Examen des services de police au Yukon

Août 2010

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Présentation de la Commission des plaintes du public contre la GRC

Sommaire

Le gouvernement du Yukon et la GRC ont annoncé qu'ils effectueraient un examen des services de police fournis par la GRC au Yukon en vue de maintenir et de renforcer la confiance du public envers la GRC dans le territoire du Yukon. On a entrepris l'« Examen des services de police au Yukon » (l'Examen) en réponse aux préoccupations exprimées relativement à la manière dont certains membres de la GRC interagissaient avec les collectivités qu'ils servent. L'une des priorités de l'Examen est d'étudier la façon dont les plaintes du public à l'égard de la GRC au Yukon sont actuellement traitées et de formuler des recommandations sur les améliorations nécessaires. Le gouvernement du Yukon et la GRC ont invité la Commission des plaintes du public contre la GRC (la Commission), qui possède une expertise dans le domaine des plaintes du public, à participer à l'examen.

Pour contribuer à l'Examen, la Commission a adopté une approche comprenant trois étapes distinctes mais interreliées afin d'obtenir un aperçu exhaustif du processus de règlement des plaintes du public au Yukon. La Commission a donc :

  • réalisé sur place des examens approfondis des plaintes du public déposées contre la GRC entre le 1er janvier 2005 et le 31 mai 2010;
  • rencontré un certain nombre d'intervenants communautaires au Yukon, tenant compte du fait que de nombreuses personnes ne suivent pas le processus de plaintes du public, et a donc;
  • obtenu de la rétroaction de membres individuels de la GRC en service au Yukon.

Examen des dossiers de plaintes du public

Le premier aspect de la présentation de la Commission concerne les conclusions qui sont ressorties d'un examen des dossiers de plaintes du public de la Division « M » pour les années 2005 à 2010. D'abord et avant tout, l'examen des dossiers de plaintes du public a permis de confirmer que, même si des améliorations sont nécessaires dans certains domaines, le système de traitement des plaintes du public de la GRC au Yukon, dans la mesure où on en fait usage, n'est pas « défectueux ». Dans l'ensemble, la GRC traite les plaintes du public de manière appropriée et conforme aux politiques et aux dispositions législatives.

Voici quelques-unes des observations les plus importantes concernant l'Examen :

  • des dossiers de plainte du public ont été réglés officieusement ou retirés sans qu'il y ait suffisamment d'information à l'appui permettant de déterminer si la mesure prise était appropriée;
  • des dossiers de plainte du public qui étaient clos contenaient suffisamment d'information pour la préparation d'une lettre de règlement à l'attention du plaignant;
  • divers membres de la GRC ayant fait l'objet de nombreuses plaintes du public ont été identifiés.

On a également fait des observations mineures à l'égard de :

  • la communication en temps opportun avec les plaignants;
  • la perception possible de partialité dans les enquêtes.

En outre, le nombre de plaintes du public déposées auprès de la CPP plutôt qu'auprès de la GRC a augmenté de manière importante en 2009 et au cours de la première moitié de 2010.

Les allégations les plus courantes au Yukon correspondent parfaitement aux allégations les plus courantes à l'échelle nationale soulignées antérieurement par la Commission dans son Examen du bilan des plaintes du public de la GRC. En particulier, les types les plus courants d'allégations concernent une attitude répréhensible, une conduite oppressive, la négligence dans le devoir et le recours abusif à la force. Même si certains des plaignants appartenaient à des groupes vulnérables, rien n'indique qu'ils aient été traités d'une manière moins professionnelle.

Bien que le système semble fonctionner, dans l'ensemble, la GRC pourrait se pencher sur les problèmes observés en prenant les mesures suivantes :

  • mettre en place un système officiel d'alerte précoce pour les plaintes du public en vue de cerner les problèmes émergents potentiels concernant des membres individuels;
  • se conformer davantage à la politique de la GRC, qui exige que des motifs soient fournis pour les règlements et les retraits non officiels, par exemple, en rédigeant des lettres de règlement lorsqu'il existe suffisamment d'information pour le faire;
  • respecter rigoureusement les délais imposés par la loi pour les rapports de mise à jour;
  • faire remplir, par l'enquêteur des plaintes du public, un questionnaire sur l'impartialité semblable à celui utilisé dans le cadre du Programme d'observateur indépendant de la CPP-GRC;
  • nommer des enquêteurs internes des plaintes du public, comme l'ont fait d'autres divisions de la GRC. Il y a eu une différence évidente dans la qualité globale des enquêtes sur les plaintes du public lorsque la Division « M » a affecté un membre particulier à un nombre important d'enquêtes sur les plaintes du public en 2006 et en 2007.

Participation des intervenants communautaires

La Commission a rencontré un certain nombre d'intervenants au Yukon afin de comprendre leurs expériences avec la GRC et de déterminer leur niveau de satisfaction et de confiance envers la GRC et le processus de plaintes du public. Même si l'examen des dossiers de plaintes du public de la Division « M » montre que le système fonctionne généralement de manière appropriée, un certain nombre d'organisations communautaires au Yukon estiment que la relation est difficile entre la GRC et les segments des collectivités qu'elle sert.

Les intervenants communautaires ont soulevé un certain nombre de préoccupations à l'égard de la GRC. Toutefois, la majorité d'entre eux ont voulu saisir l'occasion de se faire entendre et offrir des idées concrètes pour l'amélioration des services de police au Yukon. La rétroaction réfl échie de ces intervenants communautaires a permis à la Commission de poser quelques questions clés concernant la GRC et le processus de plaintes du public :

Pourquoi certains membres du public n'ont-ils pas accès au processus de plaintes du public?

Un grand nombre des clients de ces organismes ont indiqué qu'ils connaissaient peu le processus de plaintes ou que leur niveau de confiance à l'égard de ce processus est limité. On a fait allusion à la crainte de « représailles », et un grand nombre de personnes ne croyait pas que la Commission était indépendante de la GRC.

