sera effectuée de façon claire à l'adolescent, et le parent devrait être présent au moment où les explications sont données et où la fouille est effectuéeNote de bas de page 95.

Compte tenu de ce qui précède, même si les lois canadiennes n'ont prévu aucune limite ou restriction particulière en ce qui concerne les fouilles à nu d'adolescents, la Commission estime que tout devrait être mis en œuvre pour faire en sorte que les politiques assurent un traitement des adolescents conforme à la Déclaration de principes établie dans la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents. À cet égard, la GRC devrait évaluer ses politiques et procédures pour s'assurer qu'elles comportent des dispositions adéquates sur la fouille et en particulier sur la fouille à nu d'adolescents, notamment s'il faut qu'un parent, un tuteur ou un adulte responsable soit avisé avant qu'une fouille à nu soit effectuée ou soit présent au moment de celle-ci, et pour s'assurer que des mesures supplémentaires sont prises à l'égard des adolescents afin de veiller à ce qu'ils comprennent pleinement le motif de la fouille, la façon dont elle sera effectuée, ainsi que leurs droits.

Conclusion no 11 : La politique de la GRC relative à la fouille d'une personne ne prévoit aucune mesure particulière pour protéger les droits des adolescents selon l'esprit de la Déclaration de principes à l'article 3 de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents et les pratiques policières d'autres administrations.

Recommandation no 10 : Que la GRC modifie sa politique nationale sur les fouilles d'une personne pour qu'elle comprenne une orientation et des directives particulières en ce qui concerne la fouille à nu d'adolescents.

Conclusion

En menant la présente enquête, la Commission a entrepris de déterminer si les politiques, les procédures et la formation de la GRC au chapitre de la fouille d'une personne respectent les normes établies dans la jurisprudence actuelle, et de formuler des conclusions et des recommandations qui permettraient de donner suite aux préoccupations soulevées au sujet des pratiques de la GRC en matière de fouille d'une personne soulevées par des organisations de défense des droits de la personne et des libertés civiles.

La Commission a constaté que la politique nationale et la politique divisionnaire de la GRC en Colombie-Britannique sur les fouilles d'une personne sont inadéquates. Pour remédier à la situation, la Commission recommande que la politique nationale de la Direction générale et la politique divisionnaire de la Colombie-Britannique soient modifiées pour que l'on puisse s'assurer que les pouvoirs et les obligations sont clairement énoncés, que les termes clés sont clairement définis et que les exigences en matière d'approbation et de production de rapports (y compris les motifs de la fouille et la façon dont celle-ci est effectuée) ainsi que toutes limitations ou restrictions soient clairement établies.

La consignation adéquate et officielle des motifs de la tenue de fouilles, et la manière dont elles ont été effectuées, en particulier les fouilles à nu, permettent de s'assurer que la conformité avec les politiques et les processus peut faire l'objet d'un suivi et être évaluée à l'interne et par un organisme indépendant comme la Commission. L'absence d'obligations en matière de présentation de rapports et de mécanismes de suivi appropriés porte atteinte à la responsabilisation et soulève des préoccupations selon lesquelles des problèmes systémiques pourraient passer inaperçus.

La Commission constate que la formation de la GRC respecte les lois et la jurisprudence pertinente et est conforme aux politiques et aux procédures nationales. Au chapitre de la formation, la Commission a constaté que ni le Programme de formation des cadets ni la formation offerte par la Division ne fournissent une formation pratique adéquate sur la façon d'effectuer une fouille à nu ou la façon d'évaluer et d'établir s'il existe des motifs raisonnables et probables d'effectuer une fouille à nu. Le fait de restreindre la formation sur la fouille à nu à l'apprentissage en cours d'emploi pourrait exposer la GRC à un grand risque d'erreur. Cela pourrait être particulièrement vrai pour les membres en région éloignée, qui doivent effectuer des fouilles à nu sans avoir obtenu une formation officielle ni avoir acquis une expérience pratique ou sans pouvoir compter sur les conseils de membres du personnel plus expérimentés. La GRC devrait évaluer la possibilité d'inclure une formation pratique particulière sur les fouilles à nu dans le Programme de formation des cadets ou d'offrir une telle formation à l'échelle des divisions.

Maintien de l'ordre concernant des personnes en état d'ébriété dans un lieu public

Contexte

Pour évaluer le maintien de l'ordre concernant des personnes en état d'ébriété dans un lieu public qu'assure la GRC dans le district du Nord de la Colombie-Britannique, la Commission devait d'abord établir le cadre juridique en fonction duquel les agents de police de la province traitent les personnes en état d'ébriété dans un lieu public.

Au Canada, le pouvoir de la police d'arrêter et d'incarcérer des personnes en état d'ébriété dans un lieu public émane principalement de l'article 175 du Code criminel du Canada (troubler la paix) et des lois provinciales pertinentes.

En vertu du paragraphe 175(1) du Code criminel,les agents de police ont le pouvoir d'arrêter une personne troublant la paix dans un endroit public ou près d'un tel endroit « en étant ivre ». Ce paragraphe du Code criminel permet aussi aux agents de police d'arrêter, dans un endroit public ou près d'un tel endroit, une personne faisant du tapage d'autres manières, comme en se battant, en criant, en employant un langage insultant ou obscène ou en s'adonnant à d'autres types de perturbationsNote de bas de page 96.

En Colombie-Britannique, les dispositions législatives ayant trait au maintien de l'ordre concernant des personnes en état d'ébriété dans un lieu public se trouvent dans la Liquor Control and Licensing Act et la Offence Act. Selon l'article 41 de la Liquor Control and Licensing Act de la Colombie-Britannique, il est interdit d'être en état d'ébriété dans un lieu public, et les agents de police ont le pouvoir d'arrêter, sans mandat, une personne trouvée en état d'ébriété dans un endroit publicNote de bas de page 97. Conformément à l'article 41 de la Liquor Control and Licensing Act, l'agent procédant à l'arrestation peut décider d'infliger une contravention ou de délivrer une citation à comparaîtreNote de bas de page 98.

En vertu de l'article 91 de la Offence Act de la Colombie-Britannique, un agent de la paix peut appréhender une personne en état d'ébriété qui se trouve dans un endroit auquel le public a accès. La Offence Act précise que l'agent de la paix doit remettre en liberté la personne incarcérée :

[TRADUCTION]

  • a) dès qu'elle aura suffisamment retrouvé la capacité de s'en aller sans s'exposer à un danger quelconque et sans créer, pour les autres, de danger ou de gêne;
  • b) dans la mesure où elle peut être remise à la garde d'un adulte qui en a fait la demande et qui semble capable de s'occuper de la personne en causeNote de bas de page 99.

La principale distinction entre l'article 41 de la Liquor Control and Licensing Act de la Colombie-Britannique et l'article 91 de la Offence Act réside dans le fait que la Liquor Control and Licensing Act interdit, à la différence de la Offence Act, à une personne d'être en état d'ébriété dans un endroit public. Une personne ne peut donc être accusée selon la Offence Act. De plus, la Liquor Control and Licensing Act s'appuie sur les conditions de remise en liberté précisées dans le Code criminelNote de bas de page 100; pour sa part, la Offence Act prévoit les conditions selon lesquelles une personne en état d'ébriété doit être mise en liberté à la suite de son appréhension par la police.

Toutefois, l'article 91 de la Offence Act s'applique seulement [TRADUCTION] « aux parties du territoire de la Colombie-Britannique et aux catégories de personnes que le lieutenant-gouverneur en conseil désigneNote de bas de page 101 ». La Commission n'a pu confirmer si les dispositions relatives aux endroits et aux catégories de personnes visées par la Loi sont toujours en vigueur et n'a recueilli aucun élément probant montrant que les dispositions de l'article 91 sont toujours en application.

Étant donné que les arrestations effectuées en vertu de l'article 175 du Code criminel et du paragraphe 41(2) de la Liquor Control and Licensing Act de la Colombie-Britannique sont des arrestations sans mandat, les articles 495 et 497 du Code criminel s'appliquent également. L'article 495 du Code criminel précise qu'un agent de la paix peut arrêter sans mandat une personne qu'il trouve en train de commettre une infraction criminelle s'il a des motifs raisonnables de croire qu'il est nécessaire, dans l'intérêt public, d'identifier la personne, de recueillir ou conserver une preuve de l'infraction ou une preuve y relative, ou d'empêcher que l'infraction se poursuive ou se répète, ou qu'une autre infraction soit commiseNote de bas de page 102. Le paragraphe 497(1.1) du Code criminel précise des motifs semblables qui pourraient justifier qu'une personne soit détenue sous garde. Les paragraphes 497(1) et (1.1) prévoient qu'un agent de la paix doit, dès que cela est matériellement possible, mettre la personne en liberté à moins qu'il soit nécessaire, dans l'intérêt public, de détenir la personne sous garde afin d'identifier la personne, de recueillir ou conserver une preuve de l'infraction ou une preuve y relative, d'empêcher que l'infraction se poursuive ou se répète, ou qu'une autre infraction soit commise, ou d'assurer la sécurité des victimes ou des témoins de l'infractionNote de bas de page 103. Selon ces dispositions du Code criminel et de la Liquor Control and Licensing Act, les agents de police ont le pouvoir d'arrêter sans mandat et d'incarcérer une personne en état d'ébriété dans la mesure où les conditions requises sont respectées.

Dans l'arrêt Besse c Thom,la Cour d'appel de la Colombie-Britannique a conclu que l'expression [TRADUCTION] « en état d'ébriété » utilisée dans les cas d'arrestation de personnes en état d'ébriété dans un lieu public en vertu de la Liquor Control and Licensing Act, signifiait [TRADUCTION] « le fait d'être sous l'effet de stupéfiants ou d'être ivre à la suite de la consommation d'alcool ou d'une drogue à un point tel que la personne se met en danger ou met d'autres personnes en danger ou trouble la paixNote de bas de page 104 ». D'autres affaires ont par la suite généralement conservé cette définitionNote de bas de page 105. De plus, dans l'arrêt R c Robinson, la Cour a déclaré ce qui suit :

[TRADUCTION] L'arrestation d'une personne en état d'ébriété dans un lieu public ne vise pas à arrêter la personne parce qu'elle a consommé de l'alcool ou parce qu'elle est sous l'effet de l'alcool. L'arrestation vise à protéger le public, et l'agent procédant à l'arrestation doit avoir une raison importante pour priver le citoyen de sa libertéNote de bas de page 106.

Ainsi, même si les agents de police ont le pouvoir d'arrêter une personne en état d'ébriété dans un lieu public, le simple fait d'être en état d'ébriété n'est pas un motif suffisant selon la Liquor Control and Licensing Act. L'agent de police doit avoir des motifs raisonnables de croire qu'une personne se met en danger ou met d'autres personnes en danger ou qu'elle trouble la paix.

Des organisations de défense des droits de la personne et des libertés civiles soulèvent depuis longtemps des préoccupations au sujet du pouvoir de la GRC d'arrêter et d'incarcérer les personnes en état d'ébriété dans un lieu public, car la plupart des personnes détenues sous garde ne sont pas par la suite accusées d'une infraction ou ne bénéficient pas de la procédure régulière prévue dans le cas des personnes arrêtées et détenues, comme la possibilité de contester devant les tribunaux la légitimité de l'arrestation et de la détentionNote de bas de page 107.

Rapports d'incident de la GRC

Les enquêteurs de la Commission ont examiné un échantillon de rapports d'incident relatifs à des cas de personnes en état d'ébriété dans un lieu public pour la période de 2008 à 2012 dans le district du Nord de la Colombie-Britannique de la GRCNote de bas de page 108. L'examen visait à déterminer si les interventions de la GRC à la suite d'incidents liés à des personnes en état d'ébriété dans un lieu public étaient conformes aux politiques et aux procédures pertinentes, de même qu'à cerner tout problème systémique.

Les politiques et les procédures nationales et divisionnaires de la GRC concernant les arrestations, les détentions et l'évaluation des réactions n'ont pas beaucoup changé depuis 2008. Même si les politiques et les procédures ne prévoient pas d'exigences particulières en matière de production de rapports sur les incidents liés à des personnes en état d'ébriété dans un lieu public, on s'attend à ce que les membres de la GRC consignent les motifs nécessaires et les éléments de l'infraction. Les rapports d'incident devraient comporter suffisamment de renseignements pour justifier qu'une personne soit privée de sa libertéNote de bas de page 109. De plus, les membres de la GRC au quartier général divisionnaire de la Colombie-Britannique ont souligné que, lorsque les membres de la GRC sont dépêchés sur les lieux d'un incident à la suite d'un appel, ils doivent consigner les détails de l'incident dans le rapport d'incident et formuler les motifs d'arrestation même s'il s'agit d'une situation couranteNote de bas de page 110.

Pour déterminer si les interventions de la GRC dans le district du Nord étaient conformes aux politiques et aux procédures pertinentes, nous avons donc évalué chaque rapport d'incident en fonction de la qualité des renseignements consignés dans le rapport d'incident selon les principales catégories suivantes : les détails relatifs à l'intervention, les mesures prises, les détails concernant l'arrestation, la détention et l'incarcération, l'évaluation des réactions ainsi qu'un examen par le superviseur ou une assurance de la qualitéNote de bas de page 111.

Résultats de l'examen

Du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2012, le district du Nord de la GRC a reçu 796 200 demandes d'interventionNote de bas de page 112. Parmi ces demandes, 44 537 visaient des plaintes ou des incidents concernant une personne en état d'ébriété dans un lieu public, ce qui représentait environ 5,6 % du nombre total de demandes d'intervention dans le district du Nord au cours de cette périodeNote de bas de page 113.

Détails relatifs à l'intervention

Les enquêteurs de la Commission ont examiné un échantillon de 1 928 rapports d'incident sur les 44 537 plaintes ou incidents concernant une personne en état d'ébriété dans un lieu publicNote de bas de page 114. De ces rapports, 73,9 % (n = 1 424) découlaient d'une plainte reçue d'un membre du public, tandis que 19,2 % (n = 371) avaient été rédigés à la suite d'une intervention effectuée par un membre de la GRC. Dans 7,2 % (n = 139) des cas, les enquêteurs de la Commission n'ont pu déterminer si la demande d'intervention faisait suite à une plainte reçue d'un membre du public ou si une intervention avait été entreprise par un membre de la GRC. Dans 12,4 % (n = 240) de ces cas, l'incident avait été réglé avant l'arrivée du membre de la GRCNote de bas de page 115.

Au total, l'examen des dossiers a permis d'établir que la GRC avait appréhendé 1 897 personnes pour s'être trouvées dans un lieu public en état d'ébriété. De ces personnes, 81,1 % (n = 1 539) étaient des hommes; 18,7 % (n = 355), des femmesNote de bas de page 116; 93,1 % (n = 1 766), des adultes; 6,2 % (n = 118) des adolescents, et un rapport concernait un enfantNote de bas de page 117.

L'examen a également permis d'établir que, sur le nombre total de sujets, 78,9 % (n = 1 494) avaient été identifiés par un membre de la GRC comme étant d'origine autochtone; 18,6 % (n = 353) comme étant de race blanche; 0,6 % (n = 12) comme appartenant à d'autres ethnies (p. ex. Asiatiques, Hispaniques, Noirs ou du Moyen-Orient; et l'ethnie de 2 % (n = 38) des sujets n'avait pas été établie dans le rapport d'incidentNote de bas de page 118. La fiabilité de ces données comme indicateur de tendances potentielles est cependant limitée du fait que l'information est principalement fondée sur la perception de l'ethnie du membre procédant à l'arrestation. Il convient néanmoins de noter que, bien que les Autochtones représentent 5,4 % de la population totale de la Colombie-Britannique et 17,5 % de la population du nord de la provinceNote de bas de page 119, ils comptent pour 78,9 % des personnes appréhendées dans le cadre d'une infraction pour s'être trouvées en état d'ébriété dans un lieu public dans le district du Nord.

Mesures prises

Le graphique suivant présente une répartition des interventions de la GRC à la suite d'incidents impliquant une personne en état d'ébriété dans un lieu public dans le district du Nord.

L'examen a permis d'établir que, de 2008 à 2012, la GRC dans le district du Nord a incarcéré et détenu 76,5 % (n = 1 452) des personnes appréhendées (n = 1 897) pour s'être trouvées en état d'ébriété dans un lieu public jusqu'à ce qu'elles dégrisent. La proportion de personnes en état d'ébriété incarcérées était la plus grande en 2010 (84 %, n = 325) et la plus faible en 2012 (64,8 %, n = 243). Par comparaison, la part de personnes appréhendées pour s'être trouvées en état d'ébriété dans un lieu public et confiées aux soins d'un adulte responsable s'élevait à 3 % (n = 57) dans l'ensemble, 2010 étant l'année où la proportion était la plus faible (0,8 %, n = 3) et 2012 étant l'année où la proportion était la plus élevée (4,8 %, n = 18). De même, la part de personnes appréhendées pour s'être trouvées en état d'ébriété dans un lieu public et qui ont été conduites chez elles s'élevait à 5,5 % (n = 105) de 2008 à 2012, 2010 étant aussi l'année où la proportion était la plus faible (3,6 %, n = 14) et 2012 étant l'année où la proportion était la plus élevée (8 %, n = 30).
L'examen a aussi permis d'établir que, de 2008 à 2012, seules deux personnes (0,1 %) ont été confiées à un refuge ou à un centre de dégrisement. Ces données correspondent à l'information fournie par plusieurs membres de la GRC en Colombie-Britannique, qui ont dit que les refuges et les centres de dégrisement sont peu nombreux dans le district du NordNote de bas de page 120.

Dans le cadre de l'examen, nous avons également comparé les interventions de la GRC à la suite d'incidents impliquant des personnes en état d'ébriété dans un lieu public en fonction de l'ethnie de la personne. Même si nous n'avons pas dégagé, dans la plupart des cas, de différences importantes dans le traitement des Autochtones et des non autochtones (voir le tableau ci-dessous), nous avons constaté certaines différences, par exemple les suivantes : 79,7 % (n = 1 191) des personnes autochtones et 68,6 % (n = 242) des personnes de race blanche ont été détenues en cellule et mises en liberté lorsqu'elles avaient dégrisé, tandis que 3,7 % (n = 55) des personnes autochtones et 11,6 % (n = 41) des personnes de race blanche ont été conduites chez elles.

Mesures prises pour toutes les personnes selon leur ethnie
Mesure prise Autochtones Blancs Ethnie non consignée au dossier AutresNote de bas de page 121 Total
n = 1 494 % n = 353 % n = 42 % n = 8 % n = 1 897 %

Détenue en cellule et confiée à un adulte responsable

35

2,3

5

1,4

0

0

0

0

40

2,1

Détenue en cellule et mise en liberté lorsqu'elle avait dégrisé

1 191

79,7

242

68,6

12

28,6

7

87,5

1 452

76,5

Détenue en cellule et mise en liberté en vue d'une comparution devant les tribunaux

14

0,9

4

1,1

0

0

0

0

18

0,9

Confiée aux SMU/à un médecin

48

3,2

15

4,2

7

16,7

0

0

70

3,7

Confiée à un adulte à jeun responsable (sur les lieux de l'incident)

43

2,9

12

3,4

2

4,8

0

0

57

3

Conduite chez elle

55

3,7

41

11,6

9

21,4

0

0

105

5,5

Autres

24

1,6

9

2,5

1

2,4

0

0

34

1,8

Aucune mesure prise

77

5,2

21

5,9

10

23,8

1

12,5

109

5,7

Centre de dégrisement

2

0,1

0

0

0

0

0

0

2

0,1

Données insuffisantes

5

0,3

4

1,1

1

2,4

0

0

10

0,5

Femmes et adolescents

Des organisations de défense des droits de la personne et des libertés civiles ont soulevé des préoccupations au sujet d'un traitement partial réservé aux femmes autochtones, alléguant que la GRC dans le district du Nord de la Colombie-Britannique les traite plus sévèrement que des femmes de race blanche et que ces dernières sont habituellement conduites chez elles plutôt qu'incarcérées lorsqu'elles sont trouvées en état d'ébriétéNote de bas de page 122. Dans le cadre de leur examen, les enquêteurs de la Commission ont déterminé que la GRC avait appréhendé, de 2008 à 2012, 355 femmes d'âge adulte parce qu'elles s'étaient trouvées en état d'ébriété dans un lieu public. Sur ce total, 69,3 % (n = 246) ont été détenues en cellule jusqu'à ce qu'elles dégrisent, 5,4 % (n = 19) ont été confiées à un adulte responsable sur les lieux de l'incident et 6,8 % (n = 24) ont été conduites chez ellesNote de bas de page 123. Sur ces 355 femmes, 85,9 % (n = 305) ont été identifiées comme étant Autochtones et 12,1 % (n = 43) ont été identifiées comme étant Blanches (les autres rapports d'incident n'indiquaient pas l'ethnie). Selon les rapports d'incident examinés, 72,8 % (n = 222) des femmes autochtones et 53,5 % (n = 23) des femmes de race blanche appréhendées pour s'être trouvées en état d'ébriété dans un lieu public ont été détenues en cellule et mises en liberté lorsqu'elles avaient dégrisé, tandis que 3,9 % (n = 12) des femmes autochtones et 16,3 % (n = 7) des femmes de race blanche ont été conduites chez elles.

Mesures prises dans le cas de femmes selon leur ethnie (2008-2012)
Mesure prise
Autochtones Blanches Ethnie non consignée au dossier Total
n = 305 % n = 43 % n = 7 % n = 355 %

Confiée aux SMU/à un médecin

12

3,9

3

7

0

0

15

4,2

Confiée à un adulte à jeun responsable (sur les lieux de l'incident)

16

5,2

3

7

0

0

19

5,4

Détenue en cellule et confiée à un adulte responsable

16

5,2

2

4,7

0

0

18

5,1

Détenue en cellule et mise en liberté lorsqu'elle avait dégrisé

222

72,8

23

53,5

1

14,3

246

69,3

Détenue en cellule et mise en liberté en vue d'une comparution devant les tribunaux

3

1

0

0

0

0

3

0,8

Conduite chez elle

12

3,9

7

16,3

5

71,4

24

6,8

Autres

7

2,3

2

4,7

0

0

9

2,5

Aucune mesure prise

17

5,6

3

7

1

14,3

21

5,9

La Commission a aussi examiné les interventions de la GRC à la suite d'incidents de jeunes en état d'ébriété dans un lieu public. Les enquêteurs ont cerné 118 adolescents qui avaient été appréhendés pour s'être trouvés en état d'ébriété dans un lieu public de 2008 à 2012. Sur ce total, 91 adolescents ont été identifiés comme Autochtones, 23, comme Blancs, et l'ethnie de quatre de ces adolescents n'avait pas été établie dans le rapport. Les adolescents autochtones ont été détenus jusqu'à ce qu'ils dégrisent dans 39,6 % (n = 36) des incidents, détenus en cellule et confiés par la suite à un adulte responsable dans 34,1 % (n = 31) des incidents, conduits chez eux dans 5,5 % (n = 5) des cas et confiés à un adulte responsable sur les lieux de l'incident dans 7,7 % (n = 7) des cas. En comparaison, les adolescents de race blanche ont été détenus jusqu'à ce qu'ils dégrisent dans 34,8 % (n = 8) des incidents, détenus en cellule et confiés par la suite à un adulte responsable dans 13 % (n = 3) des cas, conduits chez eux dans 26,1 % (n = 6) des cas et confiés à un adulte responsable sur les lieux de l'incident dans 17,4 % (n = 4) des incidents.

Mesures prises dans les cas d'adolescents selon leur ethnie (2008-2012)
Mesure prise
Autochtones Blancs Ethnie non consignée au dossier Total
n = 91 % n = 23 % n = 4 % n = 118 %
Détenu en cellule et confié à un adulte responsable 31 34,1 3 13 0 0 34 28,8
Détenu en cellule et mis en liberté lorsqu'il avait dégrisé 36 39,6 8 34,8 1 25 45 38,1
Détenu en cellule et mis en liberté en vue d'une comparution devant les tribunaux 1 1,1 0 0 1 25 2 1,7
Confié aux SMU/à un médecin 10 11 2 8,7 2 50 14 11,9
Confié à un adulte à jeun responsable (sur les lieux de l'incident) 7 7,7 4 17,4 0 0 11 9,3
Conduit chez lui 5 5,5 6 26,1 0 0 11 9,3
Aucune mesure prise 1 1,1 0 0 0 0 1 0,8

Dans les tableaux précédents, le nombre disproportionné de femmes et d'adolescents autochtones ayant été incarcérés comparativement aux femmes et aux adolescents de race blanche est en phase avec la conclusion établie précédemment par la Commission selon laquelle les Autochtones représentent 78,9 % (n = 1 494) du nombre total de personnes appréhendées pour s'être trouvées en état d'ébriété dans un lieu public. Cependant, comme il a été mentionné précédemment, la fiabilité de ces données comme indicateur de tendances potentielles ou d'un traitement différentiel est limitée. Même si les statistiques donnent à penser que les femmes et les adolescents de race blanche sont plus susceptibles d'être conduits chez eux, la Commission est incapable de conclure que les femmes et les adolescents autochtones font l'objet d'un traitement différentiel comparativement aux femmes et aux adolescents de race blanche, compte tenu des limites associées aux données fournies et de la portée de l'enquête de la Commission. Les statistiques descriptives donnent un portrait quantitatif utile des données à l'examen, mais ne peuvent être utilisées en soi pour tirer des conclusions.

Détails concernant l'arrestation, la détention et l'incarcération

Dans le cadre de l'examen des rapports d'incident, les enquêteurs ont déterminé que, sur le nombre total de personnes appréhendées pour s'être trouvées en état d'ébriété dans un lieu public (n = 1 897), 1 510 avaient été détenuesNote de bas de page 124. Au total, 83,4 % (n = 1 259) des personnes détenues n'avaient pas fait l'objet d'une accusation.

Comme il a été mentionné précédemment, pour que l'on puisse maintenir une personne en détention parce qu'elle s'était trouvée en état d'ébriété dans un lieu public conformément à la Liquor Control and Licensing Act,la personne doit être sous l'effet de l'alcool au point où les agents de police auraient des motifs raisonnables de croire que la personne se met en danger ou met d'autres personnes en danger, ou qu'elle trouble la paix. Selon l'article 175 du Code criminel, pour que l'on puisse maintenir une personne en détention parce qu'elle était dans un état d'ébriété dans un endroit public ou près d'un tel endroit, la personne doit troubler la paix du fait qu'elle est ivre. Dans le cadre de l'examen, la Commission a examiné chaque rapport d'incident afin de vérifier si le membre de la GRC avait consigné les motifs d'arrestation, par exemple : une description du degré de l'état d'ébriété (autrement que l'expression « trouvée en état d'ébriété »); si la personne se mettait en danger ou mettait d'autres personnes en danger, et comment; et si le sujet troublait la paix.

L'examen a permis de constater que, en ce qui concerne les personnes détenues à la suite d'une infraction liée au fait de s'être trouvées en état d'ébriété dans un lieu public pendant la période visée par l'examen, les membres de la GRC n'avaient pas formulé de motif d'arrestation dans 22,6 % (n = 341) des cas. Cela comprend les rapports où le membre de la GRC avait seulement écrit qu'une « personne en état d'ébriété » avait été trouvée et détenue en cellule jusqu'à ce qu'elle dégrise, sans préciser si la personne était sous l'effet de l'alcool ou qu'elle troublait la paix. La Commission a constaté une légère amélioration à ce sujet de 2008 à 2012 : en 2008, 25,7 % des rapports d'incident ne contenaient pas de formulation ni d'explication des motifs d'arrestation; par comparaison, en 2012, cette proportion a baissé, passant à 17,1 % des rapports. Dans les cas où le rapport d'incident n'indiquait pas les motifs d'arrestation (n = 341), 88,6 % (n = 302) des personnes incarcérées n'avaient pas par la suite fait l'objet d'accusations.

Pour cet aspect, la Commission n'a pas relevé d'écart important entre les rapports d'incident concernant des personnes autochtones et ceux concernant des personnes non autochtones.

Détention et formulation des motifs d'arrestation selon l'ethnie
Formulation des motifs d'arrestation Autochtones Blancs Ethnie non consignée au dossier AutresNote de bas de page 125 Total
n = 1 240 % n = 251 % n = 12 % n = 7 % n = 1 510 %
Aucune formulation des motifs d'arrestation/de détention dans le rapport d'incident 278 22,4 56 22,3 6 50 1 14,3 341 22,6
Dans ces cas, nombre de personnes détenues sans faire par la suite l'objet d'accusations 246 88,5 50 89,3 5 83,3 1 100 302 88,6

L'examen a permis de constater que, dans bon nombre d'autres cas, les membres de la GRC n'avaient pas consigné adéquatement l'information dans les rapports d'incident. Par exemple, les membres ont énoncé ou décrit les signes d'état d'ébriété des personnes appréhendées dans seulement 55,8 % (n = 842) des incidents, et, même si les membres de la GRC ont indiqué que la personne se « mettait en danger » dans 41,7 % (n = 629) des cas, seulement 64,2 % (n = 404) de ces rapports présentaient des éléments à l'appui de cette évaluation. L'examen a aussi permis de constater que les membres de la GRC n'ont précisé le degré d'état d'ébriété de la personne et la manière dont cette dernière « se mettait en danger » que dans 26,1 % (n = 394) des cas.

La Commission a cependant observé une légère amélioration de 2008 à 2012 au chapitre de la consignation de l'information. Par exemple, en 2008, les membres du district du Nord de la GRC ont, dans 45,9 % des cas, décrit le degré d'ébriété du sujet, proportion qui a augmenté en 2012, passant à 66,2 %. De même, les membres ont présenté des éléments à l'appui de l'évaluation selon laquelle la personne « se mettait en danger » dans 60 % des cas en 2008 et dans 70,5 % des cas en 2012. Compte tenu de ce qui précède, il a été jugé, dans l'ensemble, que la consignation par les membres de la GRC de renseignements à l'appui visant à décrire les signes d'ébriété ou à expliquer pourquoi une personne se mettait en danger ou mettait les autres personnes en danger ou troublait la paix était inadéquate selon les attentes à l'égard d'une norme nationale de consignation de l'information dans les dossiers.

Conclusion no 12 : De 2008 à 2012, les membres de la GRC n'ont formulé aucun motif pour l'arrestation d'une personne en état d'ébriété dans 22,6 % des rapports d'incident et n'ont décrit le degré d'ébriété de la personne que dans 55,8 % des rapports d'incident.

Évaluation des réactions

Conformément à la politique, avant de placer une personne en détention, les membres de la GRC doivent évaluer les réactions de la personne et obtenir une aide médicale, au besoinNote de bas de page 126. La Commission a donc évalué les rapports d'incident rédigés par les membres de la GRC dans les cas où une personne s'était trouvée en état d'ébriété dans un lieu public pour déterminer si, en fonction de l'information contenue dans lesdits rapports, les membres avaient évalué les réactions de la personne et avaient tenté d'obtenir de l'aide médicale, au besoin.

La Commission a constaté de nombreux cas où les membres avaient utilisé l'expression « sans connaissance », sans expliquer davantage les réactions ou l'état de conscience de la personne (p. ex. personne trouvée « sans connaissance sur un banc » ou « sans connaissance dans une ruelle »). L'expression « sans connaissance » peut signifier une personne inconsciente ou une personne qui dort. Les enquêteurs ont calculé que, sur le nombre total de personnes détenues (n = 1 510), ils ne pouvaient évaluer si l'état de la personne pouvait avoir justifié une aide médicale dans 9,9 % (n = 150) des cas. Il s'agit principalement des cas où les membres de la GRC avaient utilisé l'expression « sans connaissance ».

Examen par le superviseur ou assurance de la qualité

Conformément à la politique, les superviseurs doivent examiner et approuver tous les rapports d'incident et ont la responsabilité de vérifier que les données saisies dans le système de gestion des dossiers sont complètes et exactesNote de bas de page 127. L'examen de la Commission a montré que, bien que des rapports aient été approuvés (p. ex. ont été signés par le superviseur), le superviseur n'avait formulé une orientation ou une rétroaction que dans 9,1 % (n = 153) des rapportsNote de bas de page 128.

Même si les superviseurs peuvent approuver systématiquement les rapports, vu qu'une grande part des dossiers n'étaient pas conformes aux lignes directrices de la politique, comme cela a été souligné précédemment, et que les superviseurs ne formulent pas généralement de commentaires ni de directives dans les rapports d'incident, la Commission conclut que l'examen par le superviseur des rapports d'incident dans les cas de personnes trouvées en état d'ébriété dans un lieu public est clairement inadéquat. Il faut souligner l'importance d'une supervision efficace pour maintenir la qualité des dossiers relatifs au maintien de l'ordre. Il incombe aux superviseurs de s'assurer que les membres consignent de manière appropriée et adéquate les motifs raisonnables d'arrestation d'une personne en état d'ébriété dans un lieu public, conformément aux dispositions applicables, ainsi que les détails relatifs à la détention et à la mise en liberté. Les superviseurs sont chargés de veiller à ce que les membres suivent la politique et à ce que les rapports soient complets.

Conclusion no 13 : Étant donné la proportion élevée de dossiers qui n'étaient pas conformes aux lignes directrices de la politique, la Commission conclut que l'examen par le superviseur des rapports d'incident dans le cas des personnes s'étant trouvées en état d'ébriété dans un lieu public était inadéquat.

Recommandation no 11 : Que la GRC rappelle aux superviseurs du district du Nord l'exigence de faire preuve de rigueur dans leur examen des rapports d'incident et, en particulier, l'importance de s'assurer que tous les rapports d'incident sont adéquatement documentés, particulièrement ceux concernant l'arrestation et la détention d'une personne.

Responsabilisation, conformité et transparence

Les détachements de la GRC en Colombie-Britannique sont tenus de réaliser des examens de l'assurance de la qualité au sein des services et peuvent faire l'objet d'examens par la direction, notamment à l'égard de ce qui suit : la procédure d'arrestation et de mise en liberté, la supervision opérationnelle, les prisonniers et les cellules ainsi que la qualité des enquêtes. Pendant de tels examens, des échantillons de dossiers sont examinés afin d'établir si les lois, les politiques et les procédures applicables sont respectées. Par exemple, le Guide d'arrestation et de mise en liberté comprend une section particulière sur les arrestations en vertu des dispositions législatives provinciales applicables aux personnes en état d'ébriété dans un lieu public, aux arrestations sans mandat, ainsi qu'une section permettant de déterminer si les circonstances entourant l'arrestation sont clairement consignées dans le calepin du membre et dans le dossier d'enquête. Le Guide de supervision opérationnelle a pour but d'établir si les superviseurs s'assurent que les activités des unités respectent les lois, les politiques et les procédures, et comprend une section visant à déterminer si les superviseurs formulent de manière rigoureuse et en temps opportun une orientation et des directives opérationnelles dans les dossiersNote de bas de page 129.

La Commission a obtenu les 19 examens de la direction réalisés par la GRC en Colombie-Britannique pour les détachements du district du Nord de 2008 à 2012. Sur les 19 examens de la direction analysés, 8 comportaient une section sur les personnes en état d'ébriété dans un lieu public ou sur les personnes en état d'ébriété. Dans ces sections, on constatait notamment que les personnes en état d'ébriété n'étaient pas systématiquement informées de leurs droits prévus par la Charte ou ne se voyaient pas offrir la possibilité de communiquer avec un avocat; dans d'autres cas, les examens de la direction soulignaient le fait que certains détachements intervenant auprès d'un nombre élevé de personnes en état d'ébriété avaient adopté de meilleures pratiques, notamment le fait que les membres de la GRC informaient de nouveau la personne arrêtée de ses droits lorsqu'elle avait dégrisé, si la personne était trop ivre pour comprendre complètement ses droits prévus par la Charte et la mise en garde policière officielleNote de bas de page 130.