Les membres de la GRC sont-ils préparés pour relever les défis uniques liés à la prestation des services de police dans le Nord canadien et devraient-ils recevoir une orientation détaillée au Yukon avant d'entreprendre leurs fonctions dans le territoire?

Les membres de la GRC au Yukon étaient généralement décrits comme coupés des collectivités qu'ils servent. Par ailleurs, on considère que les membres de la GRC envoyés au Yukon sont trop jeunes et trop inexpérimentés et qu'ils comprennent très peu le milieu dans lequel ils devront travailler. Il y a eu des plaintes au sujet du roulement constant des membres de la GRC, ce qui, selon un grand nombre des participants, mène à des niveaux inconstants de participation de ceux-ci dans la collectivité. La qualité des services de police dépend davantage, selon les participants, de la personnalité d'un membre individuel que des politiques et des procédures de la GRC.

Tous les organismes participants ont recommandé que les membres de la GRC reçoivent une formation portant particulièrement sur le Yukon avant d'entreprendre leurs fonctions dans la collectivité. Les taux élevés de problèmes sociaux liés à la consommation d'alcool et aux problèmes de santé mentale sont considérés comme des défis de taille pour tout agent de police, et les participants étaient d'avis que la plupart des membres de la GRC au Yukon ne sont pas outillés pour y faire face. La plupart des organismes sont prêts à participer à la formation des nouveaux membres qui arrivent au Yukon.

Devrait-il y avoir des voies de liaison et de communication plus officielles entre la GRC et les groupes communautaires?

Selon la rétroaction reçue, il est clair que la GRC devrait améliorer ses relations avec les intervenants communautaires. Certaines organisations ont indiqué qu'une meilleure communication entre la GRC et elles permettrait de régler de nombreux problèmes. Par exemple, on nous a indiqué que, à la lumière de préoccupations relatives aux personnes qui ont des taux d'alcoolémie élevés, une meilleure communication et une liaison régulière avec l'hôpital général de Whitehorse seraient très avantageuses pour le public de même que pour les deux organisations.

Est-il possible pour la Commission d'accroître sa présence dans le territoire afin de mieux informer le public et d'améliorer le niveau de services offerts aux Yukonnais?

Un certain nombre de sources ont indiqué que la Commission est méconnue ou même inconnue. Malgré les nombreuses activités et les nombreux programmes d'information mis en oeuvre pour communiquer avec les collectivités éloignées, certaines personnes sont plus difficiles à joindre en raison de la géographie du Canada. Par conséquent, la Commission reconnaît qu'elle doit accroître sa présence dans le territoire, et les options à cet égard feront l'objet de discussions dans les mois à venir.

Rétroaction de membres de la GRC

La Commission a également obtenu la rétroaction de membres de la GRC qui sont actuellement en service au Yukon. Ces membres ont exprimé leurs frustrations à l'égard du système en place et, en particulier, à l'égard des plaintes frivoles et non fondées déposées contre eux ainsi que des règlements des plaintes, qui s'étirent parfois en longueur. Les membres étaient également d'avis que la Commission était parfois agressive et qu'elle ne reconnaît pas le bon travail des membres de la GRC. Ces membres ont déclaré que la Commission doit travailler à bâtir la confiance du public en la GRC.

En ce qui concerne leur travail, les membres de la GRC ont indiqué que la GRC au Yukon devrait d'abord et avant tout donner aux agents de police les ressources nécessaires à leur travail. Ils ont insinué qu'on leur demande toujours de tout faire.

Conclusion

Le projet de loi C-38 récemment déposé à la Chambre des communes propose des amendements à la Loi sur la GRC qui permettraient de répondre à plusieurs des préoccupations soulevées au cours de l'Examen, tout particulièrement en ce qui concerne les délais de règlement des plaintes sans fondement. Ce faisant, on espère que la Commission pourra bien répondre aux attentes du public en ce qui concerne la surveillance civile de la GRC.

Un thème essentiel parmi ceux soulevés dans le cadre des rencontres avec les intervenants communautaires était le souhait de voir une « police communautaire » réintégrée au Yukon. Essentiellement, les parties consultées se sont fait l'écho des principes directeurs de Sir Robert Peel, selon lesquels : « La police ne peut s'acquitter de ses fonctions que dans la mesure où ses actions sont approuvées par le public. »

Conformément à la notion selon laquelle la police est le public et le public est la police devrait être un principe directeur des services de police modernes, les policiers sont les agents qui remplissent notre obligation sociale de maintenir la paix.

Dès le début de l'examen des dossiers des plaintes, la Commission a porté une attention particulière afin de déterminer s'il y avait des indices de partialité fondée sur la race. L'examen des dossiers n'a pas prouvé le bienfondé de cette préoccupation. Toutefois, dans ses interactions avec les divers participants au processus, la Commission a eu l'impression marquée que, par moments, la GRC fait preuve de partialité dans ses interactions avec certains membres de la collectivité. Justifiée ou non, cette perception a donné lieu à une certaine méfiance à l'égard de la GRC.

La GRC gagne la confiance du public en respectant un haut niveau de transparence et de responsabilité. Cette norme est assurée grâce à des processus comme le présent examen, qui découle d'un partenariat entre la GRC, le gouvernement du Yukon et le Conseil des Premières nations du Yukon. La Commission félicite toutes les parties de participer à cette initiative et espère que sa présentation contribuera à un dialogue continu qui mènera à une relation plus positive entre la GRC et tous les Yukonnais.

La commission des plaintes du public contre la GRC

Qui nous sommes

La Commission des plaintes du public contre la GRC (la Commission) est un organisme indépendant créé en vue de fournir une surveillance civile de la conduite des membres de la GRC dans l'exercice de leurs fonctions, afin d'assurer que la GRC répond de ses actes au public. L'objectif de la Commission est d'assurer l'excellence des services de police grâce à la reddition de comptes.

Le mandat de la Commission est établi dans la partie VII de la Loi sur la GRC. La Commission reçoit des plaintes contre des membres de la GRC, réalise des examens et, dans certaines circonstances, peut mener des enquêtes. La Commission a la capacité d'énoncer des conclusions et de formuler des recommandations en réponse aux plaintes concernant la conduite des membres de la GRC.