Les examens par la direction et les examens de l'assurance de la qualité au sein des services sont une façon importante d'évaluer si les membres de la GRC respectent les lois et les politiques applicables et de déterminer s'il existe des problèmes systémiques. Cependant, le fait de s'appuyer sur un échantillon aléatoire de rapports d'incident, et ce, sans prêter une attention particulière aux enquêtes dans le cas de personnes s'étant trouvées en état d'ébriété dans un lieu public donne peu confiance en cette démarche visant à vérifier la reddition de comptes dans ce domaine du maintien de l'ordre. Le district du Nord de la GRC en Colombie-Britannique devrait utiliser les mécanismes existants d'examen interne pour veiller à ce que les membres respectent les lois et les politiques applicables dans le traitement des cas de personnes en état d'ébriété dans un lieu public.

Recommandation no 12 : Que la GRC intègre un examen obligatoire des cas de personnes en état d'ébriété dans un lieu public dans les examens par la direction et les examens de l'assurance de la qualité au sein des services du district du Nord.

Politiques de la GRC

Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC

La présente section porte sur les politiques nationales de la GRC en matière de maintien de l'ordre concernant des personnes en état d'ébriété dans un lieu public. La GRC ne s'est pas dotée d'une politique indépendante ou consacrée expressément à ce sujet; par conséquent, la Commission a examiné les politiques jugées les plus pertinentes en matière de maintien de l'ordre concernant des personnes en état d'ébriétéNote de bas de page 131, notamment :

  • Direction générale de la GRC, Manuel des opérations, chapitre 18.1. « Arrestation et détention » (daté du 25 juin 2014);
  • Direction générale de la GRC, Manuel des opérations, chapitre 19.2. « Évaluation des réactions et assistance médicale » (daté du 12 janvier 2015);
  • Direction générale de la GRC, Manuel des opérations, chapitre 19.3. « Garde de prisonniers et de leurs effets personnels » (daté du 5 février 2015);
  • Direction générale de la GRC, Manuel des opérations, chapitre 19.9. « Mise en liberté des prisonniers » (daté du 30 avril 2004).
Chapitre 18.1. « Arrestation et détention »

L'article 1. – « Généralités » donne aux membres des directives sur leurs obligations juridiques au moment de l'arrestation et de la détention d'une personne afin de s'assurer que les mesures prises par les membres respectent la Charte.
L'article 7. de cette politique porte précisément sur l'incarcération des personnes en état d'ébriété. L'article 7.1. « Généralités » précise que les membres « doivent connaître leurs responsabilités relatives à l'incarcération des personnes intoxiquées dans un endroit public et veiller à connaître les responsabilités que les tribunaux ont imposées à cet égard ».

L'article 7.2. « Arrestation ou détention » de cette politique nationale indique qu'une personne qui « trouble la paix dans un endroit public » peut être arrêtée pour cette infraction punissable sur déclaration sommaire de culpabilité au titre de l'article 175 du Code criminel si elle a été trouvée en train de faire du tapage dans un endroit public. La politique précise que s'il n'y a pas suffisamment de motifs pour arrêter une personne en état d'ébriété en vertu de l'article 175 du Code criminel, la personne peut être détenue aux termes de la loi provinciale applicable. À cet égard, la politique précise les facteurs suivants à prendre en considération au moment où le membre de la GRC décide s'il devrait priver la personne de liberté :

  • 7.2.2.1. La personne est manifestement abrutie d'alcool.
  • 7.2.2.2. Il est évident que la personne ne pourrait empêcher qu'elle ne se blesse ou qu'elle ne blesse quelqu'un d'autre.
  • 7.2.2.3. Si la personne n'est pas incarcérée, il y a lieu de croire qu'elle risque de commettre un crime.
  • 7.2.2.4. La police a envisagé d'autres solutions, p. ex. confier la personne à un adulte apte et disposé à s'en occuper comme un membre de la famille, un ami ou un centre de désintoxication.
  • 7.2.2.5. Si la personne est laissée seule, elle risque de succomber à des conditions environnementales extérieuresNote de bas de page 132.

Les facteurs énumérés ci-dessus sont destinés à fournir aux membres de la GRC des directives sur les situations où ils doivent placer une personne en détention parce qu'elle était en état d'ébriété dans un lieu public. Comme il a été mentionné précédemment, si les agents de police ont le pouvoir d'arrêter une personne en état d'ébriété dans un endroit public, ils doivent, pour placer la personne en détention, avoir des motifs raisonnables de croire que la personne se met en danger ou met d'autres personnes en danger ou qu'elle trouble la paix.

À cet égard, l'article 7.2.2.2. parle de la capacité de la personne d'« empêcher qu'elle ne se blesse ou qu'elle ne blesse quelqu'un d'autre ». Bien qu'il s'agisse en effet d'un facteur important, celui-ci n'est pas sans contrainte et ne touche pas toute la portée des risques auxquels est exposée une personne ou quelqu'un d'autre. L'expression « se met en danger ou met d'autres personnes en danger » touche un plus vaste éventail de risques et correspond davantage à la jurisprudence dans ce domaineNote de bas de page 133.

Conclusion no 14 : Le facteur précisé à l'article 7.2.2.2. du chapitre 18.1. « Arrestation et détention » du Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC, qui renvoie à la capacité d'une personne d'empêcher qu'elle ne se blesse ou qu'elle ne blesse quelqu'un d'autre, ne correspond pas entièrement à la jurisprudence actuelle et ne tient pas compte adéquatement d'un plus vaste éventail de risques, pris en considération par l'expression « se met en danger ou met d'autres personnes en danger ».

Recommandation no 13 : Que la GRC modifie l'article 7.2. du chapitre 18.1. du Manuel des opérations de la Direction générale pour tenir compte de la jurisprudence actuelle.

Chapitre 19.2. « Évaluation des réactions et assistance médicale »

Au cœur de cette politique, on trouve l'exigence selon laquelle les membres doivent effectuer une évaluation des réactions d'une personne avant de la placer en détention policière. En particulier, conformément à l'article 2.1. « Évaluation des réactions », les membres doivent faire ce qui suit :

  • 2.1.2. Obtenir de l'assistance médicale immédiate et fournir les premiers soins nécessaires lorsque la personne présente l'un ou l'autre des états suivants :
    • 2.1.2.1. semble être inconsciente ou à demi-consciente, ou son état de conscience a sensiblement changé;
    • 2.1.2.2. présente des symptômes de traumatisme crânien ou aurait subi un tel traumatisme;
    • 2.1.2.3. est soupçonnée d'être atteinte d'une intoxication alcoolique ou d'une surdose de drogues;
    • 2.1.2.4. est soupçonnée de dissimuler des drogues à l'intérieur de son corps;
    • 2.1.2.5. vomit excessivement;
    • 2.1.2.6. présente tout autre signe indiquant une blessure ou une maladie pour laquelle il faudrait obtenir des soins médicauxNote de bas de page 134.

Selon cette politique, une personne présentant les symptômes ci-dessus « ne doit pas être mise dans une cellule de la GRC [sauf si un] médecin a déclaré que la personne était médicalement apte à être incarcéréeNote de bas de page 135 ». La politique précise aussi que les membres doivent, dans les régions où l'on ne peut pas consulter un médecin ou le faire aisément, faire appel à un professionnel de la santé.

La politique a récemment été modifiée pour inclure la remarque suivante : « Songer à obtenir une évaluation médicale si vous soupçonnez la personne d'une dépendance à la drogue ou à l'alcool et si vous la détenez depuis plus de douze heuresNote de bas de page 136 ». Cet ajout reflète les préoccupations et les risques potentiels liés à l'incarcération de personnes gravement intoxiquées ou ayant une dépendance à l'égard de l'alcool ou des drogues, lesquelles pourraient souffrir de symptômes découlant du sevrage si elles sont détenues pendant des périodes prolongées.

Conformément à l'article 2.2. « Consignation des constatations médicales », les membres de la GRC doivent consigner dans leur calepin, sur les lieux ou dans les plus brefs délais possibles, toutes constatations, tous troubles médicaux ainsi que tout autre renseignement pertinent obtenu de la victime ou du témoin sur les lieux. Selon la politique, les membres de la GRC doivent transcrire ces renseignements (p. ex. quantité d'alcool ou de drogues consommée, présence de bouteilles d'alcool ou d'accessoires facilitant la consommation de drogues) dans le Rapport sur le prisonnier (c.-à-d. le formulaire C-13-1) et dans le dossier d'enquête.

Conformément à l'article 2.3. « Donner accès à l'assistance médicale », les membres de la GRC doivent fournir aux professionnels de la santé soignant le prisonnier les renseignements pertinents sur les réactions du prisonnier, les blessures, les substances que le prisonnier peut avoir ingérées, ainsi que le genre et le niveau de force utilisés au moment de l'arrestation.

L'article 2.3. vise également les situations où un sujet pourrait refuser des soins médicaux. Dans de tels cas, on s'attend à ce que les membres obtiennent le refus par écrit du prisonnier dans la mesure du possible. À cet égard, la politique précise ce qui suit : « La décision finale de transporter un prisonnier à une installation médicale pour des soins appartient au membre, indépendamment du refus du prisonnier […] » La politique précise de plus que la GRC est responsable du prisonnier pendant sa détention et que, en cas de doute, ce dernier doit être transporté à une installation médicale pour y recevoir des soins.

Conclusion no 15 : Le chapitre 19.2. « Évaluation des réactions et assistance médicale » du Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC donne aux membres une orientation claire et prévoit une reddition de comptes en exigeant des membres qu'ils consignent le détail de leur évaluation et des mesures prises.

Chapitre 19.3. « Garde des prisonniers et de leurs effets personnels »

Ce chapitre donne des directives supplémentaires aux membres et aux gardiens sur l'évaluation des réactions du prisonnier.

Selon l'article 3.1. « Incarcération des prisonniers », les membres de la GRC doivent évaluer les réactions du prisonnier et consigner l'information dans le Rapport sur le prisonnier. Ils doivent demander au gardien de service d'évaluer au besoin les réactions du prisonnier et de consigner les résultats de l'évaluation dans le registre des prisonniers. Les membres doivent également informer le gardien des « circonstances entourant l'arrestation du prisonnier afin d'accroître le niveau de soins nécessaire […] »

L'article 3.1.4. exige des membres de la GRC qu'ils envisagent une évaluation médicale des toxicomanes connus ou présumés et qu'ils surveillent la présence de symptômes de sevrage. Il s'agit d'un ajout récent à la politique, qui souligne l'importance de l'évaluation des risques potentiels liés à l'incarcération de personnes gravement intoxiquées ou ayant une dépendance à l'égard de l'alcool ou des drogues, lesquelles pourraient souffrir de symptômes découlant du sevrage si elles sont détenues pendant des périodes prolongées.

En plus de ce qui précède, cette politique rappelle aux membres leurs obligations en vertu de l'article 2.1.2. du chapitre 19.2. du Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC selon lesquelles ils doivent obtenir de l'assistance médicale immédiate lorsque la personne est malade, blessée ou a besoin d'une assistance médicale. De plus, conformément à la politique, lorsque la personne a été évaluée et a été déclarée apte à être incarcérée par un médecin, elle doit d'abord être placée dans la position de réveil dans la cellule, son visage étant bien en vue pour en faciliter la surveillance. Dans la mesure du possible, les membres doivent inscrire dans le Rapport sur le prisonnier la date et l'heure à laquelle le prisonnier a été déclaré apte à être incarcéré, ainsi que le nom du médecin ayant déclaré le prisonnier apte à être incarcéré. Selon la politique, les membres doivent aussi inscrire, dans le Rapport sur le prisonnier, toute recommandation médicale faite par le médecin et « en informer le gardien » en conséquence.

Cette politique précise également que les gardiens sont chargés d'évaluer les réactions de chaque prisonnier sous leur surveillance et doivent être au courant de l'obligation d'évaluer les réactions du prisonnier et d'effectuer des évaluations conformément aux politiques énoncées au chapitre 19.2. Elle avertit les gardiens qu'ils doivent non pas tenter « d'évaluer les réactions d'un prisonnier qui ne semble pas complètement conscient », mais plutôt obtenir de l'assistance médicale immédiate et demander de l'aide à un membre.

La politique précise également que les gardiens ne doivent « jamais présumer que le prisonnier est en train de dormir pour faire passer notamment sa gueule de bois » et doivent évaluer les réactions du prisonnier conformément à l'annexe 19-2-1 « Évaluation des réactions du prisonnier » du chapitre 19.2. du Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC.

L'article 4.5. « Surveillance » souligne les responsabilités des gardiens visant à surveiller les prisonniers dont ils ont la garde. Cela comprend le fait de procéder fréquemment à une vérification physique des prisonniers à intervalles irréguliers (au moins toutes les 15 minutes) afin de s'assurer de leur sécurité et de leur bien-être. En ce qui concerne les personnes intoxiquées, la politique exige que les prisonniers soient éveillés ou réveillés au moins une fois toutes les quatre heures, et ce, pour que l'on puisse évaluer leurs réactions, conformément au chapitre 19.2., et pour demander immédiatement de l'assistance médicale, au besoin.

La politique précise également la responsabilité du chef de détachement de veiller à ce que l'ensemble des membres et des employés qui sont responsables de la garde des prisonniers aient lu et parafé les directives nationales pertinentes ainsi que les suppléments divisionnaires, de détachement et de service tous les six mois.

Chapitre 19.9. « Mise en liberté des prisonniers »

Même si la politique ne mentionne pas ou n'aborde pas expressément les personnes intoxiquées, elle précise à l'article 2. « Mise en liberté d'un contrevenant » qu'« [a]vant de mettre une personne sous la garde de la GRC en liberté, prendre les précautions nécessaires, tel qu'indiqué au chap. 19.2.Note de bas de page 137, pour assurer sa santé et sa protection ».

Cette politique donne également comme instruction de mettre en liberté la personne arrêtée sans mandat dès que cela est matériellement possible, à moins qu'il ne soit nécessaire d'identifier la personne, de recueillir ou conserver une preuve de l'infraction ou une preuve y relative, ou d'empêcher que l'infraction se poursuive ou se répète, ou qu'une autre infraction soit commise.

Cette politique est conforme à l'article 497 du Code criminel, mais ne prévoit pas toutes les exceptions énumérées à cet article, qui comprend également la nécessité « d'assurer la sécurité des victimes ou des témoins de l'infractionNote de bas de page 138 ».

Conclusion no 16 : Le chapitre 19.9. « Mise en liberté des prisonniers » du Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC est conforme à l'article 497 du Code criminel, mais ne prévoit pas la liste complète des exceptions énumérées à cet article.

Recommandation no 14 : Que la GRC modifie le chapitre 19.9. du Manuel des opérations de la Direction générale pour qu'il prévoie la liste complète des exceptions énumérées à l'article 497 du Code criminel.

Femmes et adolescents

À la lumière des préoccupations soulevées par des organisations de défense des droits de la personne et des libertés civiles au sujet des rapports de la GRC avec des femmes et des adolescents, la Commission a examiné les politiques nationales pertinentes de la GRC relatives aux personnes en état d'ébriété dans un lieu public, en vue d'établir si elle donne une orientation ou des avertissements particuliers en ce qui concerne les rapports de la GRC avec les femmes et les adolescents.

À la suite d'un examen des politiques nationales pertinentes de la GRC, les enquêteurs n'ont pas relevé de directives ou de mises en garde particulières concernant les rapports de la GRC avec les femmes arrêtées en état d'ébriété dans un lieu public. La seule mention constatée a trait à l'exigence, selon l'article 3.1. « Incarcération des prisonniers » du chapitre 19.3. du Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC, selon laquelle les femmes et les hommes doivent être détenus dans des cellules séparées et, autant que possible, dans des cellules séparées d'où ils ne peuvent se voir. Cette politique prévoit également que les adolescents doivent être détenus séparément des adultesNote de bas de page 139.

En ce qui concerne les adolescents, le chapitre 39.2. du Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC traite de l'arrestation des jeunes. La politique donne aux membres de la GRC des directives générales sur l'obligation d'aviser les parents lorsqu'un jeune est arrêté et détenu en attendant sa comparution devant les tribunaux, ainsi que sur les exigences en matière de notification lorsqu'un jeune reçoit un avis de convocation ou une citation à comparaître, ou dans les cas où un jeune est mis en liberté à la suite d'une promesse de comparaître ou contracte un engagementNote de bas de page 140. Bien que la politique soit conforme à la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, elle ne donne pas aux membres de la GRC de directives au sujet de la nécessité de communiquer avec les parents dans les cas où un jeune est arrêté sans mandat et détenu par la GRC sans accusation (ou, dans le cas de la Colombie-Britannique, sans une recommandation à l'avocat de la Couronne de déposer une accusation). La plupart des jeunes arrêtés pour s'être trouvés en état d'ébriété dans un lieu public et détenus par la GRC sont détenus sans accusation.

Conclusion no 17 : Le chapitre 39.2. du Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC ayant trait à l'arrestation des jeunes respecte les obligations en matière de notification précisées dans la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, mais ne donne pas de directives aux membres de la GRC concernant le fait d'aviser les parents lorsqu'un jeune est arrêté sans mandat et détenu par la GRC sans accusation.

Recommandation no 15 : Que la GRC modifie le chapitre 39.2. du Manuel des opérations de la Direction générale ayant trait à l'arrestation des jeunes pour y intégrer des directives à l'intention des membres sur les exigences en matière de notification dans les cas où un jeune est arrêté et détenu sans accusation, en particulier dans les cas concernant des jeunes en état d'ébriété dans un lieu public.

Manuel des opérations de la GRC en Colombie-Britannique

Les politiques divisionnaires relatives au maintien de l'ordre concernant des personnes en état d'ébriété dans un lieu public ou au traitement par la GRC des personnes en état d'ébriété en Colombie-Britannique comprennent les chapitres suivants du Manuel des opérations de la Division « E » :

  • Chapitre 100.5. « Liquor Control and Licensing Act and Regulations » (daté du 7 avril 2015);
  • Chapitre 18.1. « Arrestation et détention » (daté du 9 janvier 2014);
  • Chapitre 19.2. « Évaluation des réactions et assistance médicale » (daté du 21 août 2009);
  • Chapitre 19.3. « Garde des prisonniers et de leurs effets personnels » (daté du 2 juillet 2013)
Chapitre 100.5. « Liquor Control and Licensing Act and Regulations

Comme il a été mentionné précédemment, le pouvoir des agents de police d'arrêter une personne parce qu'elle est en état d'ébriété dans un endroit public est prévu au paragraphe 175(1) du Code criminel (troubler la paix) et dans les lois provinciales pertinentes, comme l'article 41 de la Liquor Control and Licensing Act de la Colombie-Britannique et l'article 91 de la Offence Act de la Colombie-Britannique.

À cet égard, le chapitre 100.5. Liquor Control and Licensing Act and Regulations du Manuel des opérations de la GRC en Colombie-Britanniquedonne aux membres une orientation et des directives en ce qui concerne leurs pouvoirs prévus par les lois provinciales. En particulier, l'article 1.3. Intoxicated Persons donne aux membres des directives touchant les éléments à prendre en considération au moment de l'arrestation et de la détention d'une personne ainsi que les responsabilités des membres de la GRC.

Selon l'article 1.3.1.1.1., [TRADUCTION] « une personne intoxiquée est une personne sous l'effet de stupéfiants ou de l'alcool à un point tel [Besse c Thom, (1979), 96 DLR (3e) 657] que la personne se met en danger ou met d'autres personnes en danger ou trouble la paix [alinéa 91(3)a) de la Offence Act] ». La politique énonce que les membres de la GRC [TRADUCTION] « doivent exercer leur jugement au moment d'arrêter des personnes en vertu de l'article 41 [de la ] Liquor Control and Licensing Act (LCLA) ».

L'article 1.3.3.1. de la politique divisionnaire précise ce qui suit :

[TRADUCTION]

Lorsque vous arrêtez une personne en vertu des dispositions du paragraphe 41(2) de la LCLA, vous devez :

  • 1.3.3.1.1. Détenir la personne intoxiquée jusqu'à ce qu'elle dégrise et ensuite la mettre en liberté.
  • 1.3.3.1.1.1. Obtenir immédiatement une aide médicale si l'état physique de la personne intoxiquée justifie un examen médical (voir le chapitre 19.2. « Évaluation des réactions et assistance médicale » du Manuel des opérations de la Division « E »).
  • 1.3.3.1.2. Envisager de confier la personne en état d'ébriété à un adulte responsable et à jeun.
  • 1.3.3.1.3. Examiner la possibilité de déposer des accusations, le cas échéant, en vertu :
    • 1.3.3.1.3.1. Du sous-alinéa 175(1)a)(ii) [du Code criminel] — Troubler la paix en étant ivreNote de bas de page 141;
    • 1.3.3.1.3.2. Ou de l'article 41 [de la Liquor Control and Licensing Act de la Colombie-Britannique] — Drunkenness in PublicNote de bas de page 142.

L'article 1.3.3.1.1. prévoit la mise en liberté de la personne intoxiquée lorsqu'elle a dégrisé. Il s'agit d'un critère de mise en liberté plus élevé que celui prévu à l'article 497 du Code criminel, qui précise que, lorsqu'une personne est arrêtée sans mandat, elle doit être mise en liberté dès que cela est matériellement possible à moins qu'il ne soit nécessaire d'identifier la personne, de recueillir ou conserver une preuve de l'infraction ou une preuve y relative, d'empêcher que l'infraction se poursuive ou se répète, ou qu'une autre infraction soit commise, ou d'assurer la sécurité des victimes ou des témoins de l'infractionNote de bas de page 143.

L'article 1.3.3.1.2. de cette politique donne aux membres l'instruction d'examiner la possibilité de confier la personne intoxiquée à un adulte responsable et à jeun. Cet article n'est pas conforme à la politique nationale, qui donne aux membres l'instruction d'envisager des solutions de rechange à la détention, permettant ainsi d'examiner un plus vaste éventail de possibilités de mise en liberté.

Conclusion no 18 : En ce qui concerne l'examen de solutions de rechange à la détention et la mise en liberté des personnes intoxiquées, l'article 1.3.3.1. du chapitre 100.5. du Manuel des opérations de la GRC en Colombie-Britannique n'est pas conforme à la politique nationale et au Code criminel.

Recommandation no 16 : Que la GRC modifie l'article 1.3.3.1. du chapitre 100.5. du Manuel des opérations de la Division « E » pour préciser des conditions de mise en liberté reflétant l'orientation que donne le Code criminel et pour que l'article soit conforme à la politique nationale, laquelle donne aux membres de la GRC l'instruction d'envisager des solutions de rechange à la détention, permettant ainsi d'examiner un plus vaste éventail de possibilités de mise en liberté.

En ce qui concerne les adolescents, l'article 1.4.1. du chapitre 100.5. du Manuel des opérations de la GRC en Colombie-Britannique prévoit ce qui suit : [TRADUCTION] « ne donnez pas d'avis aux parents lorsque vous délivrez à un mineur un constat de contravention à une loi provinciale [paragraphe 5(2) de la Youth Justice Act]. » Cet article est conforme à la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents du Canada ainsi qu'à la Youth Justice Act de la Colombie-Britannique.

Chapitre 19.3. « Garde des prisonniers et de leurs effets personnels »

L'article 2. de cette politique comprend des directives particulières à l'intention des superviseurs en ce qui concerne l'incarcération de personnes arrêtées en état d'ébriété dans un lieu public. Selon cette politique, les superviseurs doivent déterminer si la détention est nécessaire en fonction de trois facteurs : l'âge de la personne, son état de santé connu ou présumé et s'il y a un adulte responsable et à jeun disponible pour prendre en charge la personne.

Le fait d'attribuer un rôle particulier aux superviseurs dans le processus décisionnel relatif à l'incarcération de personnes arrêtées pour s'être trouvées en état d'ébriété dans un lieu public est une mesure importante d'assurance de la qualité qui devrait être conservée. Toutefois, le dernier facteur à prendre en considération au moment de décider de l'incarcération d'une personne, à savoir « s'il y a une personne responsable et à jeun disponible pour prendre en charge la personne », ne couvre pas le plus vaste éventail de possibilités de mise en liberté conformes à la politique nationale, selon laquelle les membres doivent envisager des « solutions de rechange à la détention ». Les solutions de rechange à la détention devraient comprendre toutes les options raisonnables disponibles, par exemple : les refuges, les centres de dégrisement, les centres d'accueil ou d'autres organisations ou personnes aptes et disposées à prendre soin de la personne intoxiquée.

Formation de la GRC

École de la GRC – Programme de formation des cadets

La Division Dépôt de la GRC ne dispose pas d'une formation spécialisée ou particulière sur le maintien de l'ordre concernant des personnes en état d'ébriété dans un lieu publicNote de bas de page 144. À la suite d'une correspondance échangée avec des responsables de la Division Dépôt, les enquêteurs ont appris que le Programme de formation des cadets vise principalement à enseigner aux cadets à trouver, à interpréter et à appliquer les lois fédérales. La question du maintien de l'ordre concernant des personnes en état d'ébriété dans un lieu public est abordée essentiellement dans les lois provinciales, et ces lois varient d'une province à une autre. Les membres de la GRC apprennent les lois provinciales dans le cadre du Programme de formation pratique, qui suit le Programme de formation des cadetsNote de bas de page 145.

Aux fins du présent examen, la Commission a relevé plusieurs modules et séances du Programme de formation des cadets qui sont particulièrement pertinents pour le maintien de l'ordre concernant des personnes en état d'ébriété dans un lieu public :

« Expliquer ses actes sur le plan juridique : un guide d'introduction »

Le document « Expliquer ses actes sur le plan juridique : un guide d'introduction » donne aux membres de la GRC l'information de base sur la rédaction des rapports d'enquête. Il est conçu pour aider les membres de la GRC n'ayant pas d'expérience sur le terrain à [TRADUCTION] « communiquer clairement, avec concision et efficacement les mesures qu'ils prennent eux-mêmes et celles d'autres membres dans le cadre des enquêtes policières ». Il donne aux membres de la GRC l'instruction de consigner tous les renseignements dans un ordre chronologique, de dire la vérité et d'éviter de passer intentionnellement sous silence des renseignements, de faire abstraction des émotions au moment de la rédaction, d'énoncer des opinions ou de tirer des conclusions uniquement lorsqu'elles sont fondées sur des éléments de preuve, d'éviter le jargon des services de police, d'éviter les hypothèses, de faire preuve de professionnalisme, de ne pas oublier de mentionner les fondements juridiques au moment d'annoter le rapport, de faire preuve de concision et de réviser l'information consignée à des fins d'exactitude et d'exhaustivité. En guise d'exemple de l'établissement de liens entre les conclusions et les éléments de preuve, le guide décrit la manière de consigner les observations précises qui ont permis au membre de tirer les conclusions selon lesquelles les facultés du sujet étaient affaiblies par l'alcool.

Le guide souligne que les membres de la GRC doivent présenter l'incident de façon détaillée, par exemple consigner les mots exacts utilisés signifiant que le suspect avait compris ses droits. Le guide recommande aux membres d'utiliser le Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents comme outil afin de décrire les facteurs situationnels et les comportements du sujet.

Sciences policières appliquées – Module 6

Dans le cadre des séances 1 et 9 (annexe 1.2 : « Documentation et questionnaire sur le traitement des prisonniers »), les cadets apprennent quels sont les pouvoirs et les exigences concernant la façon d'interagir avec une personne en détention. Cela comprend une analyse des obligations prévues par la loi que doivent respecter les membres au moment d'arrêter et de détenir une personne, des procédures de perquisition, ainsi que du moment et de la manière d'évaluer les réactions de la personne et des situations où il est judicieux d'obtenir de l'aide médicale. Ce matériel est conforme aux politiques et aux procédures nationales pertinentes de la GRCNote de bas de page 146.

Les cadets reçoivent aussi une formation sur le transport des prisonniers, les procédures de perquisition et la manière de remplir correctement les documents après le placement des prisonniers en cellule. Ils apprennent les risques liés à la prise des empreintes digitales d'une personne intoxiquée ou violente et la démarche recommandée consistant à attendre que la personne dégrise, plutôt que de courir le risque de provoquer le sujet ou de mettre en danger la sécurité des membres ou du sujet. La séance en question permet également d'examiner brièvement le pouvoir d'arrêter une personne pour s'être trouvée en état d'ébriété dans un lieu public. Les cadets sont informés du fait que toutes les provinces se sont dotées de lois octroyant aux agents de police le pouvoir [TRADUCTION] « d'arrêter les personnes très intoxiquées dans un lieu public et de les placer en détention jusqu'à ce qu'elles dégrisent ou de la manière prévue par les lois de la province ou la politique divisionnaire ». Cette séance porte aussi sur les risques ou les dangers liés à l'incarcération de personnes gravement intoxiquées. Elle rappelle les exigences prévues au chapitre 19.2. « Évaluation des réactions et assistance médicale » du Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC et ajoute [TRADUCTION] « qu'il est préférable de confier une personne intoxiquée à un adulte disposé à prendre en charge la personne ». Pendant cette séance, on rappelle aux cadets que les prisonniers sont des clients jouissant de droits prévus par la loi, qui doivent être traités avec professionnalisme, respect et dignité, et être protégés contre les blessures qu'ils peuvent s'infliger à eux-mêmes ou à d'autres personnesNote de bas de page 147.

La Commission a également analysé des documents ayant trait à la séance 14 du module 6 du cours Sciences policières appliquées (annexe 8.2 : Persons in Custody Questionnaire). Dans le cadre de cette séance, les cadets acquièrent des connaissances au sujet des lois et de la politique nationale de la GRC concernant leurs responsabilités à l'égard des personnes placées en détention. Le questionnaire comprend des questions sur l'appréhension et la mise sous garde des personnes gravement intoxiquées. Dans le cadre de cette séance, on rappelle aux cadets l'exigence d'obtenir immédiatement une assistance médicale et de fournir les premiers soins nécessaires lorsqu'une personne présente un des signes ou symptômes énoncés dans le chapitre 19.2. « Évaluation des réactions et assistance médicale » du Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC. On rappelle aux membres de la GRC que toutes les provinces ont adopté des dispositions donnant aux agents de police le pouvoir d'arrêter les personnes intoxiquées dans un endroit public. Les cadets sont également informés des dangers (y compris le décès de personnes détenues) liés à l'incarcération de personnes gravement intoxiquées. L'animateur du cours rappelle l'importance d'obtenir de l'aide médicale au besoin et qu'il est préférable de confier un prisonnier intoxiqué aux soins d'un adulte disposé à le prendre en charge. Bien que les documents de formation rappellent qu'il est préférable de confier une personne intoxiquée aux soins d'un adulte, ils ne proposent pas de solutions de rechange à la détention qui pourraient être disponibles ou ne semblent pas les aborderNote de bas de page 148.

Sciences policières appliquées – Module 10

Ce module enseigne aux cadets les éléments particuliers à prendre en considération au moment [TRADUCTION] « d'interagir avec des personnes en état d'ébriété ». En particulier, les cadets sont informés [TRADUCTION] « qu'il ne faut jamais présumer que la personne est simplement ivre » et qu'ils doivent vérifier si la personne porte un bracelet MédicAlert ou a sur elle une carte qui pourrait donner des indices qu'elle pourrait être affligée par quelque chose d'autre qu'un abus d'alcool. On rappelle également aux cadets qu'ils doivent obtenir immédiatement de l'aide médicale au besoinNote de bas de page 149.

De plus, les cadets reçoivent une formation sur l'alcoolisme d'un expert en la matière, qui les renseigne et leur donne des explications sur les signes, les facteurs de risque et les comportements associés à l'alcoolisme. L'exposé fournit également aux cadets des renseignements généraux sur la manière dont l'alcoolisme influe sur le comportement, et ce, pour veiller à ce que les interactions des membres de la GRC avec les personnes intoxiquées soient empreintes de professionnalismeNote de bas de page 150.

Sciences policières appliquées – Module 7

Les cadets reçoivent une formation sur les maladies mentales et les interventions de la GRC auprès des personnes ayant une maladie mentaleNote de bas de page 151. Cette formation est pertinente au moment d'interagir avec les personnes intoxiquées parce que les documents de formation donnent des conseils en matière d'intervention, notamment des facteurs à prendre en considération au moment d'appréhender des personnes présentant une maladie mentale qui est également intoxiquées (par l'alcool ou des drogues). Dans les documents de formation, il est mentionné que, [TRADUCTION] « à moins de problèmes urgents de santé ou de sécurité, il ne sert à rien de conduire un sujet à l'hôpital pour qu'il subisse un examen psychiatrique pendant qu'il est intoxiqué ». Il est expliqué que [TRADUCTION] « la décision des agents de police relativement à l'appréhension du sujet ainsi que la décision du médecin relativement à son incarcération pourraient devoir attendre jusqu'au moment où l'intoxication s'est dissipée et où le comportement mental habituel de la personne peut être observé ». Les documents indiquent également que des sujets violents ou dangereux pourraient devoir être détenus en cellule jusqu'au lendemainNote de bas de page 152.

Le contenu de ce module est conforme à l'information que la Commission a reçue des membres de la GRC du quartier général divisionnaire de la Colombie-Britannique et du Centre de formation de la région du Pacifique, qui ont dit que les hôpitaux n'admettent pas ou ne prennent pas soin des personnes gravement intoxiquées qui présentent également des problèmes de santé mentaleNote de bas de page 153.

Formation dans la Division

Programme de formation pratique

Pendant le Programme de formation pratique, les nouveaux membres de la GRC doivent effectuer des devoirs et se soumettre à des évaluations. En Colombie-Britannique, cela comprend le module A du Programme de formation pratique du Centre de formation de la région du Pacifique de la GRC, qui doit être terminé au cours des deux premiers mois du Programme. Le module A comprend dix questions sur des infractions prévues par la Liquor Control and Licensing Act de la Colombie-Britannique et une question sur la Offence Act de la Colombie-Britannique traitant des personnes intoxiquées en détention qui nécessitent des soinsNote de bas de page 154.

Centre de formation de la région du Pacifique de la GRC

Des responsables du Centre de formation de la région du Pacifique de la GRC ont confirmé aux enquêteurs de la Commission que le Centre de formation n'offre pas de formation particulière sur le maintien de l'ordre concernant des personnes en état d'ébriété dans un lieu public. Ils ont souligné que la formation, à l'échelon national ou divisionnaire, ne peut aborder tous les scénarios potentiels ou l'ensemble des lois, et que les membres de la GRC apprennent une bonne partie de ce qu'ils ont besoin de connaître par l'expériencNote de bas de page 155.

Le Centre de formation offre à tous les membres de la Division une formation sur l'intervention et le désamorçage en cas de crise. La Division des services de police du ministère de la Justice de la Colombie-Britannique exige que tous les agents de police de première ligne et que tous les superviseurs de la province suivent cette formation. Le ministère exige également que tous les agents de police suivent tous les trois ans une formation d'appoint sur l'intervention et le désamorçage en cas de criseNote de bas de page 156.

Le cours de formation sur l'intervention et le désamorçage en cas de crise a été élaboré pour donner suite aux recommandations découlant de la Commission d'enquête BraidwoodNote de bas de page 157. Il a été conçu pour s'assurer que les agents de police sont en mesure d'utiliser les techniques de communication afin de désamorcer efficacement les situations de crise, notamment les cas où une personne vit une crise attribuable à des troubles mentaux. Dans le cadre du cours, on utilise un module de formation en ligne suivi d'une séance de formation d'une journée entièreNote de bas de page 158.

Le volet en ligne de cette formation comprend diverses techniques visant à évaluer le risque, à désamorcer les situations de crise et à établir la méthode/technique d'intervention la plus appropriéeNote de bas de page 159.

La séance de formation en classe d'une journée entière sur l'intervention et le désamorçage en cas de crise comprend un examen des politiques et des procédures nationales et divisionnaires de la GRC pertinentes, une discussion avec un groupe d'intervenants et de clients des ressources et des services en santé mentale, un examen du modèle d'intervention et de désamorçage en cas de crise ainsi que des techniques connexes, des scénarios de jeux de rôles pratiques conçus pour appliquer les techniques d'intervention et de désamorçage en cas de crise, et un examen écrit finalNote de bas de page 160.

Les responsables du Centre de formation ont informé les enquêteurs de la Commission que, même si la formation sur l'intervention et le désamorçage en cas de crise a été conçue pour aider la GRC à composer avec les personnes perturbées sur le plan émotif et ne porte pas précisément sur le maintien de l'ordre concernant des personnes en état d'ébriété dans un lieu public, les principes de la formation s'appliquent à tous les types de scénarios et de situations de maintien de l'ordre. La formation fait ressortir l'importance de la communication en tant qu'outil essentiel dans toutes les interventions ou interactions de la GRC. Les habiletés en matière de communication sont des éléments habituels ou des composantes essentielles de toutes les activités de formation de la GRCNote de bas de page 161.

Bien qu'il n'y ait pas de formation particulière spécialisée dans le maintien de l'ordre concernant des personnes en état d'ébriété dans un lieu public, la Commission a constaté que, dans son ensemble, la formation est conforme aux politiques et aux procédures.

Conclusion no 19 : La formation de la GRC sur le maintien de l'ordre concernant des personnes en état d'ébriété dans un lieu public est conforme aux politiques et aux procédures nationales et divisionnaires.

Conclusion

L'enquête réalisée par la Commission a révélé des lacunes importantes au chapitre de la consignation des renseignements pertinents dans les rapports d'incident par les membres de la GRC, et n'a guère relevé d'éléments attestant une orientation et une surveillance offertes par le superviseur à l'égard de ces rapports. Bien que certaines améliorations aient été observées de 2008 à 2012, les résultats de l'enquête montrent néanmoins que la GRC n'a pas comblé adéquatement ces lacunes. L'absence de renseignements pertinents pose de graves difficultés pour les organismes d'examen (comme la Commission) et affaiblit la confiance du public. Les membres de la GRC doivent s'acquitter du devoir de fournir un compte rendu complet des événements et accepter qu'il ne s'agisse pas simplement d'un fardeau administratif.

L'examen a aussi permis de relever des améliorations à apporter aux aspects des politiques ayant trait à la façon dont la GRC intervient dans les cas de personnes en état d'ébriété dans un lieu public. Les changements à apporter aux politiques devraient accroître la rigueur du cadre stratégique de la GRC. Néanmoins, il est toujours nécessaire que les chefs de détachement et les superviseurs se mobilisent activement pour souligner l'importance, dans tous les cas, même s'il y a un nombre élevé d'incidents liés à des personnes en état d'ébriété dans un lieu public, de consigner l'information et de tenir à jour des dossiers appropriés.

L'examen des activités de formation a révélé que, même s'il n'existe pas de formation spécialisée sur le maintien de l'ordre concernant des personnes en état d'ébriété dans un lieu public à l'échelon national ou divisionnaire en Colombie-Britannique, la formation en place semble permettre aux membres de la GRC d'acquérir les habiletés et les compétences fondamentales nécessaires pour faire face aux situations de personnes en état d'ébriété et pour comprendre les pouvoirs prévus par la loi à cet égard.

À l'échelle nationale, le Programme de formation des cadets est axé sur l'acquisition par les cadets de capacités de régler les problèmes, de faire preuve de jugement et, essentiellement, de faire preuve de discernement au moment de décider quand et comment intervenir dans diverses situations et divers scénarios.

Le Programme permet aussi d'enseigner aux cadets que toutes les provinces se sont dotées de lois conférant aux agents de police le pouvoir d'arrêter des personnes intoxiquées dans un endroit public et de les détenir jusqu'à ce qu'elles dégrisent ou selon ce que précisent les politiques législatives/divisionnaires des provinces. La formation souligne également, de manière répétée, l'importance d'évaluer les réactions et d'obtenir de l'assistance médicale au besoin, ainsi que l'importance de traiter toutes les personnes avec dignité et respect.

La formation de la GRC en Colombie-Britannique semble se concentrer sur le Programme de formation pratique pour que les nouveaux membres puissent acquérir l'expérience, la formation pratique et les connaissances requises dans le maintien de l'ordre concernant des personnes en état d'ébriété dans un lieu public. Les membres de la GRC au Centre de formation de la région du Pacifique ont dit que les attentes et les exigences varient d'une collectivité à une autre et que les divers détachements peuvent avoir adopté des façons distinctes d'assurer le maintien de l'ordre concernant des personnes en état d'ébriété dans un lieu publicNote de bas de page 162. C'est pourquoi le Programme de formation pratique offre une formation pratique essentielle adaptée aux collectivités où les membres exercent leurs fonctions.

Il est important de souligner que, même si les interventions policières visant des personnes intoxiquées peuvent être des situations courantes, on ne devrait jamais considérer l'arrestation et l'incarcération d'une personne comme une affaire banale.

Recours à la force

Contexte

Des organisations de défense des droits de la personne et des libertés civiles ont soulevé des préoccupations et ont formulé des allégations concernant les mauvais traitements et le recours excessif à la force par des policiers dans le nord de la Colombie-Britannique, en particulier contre les femmes et les jeunes filles, ainsi que les lacunes apparentes des mécanismes de surveillance destinés à assurer la responsabilisation des policiers à l'égard de leur inconduiteNote de bas de page 163. Ces allégations ont incité la Commission à examiner la reddition de comptes de la GRC en matière de recours à la force dans le district du Nord de la Colombie-Britannique.

Le Code criminel autorise les agents de la paix, comme les membres de la GRC, à employer le degré de force jugé nécessaire pour l'application et l'exécution de la loiNote de bas de page 164. Les agents doivent agir en s'appuyant sur des motifs raisonnables et doivent pouvoir justifier non seulement le fait d'avoir eu recours à la force, mais aussi le degré de force utiliséNote de bas de page 165. Par conséquent, quand un membre de la GRC est dans une situation où il doit avoir recours à la force, il doit non seulement agir de façon raisonnable, mais il est également tenu de fournir un compte rendu complet de la situation et une justification de la force utilisée. Les limites définies dans la loi et dans les politiques mêmes de la GRC sont essentielles pour que l'on puisse veiller à ce que le pouvoir accordé à la GRC pour utiliser la force au besoin soit assorti d'une reddition de comptesNote de bas de page 166.

La base de données sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent de la GRC, un outil d'établissement de rapports et de stockage en ligne, est le principal instrument de consignation des interventions où il y a eu recours à la force. La base de données comprend des incidents où il y a eu recours à la force et fournit des renseignements sur : le comportement et les gestes du sujet avant l'intervention, les résultats de l'intervention ainsi que les blessures subies par le sujet, le membre de la GRC ou toute autre personne présente sur les lieuxNote de bas de page 167. Les membres de la GRC sont tenus d'enregistrer dans la base de données toutes les interventions où il y a eu recours à la forceNote de bas de page 168. Selon la GRC, cette base de données a été mise en place en réaction aux pressions externes exercées pour que des normes plus rigoureuses soient respectées en matière de transparence et de reddition de comptesNote de bas de page 169.

Les membres de la GRC sont tenus d'expliquer et d'enregistrer dans la base de données toutes les interventions où il y a eu recours à la force. Le « comment » et le « pourquoi » dans l'explication dépendent de l'évaluation de la situation précise par le membre. Les membres de la GRC sont formés pour évaluer les situations et sont guidés dans leurs décisions concernant le recours à la force par le Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents. Il s'agit d'un outil d'évaluation des risques utilisé pour choisir une méthode d'intervention, suivre de façon constante l'évolution de la situation et expliquer ensuite le choix de la méthode d'intervention en questionNote de bas de page 170.

Selon la GRC et son Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents, l'évaluation des risques doit tenir compte de toutes les circonstances entourant la situation et expliquer de façon claire les événements survenus avant, pendant et après une intervention. Cela comprend une évaluation de la façon dont les facteurs suivants peuvent avoir influé sur l'évaluation de la situation par l'agentNote de bas de page 171 :

  • 1) Les facteurs situationnels, comme les conditions environnementales, le nombre de sujets, la capacité perçue de ceux-ci, la connaissance antérieure du sujet, le temps et la distance et des signes de menace;
  • 2) Le comportement du sujet, à savoir coopératif, résistant passif, résistant actif, agression susceptible de causer des lésions corporelles graves ou la mort;
  • 3) Les perceptions de l'agent, qui sont des facteurs propres à l'agent qui interagissent avec les facteurs situationnels et les catégories de comportement, ce qui influe sur la façon dont l'agent perçoit et, par conséquent, évalue une situation et y réagit;
  • 4) Les considérations tactiques, comme le repositionnement tactique, l'apparence de l'agent, l'uniforme et l'équipement, le nombre d'agents, les renforts disponibles, la couverture, les considérations géographiques, la valeur concrète d'un confinement, la distance, les communications, ainsi que les politiques et directives de l'organisme.

Selon le Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents, les membres doivent examiner attentivement les facteurs ci-dessus pour formuler une évaluation des risques. Le membre choisit une réponse appropriée en fonction l'évaluation globale. Le modèle est également conçu pour aider les membres à expliquer pourquoi certaines méthodes d'intervention ont été utilisées, et à expliquer ses actions à d'autres personnes. Après une intervention où il y a eu recours à la force, le membre doit pouvoir justifier non seulement le fait d'avoir eu recours à la force, mais également le degré de force utiliséNote de bas de page 172. Ainsi, le Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents aide les membres à décrire et à expliquer comment ils ont perçu et évalué une situation précise, et comment ils sont intervenus. Ce cadre d'évaluation des risques guide les membres dans cette description.
Tous les membres de la GRC sont formés pour l'utilisation du Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents. Il est présenté et expliqué aux membres pendant la formation des cadets, dans le Manuel des opérations national et celui des divisions, dans un cours annuel obligatoire sur le Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents, et sur le site Web de la GRC.

Examen qualitatif des rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent

La Commission a examiné un échantillon de rapports du district du Nord à partir de la base de données sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent afin de déterminer si les membres remplissaient les rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent et expliquaient les interventions où il y a eu recours à la force d'une manière qui soit transparente et conforme aux directives du Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents et à la politique sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent.

La Commission a sélectionné un échantillon aléatoire de 301 rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent sur un total de 1 397 rapports établis dans les 35 détachements de la GRC du district du Nord entre 2010 et 2012Note de bas de page 173. La Commission a examiné les données des rapports et les descriptions selon une liste de vérification destinée à évaluer si l'explication du recours à la force par les membres était conforme aux exigences du Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents. L'évaluation tenait compte des questions clés suivantes :

  • Le membre a-t-il expliqué les facteurs pris en compte dans le processus d'évaluation des risques, de la façon indiquée dans le Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents : le comportement du sujet, les facteurs situationnels, les perceptions de l'agent et les considérations tactiques?
  • Le membre a-t-il expliqué de façon claire et efficace la totalité des circonstances?
  • Le membre a-t-il expliqué pourquoi la méthode d'intervention a été choisie pour gérer l'incident?
  • En tenant compte de ce qui précède, l'explication était-elle conforme au Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents?

L'examen a révélé qu'il manquait des composantes essentielles de l'évaluation des risques selon le Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents dans 35,9 % des rapports (108 sur 301), ce qui veut donc dire qu'ils n'étaient pas conformes aux exigences de la politique relative aux rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent. En outre, la Commission a constaté que 32,9 % des rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent (99 sur 301) ne précisaient pas, dans la formulation de l'explication, pourquoi on avait choisi certaines méthodes d'intervention pour gérer l'incident, ce qui constitue un des objectifs clés de l'outil qu'est le Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents. La Commission a également constaté que, des 108 rapports considérés comme non conformes à la politique, 81,5 % (88 sur 108) d'entre eux ne donnaient aucune indication sur les perceptions de l'agent, et dans 64,8 % (70 sur 108) des cas, on ne précisait rien concernant quelque considération tactique que ce soit. Les responsables de la GRC dans le district du Nord reconnaissent que les membres doivent améliorer l'explication des interventions où il y a eu recours à la force dans le système de données sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent; ils s'efforcent de résoudre les problèmes à cet égard de façon ponctuelle en fournissant de la rétroaction de même qu'en sensibilisant les superviseurs et les membres au sujet des exigences .

La Commission a relevé de nombreux exemples où l'explication des membres n'était pas claire en raison d'un recours à des énoncés génériques dans lesquels ne figure aucune justification relative à l'intervention ayant nécessité le recours à la force ni aucune évaluation des risques clairement exprimée. Selon la Commission, ces énoncés ne respectent pas les normes raisonnables relatives à l'explication par écrit, car ni la justification du recours à la force, ni les facteurs pris en considération dans le processus d'évaluation des risques, ni, en particulier, les perceptions des événements du point de vue des membres n'y figurent. Cette conclusion est conforme à une observation figurant dans un document du district du Nord de la même époque, document dans lequel on fait état de préoccupations au sujet d'une [TRADUCTION] « tendance aux descriptions génériques et conservatrices des réactions des agents qui contrastent avec les niveaux de résistance et de violence attribués au sujetNote de bas de page 175 ».

La Commission a remarqué une amélioration dans le style et le degré d'explication concernant les évaluations des risques dans les rapports de 2012, par rapport à ceux de 2010 et du début de 2011. Elle a également constaté que la conformité avec les directives du Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents et la politique sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent avait connu une certaine amélioration tout au long de la période visée par l'examen. En 2010, on a constaté que 49 % (49 sur 100) des rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent n'étaient pas conformes au cadre d'évaluation des risques du Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents, tandis qu'en 2011, 39,3 % (35 sur 89) des rapports ne respectaient pas la norme. Toutefois, la Commission a établi que seulement 20,6 % (21 sur 102) des rapports de 2012 n'étaient pas conformes au Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents.

De la même façon, des membres de la GRC dans le district du Nord ont indiqué à la Commission qu'ils avaient remarqué des améliorations en ce qui a trait aux explications depuis la mise en place du système de données sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent, en 2010, et ont fait état de l'effet néfaste du manque de formation officielle pour soutenir les membres et les superviseurs pendant la mise en œuvre du systèmeNote de bas de page 176. Des membres de la GRC dans le district du Nord ont confirmé que, dans leur district, on avait déjà signalé nombre de ces lacunes concernant les explications dans un bulletin et une présentation, en août 2010 et en avril 2012Note de bas de page 177. Bien que consciente des problèmes de conformité en ce qui a trait aux explications et aux rapports relatifs au comportement du sujet et à l'intervention de l'agent, la GRC a reconnu que, dans le district du Nord, la surveillance de l'examen du comportement du sujet et de l'intervention de l'agent était parfois inégale et lenteNote de bas de page 178.

La Commission a également remarqué une amélioration dans les explications à la suite d'une mise à jour de la politique et de la présentation d'une formation supplémentaire sur les outils d'établissement de rapports en 2011Note de bas de page 179. Néanmoins, elle a constaté en 2012 des problèmes de conformité semblables à ceux mentionnés dans les rapports précédents, sans oublier qu'il manquait toujours aux explications des détails essentiels relatifs à l'évaluation des risques et, en particulier, qu'on n'y précisait pas la perception des événements du point de vue des membres.

Conclusion no 20 : Malgré une légère amélioration en 2012, une proportion importante des rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent ont échoué à différents égards à leur obligation d'expliquer les interventions où il y a eu recours à la force conformément aux politiques et aux exigences de formation.

Recommandation no 17 : Que la GRC, dans le district du Nord de la Colombie-Britannique, veille à ce que les explications des interventions où il y a eu recours à la force soient claires, complètes et entièrement conformes aux politiques, aux lignes directrices et aux exigences de formation.

Données statistiques

La Commission a compilé et analysé des données statistiques du système de données sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent de la GRC dans le but de comprendre le recours à la force chez les membres du district du Nord (l'ampleur, le type et la fréquence), ainsi que de chercher des tendances importantes potentielles dans les statistiques relatives aux interventions où il y a eu recours à la force dans le district du Nord, et plus particulièrement pour repérer toute tendance en ce qui concerne les interventions où il y a eu recours à la force impliquant des adolescents et des sujets de sexe féminin.

La Commission a examiné 1 397 rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent. Ce nombre représente tous les rapports ayant été rédigés entre le 1er janvier 2010 et le 31 décembre 2012 par les membres des 35 détachements de la GRC dans le district du Nord. Ces rapports se rapportent à 1 128 incidents où il y a eu recours à la force et où 1 340 sujets étaient en cause.

La section qui suit renferme des statistiques décrivant l'âge et le sexe des sujets, le type de comportement des sujets par rapport à l'intervention du membre de la GRC, l'importance de la toxicomanie chez les sujets en cause dans des incidents où il y a eu recours à la force, l'ampleur des blessures causées par le recours à la force durant les incidents, le grade du membre et le type de service ainsi que les types d'incidents dans lesquels la GRC intervenait lors du recours à la force. Les statistiques descriptives offrent un résumé quantitatif utile des données faisant l'objet de l'enquête, mais à elles seules, elles ne peuvent pas servir à aboutir à une conclusion.

Âge et sexe

Graphy de l'Âge et sexe

La Commission a constaté que, dans une très grande majorité de cas – 91,3 % (1 030 sur 1 128) –, les incidents ayant nécessité le recours à la force impliquaient des sujets adultes (c.-à-d. âgés d'au moins 18 ans), tandis que ceux impliquant des adolescents ne représentaient que 8,7 % (98 sur 1 128) des incidents signalés. Ces chiffres révèlent que 87,2 % (1 169 sur 1 340) des sujets impliqués dans des interventions où il y a eu recours à la force étaient de sexe masculin, et 12,8 % (171 sur 1 340), de sexe féminin. Même si le nombre total de sujets de sexe féminin était faible (171 de 2010 à 2012), les adolescentes (de 12 à 17 ans) représentaient 19,9 % (34 sur 171) des sujets de sexe féminin. En revanche, les adolescents ne comptaient que pour 8,3 % (97 sur 1 169) des sujets de sexe masculin en cause dans des incidents où il y a eu recours à la force pendant cette période.

Comportement du sujet et intervention de l'agent

Le Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents répertorie cinq catégories différentes de comportement du sujet :

  • Coopératif signifie que le sujet réagit de façon appropriée à la présence et aux directives de l'agent, ainsi qu'à la façon dont il maîtrise la situation;
  • Résistant passif signifie que le sujet, avec peu ou pas de manifestations physiques, refuse d'obéir aux ordres de l'agent;
  • Résistant actif signifie que le sujet manifeste physiquement son refus d'obéir aux ordres de l'agent sans toutefois commettre une agression;
  • Agression signifie que le sujet tente ou menace, par une action ou un geste, d'employer la force, ou emploie la force contre une autre personne, s'il a à ce moment la capacité, ou s'il porte l'agent à croire, pour des motifs raisonnables, qu'il a alors la capacité d'accomplir son dessein;
  • Lésions corporelles graves ou mort est le terme utilisé lorsque le comportement du sujet porte l'agent à croire, pour des motifs raisonnables, que le sujet a l'intention ou est susceptible de causer des lésions corporelles graves ou la mort à une autre personne, comme une agression au couteau, avec un bâton ou une arme à feu, ou qu'il agit de façon à causer des lésions corporelles graves à un agent ou encore à une autre personneNote de bas de page 180.

Dans 26,9 % (497 sur 1 853) des incidents où il y a eu recours à la force, les sujets ont été jugés résistants actifs, 35,2 % des incidents (653 sur 1 853) ont été réputés être des cas d'agression, et dans 14,2 % des cas (264 sur 1 853), le comportement adopté correspondait à l'intention de causer des lésions corporelles graves ou la mort. Seuls 18,3 % (339 sur 1 853) des sujets ont été considérés comme coopératifs, et 5,4 % (100 sur 1 853) comme résistants passifs.

Comportement du sujet et intervention de l'agent dans les incidents où il y a eu recours à la force, district du Nord de la Division « E », de 2010 à 2013
Comportement du sujet Contrôle physique modéré Contrôle physique intense Aérosol capsique Bâton Arme à impulsions Chien policier Arme à feu pour la police Autres Total %
Coopératif 8 0 0 0 5 7 315 4 339 18,3
Résistant passif 20 9 0 0 7 3 58 3 100 5,4
Résistant actif 98 162 96 3 14 61 62 1 497 26,9
Agression 76 293 196 18 45 8 13 4 653 35,2
Lésions corporelles graves ou mort 9 29 13 2 43 8 156 4 264 14,2

Dans les cas où les adolescents ont adopté un comportement résistant actif, les membres ont fait appel à un chien policier dans 53,7 % (22 sur 41) des incidents. Un tiers des adolescents, soit 31,3 % (41 sur 131), ont adopté un tel comportement. Par ordre de fréquence, le deuxième comportement adopté par les adolescents a été le comportement coopératif, observé dans 30,5 % (40 sur 131) des incidents impliquant des adolescents. Une arme à feu pour la police a été utilisée dans 90 % (36 sur 40) des incidents dans le cadre desquels les adolescents ont adopté le comportement coopératifNote de bas de page 181.

Graphy for Officer Response in Use of Force by intervention type 2010 to 2012

Dans l'ensemble, les interventions les plus courantes où il y a eu recours à la force par des membres de la GRC comprenaient l'utilisation d'une arme à feu pour la police (32,6 %, 604 sur 1 853), suivies des interventions où il y a eu un contrôle physique intense (26,6 % ou 493 sur 1 853) et de celles où l'aérosol capsique a été utilisé (16,5 % ou 305 sur 1 853).

Dans 88,2 % (1 635 sur 1 853) des cas où il y a eu recours à la force, les membres de la GRC ont jugé que l'option d'intervention choisie s'était avérée efficace pour contrôler les sujets. La seule exception a été le bâton, qui a été perçu comme efficace dans seulement 56,5 % (13 sur 23) des incidents ayant nécessité le recours à la force. En revanche, les chiens policiers ont été considérés comme efficaces dans les 87 cas (100 %) où on y a fait appel.

Blessures

Des 1 340 sujets, 18,6 % (249 sur 1 340) ont subi des blessures lors d'incidents où l'on a eu recours à la force. Chez ces blessés, 81,1 % (202 sur 249) étaient des sujets adultes de sexe masculin, et 9,2 % (23 sur 249), de sexe féminin. Les adolescents ne comptaient que pour 6,8 % (17 sur 249) des blessés, et les adolescentes, pour 2,8 % (7 sur 249) des blessés.

Toxicomanie

Pie chart for Perceived substance abse among subjects

De 2010 à 2012, les membres de la GRC du district du Nord ont constaté une consommation abusive de substances (comme l'alcool, la drogue ou des substances à inhaler) chez les sujets dans 78,5 % (885 sur 1 128) des interventions où il y a eu recours à la force. Aucune différence appréciable n'a été observée entre les sujets adultes de sexe féminin et masculin. Dans les incidents de recours à la force sur des adultes de sexe masculin, 70,8 % (759 sur 1 072) des sujets avaient été perçus comme étant sous l'influence de l'alcool, 27,5 % (295 sur 1 072), sous l'influence de drogues, et 22,2 % (238 sur 1 072), sous l'influence de l'alcool et de drogues. Par comparaison, chez les femmes adultes impliquées dans des incidents de recours à la force, on a constaté dans 62 % (106 sur 171) des cas qu'elles étaient sous l'effet de l'alcool, dans 28 % (48 sur 171) des cas, de la drogue, et dans 19,3 % (33 sur 171) des cas, des deux. Toutefois, la comparaison entre les sujets adultes et adolescents montre que 70,1 % (848 sur 1 209) des adultes et seulement 45,8 % (60 sur 131) des adolescents étaient sous l'effet de l'alcool, et 27,9 % (337 sur 1 209) des sujets adultes et 19,1 % (25 sur 131) des sujets adolescents étaient sous l'effet de la drogue. Chez les adolescentes, 50 % (17 sur 34) d'entre elles paraissaient sous l'effet de l'alcool, soit 5 % de plus que dans le groupe des adolescents – 45 % (43 sur 97).

Graphy for perceived substance abuse by age

Types d'incident

Voici les trois types d'incidents où le recours à la force a été le plus fréquent, de 2010 à 2012 : agression d'un policier (302 sur 1 128), trouble de la paix (143 sur 1 128) et agression armée ou infliction de lésions corporelles (138 sur 1 128).

En ce qui concerne la consignation des incidents de recours à la force dans le système de rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent, les membres de la GRC doivent consigner l'infraction la plus grave. Cela dit, l'une des limites du système a trait au fait qu'il n'enregistre pas le type d'incident à la suite duquel le membre de la GRC est intervenu dès le départ. Par exemple, le membre de la GRC pourrait avoir, au départ, reçu une demande de service concernant une personne intoxiquée dans un endroit public, mais, à la fin de l'incident, celui-ci pourrait avoir dégénéré en une situation où la personne intoxiquée a agressé physiquement le membre de la GRC, le type d'incident ayant donc été consigné comme étant une « agression d'un policier ». Cela restreint l'utilité de ces données et empêche qu'on les utilise de façon à cerner les tendances potentielles en vue de l'évaluation des risques liés à certains types d'incidents.

Politiques de la GRC

Politique nationale sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent

En janvier 2010, la GRC a mis sur pied la base de données sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent. Le chapitre 17.8.Note de bas de page 182 du Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC définit les exigences concernant la production d'un rapport sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent. Ce rapport doit être présenté chaque fois que l'intervention d'un membre dans un incident repose entièrement ou notamment sur l'emploi :

  • d'une technique de contrôle physique modéré dont il est résulté des blessures pour le sujet, le membre ou une autre personne;
  • d'une technique de contrôle physique intense : coups, mise au sol;
  • d'une arme intermédiaire : arme à impulsions, matraque, aérosol capsiqueNote de bas de page 183 ou arme à impact à portée accrue;
  • de la technique de contrôle au cou par étranglement sanguin;
  • de munitions spéciales;
  • d'une arme à feu;
  • d'un chien policieNote de bas de page 184;
  • d'une autre arme ou technique : arme improvisée, lampe de poche, etc.

Selon la politique, un membre doit remplir le rapport (et le terminer) dans les 48 heures suivant l'incident, sauf si un superviseur approuve une prolongation dans des circonstances exceptionnellesNote de bas de page 185. Le chapitre 17.8. du Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC indique que le rapport sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent, rédigé par un membre, est le compte rendu écrit du choix d'intervention et complète les notes du membreNote de bas de page 186. Les membres sont également tenus de joindre tous les rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent terminés, ainsi que toutes les révisions ultérieures, au dossier du système de gestion des dossiers ou au dossier opérationnelNote de bas de page 187.

L'outil de présentation de rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent comprend de nombreux champs obligatoires et plusieurs zones de texte libre pour les descriptions narratives. Les membres doivent remplir les champs qui décrivent le comportement du sujet et l'ensemble des circonstances entourant un incident, selon les principes du Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents.

Conclusion no 21 : La politique nationale de la GRC établit clairement la responsabilité des membres à l'égard de la production de rapports sur les interventions où il y a eu recours à la force.

En plus de définir les paramètres pour la production des rapports par les membres, la politique nationale sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent établit le rôle des superviseurs, qui consiste notamment à mener un examen, à assurer la qualité et à signaler les « problèmes ». Un « problème », tel qu'il est défini dans la politique, « [s]'entend notamment des dérogations aux politiques, aux procédures et à la formation, des plaintes et des cas où l'opportunité de l'intervention est susceptible de nécessiter la mise à l'examen de l'incident par l'expert en matière de recours à la forceNote de bas de page 188 ».

Les superviseurs sont chargés du premier niveau d'examen. Toutefois, lors de son examen des responsabilités du superviseur dans la politique nationale, la Commission a constaté une ambiguïté quant à la façon dont les politiques nationales abordent le sujet des « problèmes ».

Premièrement, la définition des problèmes dans la politique nationale est vaste et s'étend des dérogations aux politiques, aux procédures et à la formation jusqu'à la remise en question du caractère approprié du recours à la force. Les problèmes de non-respect à l'égard du recours à la force peuvent être mineurs et traités de manière informelle par le superviseur, ou ils peuvent être graves et mener à une enquête ou même à des mesures disciplinaires. La politique nationale indique ce qui suit : « Si, au cours de son examen, il repère un problème, au sens défini au par. 2.5, il en avise le chef de service ou son remplaçant désigné [c'est nous qui soulignons]Note de bas de page 189. » Dans la pratique, cependant, il est ressorti de manière évidente des discussions avec les membres du district du Nord que les problèmes sont gérés de diverses manières selon leur gravité et qu'ils ne seraient pas tous signalés aux chefs de service.

La politique ne fournit pas aux superviseurs des directives ou des critères pour les aider à déterminer s'ils doivent signaler le problème au chef de service ou à son remplaçant désigné. En outre, la politique nationale n'exige pas des superviseurs qu'ils suivent ou enregistrent la décision de signaler un problème au chef de service ou qu'ils fassent un suivi quant à la résolution du problème. L'enquête de la Commission a en outre permis de constater l'absence de matériel de formation, de procédures ou de documents fournissant des directives aux superviseurs relativement aux seuils prévus pour ce qui est de signaler des problèmes au chef de service.

Selon le chapitre 17.8. du Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC, un superviseur est chargé de vérifier que les rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent sont complets et d'indiquer son approbation dans le dossier du système de gestion des dossiers ou le dossier opérationnel dans un délai raisonnable. Si le rapport sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent doit être modifié, les superviseurs sont tenus de consigner la justification de ces modifications dans le dossier du système de gestion des dossiers ou le dossier opérationnel. Une annexe à la politique nationale sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent souligne en outre que « [l]'approbation du rapport [sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent] signifie que celui-ci, après examen, a été jugé complet, et non que l'intervention du membre a été jugée adéquateNote de bas de page 190 ». Ainsi, puisque la politique est uniquement axée sur la responsabilité des superviseurs de veiller à ce que les rapports soient complets, la responsabilité de signaler les problèmes semble être laissée à la discrétion du superviseurNote de bas de page 191. Les membres de la GRC du district du Nord ont reconnu que la politique nationale suscite de l'incertitude en ce qui a trait au rôle du superviseur pour ce qui est de repérer et de signaler les problèmes; ils indiquent que ce rôle semble contradictoire et pourrait être interprété de différentes façons par les superviseursNote de bas de page 192.

Selon la GRC, quelques améliorations ont été apportées à la base de données sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent pour renforcer le processus d'examen et d'approbation du rapport. Ces améliorations comprennent : des notifications automatisées par courriel pour rappeler aux membres et aux superviseurs que des rapports sont en suspens ainsi que des règles administratives améliorées, des écrans flash et des avertissements pour aider les membres à remplir le rapport, tout en réduisant au minimum le risque d'erreur et de confusion. Les améliorations comprennent également une nouvelle liste de vérification pour les membres et les superviseurs leur demandant de confirmer :

  • la cohérence interne du résumé du rapport et des catégories obligatoires;
  • les délais pour l'achèvement;
  • l'inclusion de toutes les versions du rapport dans le dossier du système de gestion des dossiers ou le dossier opérationnel;
  • l'absence du nom des sujets, des victimes et des témoins;
  • la catégorisation exacte du comportement du sujet;
  • l'enregistrement des modifications du comportement du sujet et de chaque option d'intervention utilisée;
  • la description exacte de l'incident.

La Commission a constaté que la liste de vérification ci-dessus ne facilitait pas la détection ni le suivi des « problèmes ». La Commission estime que ces améliorations apportées à la base de données sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent ont peu contribué à renforcer les processus d'assurance de la qualité pour permettre à la GRC de faire le suivi des « problèmes » détectés lors de l'examen par le superviseur ou pour dégager des tendances à cet égard.

Lors des entrevues réalisées auprès de membres de la GRC du district du Nord, il est devenu évident que la structure de reddition de comptes pour les rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent ne fonctionnait pas comme prévuNote de bas de page 193. Même si la politique nationale indique que « les rapports CSIA renforcent l'obligation redditionnelle des policiers et favorisent la prestation de formations pertinentes », les membres du district du Nord ont insisté sur le fait qu'il ne s'agissait pas d'un outil de reddition de comptes, mais que son objectif principal était de recueillir des statistiques sur le recours à la forceNote de bas de page 194. Les membres ont souligné que la politique nationale n'exigeait pas des superviseurs qu'ils examinent les rapports sur le plan du caractère adéquat du recours à la force, et que les superviseurs doivent signaler les problèmes à leur chef de service seulement si une situation s'avère préoccupanteNote de bas de page 195. Les membres du district du Nord ont également fait remarquer que les superviseurs peuvent gérer certains problèmes de façon informelle, car il n'existe pas de mécanisme formel ou de démarche systématique leur permettant de consigner les problèmes ou d'en assurer le suivi, en particulier lorsqu'il s'agit de problèmes de conformité avec les politiquesNote de bas de page 196. Par le fait même, la GRC semble incapable de surveiller les problèmes liés au recours à la force à une plus grande échelle.

La Commission estime que la politique nationale de la GRC concernant les rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent, telle qu'elle figure au chapitre 17.8. du Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC, n'est pas assez claire quant à l'obligation pour les superviseurs de déceler les « problèmes » liés à la conformité avec la politique ou au caractère adéquat du recours à la force, de les signaler ou d'en faire le suivi.

Conclusion no 22 : La politique nationale de la GRC concernant les rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent ne fournit pas de directives claires aux superviseurs pour ce qui est de repérer les problèmes liés au recours à la force dans les rapports, de les signaler et d'en faire le suivi.

Recommandation no 18 : Que la GRC établisse des critères et des seuils en matière de signalement afin de faciliter la détection des « problèmes », et donne des directives claires pour ce qui est de signaler les problèmes liés au recours à la force cernés dans les rapports et d'en faire le suivi.

L'examen par la Commission de la responsabilité du superviseur a permis de déceler une autre lacune dans la base de données sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent qui entrave l'examen complet des rapports sur les interventions où il y a eu recours à la force. La base de données ne contient pas de renseignements sur les éléments suivants :

  • rétroaction du superviseur après son examen d'un rapport sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent;
  • approbation du superviseur et justification des prorogations de délai pour les rapports des membres;
  • versions précédentes des rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent avant les modifications apportées par le superviseur ou les membres;
  • renseignements sur les « problèmes » décelés dans les rapports;
  • examen des « problèmes » par un expert en matière de recours à la force.

Par conséquent, peu de renseignements, voire aucun, sont enregistrés dans la base de données sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent relativement à l'examen, à l'assurance de la qualité et à la détection de problèmes dans les rapports sur les interventions où il y a eu recours à la force. Ces renseignements sont plutôt enregistrés ailleurs, dans les dossiers opérationnels ou dans le système de gestion des dossiers de la division. Les membres du district du Nord ont confirmé qu'il faudrait faire un examen manuel des dossiers opérationnels pour voir la rétroaction des superviseurs ou savoir si un problème a été déceléNote de bas de page 197. En outre, les membres du district du Nord ont fait état de leur préoccupation concernant les versions précédentes des rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent, qui seraient perdues si les membres ne prenaient pas le soin de joindre des copies au dossier opérationnel dans PRIME-BCNote de bas de page 198. Cela limite la capacité des superviseurs d'examiner les problèmes décelés et leur résolution. Ainsi, cela réduit la valeur de la base de données comme outil de reddition de comptes interne et externe, de l'apprentissage organisationnel et des améliorations.

Les entrevues menées auprès de membres de la GRC en Colombie-Britannique et à la Direction générale ont permis de confirmer que la GRC manquait de moyens systématiques pour faire le suivi des « problèmes » décelés pendant le processus de rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent.

Conclusion no 23 : Le manque de renseignements dans la base de données sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent à l'égard de la détection et de la résolution des problèmes dans les rapports portant sur les interventions où il y a eu recours à la force réduit la valeur de la base de données en tant que mécanisme de responsabilisation.

Recommandation no 19 : Que la GRC modifie la base de données sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent ainsi que les politiques sur les rapports pour améliorer la reddition de comptes en s'assurant que les problèmes relevés au moyen du processus d'établissement de rapports peuvent faire l'objet d'une surveillance, d'un suivi et d'un examen indépendant.

Politique sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent de la GRC en Colombie-Britannique

La GRC en Colombie-Britannique a établi sa politique sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent le 2 février 2012 à titre de complément aux exigences nationales. La politique de la Division rappelle la structure d'examen et de reddition de comptes de la politique nationale, mais contient certaines différences relatives à la terminologie et aux exigences.