Aperçu de notre rôle

En avril 2010, la Commission a reçu une demande conjointe de la ministre de la Justice du Yukon et du commandant de la Division « M » de la GRC, qui voulaient que la Commission les aide à réaliser l'examen des services de police au YukonNote de bas de page 1 (l'Examen). L'Examen a été entrepris, car certaines affaires concernant des membres de la GRC ont reçu beaucoup d'attention négative de la part des médias. Dans la foulée de ces incidents, certains citoyens du Yukon ont exprimé des préoccupations concernant la relation entre la GRC et la collectivité.

Les cas catalyseurs comprenaient le décès sous garde de Raymond Silverfox. En décembre 2008, M. Silverfox est décédé à l'hôpital après avoir été détenu par la GRC pendant 13 heures au détachement de Whitehorse. De nombreuses personnes ont déclaré que le manque de soins et d'égards de la part des membres de la GRC était un facteur direct qui a contribué à la mort de M. Silverfox. Le 15 décembre 2008, le président de la Commission a déposé une plainte en lien avec le décès de M. Silverfox. L'enquête du coroner, qui a eu lieu en avril 2010, a fait l'objet d'une couverture médiatique importante et a donné lieu à de nombreuses critiques à l'endroit de la GRC. La Commission réalise actuellement un examen indépendant de la conduite de la GRC en lien avec le décès de M. Silverfox.

En vue de fournir une base factuelle pour toute conclusion de l'équipe chargée de l'Examen, une analyse statistique rigoureuse de la banque de données sur les plaintes de la Commission a été réalisée, de même que des entrevues en profondeur avec plusieurs intervenants communautaires. L'analyse statistique a fourni des données factuelles qui ont permis à la Commission de recueillir de l'information sur plusieurs domaines clés, comme les suivants :

  • détachements d'intérêt;
  • allégations courantes;
  • membres ayant fait l'objet de nombreuses plaintes;
  • allégations concernant la force utilisée;
  • règlement de plaintesNote de bas de page 2.

En outre, la Commission a communiqué avec un large éventail d'organismes communautaires et autochtones et d'organismes de santé afin de connaître leurs points de vue sur la GRC au Yukon. Les organismes qui ont été consultés sont les suivants :

  • Immigration Crossroads;
  • Société d'aide juridique du Yukon;
  • Armée du Salut;
  • Hôpital général de Whitehorse;
  • Conseil des Premières nations du Yukon;
  • Premières nations de Champagne et d'Aishihik;
  • Skookum Jim Friendship Community Centre;
  • Maison de transition pour femmes;
  • Clinique de santé mentale;
  • Fetal Alcohol Syndrome Society;
  • Conseil yukonnais de la condition de la femme;
  • Médias locaux.

Le rapport de la Commission comprend deux sections principales. La première rend compte des résultats de l'examen des dossiers de plaintes déposées contre des membres de la Division « M » qui a été mené par la Commission.

Dans la deuxième section, on décrit l'analyse que la Commission a fait des observations présentées par les divers intervenants qui ont été consultés. Les intervenants ont, de manière constante, formulé des recommandations constructives pour améliorer la relation de la GRC avec la collectivité. Ces recommandations sont présentées dans la présente section.

Méthode

Pour permettre une évaluation complète du système de plaintes à la Division « M », on a établi une période d'examen de cinq ans, qui s'étend du 1er janvier 2005 au 31 mai 2010. Au cours de cette période, au total, 155 plaintes ont été déposées directement à la GRC ou à la Commission.

Avec la collaboration de la GRC, deux représentants de la Commission ont examiné les dossiers de plaintes pendant la semaine du 13 juin 2010Note de bas de page 3. Les dossiers ont fait l'objet d'un examen physique à Whitehorse, au quartier général de la Division « M » de la GRC, et ont été évalués selon les critères pertinents établis par la CommissionNote de bas de page 4.

Un aperçu général des données qui sont ressorties de l'examen des dossiers est présenté à l'annexe C.

Pour la deuxième section du rapport, des rencontres en personne ont été tenues avec des représentants d'organismes. Ces rencontres ont eu lieu à Whitehorse et à Haines Junction. Les organismes ont été choisis selon le degré probable d'interaction entre la police et leur clientèle.

La participation des membres de la GRC était essentielle dans le cadre du processus, et la Commission a cherché à obtenir leurs points de vue relatifs au système des plaintes et aux services de police au Yukon.

Pour favoriser la franchise et faciliter la rétroaction, pendant chaque rencontre organisée par la Commission, les propos des participants ne leur étaient pas attribués personnellement. Par conséquent, à moins d'indication du contraire, les observations, les recommandations et la rétroaction sont attribuées aux organismes eux-mêmes.

Examen des dossiers de plaintes du public contre la division « M »

Loi et politiques applicables à la GRC

La GRC est régie par la Loi sur la GRC et par les divers règlements qui s'appliquent à elle, dont les Consignes du commissaire. En plus de la Loi sur la GRC et des règlements, la GRC a également une politique nationale qui contient des directives sur diverses affairesNote de bas de page 5. La Division « M » a également ses propres politiques qui s'appliquent au traitement des plaintes du publicNote de bas de page 6.

La GRC a préparé un Guide national des enquêtes internes (le Guide) pour aider les enquêteurs à comprendre et à appliquer les diverses procédures liées à chaque type d'enquête. Le Guide a été créé en 2001 grâce à une collaboration entre les unités d'enquête interne de la GRC dans l'ensemble du pays. Il est fondé sur un guide existant qui était en usage à la Division « E » en Colombie-Britannique. Un grand nombre des pratiques décrites dans le Guide reflètent les politiques nationales et les politiques de la division applicables à divers domaines.