À titre d'exemple, la politique de la Division prévoit que, conformément à la politique nationale, les superviseurs doivent examiner chaque rapport sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent présenté par les membres sous leur commandement. Elle indique ensuite que les superviseurs sont tenus de signaler au chef de service ou à son délégué toute préoccupation concernant le recours à la forceNote de bas de page 199. Bien qu'il ne soit pas défini dans la politique de la Division, le terme « préoccupation » est interprété par les responsables de la GRC du district du Nord comme ayant la même signification que le terme « problème » dans le chapitre 17.8. du Manuel des opérations de la GRCNote de bas de page 200. Comme la Division n'utilise pas le même terme que celui utilisé dans la politique nationale, sa politique prête à interprétation par les membres et les superviseurs.

La politique de la Division établit également les postes de coordonnateurs de district sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent, qui relèvent du coordonnateur de la Division sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent et du chef de district. Les coordonnateurs de district sont tenus d'examiner tous les rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent de leur secteur de supervisionNote de bas de page 201, ce qui constitue un ajout par rapport à la politique nationale sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent, selon laquelle le coordonnateur du recours à la force ne doit examiner que les rapports visant les cas de recours à des armes à impulsions ou à des armes à feu. Le coordonnateur de district doit à la fois informer le coordonnateur de la Division des préoccupations quant au recours à la force noté dans un rapport sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent et retourner un rapport au superviseur s'il remarque des erreurs concernant la conformité ou l'achèvement du rapportNote de bas de page 202. Cela établit une mesure de reddition de comptes supplémentaire dans la structure des rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent.

Formation sur le recours à la force et sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent

Les membres de la GRC reçoivent une formation approfondie sur le recours à la force. Cette formation comprend le cadre juridique du recours à la force ainsi que l'utilisation de divers outils, méthodes d'intervention et tactiques. La Commission a examiné les documents de formation de la GRC afin de déterminer comment les membres sont formés à propos des rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent et de l'explication des interventions nécessitant le recours à la force, et pour déterminer si les documents de formation actuels sont adéquats et conformes aux politiques nationales. La Commission a également examiné plusieurs outils de travail et guides de l'utilisateur mis à la disposition des membres pour évaluer s'ils sont conformes aux politiques nationales.

Programme de formation des cadets

La formation des cadets comprend des modules qui traitent directement ou indirectement du recours à la force. Aux fins de son enquête, la Commission a examiné les modules qui décrivent les scénarios de recours à la force/du Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents et les tactiques de défense policière, ainsi que les modules qui servent d'introduction au modèle d'évaluation des risques du Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents, en plus de la politique et de la base de données sur les rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent :

  • Scénarios de recours à la force/du Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents
  • Rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent
  • Tactiques de défense policière
  • Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents – guide
  • Évaluation des risques, explication de ses actes sur le plan juridique et notes

Le Programme de formation des cadets comprend également le document « Expliquer ses actes sur le plan juridique : un guide d'introduction », qui est conçu pour aider les membres de la GRC à acquérir les compétences nécessaires pour communiquer de façon claire, concise et efficace leurs actes sous forme verbale ou écrite. Le document traite également du Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents et souligne l'importance d'inclure la perception qu'ont les membres des facteurs situationnels, du comportement du sujet et du risque. Il souligne en outre l'importance pour les membres de déterminer comment leurs propres perceptions ont influé sur leurs considérations tactiquesNote de bas de page 203.

Ces modules étaient clairs et conformes au cadre établi dans le Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents et aux exigences énoncées dans les politiques concernant les rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent, qui mettent tous l'accent sur l'importance d'expliquer ses actes sur le plan juridique pour justifier le recours à la force lors d'une intervention.

Conseils sur les descriptions narratives

Le document Conseils sur les descriptions narratives (2009) est un autre outil disponible sur la page Web interne de la GRC qui fournit des conseils aux membres sur la façon d'expliquer les interventions où il y a eu recours à la force. Ce document traite des questions relatives à l'absence d'une explication raisonnable pour le recours à la force. Il souligne que la GRC a eu des problèmes dans le passé avec des membres qui utilisaient des énoncés génériques dans leur consignation des faits, par exemple : [TRADUCTION] « Le sujet a résisté à son arrestation, et on a eu recours à la force pour le maîtriserNote de bas de page 204. » Des membres de la GRC dans le district du Nord ont indiqué que les membres sont encouragés à consulter ce document s'ils ont besoin de conseils supplémentaires concernant l'explication de leur intervention.

Le document souligne l'importance de non seulement dresser la liste de tous les éléments d'une évaluation des risques, mais aussi d'expliquer clairement ce que signifient les observations, en prenant en considération les expériences policières précédentes du membre ainsi que ses propres compétences et capacitésNote de bas de page 205. Les membres sont invités à inclure les mesures prises pour tenter de désamorcer la situation et, si ces mesures n'ont pas fonctionné, ils doivent dire [TRADUCTION] « pourquoi [le membre] a peut-être eu à intensifier son recours à la forceNote de bas de page 206 » [c'est nous qui soulignons]. Le document précise que l'explication d'un membre quant au recours à la force doit être suffisamment claire pour permettre à d'autres personnes de lire et de comprendre les événements et les mesures prises.

La Commission a conclu que ce document était mis à la disposition des membres en tant que rappel en langage clair des aspects importants d'une description narrative complète, et que la base de données sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent dirigeait également les membres vers le guide.

Formation à l'intention des superviseurs sur l'examen du comportement du sujet et de l'intervention de l'agent

Le Programme national sur le recours à la force de la GRC a lancé la formation des examinateurs sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent en 2011Note de bas de page 207. Cette formation a été donnée aux superviseurs du district du Nord le 8 juin 2011Note de bas de page 208 pour expliquer les changements à venir dans la politique sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent et les améliorations apportées à la base de donnéesNote de bas de page 209, ainsi que pour donner plus de conseils aux superviseurs sur les processus d'examen et d'assurance de la qualitéNote de bas de page 210.

Le cours a fourni un cadre aux superviseurs pour les aider à faire en sorte que les rapports soient complets, conformément aux exigences de la politique. Il soulignait l'importance pour les superviseurs de consigner leur examen dans le dossier du système de gestion des dossiers ou le dossier opérationnel, y compris les modifications nécessaires, et pour les membres de joindre chaque version d'un rapport sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent au dossier opérationnel. La formation mettait en évidence le fait que tous les rapports sont susceptibles d'être divulgués, et que les membres peuvent être tenus de justifier devant le tribunal toute modification apportée au rapport original. La formation indiquait également que les coordonnateurs d'unité ont la responsabilité de veiller à ce que les superviseurs consignent bien leurs examens dans les dossiers opérationnels.

Même si la version mise à jour du module de formation sur l'examen du comportement du sujet et l'intervention de l'agent élaborée en avril 2012 donnait un aperçu général des « problèmes » et de la structure de signalement connexe, comme cela est indiqué dans la politique, elle ne fournissait toutefois pas de conseils, d'exemples ou de seuils aux superviseurs sur la détection des « problèmes » dans les rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent. La formation ne fournissait pas non plus de renseignements sur les politiques, les procédures ou les éléments de formation en fonction desquels les superviseurs devaient évaluer la conformité dans le processus de détection des « problèmes »Note de bas de page 211.

Conclusion no 24 : La formation à l'intention des superviseurs n'éclaire pas davantage la politique nationale relativement à la détection des problèmes dans les rapports sur le recours à la force.

Recommandation no 20 : Que la GRC modifie la formation à l'intention des superviseurs afin de fournir des conseils pour ce qui est de repérer et de signaler les problèmes dans les rapports sur le recours à la force.

Comportement du sujet et intervention de l'agent – Guide de l'utilisateur, version 2.0

Après les modifications apportées à la politique nationale sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent en août 2011, la GRC a publié le document Comportement du sujet et intervention de l'agent – Guide de l'utilisateur, version 2.0 (de la base de données sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent) en avril 2012. Ce guide de l'utilisateur réitère l'objectif et les avantages des rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent. De plus, il donne des directives étape par étape aux membres, aux superviseurs et aux responsables de l'examen des rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent relativement à la façon de remplir les champs obligatoires et les descriptions et d'examiner les données une fois le rapport terminéNote de bas de page 212. Selon le guide de l'utilisateur, le résumé en ligne du rapport sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent met en garde les membres contre l'utilisation du nom des sujets dans le résumé, et contient le message suivant à l'intention des membres une fois le rapport terminé :

L'articulation juridique est la capacité de relater les événements qui se sont produits, en établissant continuellement un rapport avec le Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents (MIGI), les critères énoncés dans les politiques et procédures de la GRC et le Code criminel. Au moment de rédiger votre explication, assurez-vous de noter toute l'information requise pour bien décrire l'incidentNote de bas de page 213.

Selon le guide de l'utilisateur, les membres doivent aussi confirmer plusieurs exigences liées à la politique avant de remplir le rapport sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent. Ces exigences comprennent, entre autres, la confirmation que les principes appropriés ont été appliqués dans l'explication du recours à la force, et que le nom d'aucun sujet, victime ou témoin n'a été mentionnéNote de bas de page 214.

Les superviseurs responsables de l'examen des rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent doivent également confirmer que les exigences précitées ont été respectées avant que ne soient approuvés les rapports sur le plan de l'exhaustivité.

Dans l'ensemble, la Commission a constaté que ce guide était bien expliqué et utile pour soutenir la mise en œuvre de la base de données sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent, version 2.0. Il soulignait avec justesse les principaux changements apportés à la base de données pour améliorer l'assurance de la qualité concernant l'exhaustivité des rapports.

Cours annuel sur le Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents

Selon le Centre de formation de la région du Pacifique de la GRC, tous les membres réguliers de la GRC et les personnes ayant le statut d'agent de la paix de la GRCNote de bas de page 215 doivent renouveler chaque année leur accréditation en ce qui concerne le Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents. La formation pour le renouvellement de l'accréditation est un cours d'une durée de quatre heuresNote de bas de page 216.

L'objectif du cours est de veiller à ce que tous les participants soient en mesure de faire ce qui suit : [TRADUCTION] « Expliquer l'intervention appropriée pour un incident selon un scénario réaliste en appliquant les principes et la terminologie du Modèle d'intervention pour la gestion d'incidentsNote de bas de page 217. » Le cours comprend un examen du Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents et une discussion à ce sujet, ainsi qu'une description complète du modèle et de l'évaluation des risques. À la fin du cours, les membres sont évalués en fonction de leur capacité de donner une explication à la fois verbalement et par écrit.

La Commission a examiné plusieurs versions du cours annuel sur le Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents. La toute dernière révision date de la fin de 2014Note de bas de page 218. La GRC a indiqué que le nouveau matériel du cours n'utilise plus les évaluations de type « texte à trous » pour les descriptions par écrit, comme c'était le cas dans les versions précédentes, et que les membres doivent maintenant regarder des vidéos de scénarios et remplir un rapport complet sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agentNote de bas de page 219. Après avoir examiné le nouveau matériel de cours, la Commission a convenu que le format révisé de l'évaluation du cours était approprié pour évaluer la capacité d'un membre de rédiger une description détaillée dans le rapport sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent.

L'examen de la Commission a montré que tout le matériel de formation fournit des directives uniformes aux membres de la GRC, en insistant sur l'importance d'une explication juridique adéquate au dossier, et sur l'importance d'utiliser l'évaluation des risques du Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents comme guide, mais d'expliquer leurs actes selon leur propre point de vue. Le matériel donne aussi des directives précises aux membres et aux superviseurs sur la bonne façon de remplir les rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent pour veiller à ce qu'ils relèvent les renseignements essentiels concernant un incident où il y a eu recours à la force.

Conclusion no 25 : Le matériel de formation et les guides de l'utilisateur liés au Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents et aux rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent sont conformes aux politiques nationales et énoncent de façon complète les attentes quant à l'explication des interventions où il y a eu recours à la force.

Conclusion

À la suite de son examen des politiques de la GRC sur le recours à la force, la Commission a constaté que la responsabilité des membres à l'égard de la production de rapports sur les interventions où il y a recours à la force est clairement établie. Les politiques établissent des attentes et des normes claires sur la tenue de dossiers et en ce qui a trait à l'explication des interventions dans le cadre desquelles on a eu recours à la force à l'égard d'une personne. Dans la pratique, toutefois, la Commission a relevé des lacunes importantes chez les membres de la GRC du district du Nord de la Colombie-Britannique en ce qui touche le respect de ces politiques. Bien qu'il y ait eu des améliorations depuis la mise en œuvre du système d'établissement de rapports, plus d'un tiers des rapports transmis en 2012 se sont avérés inadéquats selon les normes de la politique à cet égard.

De plus, les enquêteurs ont constaté que la politique nationale et la politique divisionnaire de la Colombie-Britannique étaient imprécises en ce qui concerne les directives fournies aux superviseurs relativement aux critères et aux seuils permettant de relever et de signaler les problèmes constatés dans ces rapports ainsi que d'assurer un suivi des problèmes signalés et de leurs solutions.

Par la mise en œuvre du système de données sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent, la GRC reconnaît l'importance d'une tenue de dossier complète et d'une gestion des renseignements adéquate dans les scénarios prévoyant le recours à la forceNote de bas de page 220. La base de données sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent ne contient que peu ou pas de renseignements sur l'examen des rapports par le superviseur ou des interventions par des experts en matière de recours à la force lorsque des problèmes ayant trait au recours à la force ont été relevés. Ainsi, la Commission n'a pas été en mesure d'évaluer de façon adéquate le rôle des superviseurs dans le maintien ou l'amélioration de la qualité de l'explication relativement aux interventions où il y a eu recours à la force. La Commission a également remarqué que la base de données n'est pas bien configurée ou utilisée sur le plan de la responsabilité en matière de recours à la force, ce qui fait qu'elle n'apporte pas un soutien adéquat aux examens indépendants des interventions où il y a eu recours à la force et aux questions connexes.

L'impossibilité de se fier à la base de données pour examiner les rapports et faire le suivi de la détection et de la résolution des problèmes dans les interventions où il y a eu recours à la force réduit la valeur de la base de données relativement à son usage prévu à titre de mécanisme de responsabilisation. Même si la Commission n'a pu examiner le rôle des examens par les superviseurs dans la détermination des problèmes, le nombre élevé de rapports qui, après examen, ne respectaient pas les normes prévues par les politiques donne à penser qu'il existe de graves lacunes au chapitre de la qualité des examens par les superviseurs.

Les agents de police doivent régulièrement rendre compte de leurs actes. Ce faisant, ils contribuent à la confiance que le public porte aux services de police. Cela est particulièrement important dans le cadre des incidents où il y a recours à la force, lesquels peuvent rapidement miner la confiance du public – comme cela a été observé récemment aux États-Unis. La mise en œuvre et l'application adéquate d'un système approprié de suivi et d'examen des mesures prises par les agents de police dans le cadre d'incidents où il y a recours à la force peuvent favoriser cette confiance.

Violence familiale

Contexte

La violence au foyer et la violence familiale sont des termes utilisés pour représenter de nombreuses formes distinctes de violence physique et de violence émotive, ainsi que la négligence par des membres de la famille ou un partenaire intime. La violence familiale se produit dans diverses relations et situations, et comprend la violence commise par un partenaire intime, la violence et la négligence envers les enfants, la violence envers les personnes âgées, les crimes d'honneur et les mariages forcésNote de bas de page 221. Aux fins du présent examen et à la suite des préoccupations soulevées par des organisations de défense des droits de la personne et des libertés civiles, la Commission a porté son attention exclusivement sur la violence commise par les partenaires intimes ou celle commise dans le cadre d'une relation. La violence commise dans le cadre d'une relation est caractérisée par de la violence ou des mauvais traitements dans le cadre d'un mariage, d'une union de fait ou de fréquentations, dans une relation hétérosexuelle ou homosexuelle, à n'importe quel moment pendant une relation, notamment pendant l'étape de la rupture ou après que la relation a pris finNote de bas de page 222. La GRC utilise l'expression « violence dans les relations » dans ses politiques et procédures; par conséquent, il s'agira de l'expression principalement utilisée dans tout le présent rapport.

Le Code criminel ne prévoit pas d'infraction de violence familiale en particulier. Les agents de police doivent plutôt examiner de nombreuses dispositions du Code criminel. Dans le cas d'une intervention à la suite d'un incident accompagné de violence dans les relations (violence physique ou sexuelle), l'infraction est généralement prévue par les dispositions du Code criminel ayant trait aux voies de fait, à l'enlèvement, à la séquestration ou à l'agression sexuelle. S'il s'agit d'une violence psychologique ou émotive dans le cadre d'une relation intime, les infractions de harcèlement criminel, de menaces ou de méfait peuvent s'appliquer. Le Code criminel comporte également un certain nombre de dispositions, par exemple des engagements de ne pas troubler l'ordre public et des conditions de mise en liberté, qui visent à accroître la sécurité des victimes de violence dans les relations et celle de leurs enfants par l'établissement de certaines conditions que doit respecter la personne accusée (p. ex. aucune communication avec la victime)Note de bas de page 223.

Les gouvernements provinciaux et territoriaux peuvent légiférer sur leur propre territoire pour ajouter un complément aux mécanismes de protection qu'offre le Code criminel de façon à fournir d'autres mesures de protection aux victimes de violence familiale. Par exemple, en Colombie-Britannique, la Family Law Act prévoit des ordonnances de protection en cas de violence familialeNote de bas de page 224.

Au moment d'intervenir à la suite d'un incident accompagné de violence dans les relations, la GRC est chargée de rétablir l'ordre, de protéger les victimes, d'enquêter et de recueillir des éléments de preuve. Cela pourrait comprendre l'arrestation ou la détention de la personne accusée de violence ou de mauvais traitement et pourrait entraîner une recommandation ou le dépôt d'accusations criminellesNote de bas de page 225. En plus de veiller à l'application du Code criminel, la GRC s'efforce également de lutter contre la violence dans les relations en faisant ce qui suit :

  • sensibiliser le public aux facteurs de risque;
  • organiser des ateliers communautaires sur les questions touchant les victimes, les agressions sexuelles et la violence dans les relations, ou collaborer à l'organisation de tels ateliers;
  • aider les collectivités à aborder la violence familiale dans une optique de résolution de problèmes;
  • offrir de la formation sur la violence familiale à ses membres, aux coordonnateurs de services aux victimes et aux bénévoles communautairesNote de bas de page 226.

Des organisations de défense des droits de la personne et des libertés civiles ont soulevé des préoccupations quant au traitement par la GRC des incidents de violence dans les relations dans le nord de la Colombie-Britannique, allant du défaut de mener des enquêtes approfondies et d'appliquer de manière uniforme les politiques en matière de violence dans les relations, en passant par l'absence d'évaluations du risque, notamment le fait de ne pas identifier les agresseurs principaux, et l'arrestation abusive de femmes agissant en état de légitime défenseNote de bas de page 227.

Rapports d'incident de la GRC

Du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2012, le district du Nord de la GRC a reçu 796 200 demandes d'interventionNote de bas de page 228. Sur ce total, 8 846 avaient trait à un incident de violence dans les relations, ce qui représentait environ 1,1 % du nombre total de demandes d'intervention dans le district du Nord au cours de cette périodeNote de bas de page 229.

La Commission a examiné un échantillon de rapports d'incident rédigés à la suite d'incidents de violence dans les relations datant de 2011 et de 2012 dans le district du Nord de la Colombie-Britannique de la GRCNote de bas de page 230. Étant donné l'importance attribuée à l'examen par le superviseur dans les politiques nationales et divisionnaires, l'examen visait à déterminer si les superviseurs de la GRC avaient utilisé le document sur le contrôle de l'assurance de la qualité par le superviseur dans les cas de violence familiale pendant le quart de travail où le dossier avait été reçu, comme l'exigeait la politique de la Division à cette époque-làNote de bas de page 231.

Le document sur le contrôle de l'assurance de la qualité par le superviseur dans les cas de violence familiale est un formulaire obligatoire qui doit être rempli dans le cadre de toutes les enquêtes sur la violence dans les relations. Le modèle en question exige des superviseurs qu'ils répondent à huit questions pour veiller à ce que des mesures d'enquête appropriées aient été prises conformément aux politiques. Ces questions visent à déterminer si un plan de sécurité a été établi; si des recherches dans les fichiers ont été effectuées; si, lorsque des enfants sont touchés, on a communiqué avec le ministère du Développement de l'enfance et de la famille; si une demande d'aiguillage vers les Services aux victimes a été présentée; si une analyse concernant l'agresseur principal a été réalisée; si on a recommandé des arrestations ou des mises en accusation doubles; et si des mesures de suivi ont été assignées.

Dans le cadre de son examen, la Commission a constaté que, sur 599 rapports d'incident examinés, 65,4 % (n = 392) comprenaient le document obligatoire sur le contrôle de l'assurance de la qualité par le superviseur dans les cas de violence familiale, conformément aux politiques. La Commission a relevé une amélioration à cet égard : en 2011, 59,8 % des rapports d'incident comprenaient le document, tandis qu'en 2012, cette proportion a augmenté, passant à 70,8 % des rapports.

Pie chart of Domestic  Violence Supervisor Quality Assurance template

Conclusion no 26 : L'examen de la Commission a permis de constater que 34,6 % des rapports ne comprenaient pas le document obligatoire sur le contrôle de l'assurance de la qualité par le superviseur dans les cas de violence familiale.

La Commission a aussi examiné la rapidité avec laquelle l'examen par le superviseur a été effectué à l'aide d'une comparaison de la date des rapports d'incident avec la date à laquelle le document sur le contrôle de l'assurance de la qualité par le superviseur dans les cas de violence familiale a été rempli. Sur les 392 rapports d'incident qui comprenaient le document sur le contrôle de l'assurance de la qualité par le superviseur dans les cas de violence familiale, 12 ne comportaient pas la date à laquelle le superviseur avait rempli le document ou contenait une date inexacte (c.-à-d. que la date inscrite sur le document était antérieure à la date de l'incident signalé); par conséquent, ces rapports ont été exclus de l'examen.

Sur les 380 autres rapports d'incident, le document sur le contrôle de l'assurance de la qualité par le superviseur dans les cas de violence familiale avait été rempli dans les trois jours suivant la date du rapport d'incident dans une proportion de 46,3 % (n = 176); de 4 à 7 jours suivant la date du rapport d'incident dans une proportion de 10,3 % (n = 39); de 8 à 14 jours après la date du rapport d'incident dans une proportion de 10,8 % (n = 41); et plus de 14 jours suivant la date du rapport d'incident dans une proportion de 32,6 % (n = 124). En outre, sur les documents sur le contrôle de l'assurance de la qualité par le superviseur dans les cas de violence familiale ayant été remplis plus de 14 jours (n = 124) suivant la date du rapport d'incident, 58 % (n = 72) d'entre eux l'avaient été plus de 31 jours suivant la date du rapport d'incident.

Graph of Timelines for Supervisory Review

Conclusion no 27 : Bien que la politique divisionnaire prévoie que le document sur le contrôle de l'assurance de la qualité par le superviseur dans les cas de violence familiale doit être rempli pendant le quart de travail où le dossier a été reçu, moins de la moitié des documents examinés (46,3 %) ont été remplis dans les trois jours suivant la date du rapport d'incident.

Pour veiller à la conformité avec les politiques et pour respecter les obligations redditionnelles, une supervision efficace est nécessaire. Pendant une entrevue avec des enquêteurs de la Commission, des sous-officiers ayant un rôle de consultation dans le district du Nord ont confirmé que la supervision inconstante des dossiers de violence dans les relations était une source de préoccupation. Le manque de constance au chapitre de la supervision a été attribué en partie aux nombreux postes de supervision vacants ainsi qu'à la difficile courbe d'apprentissage à laquelle font face bon nombre de nouveaux superviseurs dans le district du NordNote de bas de page 232.

Reddition de comptes à l'interne

Les enquêtes de la GRC sur la violence dans les relations peuvent faire l'objet de plusieurs niveaux de mécanismes internes d'assurance de la qualité, à commencer par un examen du superviseur de chaque dossier opérationnel, ce qui, dans certains détachements, est accompagné d'un examen effectué par le Groupe de la violence familiale. Les détachements de la GRC en Colombie-Britannique doivent également effectuer des examens de l'assurance de la qualité au sein des services et peuvent faire l'objet d'examens par la direction et d'examens réalisés par des responsables de district. Il existe des guides portant précisément sur l'examen d'aspects du maintien de l'ordre, comme la violence dans les relations, les arrestations et les procédures de mise en liberté, la tenue du calepin de l'enquêteur, la qualité des enquêtes et la supervision opérationnelle. Pendant les examens, des exemples de dossier sont analysés pour que l'on puisse vérifier si les lois, les politiques et les procédures applicables ont été suiviesNote de bas de page 233.

La Commission a examiné le Guide sur l'assurance de la qualité au sein d'un service et sur l'examen de gestion pour les enquêtes sur la violence dans les relations. D'après le Guide, l'examen vise à déterminer si toutes les principales exigences prévues par les politiques ont été respectées, notamment si le membre de la GRC a aiguillé la victime vers les Services aux victimes et l'a encouragée à accepter leur soutien; si un plan de sécurité a été créé; si une analyse de l'agresseur principal a été réalisée; si l'enquête a été jugée comme présentant « le risque le plus élevé », si une évaluation des risques (B-SAFER) a été menée; si le cas a été désigné comme présentant « le risque le plus élevé », si l'information voulue a été communiquée aux partenaires du système de justice et des services de soins aux enfants; pour les cas désignés comme présentant « le risque le plus élevé », si le suspect a fait l'objet d'une surveillance afin que l'on puisse s'assurer que les conditions imposées ont été respectées; et si le membre de la GRC a rempli le document Domestic Violence Risk Summary à la première occasion après l'admission du suspect et l'a joint à la demande adressée à l'avocat de la Couronne. Au chapitre de la supervision, le « Guide d'examen sur la violence dans les relations » permet de déterminer si le superviseur a utilisé le document Domestic Violence Supervisor's Checklist pendant le quart de travail où la plainte a été reçue et s'il en a été avisé à la première occasion et a été consulté lorsque des mises en accusation doubles ont été recommandéesNote de bas de page 234.

La Commission a examiné tous les examens de la direction effectués dans le district du Nord du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2012. Pendant cette période, 19 examens de la direction ont été effectués, et tous, sauf un, portaient sur des enquêtes sur la violence dans les relations. Dans 12 des 18 examens de la direction (67 %) portant sur des enquêtes sur la violence dans les relations, un manque de cohérence au chapitre de la supervision a été relevéNote de bas de page 235. Les constatations et les observations ayant trait à la supervision comprenaient les suivantes :

  • les formulaires permettant de consigner l'orientation et les directives du superviseur ne sont pas entièrement remplis ou sont d'une qualité insuffisante;
  • la qualité des enquêtes sur la violence dans les relations a nettement augmenté après la dotation des postes de supervision et de tous les postes de gendarme;
  • les superviseurs doivent examiner rapidement les dossiers;
  • les lacunes au chapitre de la consignation des commentaires des superviseurs à l'intention des enquêteurs sont à l'origine du manque d'uniformité dans les dossiers sur la violence dans les relations.

Ces résultats sont conformes à l'analyse des rapports d'incident effectuée par la Commission, laquelle a permis de cerner des problèmes découlant du fait que des superviseurs ne remplissent pas le document obligatoire sur le contrôle de l'assurance de la qualité par le superviseur dans les cas de violence familiale ni ne le font en temps opportun. La Commission a également remarqué plusieurs incohérences touchant la manière dont le formulaire est rempli (p. ex., bien que le formulaire exige expressément une réponse « Oui » ou « Non » à toutes les questions, certains formulaires comportaient des « X » et de nombreux champs laissés vides, rendant ainsi impossible l'évaluation de ces dossiers).

Parmi les autres observations formulées dans les examens de la direction pour le district du Nord, mentionnons des mesures d'enquête qui n'ont pas été prises ou des documents manquants, le non-respect d'échéances et le défaut d'aiguiller les victimes vers les Services aux victimes. À l'intention des détachements, des recommandations ont été formulées et des plans d'action, élaborés, pour combler les lacunes décelées pendant le processus d'examen de la direction. Les enquêteurs ont constaté que les plans d'action avaient fait l'objet d'un suivi et que des mesures avaient été prises pour régler les aspects problématiques; toutefois, aucun suivi de l'examen de la direction n'a été effectué pour l'un ou l'autre des détachements du district du Nord au cours de la période de cinq ans (de 2008 à 2012) à l'étude.

Au cours d'une entrevue réalisée avec des enquêteurs de la Commission, des sous-officiers jouant un rôle de consultation dans le district du Nord ont dit que, en 2012, une équipe composée de sous-officiers était allée dans des détachements du district du Nord pour offrir une formation en classe visant à combler les lacunes qui avaient été relevées dans le cadre d'examens de la direction récents, notamment au chapitre des enquêtes sur la violence dans les relations et, en particulier, de la supervisionNote de bas de page 236.

Recommandation no 21 : Que la GRC veille à ce que les examens de l'assurance de la qualité au sein des services et les examens par la direction menés chaque année comprennent toujours un examen des enquêtes sur la violence dans les relations.

Politiques de la GRC

Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC – Violence dans les relations

La politique nationale de la GRC relative aux incidents accompagnés de violence dans les relations est énoncée dans le chapitre 2.4. « Violence dans les relations » du Manuel des opérations de la Direction générale de la GRCNote de bas de page 237. La Commission a examiné la version la plus récente de la politique au moment de la rédaction du présent rapport, c'est-à-dire la version du 13 février 2013.

Selon la politique nationale, les membres de la GRC doivent enquêter sur toutes les plaintes de violence dans les relations et enregistrer tous les renseignements à ce sujet. Bien que les membres de la GRC aient toujours un pouvoir discrétionnaire dans les cas de violence dans les relations, la portée de ce pouvoir est très restreinte. Les enquêtes sur la violence dans les relations doivent être traitées en priorité, et les membres de la GRC ont le devoir de déposer des accusations ou de les recommander s'il y a infraction prévue au Code criminel. De plus, on s'attend à ce que les superviseurs examinent attentivement et activement toutes les plaintes de violence dans les relations, pour s'assurer que toutes les procédures d'enquête sont menées. Les chefs de commandement sont chargés de veiller à ce que toutes les plaintes de violence dans les relations fassent l'objet d'une enquête et d'une supervision et que les mesures voulues soient prises.

La politique nationale en ce qui a trait aux incidents accompagnés de violence dans les relations démontre à quel point les allégations sont prises au sérieux, et souligne l'importance de la prévention, des efforts en matière d'application de la loi, de la sécurité des victimes et de la sécurité publique. Bien que la Commission soit d'avis que la politique nationale donne généralement des directives claires aux membres de la GRC et garantit un contrôle approprié de l'assurance de la qualité et de la reddition de comptes, la Commission a néanmoins relevé des problèmes mineurs, desquels découlent les constatations et les recommandations suivantes.

Chapitre 2.4. « Violence dans les relations », article 1. « Généralités »

L'article 1. fournit aux membres de la GRC une orientation et des directives générales. Il met en lumière la nature grave et souvent imprévisible des cas de violence dans les relations, il donne des exemples des types de violence, et il rappelle aux membres de faire preuve de prudence, d'envisager toutes les options au moment de déterminer les lignes de conduite à suivre et l'obligation d'enquêter sur toutes les plaintes de violence dans les relations et de consigner l'information à ce sujet.

L'article 1.6.1. prévoit ce qui suit : « Il incombe à la police de déposer ou de recommander des accusations lorsqu'une infraction au C. cr. [Code criminel] a été commise en vertu d'une loi provinciale ou territoriale. » Tel que libellé, cet article associe par erreur les pouvoirs découlant du Code criminel, loi fédérale, avec ceux découlant d'une loi provinciale ou territoriale. La politique devrait être corrigée afin de préciser qu'il incombe aux agents de police de déposer ou de recommander des accusations lorsqu'une infraction au Code criminel ou une infraction prévue par toute autre loi fédérale ou une loi provinciale ou territoriale a été commiseNote de bas de page 238.

Conclusion no 28 : L'article 1.6.1. de la politique nationale sur la violence dans les relations ne distingue pas clairement les infractions au Code criminel et celles prévues par une autre loi fédérale ou une loi provinciale ou territoriale.

Recommandation no 22 : Que la GRC modifie l'article 1.6.1. du chapitre 2.4. du Manuel des opérations de la Direction générale pour distinguer correctement les infractions au Code criminel et celles prévues par les lois provinciales ou territoriales.

Chapitre 2.4. « Violence dans les relations », article 2. « Membre »

L'article 2. de la politique nationale précise les responsabilités des membres de la GRC et les procédures à suivre au moment d'une intervention à la suite d'un incident accompagné de violence dans les relations. L'accent est mis sur la sécurité des membres de la GRC et sur le fait que ces derniers doivent tenir compte de toutes les circonstances au moment de déterminer la ligne de conduite à suivre. Par exemple, l'article fournit aux membres de la GRC une orientation détaillée concernant les responsabilités à l'égard de la protection des victimes et du bien-être des enfants, ainsi que des directives relatives aux ordonnances d'interdiction d'armes à feu, aux engagements de ne pas troubler la paix et aux conditions de mise en liberté judiciaires.

La disposition 2.2.4. est ainsi rédigée : « dans la mesure du possible, obtenir des déclarations de la victime et des témoins » [c'est nous qui soulignons]. Cette disposition ne semble pas suffisamment rigoureuse compte tenu de la priorité accordée aux incidents de violence dans les relations et à l'article 1.5. de la politique, qui prévoit que « [t]oute plainte de violence dans les relations doit faire l'objet d'une enquête et doit être documentée ». Les déclarations de la victime et des témoins contribuent à ce que les enquêtes soient bien documentées et permettent de s'assurer que l'information pertinente sera disponible pour appuyer les évaluations du risque au cours de toute interaction ultérieure avec les personnes concernées. Le fait de renforcer l'obligation d'obtenir des déclarations de la victime et des témoins dans toutes les enquêtes sur des cas de violence dans les relations, sauf en cas d'urgence, et d'exiger des membres de la GRC qui n'obtiennent pas les déclarations de la victime et des témoins qu'ils consignent les raisons pour lesquelles ils ne les ont pas obtenues permettrait d'améliorer la reddition de comptes et pourrait contribuer à atténuer les préoccupations soulevées par des organisations de défense des droits de la personne et des libertés civiles quant à l'absence d'enquêtes approfondies menées par la GRC.

Conclusion no 29 : L'article 2.2.4. de la politique nationale sur la violence dans les relations, qui exige des membres de la GRC qu'ils obtiennent les déclarations de la victime et des témoins dans la mesure du possible, semble ne pas être suffisamment rigoureux compte tenu de l'exigence prévue par la politique selon laquelle toute plainte de violence dans les relations doit faire l'objet d'une enquête et être documentée.

Recommandation no 23 : Que la GRC modifie l'article 2.2.4. du chapitre 2.4. du Manuel des opérations de la Direction générale pour améliorer la reddition de comptes en exigeant des membres de la GRC qui n'obtiennent pas les déclarations de la victime et des témoins qu'ils consignent les raisons pour lesquelles ils ne les ont pas obtenues.

L'article 2.2.7. est libellé ainsi :

Déterminer si la personne a légalement accès à des armes à feu ou à d'autres armes lorsqu'on a des motifs raisonnables de croire qu'il n'est pas souhaitable pour la sécurité du public, ni celle de la personne, de lui laisser ces objets. S'il y a lieu, saisir les armes à feu et autres objets contrôlés, conformément au paragraphe 117.04(1) du C. cr. (avec un mandat) ou au paragraphe 117.04(2) du C. cr. (sans mandat lorsque l'urgence de la situation l'exige). 

Cet article ne reflète pas adéquatement la loi telle que précisée à l'article 117.04 du Code criminel. L'article 117.04 prévoit que l'agent de la paix peut perquisitionner et saisir « [...] les armes, dispositifs prohibés, munitions, munitions prohibées ou substances explosives en la possession de telle personne [...], s'il est convaincu […] que cette personne est en possession de tels objets [...] et que cela n'est pas souhaitable pour sa sécurité ou celle d'autrui » [c'est nous qui soulignons]. L'agent de paix doit donc avoir des motifs raisonnables de croire qu'il n'est pas souhaitable pour la sécurité de la personne d'être en possession de l'arme ou des munitions. Cette exigence prévue par la loi est absente dans l'article 2.2.7.

En outre, la politique nationale mentionne le fait que la personne « a légalement accès » à des armes, à la différence du fait d'être « en possession » d'armes ou de munitions. Le pouvoir de saisie prévu à l'article 117.04 du Code criminel s'applique « aux armes » ou aux munitions en la possession d'une telle personne. L'expression « a légalement accès » à une arme pourrait sous-entendre une portée plus large. Tel que libellé, l'article 2.2.7. est imprécis et devrait être modifié pour correspondre davantage aux dispositions applicables du Code criminelNote de bas de page 239.

Conclusion no 30 : L'article 2.2.7. de la politique nationale sur la violence dans les relations est imprécis et ne reflète pas adéquatement les dispositions du Code criminel sur les perquisitions et les saisies.

Recommandation no 24 : Que la GRC modifie l'article 2.2.7. du chapitre 2.4. du Manuel des opérations de la Direction générale pour qu'il soit conforme aux dispositions sur les perquisitions et les saisies prévues à l'article 117.04 du Code criminel.

Chapitre 2.4. « Violence dans les relations », article 3. « Superviseur » et article 4. « Chef »

Les articles 3. et 4. de la politique nationale concernent les rôles et responsabilités des superviseurs et des chefs.

Selon la politique nationale, les superviseurs doivent examiner attentivement et activement toutes les plaintes de violence dans les relations en veillant à ce que toutes les méthodes d'enquête soient appliquées. L'article 3. de la politique prévoit des échéances précises concernant l'examen par le superviseur des enquêtes sur des cas de violence dans les relations, c'est-à-dire après les 24 premières heures, puis, de nouveau, après 7 jours et après 14 jours. Les superviseurs sont chargés de recommander ou d'approuver le dépôt d'accusations, et, si le dépôt d'accusations n'a pas été recommandé ou approuvé, ils doivent le consigner par écrit. Ils sont également tenus de s'assurer que tous les membres sous leur commandement connaissent bien la politique nationale de la GRC relative à la violence dans les relations ainsi que les lois et les directives provinciales et territoriales pertinentes.

Selon l'article 4. de la politique nationale, les chefs doivent veiller à ce que toute plainte de violence dans les relations fasse l'objet d'une enquête, à ce que l'enquête soit supervisée et à ce que les mesures nécessaires soient prises. Les chefs ont également comme instruction de « [p]articiper aux initiatives ou aux programmes communautaires conjoints afin de réduire la violence dans les relations et de sensibiliser davantage le public à ce problèmeNote de bas de page 240 ».

Manuel des opérations de la Division « E » (Colombie-Britannique) de la GRC – Violence dans les relations

La politique de la Division de la GRC en Colombie-Britannique ayant trait à la violence dans les relations est contenue dans le chapitre 2.4. « Violence dans les relations » du Manuel des opérations de la Division « E »Note de bas de page 241. La Commission a examiné la version la plus récente de la politique au moment de la rédaction du présent rapport, soit celle datée du 17 décembre 2013. La politique divisionnaire s'appuie sur la politique nationale en matière de violence dans les relations et fournit aux membres de la GRC des directives et une orientation supplémentaires sur tous les aspects des interventions policières et des enquêtes à la suite d'incidents de violence dans les relations.

La politique divisionnaire comporte 14 articles distincts portant notamment sur des références et des liens relatifs à des politiques générales, la politique provinciale de la Colombie-Britannique sur la violence faite aux femmes dans les relations, le rôle des opérateurs de station de transmissions opérationnelles, des membres de la GRC, des superviseurs et des chefs, de même que d'autres aspects comme la formation, les engagements de ne pas troubler la paix, les ordonnances des tribunaux et la Family Law Act.

En Colombie-Britannique, le gouvernement provincial a élaboré une politique sur la violence faite aux femmes dans les relations, laquelle a permis d'établir des protocoles, des rôles, des responsabilités et des lignes directrices en vue d'une réponse coordonnée multi-organismes et intégrée des responsables du système de justice et des fournisseurs de services de protection de l'enfance qui participent aux interventions en cas de violence familiale. La politique provinciale précise que les services de police assument certains rôles définis et doivent veiller à ce que les politiques opérationnelles soient conformes à ces lignes directricesNote de bas de page 242.

La Commission a examiné la politique divisionnaire et l'ensemble des procédures connexes. Même si elle estime que la politique divisionnaire est conforme à la politique nationale, qu'elle est généralement conforme à la politique provinciale et qu'elle assure le contrôle de la qualité et une reddition de comptes adéquats relativement aux enquêtes sur les cas de violence dans les relations, la Commission a néanmoins relevé des problèmes mineurs. Voici un résumé des dispositions sur lesquelles s'appuient les constatations et les recommandations de la Commission.

Chapitre 2.4. « Violence dans les relations », article 5. « Agresseur principal » et article 6. « Recommandation visant une arrestation/mise en accusation double »

L'article 5. de la politique divisionnaire présente des considérations générales au sujet de l'identification des principaux agresseurs dans les enquêtes sur les cas de violence dans les relations. L'obligation qu'ont les membres de la GRC de réaliser une analyse de l'agresseur principal est mentionnée à l'article 4.1. de l'annexe 2-4-3 (Méthode d'enquête)Note de bas de page 243.

L'expression « agresseur principal » est définie comme étant la partie qui exerce la plus grande domination, plutôt que le premier agresseurNote de bas de page 244. Le concept d'« agresseur principal » est tiré de la politique provinciale sur la violence faite aux femmes dans les relations et a été élaboré pour régler la difficulté que posent les situations d'agression mutuelle ou celles dans lesquelles une personne a réagi en état de légitime défenseNote de bas de page 245.

L'article 6. indique que les membres de la GRC ne doivent arrêter les deux parties que dans de rares occasions et exige en particulier que les superviseurs soient informés dès que possible des situations d'arrestation double et soient consultés pour toute recommandation de mise en accusation double.

L'obligation d'informer et de consulter les superviseurs dans les cas d'arrestation double constitue un mécanisme important d'assurance de la qualité qui pourrait atténuer les préoccupations soulevées par des organisations de défense des droits de la personne et des libertés civiles quant au fait que la GRC n'a pas déterminé les agresseurs principaux et a procédé à l'arrestation abusive de personnes en état de légitime défense.

Chapitre 2.4. « Violence dans les relations », article 8. « Membre »

L'article 8. fournit aux membres de la GRC des directives détaillée relativement aux incidents accompagnés de violence dans les relations. Cela comprend l'obligation [TRADUCTION] « de réaliser une enquête complète et approfondie même lorsque la victime est réticente à offrir sa collaboration », de coordonner, dans la mesure du possible, l'enquête avec les responsables des Services aux victimes, et de documenter les circonstances et les résultats de l'enquête dans le dossier d'enquête ainsi que dans le rapport au procureur de la CouronneNote de bas de page 246.

L'article 8.2.1. renvoie les membres à l'annexe 2-4-3 (Violence dans les relations – Méthode d'enquête), qui fournit des directives en ce qui concerne la collecte des éléments de preuve, l'évaluation des déclarations et l'évaluation des risques, la planification de la sécurité, les arrestations, les procédures judiciaires et de mise en liberté ainsi que les exigences en matière de surveillanceNote de bas de page 247. La méthode d'enquête rappelle certaines des dispositions de la politique divisionnaire et fournit des directives procédurales supplémentaires sur d'autres aspects.

L'article 8.3.2. donne aux membres comme instruction [TRADUCTION] « d'informer les partenaires de la désignation la plus élevée du système de justice et de la protection de l'enfance afin d'assurer une intervention accrue et en toute collaboration au chapitre de la gestion du cas ».

La politique provinciale relative à la violence faite aux femmes dans les relations comprend un protocole pour les cas de violence familiale présentant les plus grands risques. Selon ce protocole, les cas présentant le plus grand risque sont définis comme ceux qui [TRADUCTION] « posent un risque élevé de violence (lésions corporelles graves ou mort) ». Le protocole vise à [TRADUCTION] « améliorer les interventions du système de justice et de protection de l'enfance dans les cas présentant le plus haut risque au moyen d'une meilleure mise en commun de l'information, d'une planification exhaustive et concertée de la sécurité, et de stratégies d'atténuation du risqueNote de bas de page 248 ».

Conformément au protocole provincial, les agents de police doivent désigner au cas par cas un incident comme présentant le plus haut risque selon leur jugement professionnel, leur formation et leur expérience, et une évaluation des risques officielle doit appuyer cette décision. Le protocole indique que [TRADUCTION] « lorsque l'agent qui est intervenu s'inquiète du fait qu'un cas de violence familiale pourrait présenter le plus haut risque compte tenu de son enquête préliminaire, il doit communiquer avec son superviseur ou un enquêteur spécialisé ayant suivi une formation officielle en matière d'évaluation des risques pour l'informer de ses préoccupations ». Le protocole provincial indique également que [TRADUCTION] « une fois que l'agent de police a désigné un cas comme présentant le plus haut risque, le protocole entre en vigueur, et des dispositions renforcées en matière de communication des renseignements et de gestion du cas s'appliquentNote de bas de page 249 ».

Bien que l'article 8.3.2. de la politique divisionnaire donne aux membres l'instruction d'informer les partenaires du système de justice et de protection de l'enfance qu'un cas a été désigné comme présentant le plus haut risque, la politique ne prévoit pas de directives ou d'orientation sur la manière dont une telle désignation doit être établie.

Conclusion no 31 : La politique divisionnaire ne fournit pas aux membres de la GRC de directives claires sur la manière de désigner un cas de violence dans les relations comme présentant le plus haut risque.

Recommandation no 25 : Que la GRC en Colombie-Britannique s'assure que la politique divisionnaire établit adéquatement un processus permettant de désigner un cas comme présentant le plus haut risque.

La GRC en Colombie-Britannique n'a pu communiquer le nombre de dossiers relatifs à des cas désignés comme présentant le plus haut risque, puisque le système de gestion des dossiers ne permet pas actuellement de faire un suivi de ce type d'information. La GRC a néanmoins informé les enquêteurs de la Commission que la Division a lancé, à la fin de 2014, un projet pilote qui permettra d'assurer un suivi des cas présentant le plus haut risque dans toute la province de la Colombie-BritanniqueNote de bas de page 250. Le projet pilote vise 15 détachements, y compris trois détachements du district du Nord. Le projet a pour but de sensibiliser davantage les membres de la GRC à l'égard des cas présentant le plus haut risque, de contribuer à déterminer les endroits de la province où les cas de violence dans les relations présentant le risque le plus élevé sont susceptibles de se produire ainsi que d'examiner des causes et des solutions potentielles, d'établir des données de base en vue de la prise de décisions et de faciliter et d'orienter le travail des partenaires communautairesNote de bas de page 251.

Chapitre 2.4. « Violence dans les relations », article 9. « Superviseur » et article 10. « Chef »

L'article 9. de la politique divisionnaire présente en détail les responsabilités des superviseurs en ce qui a trait aux enquêtes sur les cas de violence dans les relations et reconnaît que ces enquêtes [TRADUCTION] « exigent une plus grande supervision et orientation ». L'article est conforme à la politique nationale de la GRC, laquelle précise que le superviseur doit « [e]xaminer activement et attentivement toute plainte de violence dans les relationsNote de bas de page 252 », et à la politique provinciale sur la violence faite aux femmes dans les relations, laquelle indique que, [TRADUCTION] « en raison de la complexité des dossiers de violence familiale et du risque pour la sécurité de la victime, un degré élevé de supervision est nécessaireNote de bas de page 253 ».

À ce sujet, l'article 9.3. de la politique divisionnaire exige en particulier des superviseurs qu'ils remplissent la liste de contrôle du superviseur des dossiers de violence familiale pendant le quart de travail où le dossier a été reçu. Cette exigence veille à ce que toutes les enquêtes sur les cas de violence dans les relations fassent rapidement l'objet d'un examen par le superviseur.

Les superviseurs doivent également, lorsque les activités le permettent, obtenir une évaluation des risques au moyen du formulaire abrégé pour l'évaluation du risque de violence conjugale (FA-ERVC) dans toutes les enquêtes sur les cas de violence dans les relations présentant le plus haut risqueNote de bas de page 254. Cette exigence est conforme à la politique et au protocole de la province, qui prévoient qu'une évaluation des risques officielle doit être réalisée dans les cas présentant le plus haut risque et qui exigent en particulier du superviseur ou de l'enquêteur spécialisé qu'il [TRADUCTION] « décide d'effectuer ou non une évaluation des risques au moyen du FA-ERVC » dans les cas présentant le risque le plus élevéNote de bas de page 255.

L'article 10. de la politique divisionnaire rappelle l'exigence prévue par la politique nationale de la GRC selon laquelle les chefs de détachement doivent veiller à ce que les enquêtes sur les cas de violence dans les relations fassent l'objet d'un degré élevé de supervision.

L'article 10. de la politique divisionnaire correspond aussi à la politique provinciale en ce que les chefs de détachement doivent s'assurer que, chaque année, leurs membres passent en revue les politiques divisionnaires et provinciales relatives à la violence dans les relationsNote de bas de page 256. La politique divisionnaire exige également des chefs de détachement qu'ils veillent à ce que les membres connaissent la Victims of Crimes Act, les protocoles relatifs aux services aux victimes et les ressources disponibles dans la collectivité, et que les membres suivent les formations obligatoires en matière de violence dans les relations.

Lorsque cela est possible, les chefs de détachement doivent envisager la possibilité de mettre sur pied un groupe de la violence familialeNote de bas de page 257. Sinon, ils doivent assigner au détachement un agent de liaison en matière de violence familiale. La GRC a confirmé que des groupes de la violence familiale ont été mis sur pied à Prince George et à Williams Lake. En outre, la GRC en Colombie-Britannique a créé, en 2013, un nouveau poste, soit celui de coordonnateur en matière de violence familiale, qui est chargé d'améliorer la qualité des enquêtes sur les cas de violence dans les relations au sein de la Division.

La politique divisionnaire souligne également la question de l'assurance de la qualité dans les enquêtes sur les cas de violence dans les relations. Les chefs de détachement doivent examiner régulièrement des cas de violence dans les relations dans le cadre du processus d'assurance de la qualité au sein de leur détachement et assurer un suivi des enquêtes et de la rétroaction formulée par des sources internes et externes afin de modifier au besoin les protocoles à l'échelon local pour veiller à la conformité avec les lois ainsi qu'avec les politiques de la GRC et de la province.

Conclusion no 32 : La politique divisionnaire souligne l'importance de la supervision et prévoit une assurance de la qualité et une surveillance adéquates des enquêtes sur les cas de violence dans les relations.

Formation de la GRC

Division Dépôt de la GRC – Programme de formation des cadets

La Commission a examiné les modules de formation du Programme de formation des cadets de la Division Dépôt de la GRC qui se rapportent aux services de police dans les cas de violence dans les relations afin de déterminer s'ils étaient conformes à la loi, aux politiques et aux procéduresNote de bas de page 258. L'examen visait également à déterminer si l'on pouvait s'attendre raisonnablement à ce que les membres suivant cette formation aient acquis les connaissances nécessaires pour les orienter au moment d'intervenir dans les situations de violence dans les relations.

Les cadets à la Division Dépôt suivent une formation de 32 heures sous la forme d'un module portant sur la violence familiale. Ce module vise à [TRADUCTION] « permettre aux cadets d'acquérir les compétences et les connaissances nécessaires pour mener des interventions de qualité dans le cadre d'incidents en coursNote de bas de page 259 ». Le module comprend des exercices, des lectures et de la recherche, des jeux de rôles, des exposés de groupes d'experts et des discussionsNote de bas de page 260. Le module est divisé en 17 séances conçues pour intégrer et enseigner diverses matières en même temps que les cadets reçoivent un enseignement sur la violence familiale. Les sujets abordés comprennent les mandats de perquisition, les infractions relatives aux armes, les évaluations du risque dans les situations d'intervention d'urgence, les déclarations de la victime, les entrevues réalisées avec les témoins et les suspects, ainsi que les valeurs et l'éthique.

La formation est axée sur la pratique. Bon nombre de séances comportent un apprentissage fondé sur des scénarios et abordent divers aspects pratiques et juridiques des interventions en cas de violence dans les relations. Le temps consacré à la politique relative à la violence dans les relations est limité. Dans le cadre du module, les cadets ont 15 minutes pour examiner les politiques de la Direction générale de la GRC sur la violence dans les relations (chapitre 2.4. du Manuel des opérations) et les Services aux victimes (chapitre 37.6. du Manuel des opérations)Note de bas de page 261. Cette période vise à permettre aux cadets de se familiariser avec ces politiques. Les cadets sont informés du fait que chaque division de la GRC peut s'être dotée de politiques donnant des instructions plus précises relativement aux enquêtes sur les cas de violence dans les relations et au dépôt d'accusationsNote de bas de page 262.

Les méthodes d'évaluation des risques comprises dans l'ensemble du module sont fondées sur le Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents, qui est utilisé dans le cadre de l'analyse du recours à la force. Le Modèle évalue le risque en fonction de facteurs situationnels, des comportements du sujet et de considérations tactiquesNote de bas de page 263.

Conclusion no 33 : Le Programme de formation des cadets de la GRC permet aux membres d'acquérir les habiletés et les compétences fondamentales nécessaires pour composer avec les situations de violence dans les relations et pour comprendre les fondements juridiques à cet égard.

Formation de la GRC en Colombie-Britannique

La Commission a également examiné le matériel pédagogique utilisé actuellement dans le cadre du Programme de formation pratique de la GRC en Colombie-Britannique, la formation rendue obligatoire par la province sur la violence dans les relations offerte aux membres exerçant leurs fonctions en Colombie-Britannique et d'autres ressources de formation et ressources documentaires mises à la disposition des membres de la GRC en Colombie-Britannique ayant trait aux services de police dans le cadre des enquêtes sur les cas de violence dans les relations.

En plus du Programme de formation pratique, les membres de la GRC en Colombie-Britannique peuvent également consulter, au moyen de leur ordinateur de bureau et de tout terminal mobile de traitement de données pour les véhicules, le "E" Division Service Standards Investigation Guide pour les aider à mener certaines enquêtes, notamment celles sur les cas de violence dans les relations. Le guide présente des exigences obligatoires, des normes minimales en matière d'enquête et des lignes directrices générales, ainsi que les responsabilités des superviseursNote de bas de page 264. De plus, les membres de la GRC en Colombie-Britannique peuvent consulter le Guide d'enquête pour les premiers intervenants, qui a été élaboré par le Bureau des normes et pratiques d'enquête de la Colombie-Britannique et est accessible à partir de tous les terminaux mobiles de traitement de données dans la province. Ce guide sert également de ressource principale pour les membres de la GRC en leur recommandant des interventions en cas d'incidents de violence dans les relationsNote de bas de page 265.

Formation en ligne du ministère de la Justice de la Colombie-Britannique

Le ministère de la Justice de la Colombie-Britannique offre actuellement deux cours de formation interactifs en ligne sur la violence familiale que doivent suivre tous les agents de police de la province qui participent aux interventions à la suite d'un appel pour violence dans les relations, les supervisent ou en assurent le suivi (c.-à-d. la plupart des agents de police, voire tous). Le premier cours, intitulé DVI: Evidence-Based, Risk-Focused Domestic Violence Investigations (enquêtes sur les cas de violence familiale axées sur le risque et les éléments de preuve), a été lancé en novembre 2009Note de bas de page 266. Ce cours invite les membres à adopter une démarche proactive et axée sur la collaboration en ce qui a trait à la gestion de la sécurité de la victime. Le second cours, intitulé DVII: Assessing Risk and Safety Planning in Domestic Violence Investigations (évaluation des risques et planification de la sécurité dans le cadre des enquêtes sur les cas de violence familiale), a été lancé en juillet 2013Note de bas de page 267. Ce cours vise à normaliser la manière dont les agents de police évaluent et documentent le risque dans les cas de violence familiale, et favorise des pratiques qui accordent la priorité à la sécurité de la victime. Ensemble, les deux cours durent 7,5 heures et contribuent à sensibiliser les membres de la GRC en Colombie-Britannique à l'égard des attentes provinciales au chapitre de la réalisation des enquêtes sur les cas de violence dans les relations.

La province obligeait tous les agents de police de la Colombie-Britannique à suivre le cours DVI avant octobre 2011Note de bas de page 268. En date du 31 décembre 2014, 95 % des membres de la GRC du district du Nord avaient suivi les deux cours en ligne, comme 96 % de leurs collègues de l'ensemble de la DivisionNote de bas de page 269.

Conclusion no 34 : La formation offerte aux membres de la GRC en Colombie-Britannique semble couvrir les éléments essentiels des enquêtes sur les cas de violence dans les relations.

Conclusion

La Commission a mené un examen des rapports d'incident de la GRC rédigés à la suite d'enquêtes sur des cas de violence dans les relations afin de déterminer si les superviseurs s'étaient acquittés de leurs responsabilités conformément aux politiques et aux procédures pertinentes. La Commission a également examiné les politiques, les procédures et les activités de formation de la GRC au chapitre de la violence dans les relations pour évaluer si elles sont conformes aux lois, si des directives claires sont données aux membres de la GRC, et si les politiques divisionnaires sont conformes aux politiques nationales et prévoient une reddition de comptes et un contrôle de la qualité.

Même si la Commission a relevé des problèmes mineurs dans les politiques nationales et divisionnaires, dans l'ensemble, elle a constaté que les politiques et les procédures de la GRC en Colombie-Britannique sont conformes aux politiques nationales, et que les politiques nationales et divisionnaires en matière de violence dans les relations assurent adéquatement la reddition des comptes et un contrôle de la qualité.
Cependant, l'examen des rapports d'incident effectué par la Commission a permis de cerner des lacunes au chapitre de l'application pratique de ces exigences.

La Commission estime qu'il incombe aux superviseurs et aux chefs de détachement de veiller à ce que les politiques et les procédures soient suivies. Une supervision efficace, dès les premières étapes de l'enquête et pendant toute sa durée, est nécessaire pour garantir la conformité avec les politiques et démontrer la reddition de comptes.

Personnes disparues

Contexte

Selon le Centre national pour les personnes disparues et restes non identifiés, une personne disparue est une personne dont on ignore où elle se trouve, quelles que soient les circonstances de la disparitionNote de bas de page 270. Il n'existe aucune période d'attente pour signaler la disparition d'une personne, et la personne est réputée disparue jusqu'à ce qu'elle soit localiséeNote de bas de page 271. Le Centre signale que la majorité des cas de personnes disparues partout au pays sont réglés dans les 24 heures, et environ 85 %, après moins d'une semaineNote de bas de page 272.

Au cours des dix dernières années, de nombreux organismes gouvernementaux et non gouvernementaux se sont penchés sur la question des cas non résolus de personnes disparues et, en particulier, la disparition de femmes autochtones au CanadaNote de bas de page 273.

En septembre 2014, dans un contexte d'attention soutenue du public à l'égard de la question des femmes autochtones disparues au Canada, la GRC a publié sa stratégie nationale concernant les personnes disparues et a apporté d'importants changements à sa politique nationale concernant les personnes disparues.

Le commissaire de la GRC a aussi déclenché une étude dirigée par la GRC sur les incidents signalés de femmes autochtones disparues et assassinées dans l'ensemble des services de police du Canada, faisant valoir que cette étude visait à contribuer au dialogue continu sur la question des femmes d'origine autochtone disparues et assassinées au CanadaNote de bas de page 274. Le rapport de la GRC, intitulé Les femmes autochtones disparues et assassinées : Un aperçu opérationnel national, a beaucoup attiré l'attention des médias parce qu'il a conclu que le nombre total de femmes autochtones assassinées et disparues au Canada dépasse les estimations publiques précédentes. Dans son rapport, la GRC a indiqué que son étude de la question avait permis d'établir une meilleure compréhension des statistiques parce qu'elle a complété les données accessibles au public par un extrait exhaustif de renseignements des fonds de documentation d'application de la loi provenant de l'ensemble des services de police au Canada. Dans son rapport, la GRC a déterminé que la Colombie-Britannique affichait le taux le plus élevé d'homicides non résolus de femmes autochtones et de cas non réglés de femmes autochtones disparuesNote de bas de page 275.

Au cours des dernières années, la Colombie-Britannique a signalé le nombre le plus élevé d'adultes disparus par rapport à d'autres provincesNote de bas de page 276. Par conséquent, de nombreuses avancées au chapitre des politiques relatives aux enquêtes sur les personnes disparues ont aussi été réalisées en Colombie-Britannique. La province a notamment créé le Centre des personnes disparues de la police de la Colombie-Britannique. Il s'agit d'un groupe intégré composé de ressources de la GRC et de services de police municipaux qui assurent un soutien et une surveillance dans le cadre de toutes les enquêtes sur les personnes disparues en Colombie-Britannique et contribuent, en particulier, à cerner les enquêtes sur des personnes disparues à risque élevé dans la province, et à en assurer le suivi. Mis sur pied en 2004, le Centre était d'abord chargé d'élaborer des politiques, mais, de façon constante depuis 2010, ses ressources ont augmenté, et son mandat s'est élargiNote de bas de page 277. Le Centre participe aujourd'hui à l'examen et au suivi des dossiers en cours depuis sept jours de personnes disparuesNote de bas de page 278. La Commission a été informée que le Centre aide également les membres de la GRC à mener des enquêtes ou à dégager les dossiers qui exigent une attention supplémentaireNote de bas de page 279.

Par ses recommandations, la Commission d'enquête sur les femmes portées disparues (2012) a influé sur la façon dont les services de police traitent les cas de personnes disparues en Colombie-BritanniqueNote de bas de page 280. Dans son rapport, la Commission d'enquête soulignait que la GRC n'avait pas enquêté rapidement et de manière approfondie sur des rapports de femmes disparues. En 2013, Human Rights Watch s'est fait l'écho de ces préoccupations, en particulier des lacunes au chapitre de la rédaction et du suivi des rapports concernant des femmes disparues, du fait de ne pas examiner toutes les stratégies d'enquête ainsi que de la défaillance des mécanismes internes d'examen et des mécanismes externes de reddition de comptesNote de bas de page 281.

Rapports d'incident de personnes disparues

L'examen des dossiers avait pour but de déterminer si les enquêtes de la GRC menées à la suite de rapports de personnes disparues l'ont été en conformité avec les exigences prévues par les politiques en vigueur pendant la période à l'étude, et de cerner les problèmes systémiques. La Commission a analysé les mesures consignées dans les rapports d'incident de personnes disparues pour établir la mesure dans laquelle les membres de la GRC ont traité les rapports de personnes disparues en conformité avec les politiques, les procédures et les lignes directrices pertinentes relatives aux enquêtes sur les personnes disparues.

Les politiques de la GRC relatives aux personnes disparues ont beaucoup évolué depuis 2008, à la fois dans l'ensemble du pays et en Colombie-Britannique. Le chapitre 37.3. du Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC, qui porte sur les personnes disparues, contient les directives générales à l'intention de toutes les divisions de la GRC partout au pays. La GRC a apporté des modifications importantes à cette politique en septembre 2014, ce qui fera l'objet d'une analyse dans une section ultérieure du présent rapport. Cependant, aux fins de l'examen des dossiers, la Commission s'est appuyée sur la version précédente de la politique nationale sur les personnes disparues, qui était en vigueur depuis mai 2008. La Commission a également examiné des versions antérieures pertinentes de la politique divisionnaire de la Colombie-Britannique sur les personnes disparues, à laquelle des modifications importantes ont été apportées pendant toute la durée de la présente enquête, à savoir en juillet 2007, novembre 2010, février 2011 et novembre 2012.

Même si la politique nationale et la politique divisionnaire ont évolué depuis 2008, les principes et les exigences fondamentales sont demeurés les mêmes, à savoir que les membres de la GRC doivent effectuer une enquête complète sans tarder sur les cas de personnes disparuesNote de bas de page 282 et que les enquêtes sur les personnes disparues doivent être considérées comme des enquêtes à risque élevé qui doivent faire l'objet d'une documentation détaillée et d'une supervision étroiteNote de bas de page 283. Dans les faits, la politique nationale de 2008 prévoit que le superviseur doit « passer régulièrement en revue le dossier d'enquête pour vérifier la qualité de l'enquête et déterminer que la priorité appropriée y a été accordée et que toutes les mesures d'enquête ont été consignées » [c'est nous qui soulignons].

La Commission a donc fondé son évaluation des rapports d'incident de personnes disparues sur les principes fondamentaux et les exigences suivants :

  • enquêtes « rapides et rigoureuses »;
  • fugueurs à répétition ou chroniques;
  • personnes à haut risque et évaluations du risque;
  • examen par le superviseur;
  • codage des rapports d'incident;
  • cas non résolus.

Pie chart of Age and Sex

Selon la GRC, de 2008 à 2012, le district du Nord a reçu un total de 20 985 demandes d'intervention ayant trait à des personnes disparues. Sur ces signalements, la Commission a analysé un échantillon de 1 851 rapports d'incident provenant de 35 détachements du nord de la Colombie-BritanniqueNote de bas de page 284. Sur ces 1 851 rapports, 44,4 % (n = 822) concernaient des hommes; 5,9 % (n = 109), des femmes; et 49,7 % (n = 920), des adolescents signalés disparus du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2012. Conformément à sa mission d'enquête, la Commission s'est penchée sur les 1 029 rapports d'incident concernant des femmes (n = 109) et des adolescents (n = 920), tandis que les autres rapports, visant des hommes, ont été examinés uniquement à des fins statistiques.

Sur le nombre total de rapports d'incident examinés, 37,1 % (382 sur 1 029) concernaient des femmes autochtones, adultes et adolescentes. Dans le présent rapport, nous établissons des données statistiques; cependant, leur utilité en tant qu'indicateur de tendances potentielles ou d'un traitement différent est limitée. Étant donné l'information limitée contenue dans les rapports d'incident et la portée de l'enquête d'intérêt public de la Commission, la Commission n'est pas en mesure de conclure que la GRC a réservé un traitement différentiel aux femmes et aux adolescentes autochtones.

Graphy of Ethnicity, Age and Sex

Enquêtes « rapides et rigoureuses »

Depuis 2008, la politique nationale de la GRC et la politique divisionnaire de la Colombie-Britannique sur les personnes disparues comportent une exigence fondamentale selon laquelle « [l]e signalement d'une personne disparue donne rapidement lieu à une enquête rigoureuseNote de bas de page 285 » [c'est nous qui soulignons] et toutes les mesures d'enquête doivent être consignéesNote de bas de page 286. Dans le but d'évaluer la conformité avec cette exigence, la Commission a examiné des rapports d'incident de la GRC pour déterminer si les membres de la GRC avaient consigné adéquatement les mesures d'enquête prises, ainsi que le moment où les mesures consignées ont été prises afin d'établir si l'enquête a été menée rapidement.

Pour évaluer les mesures d'enquête consignées au dossier, la Commission a pris en considération l'ensemble des procédures d'enquête précisées à l'annexe 37-3-1 de la version de 2008 de la politique nationale sur les personnes disparuesNote de bas de page 287. En particulier, la Commission a examiné les dossiers pour vérifier la présence d'éléments démontrant que le membre de la GRC avait pris les mesures d'enquête élémentaires, par exemple : il a questionné la personne qui a signalé la personne disparue; il a questionné les témoins ou communiqué avec les membres de la famille, les amis ou les fréquentations connues; il a obtenu une description physique de la personne disparue ou une description des vêtements qu'elle portait lorsqu'elle a été vue la dernière fois; il a effectué des rondes ou est passé en véhicule dans le voisinage; il est allé à l'endroit où la personne disparue a été vue la dernière fois; il a fait appel à des services de soutien; et il a consigné une évaluation des risques au dossier.

Sur les 1 029 rapports d'incident examinés, qui concernaient tous des femmes et des adolescents, la Commission a constaté que les mesures d'enquête n'avaient pas été consignées dans une proportion de 26 % (263 sur 1 029). En particulier, l'exposé des faits de ces rapports ne comportait aucun détail ni aucune description des mesures prises par le membre de la GRC pour enquêter sur le cas. Cette proportion était sensiblement constante pour toutes les années à l'étude, bien qu'elle soit un peu plus élevée en 2012, alors que les mesures d'enquête n'avaient pas été consignées au dossier dans une proportion de 33,7 % (57 sur 263). Dans les cas concernant des femmes autochtones (adultes et adolescentes), la Commission a constaté qu'aucune mesure d'enquête n'avait été consignée dans 24,1 % (92 sur 382) des rapports; par comparaison, aucune mesure d'enquête n'avait été consignée dans les dossiers concernant des femmes non autochtones (identifiées comme étant de race « blanche », « autre » ou « inconnue ») dans une proportion de 26,2 % (82 sur 313) des rapports.

La Commission a aussi analysé des rapports d'incident pour déterminer si la documentation versée au dossier permettait de montrer que les enquêtes avaient été amorcées rapidement, conformément à la politique. En particulier, les enquêteurs se sont penchés sur les renseignements consignés au dossier pour voir si la documentation montrait que les enquêtes avaient été amorcées immédiatement, le même jour ou plus d'un jour après la réception par la GRC d'un signalement de personne disparue. Sur les 1 029 rapports d'incidents analysés, les enquêteurs ont constaté que certaines mesures d'enquête avaient été consignées au dossier dans une proportion de 74 % (766 sur 1 029) des rapports. Sur ces 766 dossiers, 36 % (273 sur 766) montraient que les mesures d'enquête avaient été prises immédiatement à la suite de la réception du signalement, et 33 % (250 sur 766) des rapports montraient que les mesures d'enquête avaient été prises le jour même où la personne avait été signalée disparue. Pour ce qui est des autres rapports d'incident dans lequel le membre de la GRC avait consigné les mesures d'enquête prises, 26 % (215 sur 766) d'entre eux n'indiquaient pas de date précise ni ne montraient que les mesures d'enquête avaient été prises rapidement en conformité avec la politique. Dans ces cas, la Commission a constaté que les renseignements consignés étaient souvent vagues, ne permettaient pas d'expliquer la séquence des événements ou étaient dépourvus de détails permettant d'expliquer les mesures d'enquête consignées dans le rapport d'incident.

Ces conclusions étaient constantes pour toutes les années à l'étude, et ce, en dépit de modifications apportées à la politique divisionnaire, en 2010, de façon à ajouter la disposition qui prévoit [TRADUCTION] « une première intervention menée avec diligenceNote de bas de page 288 » et une autre prévoyant que [TRADUCTION] « les témoignages, les pistes d'enquête, les renseignements et les faits soient recueillis rapidement et efficacement aux fins de la tenue immédiate d'une enquête à long termeNote de bas de page 289 ».

Dans les cas concernant des femmes autochtones (adultes et adolescentes), la Commission a constaté que des mesures d'enquête consignées ne permettaient pas d'établir de date précise ou ne montraient pas qu'elles avaient été prises rapidement en conformité avec la politique dans un nombre légèrement inférieur de cas, soit 19,6 % (75 sur 382).

Tout au long de l'examen des dossiers, la Commission a remarqué des déficiences générales sur le plan de la qualité de certains documents, notamment des exposés des faits trop génériques, des notes au dossier ne comportant pas de date, le fait que le membre de la GRC n'avait pas décrit les circonstances dans lesquelles une personne avait été portée disparue et des notes d'entrevue ou sur d'autres mesures d'enquête vagues ou génériques. Par exemple, la Commission a constaté que des résumés des faits étaient génériques, c'est-à-dire qu'ils comportaient des phrases comme [TRADUCTION] « on a signalé que [le sujet] est disparu, fugueur chronique, inscrit au CIPC, de retour, supprimé du CIPC, dossier clos » ou « disparaît habituellement; de retour; dossier clos », même dans les cas où l'adolescent avait été porté disparu pendant plusieurs jours. Les enquêteurs ont aussi remarqué qu'il y avait des dossiers dans lesquels le membre de la GRC n'avait pas indiqué clairement le moment où les mesures d'enquête avaient été prises, n'avait pas expliqué les détails ou les résultats des mesures d'enquête ou n'avait pas justifié qu'il procède à une évaluation des risques. Par exemple, il y avait des déclarations comme les suivantes [TRADUCTION] : « longues rondes, mais résultats négatifs »; « rondes effectuées, mais rien ne permet de présumer que [la personne disparue] court un danger »; « ne court pas de risque et rentre habituellement de lui-même »; ou « rondes effectuées, mais [la personne disparue] est un fugueur chronique enclin à la toxicomanie ».