La Loi sur la GRC stipule que toute personne qui a une préoccupation concernant la conduite d'un membre de la GRC peut déposer une plainte à la Commission, directement à la GRC ou à une autorité provinciale. La Loi prévoit que, dans la plupart des cas, la GRC réalisera la première enquête relativement à la plainte, après quoi la Commission peut intervenir à la demande d'un plaignant insatisfait du règlement de sa plainte par la GRC. Des amendements importants à la Loi sur la GRC ont été proposés à la Chambre des communes le 14 juin 2010. Le projet de loi C-38 comprend un certain nombre d'amendements qui visent à renforcer les pouvoirs de la Commission et à assurer une meilleure surveillance de la GRC.

Des amendements importants à la Loi sur la GRC ont été proposés à la Chambre des communes le 14 juin 2010. Le projet de loi C-38 comprend un certain nombre d'amendements qui visent à renforcer les pouvoirs de la Commission et à assurer une meilleure surveillance de la GRC.

Examen des dossiers

Le nombre d'allégations et leur nature

La Division « M » est composée d'environ 129 membres de la GRC qui travaillent dans 13 détachements, dont le plus grand est celui de Whitehorse, qui compte 39 membres. De plus, il y a de dix à 12 membres de la GRC qui travaillent au quartier général de la Division « M », qui est lui aussi situé à Whitehorse.

Au total, 155 dossiers de plaintes du public ont été examinés, mais neuf de ces dossiers n'étaient pas considérés comme des dossiers de plaintes du public contre la Division « M »Note de bas de page 7. Le plus souvent, les allégations faites dans le cadre de ces plaintes du public contre la Division « M » concernaient :

  • une attitude répréhensible;
  • une conduite oppressive;
  • la négligence dans le devoir;
  • le recours abusif à la force.

Ces problèmes sont également ceux qui font le plus souvent l'objet d'allégations dans le cadre des plaintes déposées contre la GRC dans son ensemble, comme l'a souligné la Commission dans ses rapports sur l'examen du bilan des plaintes du public de la GRCNote de bas de page 8.

Allégations courantes
Allégations courantes
Version textuelle

Le détachement de Whitehorse, qui compte 30 % de tous les membres de la GRC en service au YukonNote de bas de page 9, est arrivé au premier rang en ce qui concerne le nombre de plaintes reçues, puisqu'il a fait l'objet de 77 plaintes, ce qui représente près de la moitié de toutes les plaintes du public déposées contre la Division « M » pour la période de 2005 à 2010. Les détachements de Watson Lake, de Haines Junction et de Carmacks sont arrivés aux deuxième, troisième et quatrième rangs, respectivement, avec 13, 11 et 10 plaintes.

Le quart de toutes les plaintes du public déposées au Yukon ont été réglées (traitées) en un mois ou moins à compter de la date de la plainte, et le tiers ont été réglées en deux mois ou moins. Environ 80 % des plaintes du public ont été réglées en six mois ou moins. Même si certains retards étaient dus à la complexité des enquêtes sur les plaintes, il y avait également des cas où le retard était causé par un changement d'enquêteur. En outre, il y avait plusieurs cas de retards causés par le fait qu'il était difficile de rencontrer les plaignants que ce soit, entre autres, pour en arriver à un règlement à l'amiable ou retirer la plainte.

Temps de traitement par plainte au Yukon
Version textuelle

À l'échelle nationale, en 2008, il s'est écoulé, en moyenne, 103 jours après qu'une plainte avait été déposée pour que la GRC rende une décisionNote de bas de page 10.

Réception des plaintes : GRC ou CPP

Au cours de la période de cinq ans et demi évaluée, environ 59 % des plaintes ont été déposées à la Commission, et, 41 %, directement à la GRC. Pour les années 2005 à 2008, le nombre de plaintes déposées à la Commission était à peu près équivalent à celui des plaintes déposées à la GRC. Toutefois, depuis 2009, on a constaté une augmentation marquée du nombre de plaintes du public déposées à la Commission plutôt qu'à la GRC. En effet, le nombre de plaintes du public déposées à la Commission a augmenté pour correspondre à 80 % en 2009 et à 76 % au cours de la première moitié de 2010.

Réception de plaintes du public contre la Division M : GRC ou CPP
Version textuelle

Les rapports sur l'examen du bilan des plaintes du public de la GRC pour les années 2007 et 2008 réalisés par la Commission montrent que, à l'échelle nationale, 64,2 % des plaintes étaient, en moyenne, déposées à la Commission et 35,6 %, à la GRCNote de bas de page 11.

Réception de plaintes du public : GRC ou CPP
Réception de plaintes du public : GRC ou CPP
Version textuelle

Règlements à l'amiable et retraits

Une portion importante des plaintes du public déposées au Yukon font l'objet d'un règlement à l'amiableNote de bas de page 12. Par ailleurs, il arrive souvent que le plaignant retire sa plainte ultérieurementNote de bas de page 13. Les retraits sont un type de règlement à l'amiable, et les deux mesures sont consignées sur le même formulaire, qui est signé par le plaignant. Comme c'est le cas pour d'autres régimes de règlement des plaintes du public à l'échelle nationale et internationale, la politique de la Division « M » de la GRC favorise le règlement à l'amiable de plaintes du public :

[traduction] Au premier abord, les règlements à l'amiable devraient être considérés comme une option pour le traitement d'une plainte du public. Toutefois, s'il est dans l'intérêt de la Gendarmerie de réaliser une enquête (c.-à-d. si les allégations sont fondées), une enquête devrait être réalisée. Cependant, il est important de déterminer si une enquête est réellement justifiée. Si ce n'est pas le cas, on devrait déployer tous les efforts nécessaires pour régler la plainte ou mettre fin à l'enquête. Les facteurs à prendre en considération comprennent la disponibilité des ressources, la nature de l'allégation, les raisons pour lesquelles une enquête est nécessaire ou non, etcNote de bas de page 14.

Dans le Guide national des enquêtes internes, on encourage les commandants de détachement et les enquêteurs à tâcher d'arriver à un règlement à l'amiable, dans un premier temps, sauf lorsque les allégations ou les circonstances sont graves ou impliquent une infraction à une loiNote de bas de page 15. En outre, dans le Guide, on énumère les avantages suivants des règlements à l'amiable :

  • Il n'est pas nécessaire d'enquêter ni de consigner de déclarations ou d'aveux. NE demandez PAS ou NE consignez PAS de déclarations, d'aveux ou de commentaires au cours d'un processus de règlement amiable : ils sont considérés comme ayant été faits « sans aveu de responsabilité ». Aucune conclusion ne doit être tirée quant à la véracité ou à la validité de la plainte.
  • La plainte est réglée rapidement et à la satisfaction de toutes les parties.
  • Aucune mesure disciplinaire n'est imposée et aucune conclusion n'est rendue ni consignée quant au bien-fondé de la plainte.
  • Une fois réglée, l'affaire ne peut pas être rouverte ni réexaminée.
  • Le plaignant ne peut pas interjeter appel devant la CPP ni le commandant divisionnaireNote de bas de page 16.

Le règlement à l'amiable de types appropriés de plaintes du public comporte de nombreux avantages, puisque de tels règlements permettent de réagir rapidement à une plainte du public de manière qui est satisfaisante pour le plaignantNote de bas de page 17.

L'examen de l'utilisation, par la Division du Yukon de la GRC, de règlements à l'amiable et de retraits pour traiter de plaintes du public révèle deux problèmes principaux. Le premier concerne le bien-fondé des motifs fournis pour expliquer la mesure prise, et le deuxième concerne l'application appropriée de la politique de la GRC dans l'utilisation de ces mesures.

Suffisance des motifs

Le paragraphe 45.36(3) de la Loi sur la GRC prévoit que : « Tout règlement amiable doit être consigné et approuvé par écrit par le plaignant; il doit de plus être notifié au membre ou à la personne visés par la plainte. » Selon le Guide national des enquêtes internes, les documents doivent contenir des renseignements suffisants qui décrivent la mesure prise en réaction à la plainte et « exactement ce sur quoi les parties se sont entenduesNote de bas de page 18 ».

La Commission s'est penchée sur la question de la suffisance des motifs dans ses examens du bilan des plaintes du public de la GRC. La Commission a souligné que : « il ne fait aucun doute que l'on respecte peu l'intention derrière le processus de règlement à l'amiable dans la mesure où il est souvent difficile de déterminer de quelle manière on en est arrivé à une solution et si les deux parties étaient d'accordNote de bas de page 19 ». On a tenu compte de cette question au moment d'examiner les dossiers des plaintes du public déposées contre la Division « M ». Des 44 dossiers de plaintes du public qui avaient fait l'objet d'un règlement à l'amiable, quatre seulement ne contenaient pas de renseignements suffisants pour déterminer si ce type de règlement était approprié. Cependant, dans la plupart des cas, l'information a été jugée suffisante.

L'absence de motifs suffisants s'est révélée beaucoup plus courante dans les plaintes du public qui avaient été retirées. Des 21 dossiers de plaintes du public retirées, huit ne contenaient pas de renseignements suffisants pour déterminer si la mesure prise était appropriée. Même si son libellé n'est pas aussi direct que celui de la politique nationale de la GRC, la politique de la Division « M » prévoit que, lorsqu'un plaignant souhaite retirer sa plainte, la GRC doit lui demander d'indiquer le motif du retrait et, selon les allégations ou les circonstances, une enquête peut toujours être nécessaire, en dépit des souhaits du plaignantNote de bas de page 20.

Le fait de ne pas consigner les motifs pour lesquels un plaignant souhaite retirer une plainte peut causer des problèmes et donner lieu à des critiques selon lesquelles la GRC aurait peut-être convaincu de manière inappropriée le plaignant de retirer sa plainte. Par exemple, dans un dossier concernant un cas de détention arbitraire, le plaignant a retiré sa plainte après neuf mois, à la suite d'un appel téléphonique par un agent haut placé (pas l'enquêteur).Aucun motif n'a été fourni pour expliquer le retrait de la plainte et aucun renseignement n'a été inclus concernant la discussion.

L'exigence de fournir des motifs suffisants est d'autant plus importante qu'il existe un déséquilibre des pouvoirs inhérent dans la relation entre la police et les membres du public. On doit déployer tous les efforts possibles pour éviter toute perception d'irrégularité dans le processus qui donne lieu à un règlement à l'amiable ou au retrait d'une plainte du public. En consignant de manière exhaustive les motifs du règlement à l'amiable ou du retrait, on évitera toute perception négative et on permettra un examen adéquat de la mesure.

Application appropriée des règlements à l'amiable et des retraits

Un autre problème important concerne l'application appropriée des dispositions de la politique qui régissent les règlements à l'amiable et les retraits. Autrement dit, il faut déterminer si la politique établit les circonstances appropriées dans lesquelles on peut envisager un règlement à l'amiable ou un retrait. Les règlements à l'amiable et les retraits ne conviennent pas dans chaque situation; certaines allégations sont si graves qu'elles doivent faire l'objet d'une enquête officielle, quels que soient les souhaits du plaignant.

En vertu de la politique nationale de la GRC, les plaintes liées à des allégations d'inconduite grave ou à une situation où un membre est arrêté ou fait l'objet d'un mandat d'arrestation ne doivent pas être réglées à l'amiableNote de bas de page 21. De plus, la politique prévoit que, si des allégations sont reliées et que l'une de ces allégations est grave, toutes ces allégations doivent faire l'objet d'une enquête officielleNote de bas de page 22. Le Guide national des enquêtes internes de la GRC énonce également ce qui suit :

Si les allégations sont graves (c. -à-d. allégations d'infraction à une loi ou d'incidents scandaleux justifiant l'imposition de mesures disciplinaires), il ne faut pas régler la plainte à l'amiableNote de bas de page 23.