Pie chart of documentation of investigation steps

Selon une exigence fondamentale de la politique, « [l]e signalement d'une personne disparue donne rapidement lieu à une enquête rigoureuse » [c'est nous qui soulignons]. D'après l'examen des rapports d'incident par la Commission, les mesures d'enquête n'avaient pas été documentées dans 25,6 % (n = 263) d'entre eux, et des dates précises ou des éléments montrant que des mesures d'enquête avaient été prises rapidement n'avaient pas été clairement consignés dans 20,9 % (n = 215) des rapports d'incident. Ensemble, les rapports d'incident établis de 2008 à 2012 ne permettaient pas de démontrer, dans une proportion de 46,5 % (478 sur 1 029), qu'ils respectaient cette exigence prévue par la politique.

Conclusion no 35 : Près de la moitié (46 %) des rapports d'incident ne permettaient pas d'établir que la GRC dans le district du Nord avait enquêté rapidement et rigoureusement sur les cas de personnes disparues, et ce, contrairement à la politique.

Personnes à risque élevé et évaluations du risque

Afin de vérifier la conformité avec la politique relativement aux personnes à risque élevé et avec les exigences en matière d'évaluation des risques, il est nécessaire de comprendre les modifications apportées à cet égard à la politique au cours de la période à l'étude.

En 2008, la politique nationale ne comportait pas de disposition précisant la manière d'évaluer le risque dans les cas de personnes disparues. Les divisions définissaient la procédure à suivre. À cette époque-là, la politique divisionnaire contenait seulement une disposition d'ordre général, laquelle prévoyait que [TRADUCTION] « les enquêtes sur les personnes disparues doivent être considérées comme des enquêtes "à risque élevé" qui exigent une supervision étroite et une consignation détaillée de l'informationNote de bas de page 290 ».

Au dire des hauts responsables de la GRC en Colombie-Britannique, la démarche à l'égard des enquêtes sur les personnes disparues était moins rigoureuse pendant la période correspondant à la politique de 2008. Le fait qu'il n'existait pas d'exigence qu'on effectue officiellement des évaluations du risque en était un signe. En guise d'exemple supplémentaire, l'absence de procédures définies concernant le traitement des dossiers a entraîné des lacunes au chapitre de la consignation des mesures d'enquêteNote de bas de page 291. Selon la GRC, les procédures et les exigences en matière d'enquête sont devenues plus rigoureuses par la suiteNote de bas de page 292. Il convient cependant de noter que la Commission n'a pas vérifié de manière indépendante les pratiques ne relevant pas de la portée de la présente enquête, qui couvre la période de 2008 à 2012.

En 2010, la GRC en Colombie-Britannique a modifié les dispositions de sa politique touchant les enquêtes sur les personnes disparues à risque élevé, ajoutant une définition détaillée des personnes considérées comme à risque élevé et une mention renvoyant aux cas à risque élevé dans la disposition suivante [TRADUCTION] : « Le signalement d'une personne disparue donne rapidement lieu à une enquête rigoureuse, en particulier dans le cas des personnes à risque élevéNote de bas de page 293 [c'est nous qui soulignons]. » La politique divisionnaire indiquait que les personnes considérées comme à risque élevé comprenaient [TRADUCTION] « les enfants, les personnes âgées, les personnes ayant un handicap mental ou physique, les personnes malades, les personnes ayant une maladie mentale, les personnes suicidaires, les travailleurs et les travailleuses du sexe, les personnes liées aux gangs de rue ou au commerce de drogue, les personnes qui témoignent en cour, les victimes de violence familiale et de violence envers les personnes âgées, les victimes d'intimidation, les itinérants/personnes sans abri et les personnes qui s'adonnent à des activités à risque élevé comme l'autostop et l'abus de drogues et d'alcoolNote de bas de page 294 ».

La politique divisionnaire prévoyait l'obligation de [TRADUCTION] « réaliser immédiatement une évaluation des risques, laquelle doit comprendre une évaluation de la manière dont la personne est disparue, ses antécédents personnels et sa situation, si la personne est considérée comme à risque élevéNote de bas de page 295 ». Elle ajoute que [TRADUCTION] « l'évaluation des risques relative à la personne disparue doit être consignée au dossier, au même titre que tous les facteurs explicatifs » et que [TRADUCTION] « l'évaluation des risques doit permettre d'établir le degré de priorité de l'enquêteNote de bas de page 296 ». La politique comporte également une disposition indiquant que les chefs de service doivent [TRADUCTION] « envisager de rendre obligatoire l'utilisation des outils d'évaluation des risques (p. ex. l'annexe 37-3-1 – outil d'évaluation des risques dans les cas de personnes disparues) à l'intention des membres qui enquêtent et de mettre au point, à l'intention des STO et du personnel de service au comptoir, outils semblables offrant une démarche coordonnée à l'égard de l'évaluation des risques relativement aux plaintes ou à l'information concernant les personnes disparuesNote de bas de page 297 ».

La version de 2010 de la politique divisionnaire exigeait des membres de la GRC qu'ils réalisent et consignent les évaluations du risque relativement aux cas de personnes disparues, mais la plus récente mise à jour de la politique, qui a eu lieu à la fin de 2012Note de bas de page 298, exige des membres de la GRC qu'ils remplissent un formulaire obligatoire d'évaluation des risques. La politique exige également des superviseurs qu'ils passent en revue le formulaire d'évaluation des risques pour s'assurer qu'un degré de priorité approprié a été attribué aux casNote de bas de page 299. De hauts responsables de la GRC en Colombie-Britannique ont expliqué que le formulaire était nécessaire pour offrir aux membres une procédure mieux définie en ce qui a trait à l'évaluation des risques.

À la suite de l'analyse des rapports d'incident établis de 2008 à 2012, les enquêteurs ont constaté que 9,4 % (97 sur 1 029) des cas avaient été désignés comme à risque élevé. Le nombre de cas par année a diminué, passant de 31 en 2008 à 13 en 2012Note de bas de page 300. Aucune mesure d'enquête n'a été consignée au dossier dans 28,8 % (28 sur 97) des cas désignés comme à risque élevé; par comparaison, 20,6 % (20 sur 97) des cas contenaient certaines mentions renvoyant à des mesures d'enquête, mais ne précisaient pas de date permettant de déterminer si les mesures d'enquête avaient été prises sans tarder. La Commission a remarqué que dans certains cas à haut risque, le rapport ne comportait aucun détail ni renseignement contextuel justifiant la désignation de cas à haut risque et que certains autres rapports montraient des retards importants relativement aux mesures d'enquête prises. En règle générale, ces problèmes ont été soulevés dans les cas antérieurs aux modifications de 2010 apportées à la politique divisionnaire sur les personnes disparues. Ces problèmes étaient moins courants en 2012, où seulement 2 dossiers à haut risque sur 13 ne faisaient pas état de mesures d'enquête, et où un seul dossier à haut risque ne précisait pas la rapidité avec laquelle les mesures d'enquête avaient été prises.

Pie chart of investigation of high risk missing persons

Conclusion no 36 : Près de la moitié (49,4 %) des rapports d'incident établis de 2008 à 2012 relativement à des cas de personnes disparues désignés par la GRC du district du Nord comme étant à « risque élevé » ne démontraient pas que les cas avaient fait l'objet d'une enquête rapide et rigoureuse.

Fugueurs à répétition ou chroniques

La majorité des rapports d'incident examinés par la Commission avaient trait à des personnes disparues pour lesquelles la GRC avait découvert qu'elles avaient des antécédents de disparition. Dans 60,6 % (624 sur 1 029) des cas, la GRC avait indiqué dans le système PRIME-BC que la personne avait des antécédents de fugueur [TRADUCTION] « récidiviste, à répétition et chronique »Note de bas de page 301, et, dans 31,4 % (323 sur 1 029) des cas, le membre de la GRC avait écrit que la cause probable était que la personne était un [TRADUCTION] « fugueur ». La plupart des cas où la personne était décrite comme un fugueur récidiviste, à répétition et chronique se rapportaient à des adolescents (98,1 % ou 612 sur 624). De ce nombre, 63,8 % (398 sur 624) visaient des personnes autochtones, et les autres cas (36,2 % ou 226 sur 624) concernaient des personnes identifiées comme étant de race « blanche », « autre » ou « inconnue ».

En 2008, la politique nationale de la GRC sur les personnes disparues prévoyait ceci : « Il faut accorder la priorité d'enquête aux plaintes concernant les personnes disparuesNote de bas de page 302. » Elle précise également ceci : « Le chef détermine la priorité d'enquête appropriée dans le cas des plaintes concernant des fugueurs chroniques, lorsqu'on sait à peu près où ils se trouvent et qu'ils devraient rentrer chez eux après une brève absenceNote de bas de page 303. » Cette directive accordait aux chefs une certaine latitude au moment d'attribuer une plus ou moins grande priorité aux cas de fugueurs chroniques. Pendant la période à l'étude, ni la politique nationale de la GRC ni la politique divisionnaire sur les personnes disparues ne précisait que les cas de personnes disparues ayant des antécédents comme fugueurs récidivistes, à répétition et chroniques devaient être considérés comme des cas à risque élevé.

Dans le cadre de son examen des rapports d'incident, la Commission a constaté que les renseignements consignés au dossier dans les cas désignés de fugueurs récidivistes, à répétition et chroniques était moins susceptibles de contenir de l'information montrant que les mesures d'enquête avaient été prises rapidement conformément à la politique. Dans 42,3 % (264 sur 624) de ces dossiers, les renseignements consignés n'indiquaient pas de dates précises ni d'éléments prouvant que les mesures d'enquête avaient été prises rapidement conformément à la politique; en comparaison, c'était, au contraire, le cas pour 26 % (215 sur 766) des rapports d'incident dans lesquels les mesures d'enquête avaient été consignées. Au cours d'entrevues avec les enquêteurs de la Commission, de hauts responsables de la GRC en Colombie-Britannique ont reconnu que le cadre stratégique en place de 2008 à 2012 accordait davantage de latitude au moment de traiter les enquêtes sur les personnes disparues qui n'étaient pas considérées comme étant à risque élevé, comparativement à ce que la politique actuelle permetNote de bas de page 304.

À la suite des modifications apportées en 2010, la politique divisionnaire sur les personnes disparues prévoyait l'exigence de [TRADUCTION] « réaliser immédiatement une évaluation des risques, laquelle doit comprendre une évaluation de la manière dont la personne est disparue, ses antécédents personnels et sa situation dans le contexte des personnes considérées comme étant à risque élevéNote de bas de page 305 ». Elle indique également que [TRADUCTION] « l'évaluation des risques concernant la personne disparue doit être consignée au dossier, au même titre que tous les facteurs explicatifs, [et] elle doit établir le degré de priorité de l'enquêteNote de bas de page 306 ».

Même si les modifications apportées à la politique divisionnaire en 2010 exigeaient clairement qu'une évaluation des risques établissant le degré de priorité de l'enquête devait être consignée au dossier, la Commission a remarqué que des rapports concernant des cas de fugueurs récidivistes, à répétition et chroniques comportaient des lacunes inexpliquées sur le plan des mesures d'enquête consignées au dossier. De plus, la Commission a relevé l'absence de renseignements expliquant pourquoi le risque relativement à la personne disparue avait été évalué comme étant faible ou pourquoi le cas s'était vu attribuer une faible priorité d'enquête.

Au début de 2011, la politique divisionnaire a été modifiée de nouveau afin d'inclure l'exigence que soit réalisée une entrevue officielle avec les personnes disparues, une fois qu'elles ont été retrouvées, si elles avaient des antécédents de disparition ou si elles étaient considérées comme étant à risque en raison de leur mode de vie, de leur âge ou de tout autre facteur pertinentNote de bas de page 307. L'entretien a pour but d'établir et de consigner dans le rapport d'incident les raisons pour lesquelles la personne est disparue, les endroits où la personne est allée pendant sa disparition et toute autre information qui pourrait être utile pour réduire la probabilité que la personne disparaisse de nouveau ou pour contribuer à retrouver la personne disparue dans le cadre d'une enquête ultérieureNote de bas de page 308. Après février 2011, à la suite de l'entrée en vigueur de cette modification de la politique, la GRC a relevé 211 cas de fugueurs récidivistes, à répétition ou chroniques ou à risque élevé dans l'échantillon de la Commission. De ce nombre, moins de 1 % (18 sur 211) des rapports indiquaient qu'un entretien avait été réalisé.

Conclusion no 37 : Les rapports sur les cas d'adolescents disparus que la GRC dans le district du Nord avait désignés comme étant des fugueurs récidivistes, à répétition ou chroniques étaient plus susceptibles que des rapports sur d'autres cas de comporter des lacunes sur le plan de la consignation des mesures d'enquête, notamment l'absence inexpliquée de dates relatives à l'enquête et l'absence de renseignements consignés ayant trait aux évaluations du risque ou aux entretiens réalisés avec les personnes disparues.

De plus, à la suite de l'analyse des rapports d'incident établis de 2008 à 2010, la Commission a remarqué, de façon générale, que les renseignements au dossier relativement à un certain nombre de cas de fugueurs à répétition ou chroniques avaient été consignés d'une manière donnant à penser que le dossier avait fait l'objet d'une « surveillance » passive, plutôt que d'une enquête active. Ces rapports d'incident montraient que les membres de la GRC communiquaient périodiquement avec la personne qui avait signalé la disparition de la personne (le plus souvent le responsable d'un foyer de groupe, un parent, un parent de la famille d'accueil ou un tuteur) pour lui demander si la personne disparue était rentrée. Dans certains de ces cas, des renseignements relatifs à d'autres mesures d'enquête prévues dans la politique, comme communiquer avec les témoins ou effectuer des rondes dans la région en question, n'avaient pas du tout été consignés ou, selon le rapport d'incident, les mesures avaient été prises plusieurs jours après le moment où la disparition de la personne avait été signalée. Des entrevues réalisées avec des membres de la GRC en Colombie-Britannique ont permis de confirmer que le simple fait de communiquer avec un parent ou un tuteur pour s'enquérir du retour d'un adolescent disparu était contraire aux politiques actuellesNote de bas de page 309.

Examen par le superviseur

En 2008, selon la politique nationale, la principale responsabilité des superviseurs en ce qui concerne les dossiers de personnes disparues était de « passer régulièrement en revue le dossier d'enquête pour vérifier la qualité de l'enquête et déterminer que la priorité appropriée y a été accordée et que toutes les mesures d'enquête ont été consignéesNote de bas de page 310 ». En Colombie-Britannique, la politique divisionnaire en place de 2007 à 2010 exigeait que les superviseurs examinent le dossier opérationnel et que, s'ils étaient convaincus que les faits consignés au dossier ne donnaient pas à penser que des actes criminels avaient été posés, ils inscrivent une note, accompagnée de leur signature, à ce sujet au dossierNote de bas de page 311.

À la suite des modifications susmentionnées qui ont été apportées à la politique divisionnaire en 2010, des exigences à l'intention des superviseurs ont été ajoutées, à savoir : aider les membres de la GRC à effectuer l'évaluation des risques et à établir le degré de priorité du dossier; passer en revue immédiatement le dossier opérationnel pour s'assurer que les membres de la GRC respectent les exigences; veiller à ce que le dossier fasse l'objet d'une enquête ayant comme hypothèse qu'un acte criminel a été commis jusqu'à ce que les faits démontrent le contraire; et voir à ce que le dossier fasse l'objet d'une enquête active. La politique prévoyait également que les superviseurs devaient consigner leurs observations et instructions au dossierNote de bas de page 312.

Les enquêteurs de la Commission ont aussi examiné les rapports d'incident pour voir si les superviseurs avaient consigné des commentaires afin de respecter les exigences prévues par la politique. En particulier, ils ont cherché des renseignements montrant que le superviseur avait passé en revue le dossier et donné aux membres de la GRC des instructions relatives à l'enquête, et s'était assuré que les membres suivaient les instructions données. L'examen de la Commission a permis de révéler que les superviseurs n'avaient donné d'instructions dans le dossier que dans 44,3 % (456 sur 1 029) des rapports d'incident analysés. La Commission a constaté que seuls 40 % (182 sur 456) des dossiers contenant des instructions données par le superviseur contenaient également des remarques montrant que le membre de la GRC avait suivi les instructions du superviseur. Même si le superviseur peut donner ses instructions et assurer un suivi de manière informelle, la politique exige que ces mesures soient consignées.

Conclusion no 38 : Plus de la moitié des dossiers examinés montraient que les superviseurs du district du Nord ne respectaient pas les exigences prévues par les politiques pour ce qui est de consigner au dossier les observations et les instructions, et n'indiquaient pas si un suivi avait été fait pour vérifier que le membre de la GRC avait suivi les instructions.

En outre, la Commission a constaté que les instructions rédigées, lorsqu'il y en avait, étaient souvent génériques ou n'offraient qu'une orientation limitée. Parmi les remarques inscrites sur la page réservée au suivi effectué par le superviseur dans PRIME-BC, mentionnons les exemples suivants [TRADUCTION] : « assurer un suivi du retour de la personne »; « personne disparue »; « adolescent disparu – enquêter »; « effectuer un suivi »; « retrouver [la personne disparue] »; « enquête toujours en cours pour retrouver [la personne disparue] »; « confirmer que la personne est disparue » et « retrouver la personne ou transmettre le dossier ». La Commission a aussi constaté que, dans aucun rapport d'incident, le superviseur n'avait consigné de remarque selon laquelle aucun acte criminel n'était soupçonnéNote de bas de page 313, et rien n'indiquait que le superviseur avait aidé le membre de la GRC à évaluer le risque et à établir le degré de priorité du dossier. Dans les premières années (de 2008 à 2010), certains commentaires génériques qui dénotaient davantage un suivi passif des rapports d'incident, comme [TRADUCTION] « assurer un suivi du retour de la personne » et « le dossier restera ouvert pour confirmer le retour de la personne disparue », étaient courants. Cependant, la Commission a découvert que l'utilisation de commentaires génériques, comme [TRADUCTION] « retrouver [la personne disparue] », qui n'offrent qu'une orientation limitée aux membres de la GRC était toujours un problème dans les années suivant les modifications apportées en 2010 à la politique divisionnaire. De l'avis de la Commission, les observations ou les instructions du superviseur dans le rapport d'incident devraient fournir suffisamment de détails de façon à ce qu'elles puissent être comprises au moment de leur analyse.

Codage des dossiers opérationnels

Le système de gestion des dossiers opérationnels de la GRC en Colombie-Britannique (PRIME-BC) comporte plusieurs « types d'incidents » distincts pour catégoriser les rapports sur des personnes disparues : personne disparue; personne disparue – risque élevé; fugueur; personne blessée; personne perdue ou attendue depuis longtemps; fugueur en danger; autres personnes disparues; et demande de retrouver une personne. Dans les rapports d'incident analysés, seuls trois types d'incidents ont été utilisés pour catégoriser les rapports sur des personnes disparues pendant la période à l'étude :

  • Personne disparue
  • Personne disparue – risque élevé
  • Demande de retrouver une personne

Selon la GRC en Colombie-Britannique, le type d'incident « demande de retrouver une personne » n'exige pas la même procédure d'enquête que celle destinée aux cas de personnes disparues. Cette catégorie est utilisée pour des alertes concernant des touristes et pour trouver des personnes voyageant de façon légitime, ainsi que pour demander de vérifier le bien-être de personnes. Cette catégorie n'est pas utilisée pour les fugueurs, puisqu'il est présumé que ces derniers ne souhaitent pas être retrouvésNote de bas de page 314.

Dans l'échantillon de départ, contenant 1 851 dossiers de personnes disparues, que la Commission a reçu, 572 rapports d'incident s'étaient vu attribuer le code « demande de retrouver une personne ». Les enquêteurs ont analysé ces rapports pour vérifier si le code « demande de retrouver une personne » avait été employé selon la définition de la GRC relative à ce type d'incident. Les rapports portant le code « demande de retrouver une personne » n'exige pas de l'utilisateur qu'il saisisse les mêmes renseignements requis dans un rapport portant le code « personne disparue », des renseignements limités étant consignés dans le système. De plus, les demandes de retrouver une personne ne sont pas visées par les mêmes exigences rigoureuses prévues par les politiques et les normes d'enquête touchant les rapports de personnes disparues. La Commission a constaté que 45,3 % (259 sur 572) des rapports d'incident portant le code « demande de retrouver une personne » ne correspondaient pas à la définition de la GRC pour ce type de rapport, mais semblaient plutôt porter sur des cas de personnes disparues.

Pendant son enquête, la Commission a été informée de la tenue d'un examen de la direction effectué par la GRC en Colombie-Britannique en 2011-2012, lequel a permis de conclure que le détachement de la GRC de Terrace s'était doté d'une politique locale « tacite » selon laquelle tous les rapports de personnes disparues devaient porter au départ le code « demande de retrouver une personne » pour ensuite porter le code « personne disparue » si la personne était toujours portée disparue à la fin du quart de travail en question. Dans le rapport découlant de cet examen, la GRC a souligné sa grande préoccupation quant à cette pratique et a mentionné que cette politique propre au détachement visait clairement à éviter une « quantité importante » des formalités administratives liées au bon codage. Dans ce rapport, la GRC a également mis en évidence l'absence d'une supervision constante des dossiers opérationnels liés aux personnes disparues. L'officier responsable du détachement a par la suite reçu l'instruction de cesser d'appliquer cette politique locale et de respecter la politique divisionnaireNote de bas de page 315. Les enquêteurs de la Commission ont mené une entrevue auprès du chef du détachement de la GRC de Terrace, lequel a confirmé que la politique locale tacite qui était en place avant son arrivée n'était plus appliquée.

En mai 2012, le Centre des personnes disparues de la police de la Colombie-Britannique, un groupe intégré composé de ressources de la GRC et de services de police municipauxNote de bas de page 316, a réalisé un examen informel des cas de personnes disparues, de personnes disparues à risque élevé et de « demandes de retrouver une personne » dans la province (y compris les dossiers de la GRC et de services de police municipaux) pour déterminer si les cas avaient été codés selon les exigences prévues par les politiques. L'examen a révélé un taux d'erreur de 13 à 24 % au chapitre de l'utilisation des codes d'incidentNote de bas de page 317. Le Centre a donc clarifié en 2014 l'utilisation du code « demande de retrouver une personne » par rapport au code « personne disparue » dans sa formation à l'intention des membres de la GRC.

Conclusion no 39 : La GRC dans le district du Nord semble avoir utilisé de manière inadéquate le code « demande de retrouver une personne » pour des dossiers de personnes disparues.

Cas non résolus

Tous les rapports d'incident que la Commission a examinés pendant son enquête portaient sur des cas de personnes disparues qui ont fini par être retrouvées. L'examen a permis de constater que, dans 80,5 % (724 sur 899) des cas, la personne disparue a été retrouvée moins de 24 heures après le signalement et que, dans 96,6 % (868 sur 899) des cas, la personne disparue a été retrouvée après moins d'une semaineNote de bas de page 318.

Les cas non résolus ne représentent qu'une petite proportion des dossiers de personnes disparues et pouvaient donc ne pas faire partie de l'échantillon reçu en raison du caractère aléatoire de la démarche adoptée par la Commission. La Commission a par la suite demandé tous les dossiers de personnes disparues signalées dans le district du Nord de 2008 à 2012 qui n'avaient pas encore été réglésNote de bas de page 319. La GRC a cerné 31 cas de personnes disparues qui demeuraient non résolus en date du 27 février 2015 et a fourni des renseignements provenant du système de gestion des cas de la GRC présentant un résumé des circonstances des cas non résolusNote de bas de page 320. Selon ces renseignements, 58 % (18 sur 31) des cas visaient des personnes qui s'étaient présumément noyées ou qui étaient portées disparues à la suite d'une « mésaventure » dans la nature sauvageNote de bas de page 321; 6 % (2 sur 31) des cas sont considérés comme étant un suicide; 22 % (7 sur 31) des cas se rapportaient à des personnes qui demeuraient disparues, mais dont la disparition n'était pas considérée ni démontrée comme étant liée à un acte criminel; et 13 % (4 sur 31) des cas concernaient des personnes dont la disparition était considérée comme étant liée à un acte criminel ou pour lesquelles un acte criminel avait été démontré à la suite d'une enquêteNote de bas de page 322. Les renseignements fournis par la GRC ne comprenaient pas cependant de données démographiques, comme le sexe, l'âge ou l'ethnie des personnes visées, ni de l'information sur la nature ou la portée des enquêtes.

À la suite de la publication de son rapport intitulé Les femmes autochtones disparues et assassinées : Un aperçu opérationnel national (2014), la GRC s'est engagée à procéder à l'examen de tous les cas non résolus de femmes autochtones disparues ou assassinées dont est chargée la GRC et qui avaient été relevés dans ce rapportNote de bas de page 323. Au cours d'une rencontre avec des membres de la Direction générale, la GRC a confirmé que les divisions avaient reçu l'instruction d'examiner les cas non résolus de femmes autochtones disparues ou assassinées, notamment de vérifier que toutes les possibilités d'enquête avaient été entièrement explorées et de s'assurer d'établir un calendrier de communication avec les membres des familles concernéesNote de bas de page 324. Questionnés à ce sujet par les enquêteurs de la Commission, les membres de la GRC en Colombie-Britannique étaient incapables de fournir de l'information précise sur les examens de suivi des cas non résolus de femmes autochtones disparues ou assassinées qui relevaient du district du Nord de la Colombie-Britannique, bien qu'ils aient dit que des examens avaient été effectuésNote de bas de page 325. Les membres de la GRC ont fait remarquer que, en règle générale, les examens des cas non résolus sont très complexes, donnant lieu parfois à un examen externe ou à une analyse médico-légale, et que chaque cas peut être traité différemment, puisqu'il n'existe pas de procédure ou de structure prévue pour ces examensNote de bas de page 326.

En juin 2015, la GRC a publié une mise à jour du rapport de 2014, laquelle promettait d'aborder « les progrès accomplis par la GRC sur les plans des enquêtes, des procédures et de la prévention pour donner suite aux prochaines étapes prévues dans l'Aperçu opérationnel national 2014 »Note de bas de page 327. Cependant, en ce qui concerne l'engagement de la GRC de réaliser un examen de tous les cas non résolus de femmes autochtones disparues ou assassinées, la mise à jour du rapport indique seulement que la GRC a examiné tous les cas non résolus de femmes autochtones disparues ou assassinées relevant de sa compétence et a conclu que « les enquêtes correspondantes étaient menées avec diligence et que les ressources appropriées y étaient consacréesNote de bas de page 328 ». Hormis cela, la mise à jour du rapport ne présente aucun détail ni élément de fond au sujet des cas ou des procédures de la GRC pour ce qui est d'examiner les cas non résolus. Vu l'incapacité de la GRC de fournir en temps opportun les dossiers non réglés de personnes disparues qui lui avaient été demandés et l'absence de renseignements concernant les examens de suivi des cas non résolus, la Commission demandera à la GRC une mise à jour à cet égard et décidera si d'autres mesures d'enquête devraient être prises par la Commission relativement à la manière dont les enquêtes sur ces cas ont été menées et à la façon dont ces cas ont par la suite été examinés.

Politiques de la GRC

Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC – Personnes disparues

La Commission a examiné la politique nationale actuelle de la GRC relative aux personnes disparues pour déterminer si elle prend en considération les problèmes que la Commission a relevés dans son examen des rapports d'incident de 2008 à 2012, ainsi que certaines des préoccupations soulevées par des organisations de défense des droits de la personne et des libertés civiles, des organisations gouvernementales et non gouvernementales et des commissions d'enquête.

La politique nationale de la GRC ayant trait aux personnes disparues est exposée au chapitre 37.3. du Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC. La Commission a examiné la version la plus récente de cette politique au moment de la rédaction du présent rapport, soit celle datée du 5 septembre 2014. La version précédente était en vigueur depuis 2008. Elle a été modifiée dans le cadre de la Stratégie concernant les personnes disparues, que la GRC avait récemment mise au point et qui avait été présentée en 2014 afin d'accroître la qualité des enquêtes sur les personnes disparues. Selon la GRC, les modifications représentent des pratiques exemplaires établies, lesquelles visent à « assurer des services normalisés, professionnels et uniformes dans le cadre des enquêtes sur des personnes disparues menées par la GRCNote de bas de page 329 ».

La politique nationale établit une norme nationale de portée générale relativement aux enquêtes sur les cas de personnes disparues. Parmi les principales modifications apportées à la politique, mentionnons les suivantes : l'ajout d'une nouvelle définition nationale des termes « personne à risque élevé » et « style de vie à risque élevé »; un accent supplémentaire mis sur l'importance de la consignation des renseignements dans les dossiers opérationnels; l'adoption d'un formulaire obligatoire d'évaluation des risques et d'un nouveau formulaire de réception de cas; ainsi qu'une annexe révisée de la politique, qui présente une liste de vérification des renseignements concernant les personnes disparues.

Dans les sections suivantes, nous examinons les principales modifications apportées à la politique nationale pour déterminer si elles traitent des problèmes décelés à la suite de l'examen par la Commission de rapports d'incident.

Définitions

La dernière version de la politique nationale a beaucoup changé en ce qui concerne les définitions qu'elle contient. Elle modifie la définition du terme « personne disparue », ajoute les définitions des termes « personne à risque élevé » et « style de vie à risque élevé », et supprime la définition du terme « fugueur » que contenait la version de 2008 de la politique.

La dernière version de la politique définit une « personne disparue » comme étant « une personne dont la disparition a été signalée par ou à la police parce qu'on ignore où elle se trouve, quelles que soient les circonstances de la disparition, qui est réputée disparue jusqu'à ce qu'elle soit retrouvéeNote de bas de page 330 ». Selon la définition précédente, une personne disparue était une « [p]ersonne qui reste introuvable et qui pourrait : avoir besoin d'aide afin de retrouver sa famille ou de rentrer chez elle; être victime d'une infraction; avoir besoin de soins médicaux immédiats; avoir une déficience mentale et être incapable de prendre soin d'elle-même ou qui pourrait constituer un danger pour elle-même ou autruiNote de bas de page 331. » La dernière version de la politique souligne désormais qu'une personne est réputée disparue, quelles que soient les circonstances de la disparition, jusqu'à ce qu'elle soit retrouvée. Elle ne tente pas de définir des circonstances particulières qui pourraient restreindre de manière déraisonnable les cas pouvant faire l'objet d'une enquête comme étant des cas de « personnes disparues ».

Dans la dernière version de la politique, la définition particulière du terme « fugueur » a été supprimée et fait partie de la nouvelle définition du terme « personne à risque élevé »Note de bas de page 332. Des membres de la GRC à la Direction générale ont expliqué que les fugueurs font désormais partie de la définition du terme « personne à risque élevé » en raison des caractéristiques observées fréquemment dans de tels cas, notamment la consommation de drogues et d'alcool, des antécédents de violence ou de violence dans la famille, et le manque de ressources et d'attaches familialesNote de bas de page 333. Si les versions précédentes de la politique accordaient à chaque membre de la GRC la latitude voulue pour assigner un degré de priorité d'enquête aux cas concernant des fugueurs chroniquesNote de bas de page 334, on s'attend maintenant à ce que les membres de la GRC considèrent les fugueurs comme des personnes à risque élevé, conformément à la nouvelle définitionNote de bas de page 335.

La version de 2014 de la politique nationale ajoute également l'expression « style de vie à risque élevé », laquelle est définie comme le « style de vie de personnes qui participent à des activités dangereuses ou qui s'associent à de telles personnes, ou de personnes qui fréquentent des lieux dangereux ou qui habitent de tels lieux par choix personnel ou en raison de circonstances personnellesNote de bas de page 336 ».

À titre de principe directeur, la politique nationale indique ce qui suit : « Le signalement d'une personne disparue donne rapidement lieu à une enquête rigoureuse, quels que soient le sexe, l'âge, la race, la nationalité ou l'origine ethnique, la couleur, la religion, l'orientation sexuelle, les croyances, le statut social ou le style de vie de la personneNote de bas de page 337. » Elle indique explicitement ce qui suit : « Il ne faut en aucun cas dire à une personne qui signale la disparition d'une autre personne qu'elle doit attendre une période donnée avant qu'un rapport ne soit déposéNote de bas de page 338. »

Dans leur ensemble, les principes directeurs et les modifications apportées aux définitions abordent certaines des préoccupations soulevées par des organisations de défense des droits de la personne et des libertés civiles et la Commission d'enquête sur les femmes portées disparues (2012), qui soutenaient que l'un des facteurs sous-jacents au retard ou à l'inaction des services de police au moment d'enquêter à la suite du signalement de femmes disparues tenait à un préjugé systémique contre les personnes marginalisées et les femmes autochtones.

Conclusion no 40 : Les définitions et les principes directeurs de la politique nationale révisée sur les personnes disparues tiennent compte des préoccupations soulevées par la Commission d'enquête sur les femmes portées disparues (2012).

Formulaire obligatoire d'évaluation des risques et nouveau formulaire de réception de cas

D'après la GRC, l'une des plus grandes modifications apportées à la politique nationale révisée est l'obligation d'effectuer dès que possible après la réception du rapport une évaluation des risques concernant la personne disparueNote de bas de page 339. Selon la politique révisée, le membre de la GRC faisant enquête doit faire ce qui suit : « Déterminer la procédure d'enquête à suivre en fonction des circonstances, de même que tous les facteurs de risque en lien avec la personne disparue, p. ex. établir s'il s'agit d'une personne à risque élevéNote de bas de page 340. » Le membre de la GRC doit remplir le formulaire « Évaluation des risques courus par les personnes disparues », ce qui l'aidera à établir la bonne intervention et les ressources nécessairesNote de bas de page 341, et consulter son superviseur au sujet de l'intervention qui convientNote de bas de page 342.

Selon la GRC, le formulaire obligatoire d'évaluation des risques vise principalement à favoriser la participation du superviseur dès le début de l'enquêteNote de bas de page 343. De plus, d'après la Stratégie concernant les personnes disparues de la GRC (2014), l'adoption du formulaire national d'évaluation des risques est une initiative à l'appui des efforts déployés par la GRC visant à faire preuve de responsabilisation en assurant une direction et une supervision solides relativement aux enquêtes sur les cas de personnes disparuesNote de bas de page 344. La Commission estime que l'instauration d'un formulaire national d'évaluation des risques constitue une mesure positive et répond de façon générale aux recommandations formulées par la Commission d'enquête sur les femmes portées disparues (2012) en Colombie-Britannique, laquelle avait mis en évidence les préoccupations selon lesquelles les services de police prenaient des décisions fondées sur des évaluations du risque erronées, et a aussi recommandé l'établissement de facteurs de risque normalisés en vue des évaluations du risqueNote de bas de page 345. Compte tenu des définitions élargies des termes « personne à risque élevé » et « style de vie à risque élevé » contenues dans la politique nationale, la Commission a relevé certaines lacunes dans le contenu du formulaire « Évaluation des risques courus par les personnes disparues ».

Destiné aux membres de la GRC, le formulaire « Évaluation des risques courus par les personnes disparues » comporte 13 questions qui exigent une réponse par « Oui » ou « Non ». Si le membre répond « Oui » à l'une des questions, il doit conclure que l'évaluation des risques « doit être examinée immédiatement en consultation avec un superviseur afin de déterminer l'intervention à mener et les ressources à déployerNote de bas de page 346 » [caractères gras dans l'original].

À la lumière des nouvelles définitions de la politique nationale, les fugueurs pourraient être considérés comme des personnes à risque élevé, et une personne pourrait courir un risque en raison d'un style de vie à risque élevé. Malgré ces nouvelles définitions, la Commission a constaté que le formulaire d'évaluation des risques ne comportait pas de questions qui incitaient les membres de la GRC à considérer les fugueurs comme des personnes à risque élevé potentielles ni de questions amenant les membres de la GRC à prendre en considération les facteurs relatifs aux personnes ayant un « style de vie à risque élevé ».