Quant aux retraits, le Guide prévoit que :

Peu importe ce que souhaite le plaignant, si les allégations et l'enquête subséquente indiquent qu'une enquête plus approfondie est nécessaire ou qu'il y aurait eu infraction à une loi ou contravention au code de déontologie, il faut poursuivre l'enquête de la manière habituelle et selon les modalités de présentation de rapports applicablesNote de bas de page 24.

Il y avait deux exemples de plaintes concernant des allégations d'inconduite grave qui avaient fait l'objet d'un règlement à l'amiable. La Commission avait exprimé ses préoccupations à l'égard de la mesure prise en lien avec l'un de ces cas, et une enquête a été réalisée, suivie d'une lettre de décision. Dans l'autre dossier, la plainte contenait des allégations d'étranglement et de recours abusif à la force dans les cellules, et il semble que les vidéos prises dans le bloc cellulaire ont confirmé que les actes allégués n'avaient pas eu lieu. Malgré ces éléments de preuve vidéographiques, l'allégation portait sur une inconduite grave, et une lettre de décision aurait dû être rédigée.

Des 65 dossiers de plaintes qui avaient fait l'objet d'un règlement à l'amiable ou d'un retrait, 12 au total, ou 18 %, ne contenaient pas suffisamment de renseignements pour déterminer si les dispositions avaient été appliquées de manière appropriée. Compte tenu de l'absence de renseignements dans ces dossiers, il est impossible de déterminer comment ces affaires auraient pu influer sur la présente évaluation.

Clôture

Aux termes du paragraphe 45.36(5) de la Loi sur la GRC, la GRC peut clore une enquête sur une plainte du public dans les circonstances suivantes :

  • a) il est préférable de recourir, au moins initialement, à une procédure prévue par une autre loi fédérale;
  • b) la plainte est futile ou vexatoire ou a été portée de mauvaise foi;
  • c) compte tenu des circonstances, il n'est pas nécessaire ou raisonnablement praticable de procéder à une enquête ou de poursuivre l'enquête déjà commencée.

La politique de la Division « M » de la GRC prévoit également que, [traduction] « si des éléments de preuve suffisants existent pour recommander une décision relative à une allégation particulière (c.-à-d. non fondée, non corroborée ou corroborée), les dispositions concernant la clôture ne s'appliquent pasNote de bas de page 25 ».

La Commission a souvent déclaré que les dispositions relatives à la clôture ne sont pas toujours appliquées de manière appropriée à la GRC. En 2007, dans le rapport sur l'examen du bilan des plaintes du public de la GRC concernant la Division « M » (Yukon), on a examiné diverses données, dont celles sur les plaintes du public ayant donné lieu à une clôture de l'enquête. On a relevé seulement un dossier qui avait été clos à la Division « M » en 2007, et rien n'indiquait que les dispositions sur la clôture avaient été appliquées de manière incorrecte.

L'examen des 15 dossiers de plaintes du public qui ont été déposées contre la Division « M » pour les années 2005 à 2010 et qui ont fait l'objet d'une application des dispositions sur la clôture a révélé que, dans certains cas, ces dispositions avaient été appliquées de manière inappropriée. En particulier, dans plus de la moitié des cas de plaintes où l'enquête sur la plainte du public avait été close, l'information était suffisante pour régler les plaintes, mais la GRC n'a pas produit de lettre de décision. Il s'agit d'un problème particulièrement courant pour les dossiers des plaintes du public déposées en 2008, année durant laquelle cinq des neuf enquêtes sur une plainte du public ont été closes alors qu'on disposait de suffisamment d'information pour délivrer une lettre de décision.

Ce problème, y compris le fait que la GRC n'était pas obligée d'appliquer les dispositions sur la clôture, a été porté à l'attention de la Division « M » de la GRC dans quatre rapports d'examen de la Commission (deux de 2005 et deux de 2008). Dans chaque cas, l'examen de la Commission a confirmé que la conduite des membres de la GRC avait été appropriée. Il est important de souligner que, dans la plupart des cas, on a pris la décision de clore l'enquête sur la plainte après la réalisation de cette enquête et qu'il existait clairement des éléments de preuve suffisants pour régler la plainte. Dans le même ordre d'idées, dans deux autres cas, l'un datant de la f n de 2008 et l'autre de 2009 et dans lesquels les plaignants n'ont pas demandé d'examen, une lettre de décision n'a pas été produite.

La politique de la GRC indique clairement que les dispositions sur la clôture ne devraient pas être appliquées dans les cas où des éléments de preuve suffisants existent pour régler la plainte. Dans ces cas, une décision officielle confère une certitude aux éléments de preuve et facilite la tenue d'un examen, le cas échéant. Il est important de souligner que les dossiers de plainte du public ne donnent aucunement à penser que la GRC a utilisé les dispositions sur la clôture pour que ses membres puissent échapper à leurs responsabilités à l'égard de l'inconduite alléguée. Au contraire, les dossiers examinés par la Commission ont confirmé que les membres dans chaque cas avaient agi de manière appropriée.

Le respect de la politique et des lignes directrices à l'égard de la clôture est essentiel pour garantir qu'il n'y a pas de partialité perçue en ce qui concerne la manière dont la GRC gère les plaintes du public. Le fait de ne pas régler une plainte malgré le fait que des renseignements suffisants existent pour le faire fait en sorte que le plaignant pourrait avoir une perception négative concernant la clôture de l'enquête. En dépit de toute conclusion reliée à l'inconduite, la GRC devrait éviter à tout prix de clore une enquête lorsqu'il existe de l'information suffisante pour la poursuivre.

La Commission a recommandé que la Direction des normes professionnelles et des examens externes au quartier général de la GRC émette une directive qui indique clairement les circonstances où il est approprié de clore une enquête sur une plainte du public en vertu de la Loi sur la GRC et quels renseignements devraient être inclus dans un avis de décision. En outre, la Commission a affiché sa position sur l'utilisation appropriée de ces dispositions sur son site Web qui est accessible au publicNote de bas de page 26.

Plaintes multiples contre des membres

Certains membres de la GRC ont fait l'objet de multiples plaintes du public. Dans une certaine mesure, cela n'est pas surprenant dans une petite division où les membres de la GRC travaillent dans de petites collectivités. De plus, il n'est pas rare de découvrir que de multiples plaintes ont été déposées par un seul plaignant, ce que reflètent également les données.

Même s'il y a des membres particuliers de la GRC qui font l'objet de multiples plaintes du public, les données ne révèlent aucune tendance évidente qui donnerait à penser que l'un de ces membres a régulièrement une conduite inappropriée. Il n'en demeure pas moins que les données sur les plaintes du public peuvent révéler des domaines dans lesquels des membres particuliers de la GRC peuvent améliorer leur rendement dans le cadre de leurs fonctions policières. Toutefois, il est difficile de tirer des conclusions définitives en raison des données limitées disponibles en matière de plaintes du public qui font l'objet d'un règlement à l'amiable, d'un retrait ou d'une clôture. On examinera la question plus loin dans le présent rapport.

Même si un règlement à l'amiable peut constituer une manière convenable de régler une affaire donnée, un examen plus rigoureux des circonstances de chaque dossier peut révéler que le membre bénéficierait d'un quelconque type d'orientation opérationnelle pour éviter que des plaintes du public semblables soient déposées à l'avenir. Il serait utile d'avoir un système proactif permettant d'examiner les plaintes au moment où elles sont déposées afin de déterminer s'il existe un problème émergent. La GRC envisage justement d'appliquer ce type d'approche d' « alerte précoce » à l'échelle nationale (ce type de système n'est pas encore en applicationNote de bas de page 27). Cette approche est déjà utilisée dans certaines divisions. Par exemple, la Division «  K » utilise une forme de système d'alerte précoceNote de bas de page 28.

La Division « M » n'a pas de système d'alerte précoce officiel en place, mais il semblerait qu'elle soit quand même avisée lorsqu'un membre fait l'objet de multiples plaintes du publicNote de bas de page 29. Selon les circonstances, cette information serait également, en théorie, consignée par le commandant de détachement ou le supérieur hiérarchique du membre pour que la mesure appropriée soit prise. À tout le moins, des efforts devraient être déployés pour comprendre les raisons pour lesquelles le membre fait l'objet de multiples plaintes – ces dernières pourraient simplement refléter la nature des services de police si, par exemple, le membre est tenu de prendre des mesures dans des circonstances difficiles. Cela pourrait toutefois également être un indice d'un problème émergent pour lequel il serait utile d'intervenir auprès du membre.

Partialité/Conflit d'intérêts

En vertu de l'article 8 des Consignes du commissaire (plaintes du public), le membre chargé de mener l'enquête sur une plainte doit mener l'enquête « de façon impartiale et objective, selon les méthodes d'enquête reconnues » et « recueillir les preuves de façon impartiale et diligente en vue de mener l'enquête à terme ». L'article 9 prévoit que : « Un membre ne peut faire enquête sur une plainte s'il peut se trouver en situation de conflit d'intérêts. » Selon ces dispositions, un enquêteur qui se penche sur une plainte du public doit éviter toute partialité, qu'elle soit réelle ou perçue. Cet avertissement est répété dans le Guide national des enquêtes internes et dans la politique nationale de la GRC.

L'un des facteurs les plus évidents qui peut causer des problèmes de partialité et de conflit d'intérêts est la relation de l'enquêteur à l'incident et au membre faisant l'objet de la plainte. Lorsqu'un enquêteur a joué un rôle dans l'incident qui a mené à la plainte ou lorsque l'enquêteur est un superviseur direct du membre visé par cette dernière, il y a un conflit d'intérêts évident, et il y aura probablement une perception de partialité. De telles circonstances donnent lieu à un manque d'impartialité qui a été reconnu aussi bien par la Commission que par le commissaire de la GRC. Le programme d'observateur indépendant (POI) de la Commission et de la GRC a été créé, en partie, pour régler ce problème particulier et prévenir les conséquences négatives sur l'intégrité perçue de l'enquête.

Dans les dossiers de plaintes du public examinés, il y avait un seul exemple (de 2005) qui soulevait directement les problèmes énoncés ci-dessus. En effet, l'enquêteur en question avait joué un rôle dans l'incident (en fournissant des conseils au membre visé par la plainte, ce qui avait amené le plaignant à être accusé d'une infraction criminelle) et était le superviseur direct du membre ayant fait l'objet de la plainte. Dans sa lettre de décision, la GRC a confirmé que la conduite du membre ayant fait l'objet de la plainte avait été appropriée, mais elle n'a pas abordé la question du conflit d'intérêts de l'enquêteurNote de bas de page 30. Le plaignant a demandé un examen par la Commission, qui a soulevé le problème du conflit d'intérêts de l'enquêteur dans un rapport provisoire. Le commissaire de la GRC a reconnu que l'enquêteur était dans une situation de conflit d'intérêts.

Même s'il est habituellement relativement simple de déterminer si l'enquêteur a joué un rôle dans l'incident qui a donné lieu à une plainte du public, si l'on ne connaît pas le grade de l'enquêteur, son poste et sa position dans la structure hiérarchique le jour de l'incident, il peut être difficile de déterminer, en se fondant seulement sur un examen du dossier, s'il existe une situation de conflit d'intérêts en ce qui a trait à l'enquêteur. Bien que la réponse à cette question puisse être connue par l'ensemble de l'organisme, cela ne permet pas d'évaluer le problème uniquement en fonction d'un examen du dossier.

Le POI en place à la Division « E » fournit certaines directives à cet égardNote de bas de page 31. Ce dernier a été créé « en réponse à l'intérêt et au souci croissants du public au sujet de l'indépendance, de l'impartialité et de la compétence des enquêteurs internes de la GRC chargés de cas où les actions d'un membre de la GRC ont entraîné des blessures graves ou un décès ou encore de cas médiatisés ou de nature délicateNote de bas de page 32 ». Dans des cas appropriés, la Commission envoie un observateur indépendant pour qu'il participe à l'enquête criminelle et surveille la question de l'impartialité. Pour aider l'observateur à évaluer l'impartialité de l'équipe d'enquête de la GRC, chacun de ses membres remplit un questionnaire conçu pour faire ressortir tout lien entre l'enquêteur et le membre ayant fait l'objet de la plainte.