Seules deux questions du formulaire portent sur le style de vie de la personne disparue, à savoir les suivantes : « La personne est-elle impliquée dans le commerce du sexe, fait-elle de l'auto-stop, s'adonne-t-elle au jeu ou est-elle itinérante? » et « La personne est-elle associée à des gangs ou à d'autres groupes du crime organisé? » Ces questions présentent des facteurs liés au style de vie de moins grande portée que ceux de la définition de l'expression « style de vie à risque élevé » dans la politique, laquelle précise qu'une personne pourrait courir un risque du fait de son association avec des personnes qui participent à des activités dangereuses ou parce qu'elle fréquente ou habite des lieux dangereux. Selon le point de vue de la Commission, la politique fournit, de façon judicieuse, une définition adaptée de l'expression « style de vie à risque élevé », mais les questions figurant actuellement sur le formulaire ne reflètent pas les mêmes possibilités de facteurs liés au style de vie à risque élevé. Le formulaire d'évaluation des risques est conçu comme un outil d'enquête et indique qu'il peut y avoir d'autres facteurs à prendre en considération et à consigner au moment de déterminer les risques courus et l'enquête à effectuerNote de bas de page 347. Toutefois, le formulaire ne prévoit pas d'espace pour un exposé des faits ou des questions qui inciteraient les membres de la GRC à cerner d'autres facteurs de risque élevé et entraîneraient la participation immédiate du superviseur. La Commission se préoccupe donc de la possibilité que certains cas à risque élevé puissent ne pas être portés à l'attention du superviseur aux premières étapes de l'enquête si les questions auxquelles il faut répondre par « Oui » ou « Non » utilisées dans la liste de vérification de l'évaluation des risques représentent un nombre trop restreint de facteurs.

Conclusion no 41 : L'adoption à l'échelon national du formulaire « Évaluation des risques courus par les personnes disparues » répond aux préoccupations soulevées par la Commission d'enquête sur les femmes portées disparues, mais son contenu ne prend pas complètement en considération les nouvelles définitions prévues par la version de 2014 de la politique nationale.

Recommandation no 26 : Que la GRC examine et modifie son formulaire « Évaluation des risques courus par les personnes disparues » pour s'assurer qu'il contient des questions qui aident les membres de la GRC à évaluer l'éventail complet des risques que pourraient courir les personnes à risque élevé, y compris les fugueurs et les personnes ayant un style de vie à risque élevé.

La Commission a également découvert que, même si la politique nationale modifiée rend obligatoire l'évaluation des risques, elle ne donne pas aux membres ni aux superviseurs des directives claires en ce qui concerne la nécessité de consigner l'évaluation des risques dans le dossier opérationnel. Selon la politique nationale, le formulaire d'évaluation des risques, une fois rempli, a pour but d'aider à établir l'« intervention qui convientNote de bas de page 348 ». Le formulaire en soi est toutefois une liste de vérification et ne prévoit pas une évaluation descriptive des risques, des commentaires ou des directives du superviseur, et il n'offre pas la possibilité de consigner des facteurs explicatifs que les 13 questions à réponses fermées du formulaire pourraient ne pas aborder. La politique nationale n'exige pas non plus que les membres consignent l'évaluation des risques dans le dossier opérationnel, qu'ils l'effectuent de nouveau, qu'ils l'élargissent ou qu'ils consignent la nouvelle évaluation des risques tout au long de l'enquête.

Depuis 2010, la politique divisionnaire de la GRC en Colombie-Britannique prévoit un article indiquant ce qui suit : [TRADUCTION] « À mesure que le temps passe, ou que de nouveaux renseignements ou de nouvelles pistes d'enquête sont découverts, le risque que court la personne disparue pourrait changer, et l'évaluation des risques doit ainsi être étendue, effectuée de nouveau et consignée de façon continueNote de bas de page 349. » Bien que la politique divisionnaire contienne cette disposition depuis 2010, l'examen des dossiers qu'a fait la Commission a quand même révélé des lacunes au chapitre de la consignation par les membres de la GRC de l'évaluation des risques.

De l'avis de la Commission, la politique nationale devrait énoncer les attentes liées à la formulation des risques et à la consignation de l'évaluation en question, puisque la GRC a souligné l'importance de démontrer le respect des obligations redditionnelles et de veiller à ce que les interventions dans le cadre des enquêtes sur les cas de personnes disparues soient exhaustives et coordonnées. Par conséquent, en plus de rendre obligatoire le fait de remplir la liste de vérification de l'évaluation des risque, la politique nationale devrait aussi mettre l'accent sur l'importance de consigner en détail l'évaluation des risques au dossier.

Conclusion no 42 : La politique nationale révisée sur les personnes disparues n'exige pas des membres qu'ils consignent en détail l'évaluation des risques au dossier.

Recommandation no 27 : Que la GRC modifie sa politique nationale sur les personnes disparues pour y ajouter l'exigence claire de consigner en détail l'évaluation des risques au dossier et de mettre à jour l'évaluation des risques à mesure que le cas évolue.

Consignation de l'information dans les dossiers opérationnels et collecte de l'information

La politique nationale révisée met clairement en évidence l'exigence selon laquelle les membres de la GRC doivent consigner dans le détail toutes les mesures prises en matière d'enquête dans leur carnet et dans le système de gestion des dossiersNote de bas de page 350.

Selon la même politique, les superviseurs doivent « confirmer » que la bonne procédure d'enquête est en coursNote de bas de page 351, confirmer la poursuite de l'enquête jusqu'à ce que la personne disparue ait été retrouvéeNote de bas de page 352 et contrôler le dossier d'enquête en permanence pour s'assurer que toutes les mesures prises dans le cadre de l'enquête sont documentées comme il se doitNote de bas de page 353. Comme cela a été mentionné précédemment, l'examen des rapports d'incident de la Commission a révélé des déficiences sur le plan de la qualité de la consignation de l'information dans les rapports d'incident relatifs aux enquêtes sur des personnes disparues établis de 2008 à 2012 par des membres de la GRC et des superviseurs dans le district du Nord. Dans ce contexte, la Commission estime que la GRC a réglé adéquatement le problème de la consignation de l'information par les membres de la GRC en mettant davantage l'accent sur l'exigence, prévue par sa politique révisée et visant les membres de la GRC, de consigner en détail les mesures d'enquête prises dans le système de gestion des dossiers. La politique nationale, néanmoins, ne dit pas explicitement que les superviseurs doivent consigner leurs commentaires et directives à l'intention des membres de la GRC dans le rapport d'incident. Étant donné que la GRC a précisé, dans sa stratégie nationale concernant les personnes disparues (2014), qu'une supervision efficace est nécessaire pour vérifier que la politique et les obligations redditionnelles sont respectéesNote de bas de page 354, la Commission est d'avis que la politique nationale devrait établir des exigences claires et uniformes pour que les superviseurs consignent dans le rapport d'incident leurs observations et directives à l'intention des membres de la GRC. Cette initiative contribuerait à la réalisation de l'objectif de la GRC visant l'uniformisation à l'échelon national et garantirait qu'une démarche uniforme soit adoptée à l'égard de la supervision des enquêtes sur les cas de personnes disparues. En outre, les constatations de la Commission découlant de l'examen de rapports d'incident dans le district du Nord montrent qu'il faut préciser cette exigence dans la politique.

Conclusion no 43 : La politique nationale sur les personnes disparues n'exige pas explicitement que les superviseurs consignent dans le rapport d'incident leurs observations et directives à l'intention des membres.

Recommandation no 28 : Que la GRC modifie sa politique nationale sur les personnes disparues pour faire en sorte qu'elle exige des superviseurs qu'ils consignent en détail leurs observations et directives à l'intention des membres.

En ce qui concerne la collecte de l'information, la révision de la politique nationale de la GRC a eu pour effet de modifier la directive, à l'annexe 37-3-1, exposant la méthode d'enquête. La dernière version de l'annexe 37-3-1 ne présente plus de lignes directrices relatives aux enquêtes que les membres de la GRC mènent à la suite de rapports de personnes disparues; plutôt, elle contient maintenant une liste de vérification des renseignements concernant les personnes disparues. Au moyen de la liste de vérification, les membres de la GRC doivent consigner des renseignements en fonction d'un certain nombre de catégories, notamment les suivantes : renseignements concernant le sujet; sources possibles d'ADN; renseignements médicaux et relatifs au comportement; activités et communications; situation particulière de la personne; séquence chronologique des événements et circonstances entourant la disparition; renseignements concernant les amis, la famille et l'environnement de la personne; et emplacement et habitudes de déplacement. En vertu de la politique, les membres de la GRC ont comme instruction de consulter l'annexe 37-3-1 « pour s'assurer de recueillir tous les renseignements pertinentsNote de bas de page 355 ».

La dernière version de la politique nationale comprend également un nouveau formulaire de réception de cas de 12 pages intitulé « Rapport de personne perdue ou disparue et résultats des recherches », qui vise à s'assurer que les renseignements pertinents sont consignés au dossier au début de l'enquête. À la suite d'un certain nombre de consultations, ainsi que de rapports sur les politiques et de rapports de recherche, il a été recommandé qu'un formulaire normalisé de réception des cas de personnes disparues soit élaboré afin de recueillir des renseignements cohérents au début des enquêtesNote de bas de page 356. Si le nouveau formulaire de réception de cas constitue une étape importante en vue d'établir des interventions coordonnées au pays à la suite de rapports sur des personnes disparues, la politique prévoit seulement que les membres envisagent d'utiliser le formulaireNote de bas de page 357.

Questionnés à ce sujet, des membres de la GRC à la Direction générale ont informé les enquêteurs de la Commission que la politique nationale ne prévoit pas actuellement que le formulaire de réception de cas doit être rempli obligatoirement, en raison de préoccupations soulevées par les responsables des divisions selon lesquels le fait de devoir remplir le formulaire pourrait nuire aux activités, compte tenu du nombre élevé de rapports sur des personnes disparues, en particulier de rapports sur des fugueurs chroniques. La GRC a fait savoir qu'elle travaille actuellement à trouver des façons de faciliter l'utilisation du formulaireNote de bas de page 358. Selon la GRC, l'un des objectifs de la Stratégie nationale concernant les personnes disparues consiste à normaliser une démarche organisationnelle à l'égard des enquêtes sur les cas de personnes disparuesNote de bas de page 359. Le recours à un formulaire normalisé de réception de cas contribuerait à atteindre ce but.

Conclusion no 44 : Le formulaire « Rapport de personne perdue ou disparue et résultats des recherches » offre une méthode exhaustive et normalisée de collecte des renseignements pertinents au début des enquêtes, mais le fait que les membres de la GRC peuvent l'utiliser de façon facultative détourne la GRC de l'objectif de normaliser la démarche à l'égard des enquêtes sur les cas de personnes disparues.

Recommandation no 29 : Que la GRC mette à jour sa politique nationale sur les personnes disparues pour obliger les membres à remplir le nouveau formulaire Rapport de personne perdue ou disparue et résultats des recherches au début des enquêtes.

Manuel des opérations de la Division « E » (Colombie-Britannique) de la GRC – Personnes disparues

Dans le cadre de son examen de rapports d'incident, la Commission s'est penchée sur l'évolution de la politique divisionnaire de la GRC en Colombie-Britannique de 2008 jusqu'à la date de sa version la plus récente, soit en 2012.

Selon la GRC, la version de 2012 de la politique divisionnaire sur les personnes disparues en Colombie-Britannique a servi de modèle pour les révisions de la politique nationaleNote de bas de page 360. Cependant, à la lumière du nouvel accent mis sur la normalisation à l'échelon national, des définitions modifiées et des nouveaux formulaires mentionnés dans la version révisée de la politique nationale, il pourrait y avoir quelques aspects pour lesquels la politique divisionnaire pourrait devoir être mise à jour de façon à ce qu'elle soit conforme aux nouvelles exigences de la politique nationale.

Recommandation no 30 : Que la GRC examine et modifie la politique divisionnaire sur les personnes disparues en Colombie-Britannique pour veiller à ce qu'elle soit conforme à la politique nationale révisée.

Formation de la GRC

Des responsables de la GRC ont informé les enquêteurs de la Commission qu'une formation obligatoire concernant les enquêtes sur les cas de personnes disparues n'est pas offerte à la Division Dépôt ni au Centre de formation de la région du Pacifique en Colombie-BritanniqueNote de bas de page 361. Questionnés à ce sujet, les responsables de la GRC en Colombie-Britannique ont répondu que les politiques et les procédures orientent les membres et que les nouveaux membres reçoivent une formation pratique pendant le Programme de formation pratiqueNote de bas de page 362.

La participation au Programme de formation pratique ne garantit toutefois pas que les nouveaux membres reçoivent une formation pratique concernant les enquêtes sur les cas de personnes disparues puisque les cas utilisés dans le cadre de la formation pratique sont ceux sur lesquels travaillent les nouveaux membres et qu'un cas de personne disparue pourrait se présenter ou non.

D'après la GRC, les membres en Colombie-Britannique peuvent consulter le "E" Division Service Standards Investigation Guide, au moyen de leur ordinateur de bureau et de tout terminal mobile de traitement de données pour les véhicules, pour les aider à mener certaines enquêtes. Le guide présente des exigences obligatoires, des normes minimales en matière d'enquête et des lignes directrices générales, ainsi que les responsabilités des superviseurs, dans le cadre des enquêtes sur les cas de personnes disparuesNote de bas de page 363. De plus, les membres de la GRC en Colombie-Britannique peuvent consulter le Guide d'enquête pour les premiers intervenants, qui a été élaboré par le Bureau des normes et pratiques d'enquête de la Colombie-Britannique et est accessible à partir de tous les terminaux mobiles de traitement de données dans la province. Ce guide sert également de ressource principale pour les membres de la GRC en leur recommandant des interventions dans le cadre des enquêtes sur les adultes disparusNote de bas de page 364.

Une formation relative aux enquêtes sur les personnes disparues est maintenant offerte aux membres qui souhaitent la suivre. Par exemple, le Centre des personnes disparues de la police de la Colombie-Britannique a établi récemment un dossier de formation au sujet du traitement des enquêtes sur les cas de personnes disparues. Sur demande, le Centre offre la formation aux superviseurs ou aux membres de la GRCNote de bas de page 365.

En outre, le plan d'action découlant de la Stratégie concernant les personnes disparues (2014) de la GRC souligne que l'élaboration de trois nouveaux cours en ligne par le Centre national pour les personnes disparues et restes non identifiés devrait être achevée au plus tard en avril 2015. Selon la GRC, les nouveaux cours, dans le cadre du plan d'action, devraient contribuer à [TRADUCTION] « accroître la sensibilisation » et à mettre en évidence les pratiques exemplaires établies relativement aux enquêtes sur les cas de personnes disparuesNote de bas de page 366. Destinés aux enquêteurs, les cours portent sur les enquêtes sur les cas d'enfants disparus, d'adultes disparus et de restes non identifiésNote de bas de page 367. D'après les documents de la Stratégie concernant les personnes disparues, les nouveaux cours permettront d'améliorer la formation à l'intention des membres de la GRC au chapitre de leurs responsabilités dans le cadre des enquêtes sur les cas de personnes disparuesNote de bas de page 368; cependant, il n'est pas clair si ces nouveaux cours seront obligatoires pour les membres de la GRC. Étant donné que la formation a été élaborée récemment en même temps que la stratégie, la Commission n'a pu évaluer ces cours dans le cadre du présent examen.

Conclusion no 45 : Que ce soit au sein de la Division Dépôt, au Centre de formation de la région du Pacifique ou dans le cadre du Programme de formation pratique, la GRC ne s'est pas dotée d'une formation obligatoire au sujet des enquêtes sur les cas de personnes disparues.

Recommandation no 31 : En vue de favoriser une démarche normalisée et de faciliter des interventions efficaces, exhaustives et coordonnées dans le cadre des enquêtes sur les cas de personnes disparues, que la GRC envisage de rendre obligatoire pour les membres des services de police contractuels une formation sur les exigences relatives aux personnes disparues prévues dans la politique nationale révisée.

Conclusion

Au moyen de sa stratégie nationale concernant les personnes disparues, la GRC a fait une priorité des enquêtes sur les cas de personnes disparuesNote de bas de page 369. Au cours d'une rencontre avec les enquêteurs de la Commission, les responsables de la GRC ont dit que le but de la nouvelle stratégie concernant les personnes disparues et de la politique nationale est de normaliser les processus d'enquête de la GRC sur les cas de personnes disparues et de garantir la même qualité des enquêtes partout au paysNote de bas de page 370. Selon la GRC, la stratégie oriente et favorise des interventions efficaces, exhaustives et coordonnées à l'égard des enquêtes sur les cas de personnes disparues sur le territoire de compétence de la GRC. Grâce à une supervision efficace, elle vise en particulier à établir la preuve du respect des obligations redditionnelles et à vérifier que les membres de la GRC se conforment à la politiqueNote de bas de page 371.

Au cours de l'enquête, la GRC a communiqué à la Commission son plan d'action prévu, lequel présente des mesures destinées à atténuer ou à supprimer les difficultés passées qui minaient les enquêtes sur les cas de personnes disparuesNote de bas de page 372. La Commission a examiné ce plan et fait remarquer qu'il donne suite à certaines des recommandations formulées par diverses organisations gouvernementales et non gouvernementales ainsi que par la Commission d'enquête sur les femmes portées disparues (2012), lesquelles ont réclamé que des politiques et des pratiques uniformes concernant les personnes disparues soient élaborées, notamment une définition normalisée du terme « personne disparue », un outil d'évaluation des risques courus par les personnes disparues, une plus grande responsabilisation des superviseurs à l'égard du contrôle de la qualité et un suivi accru des cas de personnes disparues non résolusNote de bas de page 373.

Dans le cadre de l'enquête, la Commission a soulevé des préoccupations quant à la manière dont les membres de la GRC du district du Nord de la Colombie-Britannique ont mené, de 2008 à 2012, les enquêtes sur les cas de personnes disparues. En particulier, les enquêteurs ont relevé des lacunes au chapitre de la qualité de la consignation de l'information dans les rapports d'incident concernant des personnes disparues, de même que l'absence d'éléments consignés, dans ces rapports, démontrant que ceux-ci avaient donné lieu rapidement à une enquête rigoureuse en conformité avec la politique, y compris pour les cas que la GRC avait désignés comme « à risque élevé ».

La démarche de la GRC à l'égard des enquêtes sur les cas de personnes disparues a beaucoup évolué à la suite de modifications essentielles apportées aux politiques et adoptées depuis la période visée par l'étude de la Commission, en particulier des modifications apportées en 2012 à la politique divisionnaire ainsi que des modifications plus récentes, apportées en 2014 à la politique nationale. Des efforts considérables ont été déployés pour que l'on puisse s'assurer de l'instauration d'une démarche globale et d'une responsabilisation accrue concernant la façon dont les enquêtes sur les cas de personnes disparues sont menées partout au pays, et la GRC semble avoir pris en considération certaines recommandations principales formulées par des organisations de défense des droits de la personne et des libertés civiles, des organisations gouvernementales et non gouvernementales, de même que des commissions d'enquêteNote de bas de page 374. Les progrès réalisés au chapitre des politiques de la GRC sont encourageants; cependant, la mise en œuvre des politiques sera essentielle à leur efficacité. Ces recommandations visent à améliorer la consignation de l'information par les membres de la GRC dans les rapports d'incident, à renforcer le rôle des superviseurs ainsi qu'à améliorer les politiques et la formation ayant trait aux enquêtes sur les cas de personnes disparues.

Partie IV : Mobilisation des collectivités et de la GRC

Afin de mieux connaître les expériences des collectivités avec la GRC dans le district du Nord et d'évaluer leur satisfaction et leur confiance à l'égard de la GRC et du processus de plaintes du public, la Commission a mobilisé les collectivités et les membres de la GRC.

Un enquêteur de la Commission s'est rendu dans 21 collectivités du nord de la Colombie-Britannique pour y réaliser des entrevues, ainsi que dans d'autres endroits de la Colombie-Britannique, de l'Alberta et de l'Ontario. Les personnes interrogées comprenaient 64 membres de collectivités, notamment des chefs de bande, des administrateurs de bande, des conseillers de bande, des employés municipaux ou de villes ainsi que des représentants d'organisations non gouvernementales, et, dans chaque collectivité, des membres de la GRC du détachement local, y compris des chefs de détachement, des membres du service de police des Premières Nations et des membres des Services généraux. À la lumière des préoccupations soulevées par des organisations de défense des droits de la personne et des libertés civiles au sujet du traitement des personnes autochtones, la Commission s'est attachée à réaliser des entrevues auprès de chefs de collectivités autochtones.

L'enquêteur s'est rendu notamment dans des collectivités éloignées et semi-éloignées à prédominance autochtone, dans de petites collectivités et dans des collectivités de taille moyenne comportant une population autochtone et situées à proximité d'au moins une collectivité des Premières Nations, ainsi que dans une grande collectivité comportant une population autochtone et située à proximité d'une collectivité des Premières Nations.

Les participants ont exprimé leur souhait de faire entendre leur voix et ont formulé des propositions concrètes afin de contribuer à l'amélioration du maintien de l'ordre dans le nord de la Colombie-Britannique. Des déclarations ont été obtenues de façon confidentielle, et les participants ont parlé ouvertement et avec franchise.

Tout a été mis en œuvre pour refléter avec exactitude, dans le présent rapport, les commentaires des membres des collectivités et des membres de la GRC. Bon nombre d'exemples de nature anecdotique ont été fournis, dont la Commission n'a pu établir la véracité. Les opinions et les suggestions demeurent donc celles des personnes interrogées et ne représentent pas nécessairement les points de vue communs des membres des collectivités, de la GRC ou de la Commission.

Ces renseignements sont présentés pour étude par la GRC.

Points de vue des collectivités

Dans les petites collectivités du district du Nord, en particulier celles comportant une forte population des Premières Nations, les membres de la GRC affectés au service de police des Premières Nations et aux Services générauxNote de bas de page 375 assurent des services de police améliorés (axés sur la participation des collectivités et la création de liens) et essentiels (liés aux activités d'application de la loi). Interrogés au sujet des relations établies avec la GRC, les membres des petites collectivités ont répondu, de façon prédominante, qu'ils entretenaient de bonnes relations. Presque toutes les collectivités auxquelles un membre du service de police des Premières Nations était expressément affecté ont formulé des commentaires positifs concernant ce membre de la GRC. La majorité des membres des collectivités des Premières Nations ont cependant exprimé aux enquêteurs de la Commission le souhait d'obtenir les services de police de base dans leur collectivité. Certaines personnes interrogées ont attribué cette impression largement favorable à l'égard de la présence de la GRC dans les petites collectivités aux efforts consacrés par les membres de la GRC pour établir des relations avec les membres de la collectivité.

À l'inverse, les enquêteurs de la Commission ont entendu de nombreux commentaires négatifs au sujet du maintien de l'ordre dans les grands centres urbains, où l'anonymat des membres de la GRC peut contribuer, ou être perçu comme contribuant, à des interactions moins positives avec le public.

Le leadership exercé par la GRC était un autre problème récurrent soulevé par certains membres des collectivités. D'après les déclarations faites par les membres des collectivités et des membres de la GRC, le leadership exercé par la GRC semble être un facteur déterminant crucial dans les relations entre les collectivités et la police.

À cet égard, la Commission a remarqué certains signes dénotant que la GRC déploie des efforts pour affecter des membres compétents à des postes de direction dans le district du Nord. Les nombreux commentaires positifs formulés par des membres des collectivités des Premières Nations à l'égard des chefs de détachement dans leur région reflètent la réussite des efforts de la GRC à cet effet. Même dans les grandes collectivités urbaines, où des commentaires négatifs ont été formulés au sujet des services de police de première ligne, des membres de certaines organisations autochtones ont fait des commentaires positifs au sujet du chef de détachement. En particulier, la GRC semble avoir déployé des efforts considérables pour affecter des chefs de détachement sensibilisés aux enjeux culturels ayant une vaste expérience des relations avec les collectivités autochtones dans les collectivités comportant une forte population autochtone. Dans de nombreux cas, les chefs de détachement interrogés par les enquêteurs comptaient de longs états de service dans le Nord et auprès des Autochtones. Dans certains cas, une expérience préalable du travail auprès des autochtones était une exigence du poste, et les collectivités ont participé elles-mêmes à la sélection du chef de la GRC.

Des membres des collectivités ont formulé une critique courante, ayant trait à leur perception du roulement fréquent des agents de la GRC, y compris des chefs de détachement. Selon eux, la collectivité établit une bonne relation avec le membre de la GRC qui y est affecté, peu importe son grade, et, trop souvent, ce dernier est muté ailleurs, ce qui oblige la collectivité à recommencer à établir une relation avec le nouveau membre de la GRC qui lui est assigné.

Il convient de souligner un dernier problème énoncé par plusieurs membres des collectivités, en particulier dans les grandes collectivités urbaines, à savoir la perception selon laquelle la GRC – et la société en général – fait preuve de racisme envers les personnes autochtones et les membres des Premières Nations. Certaines personnes interrogées ont parlé de la méfiance, découlant de ce racisme perçu, que des Autochtones entretiennent à l'égard des services de police. Elles ont aussi mentionné, à titre de facteur général expliquant un manque de confiance envers la GRC, que celle-ci a participé, dans le passé, à appréhender des enfants devant être placés dans des pensionnats.

Des membres des collectivités ont formulé des recommandations afin d'améliorer les services de police assurés par la GRC, notamment la recommandation selon laquelle on devrait offrir aux membres de la GRC des activités de sensibilisation culturelle axées sur les différences locales. Il a aussi été recommandé qu'une telle formation touche les problèmes généraux découlant des séquelles des pensionnats.

D'autres recommandations avaient trait directement ou indirectement aux ressources, notamment le financement des services de police; par exemple, des collectivités côtières ne reçoivent que des services de police à temps partiel, mais souhaiteraient des services de police à temps plein ou, du moins, une plus grande présence policière. Ces collectivités s'inquiètent principalement du fait que, en raison de la faible présence policière, des crimes pourraient être commis dans leur collectivité. En général, les collectivités disent avoir besoin de membres de la GRC supplémentaires dans de nombreuses régions, de même que de plus de ressources affectées à des groupes spécialisés, comme les groupes de la violence familiale.

Points de vue des membres de la GRC

Certains membres de la GRC ont reconnu l'importance d'établir des relations avec les collectivités pour que leur travail soit couronné de succès dans les petites collectivités; dans les grandes collectivités urbaines, les membres de la GRC ont dit avoir moins de temps pour entrer en rapport avec des personnes et peuvent ne pas connaître la personne avec qui ils interagissent. Ils ont aussi souligné l'importance d'un leadership efficace en vue d'établir de bonnes relations communautaires et de prêcher par l'exemple au chapitre des interactions des membres de la GRC avec le public. Les membres de la GRC ont laissé entendre qu'il serait bon que les collectivités comprennent les limites imposées aux membres du service de police des Premières Nations, c'est-à-dire la distinction entre les services de police améliorés et les services de police de base, de même que les limites imposées aux autorités policières. Par exemple, les membres de certaines petites collectivités souhaitaient que les membres du service de police prennent des mesures d'application de la loi qui pourraient être considérées comme dépassant leurs pouvoirs prévus par la loi, comme le fait de procéder à des perquisitions sans motifs raisonnables.

Certains membres de la GRC ont proposé la mise sur pied dans les villes d'un programme des services de police des Premières Nations ou d'une stratégie sur les services de police autochtones, lesquels pourraient assurer une forme de services de police améliorés dans les collectivités urbaines.

Domaines d'enquête

Dans le cadre de ses activités de mobilisation, la Commission a demandé aux membres des collectivités et aux membres de la GRC de formuler des commentaires concernant des domaines d'enquête particuliers. Voici une synthèse des commentaires reçus.

Fouilles de personnes effectuées par un membre de sexe opposé

Peu de préoccupations ont été soulevées par des membres des collectivités et des membres de la GRC au sujet des fouilles de personnes effectuées par un membre de sexe opposé. Selon les commentaires formulés par les membres de la GRC, il semble cependant qu'il n'existe pas de démarche normalisée pour effectuer de telles fouilles. L'impression qui se dégageait est que, selon la disponibilité de membres de la GRC de sexe féminin, les membres de la GRC de sexe masculin « gèrent le risque » lié à la fouille de femmes.

Les membres de la GRC de sexe féminin étaient disponibles ou non selon qu'il s'agissait d'un détachement de grande taille, où elles sont habituellement disponibles, ou d'autres détachements, où il n'y avait pas de membres de la GRC de sexe féminin. Les enquêteurs ont été informés du fait que, dans de nombreux cas, des membres de la GRC de sexe masculin demandent qu'une membre de la GRC soit présente lors de la fouille d'une femme. Néanmoins, même dans les détachements de grande taille, des membres de la GRC de sexe féminin peuvent ne pas être facilement disponibles, et les membres de la GRC de sexe masculin effectueront la fouille corporelle (par palpation) avant le transport de la détenue. Des membres de la GRC de sexe féminin ont aussi mentionné qu'elles devaient effectuer la fouille par palpation sur des hommes en l'absence de membres de la GRC de sexe masculin.

Il semble qu'il n'existait pas de méthode uniforme pour la fouille corporelle (par palpation) de personnes de sexe opposé. Certains membres de la GRC ont décrit ce type de fouille comme étant une fouille sommaire et une fouille à la hauteur de la taille et de tout ce qui peut être à la portée des mains de la personne. Un chef de veille a cependant décrit une fouille effectuée en bordure de route comme étant le contrôle, au moyen du dos de la main, des mains et des poignets de la personne, l'utilisation de la tranche de la main sur la région au-dessus, au centre et en-dessous de la poitrine, et ce, sans la fouille à la hauteur des parties génitales et le tâtonnement des poches, et la fouille des bas. Les membres de la GRC n'avaient pas non plus les mêmes points de vue au sujet de la nécessité ou non de retirer le soutien-gorge d'une prisonnière avant qu'elle soit placée en cellule.

État d'ébriété dans un lieu public

Des membres des collectivités se sont dits quelque peu préoccupés par le maintien de l'ordre concernant des personnes en état d'ébriété dans un lieu public. Il est communément perçu que le problème des personnes en état d'ébriété dans un endroit public constitue un problème de société dont les causes sont multiples, y compris les séquelles des pensionnats indiens pour les membres des Premières Nations, et que la GRC doit répondre aux demandes de service dans les cas de personnes intoxiquées même si aucune mesure d'application de la loi n'est requise.

Des membres de la GRC ont confirmé que, même si bon nombre de personnes sont incarcérées pour s'être trouvées en état d'ébriété, c'est-à-dire parce qu'elles étaient ivres dans un endroit public, en vertu de la Liquor Control and Licensing Act de la Colombie-Britannique ou parce qu'elles troublaient la paix aux termes du Code criminel, elles sont rarement accusées formellement. Un membre de la GRC a dit que le fait d'accuser les personnes intoxiquées d'une infraction criminelle ne constituerait pas une utilisation judicieuse des ressources, compte tenu du travail qui serait demandé pour établir les documents nécessaires afin d'entamer une poursuite au pénal, et que la délivrance d'une contravention à ces personnes avait peu d'incidence, puisqu'elles ne sont souvent pas en mesure de payer le montant de l'amende.

Le traitement réservé aux personnes intoxiquées et les efforts pour trouver une solution à leur détention dans une prison de la GRC semblaient dépendre de la relation existante entre les agents de police et la collectivité en question. Les membres de la GRC dans les petites collectivités étaient enclins à prendre plus de temps pour interagir avec les personnes en état d'ébriété parce qu'ils connaissaient souvent ces personnes et avaient également plus de temps pour agir ainsi. Par contraste, dans les grandes collectivités, les membres de la GRC interrogés ont dit avoir moins de temps pour interagir avec les personnes, ce qui, en pratique, se traduit par le fait qu'ils prennent moins de temps pour envisager des solutions de rechange dans le cas des personnes intoxiquées. Cela pourrait également être attribuable au fait que, dans les petites collectivités, il n'y a pas de gardien affecté à la surveillance des cellules de la GRC, ce qui incite davantage à éviter de placer ces personnes en détention, à la différence des grandes collectivités, où il y a des gardiens de cellule à temps plein.

Recours à la force

Les réponses des personnes interrogées concernant le recours à la force étaient, dans une grande mesure, de nature générale. Certains membres des collectivités se sont dits préoccupés par des incidents antérieurs de recours à la force dans une collectivité en particulier, mais la question semble avoir été réglée par le chef de détachement actuel concerné.

De plus, divers membres de collectivités ont mentionné des incidents de recours à la force connus ou très médiatisés; néanmoins, dans de nombreux cas, ils estimaient que les agents de police avaient employé une force appropriée au moment d'intervenir auprès des personnes visées.

Aucune plainte du public n'a été reçue à la suite de l'enquête de la Commission, et aucun renseignement précis incitant la Commission à vérifier des allégations n'a été communiqué.

Violence familiale

Même si les personnes interrogées ont convenu que la violence familiale est un problème, dans l'ensemble, elles estimaient que la GRC assurait une intervention adéquate dans le cadre des incidents de violence familiale. Dans de nombreux cas, il a été souligné que la GRC participait aux activités de comités locaux s'occupant de questions de violence familiale.

Une personne interrogée a formulé le commentaire selon lequel les agents de police n'empêchent pas l'agresseur dans une relation conjugale d'accéder à la collectivité d'où il a été banni. Une autre personne interrogée a dit que les agents de police n'interviennent pas dans une dispute familiale à moins qu'un événement ne survienne. Certains membres des collectivités ont dit que la GRC tarde à répondre aux demandes de service dans les cas de violence familiale lorsque ses agents ne se trouvent pas dans la collectivité ou à leur bureau.

Personnes disparues

En ce qui concerne certains exemples récents, des personnes interrogées ont dit que la GRC n'avait pas pris au sérieux des signalements de personnes disparues dans une collectivité en particulier. Dans les deux cas en question, une personne en position d'autorité de la collectivité a dû joindre personnellement un membre de la direction du détachement de la GRC pour déclencher une intervention appropriée. Dans l'un de ces cas, la GRC a d'abord dit à la personne d'attendre 24 heures avant de signaler la personne disparue, et une autre personne interrogée a présenté un récit semblable. En revanche, une personne interrogée a parlé des efforts positifs déployés pour retrouver une personne disparue, notamment le recours à un avion et à un hélicoptère de la GRC.

Les membres de la GRC interrogés ont dit que bon nombre des cas de personnes disparues comprennent des scénarios de recherche et de sauvetage, plutôt qu'un acte criminel soupçonné. Cela dit, ils ont affirmé de manière catégorique que tous les dossiers de personnes disparues sont pris au sérieux.

Les membres de la GRC œuvrant dans les grandes collectivités ont également formulé des commentaires au sujet des « fugueurs chroniques » provenant de foyers de groupe. Ils ont dit que les mesures prises à la suite du signalement de fugueurs chroniques exerçaient des pressions importantes sur les ressources de la GRC, ces cas nécessitant parfois le déploiement de tous les membres de la GRC en service.

Un membre de la GRC a dit que, bien que tous les signalements de personnes disparues soient pris au sérieux, l'intervention diffère entre les cas de fugueur chronique et ceux d'enfants disparus. Un autre membre de la GRC s'est fait l'écho de ces commentaires et a expliqué qu'il tente de collaborer avec les foyers de groupe pour qu'ils établissent des critères réalistes de signalement de la disparition de jeunes sous leur soins, afin d'éviter les signalements inutiles de personnes disparues, par exemple lorsqu'un jeune n'est pas réellement porté disparu, mais qu'il n'a simplement pas respecté une condition en ce qui a trait au couvre-feu.

Adolescents

En ce qui a trait aux interactions des membres de la GRC avec les adolescents, les enquêteurs ont entendu peu de commentaires concernant les interactions, dans un contexte d'application de la loi, des agents de police avec les adolescents. Toutefois, de nombreux commentaires positifs ont été formulés au sujet des efforts déployés par les membres de la GRC afin d'interagir avec les adolescents dans les petites collectivités. Entre autres initiatives, des membres de la GRC vont dans les écoles, participent à des événements communautaires et à des activités pour adolescents, organisent des activités à l'intention des adolescents et participent à des activités sportives avec les adolescents. Ces commentaires positifs semblent refléter la relation que la GRC entretient dans ces collectivités.

Partie V : Conclusion

Afin de remplir son mandat, la GRC dans le nord de la Colombie-Britannique – et partout au Canada – doit obtenir la confiance du public. Les agents de police peuvent réussir à s'acquitter de leurs fonctions uniquement lorsque les gens ont confiance en eux et les considèrent comme légitimes. La GRC a gagné une telle confiance parce qu'elle est tenue de respecter une norme rigoureuse de transparence et de responsabilisation, à la fois à l'interne et à l'externe. La GRC se plie à cette norme en partie grâce à des démarches telles que la présente enquête d'intérêt public.

La Commission a déposé des plaintes et entrepris une enquête d'intérêt public afin de déterminer s'il existait des problèmes systémiques en ce qui concerne le maintien de l'ordre assuré par la GRC dans le nord de la Colombie-Britannique en fonction des domaines suivants : cas de personnes disparues, personnes en état d'ébriété dans un lieu public, rapports sur le recours à la force, violence familiale et fouilles d'une personne. La Commission a mis l'accent sur la transparence et la reddition de comptes au moment d'examiner les politiques et les procédures opérationnelles, le rôle des superviseurs et la consignation des mesures prises par les membres de la GRC dans les rapports.

L'enquête de la Commission a consisté en un examen attentif d'éléments de preuve documentaire comportant plus de 100 000 pages de documents, notamment les politiques, les procédures et les documents de formation pertinents de la GRC, plus de 4 000 rapports d'incident de la police, 301 rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent, les lois et la jurisprudence applicables, des rapports d'enquête, des rapports d'organisations de défense des droits de la personne et des libertés civiles, des rapports d'enquête du coroner et des études universitaires; et comportait de nombreuses entrevues réalisées auprès de membres de la GRC et de membres de collectivités.

De plus, les enquêteurs ont déployé des efforts visant à mobiliser 21 collectivités du nord de la province, rencontrant ainsi près de 100 personnes. Les résultats des activités de mobilisation des collectivités ont fait ressortir un certain degré de satisfaction à l'égard de la GRC dans le nord de la Colombie-Britannique. Cependant, de nombreux membres de collectivités ont toujours l'impression que la GRC fait preuve de partialité à l'égard des personnes autochtones. Bien que la Commission n'ait pu, au moyen de son examen des politiques et des dossiers, étayer ce point de vue, il est reconnu que les faiblesses sur le plan de la transparence et de la responsabilisation, relevées dans le cadre de la présente enquête, peuvent susciter la méfiance à l'égard de la GRC et nourrir des perceptions négatives du public.

À cet égard, deux problèmes principaux ont été constamment soulevés tout au long de l'enquête d'intérêt public : le fait que les mesures prises par les agents de police n'avaient pas été consignées adéquatement dans les rapports d'incident ou dans les rapports sur le recours à la force, et le manque de cohérence avec laquelle les dossiers ont fait l'objet d'un examen par le superviseur. En outre, l'examen effectué par la Commission des pratiques en matière de fouille d'une personne et de recours à la force a révélé des lacunes importantes au chapitre de la production des rapports qui entravent ou limitent grandement la tenue d'examens indépendants. Ces problèmes ne sont pas sans importance, puisqu'ils touchent directement l'obligation de rendre compte à laquelle est tenue la GRC.

Les agents de police sont investis de pouvoirs considérables et sont responsables devant le public de la manière dont ces pouvoirs sont exercés. En la matière, les politiques de la GRC soulignent clairement l'importance d'un contenu détaillé et de qualité dans les dossiers, y compris la consignation de l'information par les membres de la GRC. Ces derniers doivent rendre des comptes à l'égard des données figurant dans les rapports sur les incidents auxquels ils sont affectés; les superviseurs et les chefs doivent, pour leur part, rendre compte du caractère exhaustif et de l'exactitude des données. Cependant, la Commission a constaté plusieurs cas de non-conformité avec les politiques en ce qui concerne la consignation de l'information dans les domaines à l'examen. Même si certains membres de la GRC et superviseurs considèrent la consignation de l'information comme un fardeau administratif, l'enjeu est beaucoup plus important. Le fait de ne pas consigner adéquatement l'information ouvre la porte à des conclusions négatives légitimes concernant les interventions policières.

Il est possible de réaliser un examen à la fois à l'interne et à l'externe des activités policières au moyen d'un système efficace de production de rapports. Maintenir l'intégrité d'un tel système est essentiel pour favoriser une culture de la transparence au sein de la GRC. La Commission estime que la direction de la GRC a la responsabilité de promouvoir une telle culture en s'assurant que tous les membres de la GRC comprennent la nécessité de rendre des comptes au moyen d'une consignation adéquate de l'information.

Les examens effectués par le superviseur apparaissent comme un autre enjeu problématique. La part élevée de dossiers qui n'étaient pas entièrement conformes aux lignes directrices stratégiques et l'absence générale de commentaires ou de directives du superviseur dans les dossiers, comme pour ceux relatifs aux personnes disparues, dénotaient un examen inadéquat des dossiers par le superviseur. En raison de leur fonction de leadership, les superviseurs ont une incidence sur la culture organisationnelle, notamment au chapitre de l'intégrité et de la transparence. Par conséquent, l'importance d'une supervision efficace a été mise en lumière tout au long de l'enquête de la Commission, puisqu'il s'agit d'une dimension essentielle de la reddition de comptes à l'interne.

[TRADUCTION]
Les services de police peuvent établir, restaurer ou accroître la confiance du public au moyen de mesures qui améliorent la reddition de comptes, en particulier en acceptant de se soumettre à une surveillance par des civils. Une telle surveillance exige de la transparence; les forces de police affichant une grande intégrité éprouvent moins de difficultés à faire preuve de transparence et de responsabilisation.
- Office des Nations Unies contre la drogue et le crime

Nations Unies, New York : 2011
Handbook on police accountability, oversight and integrity, Criminal Justice Handbook Series

Enfin, la Commission a fait face à certaines difficultés concernant les systèmes et les procédures, qui entravaient ou ne facilitaient pas la tenue d'un examen externe. Par exemple, la Commission prévoyait réaliser un examen des dossiers pour vérifier la conformité des membres de la GRC avec les politiques et les procédures en matière de fouille des personnes, y compris les cas de fouilles à nu. Cependant, on a informé la Commission que le système de gestion des dossiers de la GRC en Colombie-Britannique ne permettait pas d'effectuer un suivi de la fréquence ou du type de fouilles effectuées, ni de les comptabiliser, et ne permettait pas non plus de rendre compte des fouilles de personnes effectuées par un membre de sexe opposé. Même si ces renseignements peuvent être consignés dans le calepin du membre de la GRC, l'absence d'une consignation ou d'un suivi systématique a grandement restreint la capacité de la Commission d'évaluer la conformité et de déterminer l'existence d'un problème systémique à ce sujet. La Commission avait auparavant constaté dans le cadre d'un rapport « l'importance d'une gestion et d'un entreposage adéquats des documents pour en faciliter l'examenNote de bas de page 376 ». Cela demeure un problème permanent qui entrave la capacité de la Commission de tenir la GRC responsable de ses actes. Essentiellement, le fait que des services de police sont tenus de rendre des comptes signifie qu'ils acceptent et, en échange, facilitent la tenue d'examens externes.

Comme l'efficacité des services de police repose en grande partie sur le consentement du public, il est essentiel, au nom de la légitimité, que la GRC obtienne la confiance du public qu'elle sert. Un tel consentement est fondé sur la transparence des pouvoirs des policiers, l'intégrité affichée pendant l'exercice de ces pouvoirs et l'obligation de rendre compte qui y est rattachée.

En conclusion, la présente enquête n'a pas permis de tirer des conclusions selon lesquelles les membres de la GRC dans le nord de la Colombie-Britannique avait systématiquement fait preuve d'inconduite; l'enquête n'a pas non plus entraîné une seule plainte du public contre un membre de la GRC en particulier. Cependant, l'enquête a permis de relever des éléments montrant qu'il existe des lacunes sur le plan des politiques et des rapports, des problèmes de conformité ainsi que le besoin d'une formation et d'une supervision plus rigoureuses. À cet égard, la Commission a formulé plusieurs recommandations visant à améliorer les politiques, les procédures et les pratiques de la GRC.

Après avoir examiné la plainte, je dépose par les présentes mon rapport conformément au paragraphe 45.76(1) de la Loi sur la GRC.

Le président,
Ian McPhail, c.r.

Annexe A : Liste des conclusions et des recommandations

Conclusions

Fouilles d'une personne

Conclusion no 1 : Les définitions des termes « fouille corporelle » et « fouille à (corps) nu » dans le Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC sont imprécises et ne permettent pas suffisamment d'orienter les membres afin de distinguer clairement les deux types de fouille.

Conclusion no 2 : La définition du terme « fouille à (corps) nu » dans la politique nationale de la GRC n'est pas conforme aux définitions de la jurisprudence actuelle.

Conclusion no 3 : L'exigence de la politique nationale de la GRC selon laquelle les membres doivent obtenir l'approbation d'un superviseur avant d'effectuer une fouille à nu « lorsqu'il y en a un de disponible » n'est pas suffisamment stricte pour que l'on puisse s'assurer qu'une telle approbation est obtenue dans toutes les situations, sauf les plus urgentes.

Conclusion no 4 : Les articles 4.3. et 4.4. du chapitre 21.2. du Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC manquent de clarté en ce qui concerne les situations où une fouille à nu effectuée par un membre de sexe opposé est autorisée.

Conclusion no 5 : L'article 3. du chapitre 21.2. du Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC ne présente pas clairement aux membres les motifs obligatoires permettant d'effectuer un examen corporel, les approbations nécessaires ou les exigences au chapitre de la production de rapports.

Conclusion no 6 : Le libellé actuel de l'article 5.2. du chapitre 21.2. du Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC est flou et ambigu en ce qui a trait à l'exigence prévue à l'article 2.4., selon laquelle il faut consigner les motifs de la tenue d'une fouille et la façon dont elle a été effectuée, et au support matériel où ces renseignements doivent être consignés.

Conclusion no 7 : L'obligation prévue dans la politique de la GRC en Colombie-Britannique d'enlever le soutien-gorge est contraire aux principes de la common law. En l'absence de motifs raisonnables d'effectuer une fouille à nu, le retrait du soutien-gorge d'une prisonnière est déraisonnable.

Conclusion no 8 : En limitant la formation sur les fouilles à nu à l'examen des politiques, des procédures et des lois pertinentes et à des devoirs par écrit, le Programme de formation des cadets de la GRC n'offre pas une formation adéquate aux cadets sur ce qui constitue une fouille à nu.

Conclusion no 9 : Le fait qu'un membre ou que le détachement doive demander la tenue d'une formation pratique continue sur les fouilles corporelles ou toute autre formation sur les fouilles à nu à l'échelle de la division, plutôt que de rendre obligatoire une telle formation, ne permet pas de s'assurer que les membres ont une expérience et des connaissances adéquates dans ces domaines.

Conclusion no 10 : Au chapitre de la responsabilisation, la Commission constate que les pratiques et les politiques relatives aux fouilles d'une personne de la Division « E » (Colombie-Britannique) et de la Direction générale de la GRC ne sont pas adéquates.

Conclusion no 11 : La politique de la GRC relative à la fouille d'une personne ne prévoit aucune mesure particulière pour protéger les droits des adolescents selon l'esprit de la Déclaration de principes à l'article 3 de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents et les pratiques policières d'autres administrations.

Maintien de l'ordre concernant des personnes en état d'ébriété dans un lieu public

Conclusion no 12 : De 2008 à 2012, les membres de la GRC n'ont formulé aucun motif pour l'arrestation d'une personne en état d'ébriété dans 22,6 % des rapports d'incident et n'ont décrit le degré d'ébriété de la personne que dans 55,8 % des rapports d'incident.

Conclusion no 13 : Étant donné la proportion élevée de dossiers qui n'étaient pas conformes aux lignes directrices de la politique, la Commission conclut que l'examen par le superviseur des rapports d'incident dans le cas des personnes s'étant trouvées en état d'ébriété dans un lieu public était inadéquat.

Conclusion no 14 : Le facteur précisé à l'article 7.2.2.2. du chapitre 18.1. « Arrestation et détention » du Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC, qui renvoie à la capacité d'une personne d'empêcher qu'elle ne se blesse ou qu'elle ne blesse quelqu'un d'autre, ne correspond pas entièrement à la jurisprudence actuelle et ne tient pas compte adéquatement d'un plus vaste éventail de risques, pris en considération par l'expression « se met en danger ou met d'autres personnes en danger ».

Conclusion no 15 : Le chapitre 19.2. « Évaluation des réactions et assistance médicale » du Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC donne aux membres une orientation claire et prévoit une reddition de comptes en exigeant des membres qu'ils consignent le détail de leur évaluation et des mesures prises.

Conclusion no 16 : Le chapitre 19.9. « Mise en liberté des prisonniers » du Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC est conforme à l'article 497 du Code criminel, mais ne prévoit pas la liste complète des exceptions énumérées à cet article.

Conclusion no 17 : Le chapitre 39.2. du Manuel des opérations de la Direction générale de la GRC ayant trait à l'arrestation des jeunes respecte les obligations en matière de notification précisées dans la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, mais ne donne pas de directives aux membres de la GRC concernant le fait d'aviser les parents lorsqu'un jeune est arrêté sans mandat et détenu par la GRC sans accusation.

Conclusion no 18 : En ce qui concerne l'examen de solutions de rechange à la détention et la mise en liberté des personnes intoxiquées, l'article 1.3.3.1. du chapitre 100.5. du Manuel des opérations de la GRC en Colombie-Britannique n'est pas conforme à la politique nationale et au Code criminel.

Conclusion no 19 : La formation de la GRC sur le maintien de l'ordre concernant des personnes en état d'ébriété dans un lieu public est conforme aux politiques et aux procédures nationales et divisionnaires.

Recours à la force

Conclusion no 20 : Malgré une légère amélioration en 2012, une proportion importante des rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent ont échoué à différents égards à leur obligation d'expliquer les interventions où il y a eu recours à la force conformément aux politiques et aux exigences de formation.

Conclusion no 21 : La politique nationale de la GRC établit clairement la responsabilité des membres à l'égard de la production de rapports sur les interventions où il y a eu recours à la force.

Conclusion no 22 : La politique nationale de la GRC concernant les rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent ne fournit pas de directives claires aux superviseurs pour ce qui est de repérer les problèmes liés au recours à la force dans les rapports, de les signaler et d'en faire le suivi.

Conclusion no 23 : Le manque de renseignements dans la base de données sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent à l'égard de la détection et de la résolution des problèmes dans les rapports portant sur les interventions où il y a eu recours à la force réduit la valeur de la base de données en tant que mécanisme de responsabilisation.

Conclusion no 24 : La formation à l'intention des superviseurs n'éclaire pas davantage la politique nationale relativement à la détection des problèmes dans les rapports sur le recours à la force.

Conclusion no 25 : Le matériel de formation et les guides de l'utilisateur liés au Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents et aux rapports sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent sont conformes aux politiques nationales et énoncent de façon complète les attentes quant à l'explication des interventions où il y a eu recours à la force.

Violence familiale

Conclusion no 26 : L'examen de la Commission a permis de constater que 34,6 % des rapports ne comprenaient pas le document obligatoire sur le contrôle de l'assurance de la qualité par le superviseur dans les cas de violence familiale.

Conclusion no 27 : Bien que la politique divisionnaire prévoie que le document sur le contrôle de l'assurance de la qualité par le superviseur dans les cas de violence familiale doit être rempli pendant le quart de travail où le dossier a été reçu, moins de la moitié des documents examinés (46,3 %) ont été remplis dans les trois jours suivant la date du rapport d'incident.

Conclusion no 28 : L'article 1.6.1. de la politique nationale sur la violence dans les relations ne distingue pas clairement les infractions au Code criminel et celles prévues par une autre loi fédérale ou une loi provinciale ou territoriale.

Conclusion no 29 : L'article 2.2.4. de la politique nationale sur la violence dans les relations, qui exige des membres de la GRC qu'ils obtiennent les déclarations de la victime et des témoins dans la mesure du possible, semble ne pas être suffisamment rigoureux compte tenu de l'exigence prévue par la politique selon laquelle toute plainte de violence dans les relations doit faire l'objet d'une enquête et être documentée.

Conclusion no 30 : L'article 2.2.7. de la politique nationale sur la violence dans les relations est imprécis et ne reflète pas adéquatement les dispositions du Code criminel sur les perquisitions et les saisies.

Conclusion no 31 : La politique divisionnaire ne fournit pas aux membres de la GRC de directives claires sur la manière de désigner un cas de violence dans les relations comme présentant le plus haut risque.

Conclusion no 32 : La politique divisionnaire souligne l'importance de la supervision et prévoit une assurance de la qualité et une surveillance adéquates des enquêtes sur les cas de violence dans les relations.

Conclusion no 33 : Le Programme de formation des cadets de la GRC permet aux membres d'acquérir les habiletés et les compétences fondamentales nécessaires pour composer avec les situations de violence dans les relations et pour comprendre les fondements juridiques à cet égard.

Conclusion no 34 : La formation offerte aux membres de la GRC en Colombie-Britannique semble couvrir les éléments essentiels des enquêtes sur les cas de violence dans les relations.

Personnes disparues

Conclusion no 35 : Près de la moitié (46 %) des rapports d'incidents ne permettaient pas d'établir que la GRC dans le district du Nord avait enquêté rapidement et rigoureusement sur les cas de personnes disparues, et ce, contrairement à la politique.

Conclusion no 36 : Près de la moitié (49,4 %) des rapports d'incident établis de 2008 à 2012 relativement à des cas de personnes disparues désignés par la GRC du district du Nord comme étant à « risque élevé » ne démontraient pas que les cas avaient fait l'objet d'une enquête rapide et rigoureuse.

Conclusion no 37 : Les rapports sur les cas d'adolescents disparus que la GRC dans le district du Nord avait désignés comme étant des fugueurs récidivistes, à répétition ou chroniques étaient plus susceptibles que des rapports sur d'autres cas de comporter des lacunes sur le plan de la consignation des mesures d'enquête, notamment l'absence inexpliquée de dates relatives à l'enquête et l'absence de renseignements consignés ayant trait aux évaluations du risque ou aux entretiens réalisés avec les personnes disparues.

Conclusion no 38 : Plus de la moitié des dossiers examinés montraient que les superviseurs du district du Nord ne respectaient pas les exigences prévues par les politiques pour ce qui est de consigner au dossier les observations et les instructions, et n'indiquaient pas si un suivi avait été fait pour vérifier que le membre de la GRC avait suivi les instructions.

Conclusion no 39 : La GRC dans le district du Nord semble avoir utilisé de manière inadéquate le code « demande de retrouver une personne » pour des dossiers de personnes disparues.

Conclusion no 40 : Les définitions et les principes directeurs de la politique nationale révisée sur les personnes disparues tiennent compte des préoccupations soulevées par la Commission d'enquête sur les femmes portées disparues (2012).

Conclusion no 41 : L'adoption à l'échelon national du formulaire « Évaluation des risques courus par les personnes disparues » répond aux préoccupations soulevées par la Commission d'enquête sur les femmes portées disparues, mais son contenu ne prend pas complètement en considération les nouvelles définitions prévues par la version de 2014 de la politique nationale.

Conclusion no 42 : La politique nationale révisée sur les personnes disparues n'exige pas des membres qu'ils consignent en détail l'évaluation des risques au dossier.

Conclusion no 43 : La politique nationale sur les personnes disparues n'exige pas explicitement que les superviseurs consignent dans le rapport d'incident leurs observations et directives à l'intention des membres.

Conclusion no 44 : Le formulaire « Rapport de personne perdue ou disparue et résultats des recherches » offre une méthode exhaustive et normalisée de collecte des renseignements pertinents au début des enquêtes, mais le fait que les membres de la GRC peuvent l'utiliser de façon facultative détourne la GRC de l'objectif de normaliser la démarche à l'égard des enquêtes sur les cas de personnes disparues.

Conclusion no 45 : Que ce soit au sein de la Division Dépôt, au Centre de formation de la région du Pacifique ou dans le cadre du Programme de formation pratique, la GRC ne s'est pas dotée d'une formation obligatoire au sujet des enquêtes sur les cas de personnes disparues.

Recommandations

Fouilles d'une personne

Recommandation no 1 : Que la GRC modifie les définitions des termes « fouille corporelle » et « fouille à (corps) nu » dans le Manuel des opérations de la Direction générale pour éliminer toute ambiguïté et s'assurer que les définitions sont conformes à celles de la jurisprudence actuelle.

Recommandation no 2 : Que la GRC modifie le chapitre 21.2. de sa politique nationale en ce qui a trait aux fouilles d'une personne afin de veiller à une surveillance plus rigoureuse par un superviseur en exigeant expressément l'approbation d'un superviseur avant que soit effectuée une fouille à nu, sauf en cas de circonstances urgentes.

Recommandation no 3 : Que la GRC modifie le chapitre 21.2. de sa politique nationale concernant la fouille d'une personne afin de clarifier les situations où une fouille à nu d'une personne de sexe opposé est autorisée. De plus, la politique devrait énoncer les circonstances ou les critères qui doivent être respectés avant que l'on puisse effectuer ou superviser une fouille à nu d'une personne de sexe opposé (c.-à-d. s'il existe un risque immédiat de blessure ou d'évasion ou dans des circonstances urgentes).

Recommandation no 4 : Que la GRC modifie sa politique relative à l'examen corporel afin de s'assurer qu'elle précise clairement les motifs obligatoires permettant d'effectuer un examen corporel, de même que les approbations requises.

Recommandation no 5 : Que la GRC modifie le chapitre 21.2. de sa politique nationale au sujet des fouilles d'une personne afin de s'assurer que la politique établit l'exigence selon laquelle le membre doit énoncer par écrit les motifs de la tenue d'une fouille et la façon dont elle a été effectuée, notamment les renseignements que les membres doivent inscrire et le support matériel où ils doivent être consignés.

Recommandation no 6 : Que la GRC en Colombie-Britannique modifie sa politique relative aux fouilles d'une personne (chapitre 21.2. du Manuel des opérations) pour tenir compte de la jurisprudence actuelle.

Recommandation no 7 : Que la GRC améliore sa formation élémentaire à la Division Dépôt pour s'assurer que les cadets connaissent les obligations prévues par la loi ainsi que les politiques et procédures pertinentes pour tous les types de fouilles d'une personne.

Recommandation no 8 : Que la GRC améliore la formation sur les fouilles d'une personne pour s'assurer que les membres des divisions connaissent les exigences prévues par la loi ainsi que les politiques et procédures pertinentes en matière de fouille corporelle, de fouille à nu et d'examen corporel, et qu'une telle formation fasse également partie du processus de renouvellement de l'accréditation du maintien des compétences opérationnelles.

Recommandation no 9 : Que la GRC modifie les politiques relatives aux fouilles d'une personne (Manuel des opérations) de la Direction générale et de la Division « E » (Colombie-Britannique) pour accroître la transparence et la responsabilisation en veillant à ce que les politiques comprennent une manière appropriée de documenter et d'évaluer la conformité, ainsi que d'en assurer le suivi, de façon à contribuer à la tenue d'un examen indépendant.

Recommandation no 10 : Que la GRC modifie sa politique nationale sur les fouilles d'une personne pour qu'elle comprenne une orientation et des directives particulières en ce qui concerne la fouille à nu d'adolescents.

Maintien de l'ordre concernant des personnes en état d'ébriété dans un lieu public

Recommandation no 11 : Que la GRC rappelle aux superviseurs du district du Nord l'exigence de faire preuve de rigueur dans leur examen des rapports d'incident et, en particulier, l'importance de s'assurer que tous les rapports d'incident sont adéquatement documentés, particulièrement ceux concernant l'arrestation et la détention d'une personne.

Recommandation no 12 : Que la GRC intègre un examen obligatoire des cas de personnes en état d'ébriété dans un lieu public dans les examens par la direction et les examens de l'assurance de la qualité au sein des services du district du Nord.

Recommandation no 13 : Que la GRC modifie l'article 7.2. du chapitre 18.1. du Manuel des opérations de la Direction générale pour tenir compte de la jurisprudence actuelle.

Recommandation no 14 : Que la GRC modifie le chapitre 19.9. du Manuel des opérations de la Direction générale pour qu'il prévoie la liste complète des exceptions énumérées à l'article 497 du Code criminel.

Recommandation no 15 : Que la GRC modifie le chapitre 39.2. du Manuel des opérations de la Direction générale ayant trait à l'arrestation des jeunes pour y intégrer des directives à l'intention des membres sur les exigences en matière de notification dans les cas où un jeune est arrêté et détenu sans accusation, en particulier dans les cas concernant des jeunes en état d'ébriété dans un lieu public.

Recommandation no 16 : Que la GRC modifie l'article 1.3.3.1. du chapitre 100.5. du Manuel des opérations de la Division « E » pour préciser des conditions de mise en liberté reflétant l'orientation que donne le Code criminel et pour que l'article soit conforme à la politique nationale, laquelle donne aux membres de la GRC l'instruction d'envisager des solutions de rechange à la détention, permettant ainsi d'examiner un plus vaste éventail de possibilités de mise en liberté.

Recours à la force

Recommandation no 17 : Que la GRC, dans le district du Nord de la Colombie-Britannique, veille à ce que les explications des interventions où il y a eu recours à la force soient claires, complètes et entièrement conformes aux politiques, aux lignes directrices et aux exigences de formation.

Recommandation no 18 : Que la GRC établisse des critères et des seuils en matière de signalement afin de faciliter la détection des « problèmes », et donne des directives claires pour ce qui est de signaler les problèmes liés au recours à la force cernés dans les rapports et d'en faire le suivi.

Recommandation no 19 : Que la GRC modifie la base de données sur le comportement du sujet et l'intervention de l'agent ainsi que les politiques sur les rapports pour améliorer la reddition de comptes en s'assurant que les problèmes relevés au moyen du processus d'établissement des rapports peuvent faire l'objet d'une surveillance, d'un suivi et d'un examen indépendant.

Recommandation no 20 : Que la GRC modifie la formation à l'intention des superviseurs afin de fournir des conseils pour ce qui est de repérer et de signaler les problèmes dans les rapports sur le recours à la force.

Violence familiale

Recommandation no 21 : Que la GRC veille à ce que les examens de l'assurance de la qualité au sein des services et les examens par la direction menés chaque année comprennent toujours un examen des enquêtes sur la violence dans les relations.

Recommandation no 22 : Que la GRC modifie l'article 1.6.1. du chapitre 2.4. du Manuel des opérations de la Direction générale pour distinguer correctement les infractions au Code criminel et celles prévues par les lois provinciales ou territoriales.

Recommandation no 23 : Que la GRC modifie l'article 2.2.4. du chapitre 2.4. du Manuel des opérations de la Direction générale pour améliorer la reddition de comptes en exigeant des membres de la GRC qui n'obtiennent pas les déclarations de la victime et des témoins qu'ils consignent les raisons pour lesquelles ils ne les ont pas obtenues.

Recommandation no 24 : Que la GRC modifie l'article 2.2.7. du chapitre 2.4. du Manuel des opérations de la Direction générale pour qu'il soit conforme aux dispositions sur les perquisitions et les saisies prévues à l'article 117.04 du Code criminel.

Recommandation no 25 : Que la GRC en Colombie-Britannique s'assure que la politique divisionnaire établit adéquatement un processus permettant de désigner un cas comme présentant le plus haut risque.

Personnes disparues

Recommandation no 26 : Que la GRC examine et modifie son formulaire « Évaluation des risques courus par les personnes disparues » pour s'assurer qu'il contient des questions qui aident les membres de la GRC à évaluer l'éventail complet des risques que pourraient courir les personnes à risque élevé, y compris les fugueurs et les personnes ayant un style de vie à risque élevé.

Recommandation no 27 : Que la GRC modifie sa politique nationale sur les personnes disparues pour y ajouter l'exigence claire de consigner en détail l'évaluation des risques au dossier et de mettre à jour l'évaluation des risques à mesure que le cas évolue.

Recommandation no 28 : Que la GRC modifie sa politique nationale sur les personnes disparues pour faire en sorte qu'elle exige des superviseurs qu'ils consignent en détail leurs observations et directives à l'intention des membres.

Recommandation no 29 : Que la GRC mette à jour sa politique nationale sur les personnes disparues pour obliger les membres à remplir le nouveau formulaire Rapport de personne perdue ou disparue et résultats des recherches au début des enquêtes.

Recommandation no 30 : Que la GRC examine et modifie la politique divisionnaire sur les personnes disparues en Colombie-Britannique pour veiller à ce qu'elle soit conforme à la politique nationale révisée.

Recommandation no 31 : En vue de favoriser une démarche normalisée et de faciliter des interventions efficaces, exhaustives et coordonnées dans le cadre des enquêtes sur les cas de personnes disparues, que la GRC envisage de rendre obligatoire pour les membres des services de police contractuels une formation sur les exigences relatives aux personnes disparues prévues dans la politique nationale révisée.

Annexe B : Processus de plaintes du public

Le processus de plaintes du public fait partie intégrante du système de reddition de comptes de la GRC. Au titre du paragraphe 45.35(1) de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada (Loi sur la GRC), tout membre du public peut déposer une plainte concernant la conduite d'un membre de la GRC. Les plaintes peuvent être portées à la Commission, directement à la GRC ou à un organisme provincial chargé de recevoir les plaintes concernant les agents de police.

Le paragraphe 45.37(1) de la Loi sur la GRC prévoit également que le président de la Commission peut déposer sa propre plainte lorsqu'il est convaincu qu'il y a des motifs raisonnables de tenir une enquête sur la conduite des membres de la GRC concernés. Le ministre de la Sécurité publique et le commissaire de la GRC sont informés de toutes plaintes déposées par le président. La Commission reçoit les plaintes concernant la conduite en service de membres de la GRC. Elle peut également recevoir des plaintes concernant la conduite de membres de la GRC lorsqu'ils ne sont pas en fonction si elle détermine que cette conduite est susceptible d'avoir des répercussions sur le rendement du membre de la GRC visé ou sur la réputation de la GRC.

La GRC peut rendre une décision sur les plaintes du public de trois manières :

  • La plainte peut faire l'objet d'une enquête aux termes de laquelle un rapport énonçant de façon détaillée la réponse de la GRC aux allégations soulevées dans la plainte est publié;
  • Le plaignant et les membres de la GRC visés peuvent convenir d'une entente à l'amiable, processus au cours duquel des responsables de la GRC rencontrent le plaignant pour examiner les préoccupations et les allégations soulevées dans la plainte et les deux parties s'entendent sur le règlement touchant des allégations précises ou sur toute la plainte;
  • L'enquête sur la plainte du public peut être close ou peut ne pas être entamée selon des critères précisés au paragraphe 45.35(1) de la Loi sur la GRC. Un avis de décision, plutôt qu'un rapport, est établi lorsque la GRC décide de ne pas enquêter sur une plainte ou si l'enquête sur la plainte est close au titre de l'un ou de plusieurs des trois motifs distincts prévus dans la Loi sur la GRC.

Si un plaignant n'est pas satisfait de la manière dont la GRC a rendu une décision sur sa plainte, il peut demander une révision de cette décision. La Commission amorcera un examen et en informera la GRC, lui demandant qu'elle fournisse tous les documents pertinents relatifs à la plainte. La Commission examine la décision de la GRC sur la plainte à la lumière des politiques, des lignes directrices, de la formation et des lois applicables.

Si la Commission juge que la décision de la GRC sur la plainte est raisonnable, elle produira un rapport final à l'intention du plaignant, du commissaire de la GRC et du ministre de la Sécurité publique. Si elle conclue toutefois que la décision sur la plainte n'est pas raisonnable, elle produira un rapport provisoire comportant des conclusions défavorables ou des recommandations à des fins d'amélioration.

À la suite de la réception d'un rapport provisoire de la Commission, le commissaire de la GRC doit fournir à la Commission une réponse indiquant s'il est d'accord ou ne l'est pas avec les conclusions et les recommandations exposées dans le rapport provisoire de la Commission. Avant la fin de la rédaction de son rapport final ou de son rapport provisoire, la Commission pourrait mener une enquête ou demander que la GRC mène une telle enquête en son nom si la Commission doit obtenir de plus amples renseignements afin de parvenir à une conclusion.

Une fois que la Commission a reçu la réponse du commissaire, elle établit le rapport final, lequel est transmis au plaignant, au commissaire, au ministre de la Sécurité publique et aux membres de la GRC visés. Ce rapport est un accusé de réception de la réponse du commissaire et énonce les conclusions et les recommandations finales de la Commission.

Annexe C : Examen de la formation de la GRC

Le Programme de formation des cadets de la Division Dépôt de la GRC est un cours de formation de 24 semaines obligatoire pour toutes les nouvelles recrues de la GRC. Le Programme offre une formation sur les lois ainsi que les politiques et les procédures de la Direction générale de la GRC, de même qu'une formation particulière sur le vaste éventail des compétences requises en matière de maintien de l'ordre dans les collectivitésNote de bas de page 377. Des études de cas et des scénarios sont utilisés tout au long du Programme pour permettre aux cadets d'appliquer et de mettre en pratique les connaissances et les compétences acquises.

Les cadets qui réussissent le Programme de formation des cadets de la GRC et qui se voient offrir un emploi à la GRC doivent par la suite suivre le Programme de formation pratique.

Il s'agit d'un programme de six mois axé sur les compétences visant à aider les nouveaux membres à assurer la transition d'un environnement de formation aux activités des services policiers. Le Programme permet aux nouveaux membres d'appliquer les connaissances et les compétences acquises au cours du Programme de formation des cadets dans un milieu opérationnel grâce à l'orientation et la supervision attentives d'un membre de la GRC possédant plus de deux ans d'expérience. Le Programme se compose de trois étapes, chacune d'elles exigeant du nouveau membre qu'il assume des responsabilités et fasse preuve de jugement et d'autonomie de façon croissanteNote de bas de page 378.

En Colombie-Britannique, dans le cadre du Programme de formation pratique, les nouveaux membres de la GRC doivent effectuer des devoirs et se soumettre à des évaluations ayant pour but de leur faire connaître les politiques nationales, divisionnaires et des détachements ainsi que les loisNote de bas de page 379.

En plus du Programme de formation pratique, les membres de la GRC en Colombie-Britannique peuvent également consulter, au moyen de leur ordinateur de bureau et de tout terminal mobile de traitement de données pour les véhicules, le "E" Division Service Standards Investigation Guide pour les aider à mener certaines enquêtes, notamment celles sur les cas de personnes disparues et les cas de violence dans les relations. Le guide présente des exigences obligatoires, des normes minimales en matière d'enquête et des lignes directrices générales, ainsi que les responsabilités des superviseursNote de bas de page 380. De plus, les membres de la GRC en Colombie-Britannique peuvent consulter le Guide d'enquête pour les premiers intervenants, qui a été élaboré par le Bureau des normes et pratiques d'enquête de la Colombie-Britannique et est accessible à partir de tous les terminaux mobiles de traitement de données dans la province. Ce guide sert également de ressource principale pour les membres de la GRC en leur recommandant des interventions dans le cadre de divers types d'incidentsNote de bas de page 381.

Annexe D : Rapports stratégiques, de consultation et de recherche portant sur les personnes disparues

Amnistie internationale. (2009). Assez de vies volées! Discrimination et violence contre les femmes autochtones au Canada : une réaction d'ensemble est nécessaire. Royaume-Uni : auteur.

Association des femmes autochtones du Canada, Canadian Feminist Alliance for International Action et University of Miami School of Law Human Rights Clinic. (2012). Missing and murdered Aboriginal women and girls in British Columbia, Canada. Colombie-Britannique : auteurs.

Association des femmes autochtones du Canada. (2010). What their stories tell us: Research findings from the Sisters In Spirit Initiative. Ottawa (Ontario) : auteur.

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