Il serait utile de faire remplir un questionnaire semblable aux enquêteurs sur les plaintes du public. Cela permettrait d'éviter tout problème de partialité perçue durant tout type d'examen de dossier. Il s'agit d'une mesure positive qui peut être prise pour améliorer l'intégrité de l'enquête de la GRC et pour éviter les conflits d'intérêts et, par extension, la partialité, et ce, qu'ils soient réels ou perçus. Il faut reconnaître que les efforts déployés pour éviter toute association entre l'enquêteur et le membre faisant l'objet de la plainte dépendraient des circonstances. D'un point de vue pratique, il serait difficile de trouver une personne qui n'a aucun lien avec le membre visé par la plainte pour jouer le rôle d'enquêteur relativement à la plainte du public. Certaines plaintes du public nécessiteront de telles mesures, et d'autres, non.

Outre la valeur évidente d'une absence complète de liens entre l'enquêteur et le membre visé par la plainte dans certains cas, un « questionnaire sur l'impartialité » pour les enquêtes sur les plaintes du public aurait l'avantage important de sensibiliser les membres de la GRC au problème et d'être un obstacle à la complaisance. Même si une absence complète de liens ne sera peut-être pas possible dans certaines circonstances, un questionnaire sur l'impartialité fournirait des éléments de preuve clairs à l'appui des mesures prises dans les cas où il y a un lien quelconque entre l'enquêteur et le membre visé par la plainte. Un mécanisme pour l'inclusion de tels éléments de preuve dans les dossiers de plaintes du public déposées contre la Division « M » n'existe pas actuellement.

Qu'il y ait véritablement partialité ou non, la perception de partialité peut, en elle-même, nuire à l'intégrité d'une enquête et miner la confiance du public. Par conséquent, on doit à tout prix éviter toute perception de partialité. Même s'il y avait peu d'exemples, dans les dossiers de plaintes du public examinés, de cas où une personne objective pourrait percevoir la présence de partialité, tout indice de partialité possible, aussi minime soit-il, peut soulever des questions sur le bien-fondé de l'enquête sur la plainte du public réalisée par la GRC.

Communiquer avec les plaignants

Il est essentiel, pour l'intégrité du processus de plaintes du public, de maintenir un dialogue régulier et significatif avec les plaignants. En vertu de l'article 45.39 de la Loi sur la GRC, le plaignant et la personne faisant l'objet de la plainte doivent être avisés de l'état d'avancement de l'enquête au plus tard 45 jours après la présentation de la plainte et, par la suite, tous les mois.

Dans l'ensemble, la Division « M » a maintenu, de façon appropriée, une communication régulière avec les plaignants. Ces communications comprenaient des lettres et des conversations téléphoniques pour leur faire part des mises à jour, ainsi que des rencontres en personne avec l'enquêteur. Dans les cas où un événement important touchait l'enquête, par exemple un retard causé par un changement d'enquêteur, ce fait était communiqué au plaignant. Même s'il y a eu des cas de lettres de mise à jour manquantes ou de lettres envoyées après les délais prescrits, on n'a pas considéré ces incidents comme une source de préoccupation.

Constats et conclusions découlant de l'examen des dossiers

L'analyse des données présentées ci-dessus a révélé que la Division « M » de la GRC traitait généralement les plaintes du public de manière appropriée. Même si l'on a constaté que certaines améliorations doivent être apportées, il semblerait qu'aucun dossier de plainte particulier n'ait été traité de manière inadéquate.

La grande majorité des plaintes déposées au Yukon (53 %) concernent le détachement de Whitehorse, qui compte 30 % des membres en service au Yukon. Cela n'est ni une surprise ni une préoccupation compte tenu de la nature du territoire. Près de 58 % des plaintes ont été traitées en deux mois ou moins, et 80 % des plaintes ont été réglées en moins de six mois. L'analyse de ces plaintes n'a permis de révéler aucune tendance particulière à l'égard de membres particuliers. Il vaut la peine de mentionner que la Division « M » n'a pas de système d'alerte précoce en place permettant de cerner certains problèmes avec des membres particuliers, au besoin.

En outre, on a remarqué que de nombreuses plaintes ont fait l'objet d'un règlement à l'amiable ou d'un retrait par le plaignant. Cela soulève certaines préoccupations compte tenu du fait qu'un grand nombre de ces dossiers contenaient trop peu d'information pour permettre à la Commission de déterminer si ces règlements étaient raisonnables. Ces renseignements sont essentiels pour éviter la perception de partialité ou d'irrégularité dans le règlement des plaintes du public. En ce qui concerne les dossiers clos, les dispositions sur la clôture de la Loi sur la GRC ont généralement été mal appliquées; dans plus de la moitié des dossiers de plaintes clos, il y avait suffisamment d'information pour que la plainte soit réglée autrement.

À l'égard de la question de la partialité dans le traitement des plaintes du public, l'examen des dossiers n'a pas soulevé de préoccupations particulières. Toutefois, il est important de souligner que, dans de nombreux dossiers, il était impossible de déterminer la relation entre le membre ayant fait l'objet de la plainte et l'enquêteur sur les plaintes du public parce que cette information n'était pas consignée dans le dossier.

Le processus interne de traitement des plaintes du public au Yukon mérite un commentaire. Les enquêtes sur les plaintes du public font partie des enquêtes internes. Certaines divisions de la GRC comprennent des unités particulières avec des enquêteurs spécialisés qui enquêtent sur les affaires internes, dont les plaintes du public. La Division «  M » ne comprend pas d'unité de ce genre et nomme ses enquêteurs au besoin lorsqu'il faut une enquête sur une affaire interne ou qu'une plainte du public a été déposée. Le règlement des plaintes du public contre la Division « M » est surveillé par le sous-officier administratif de la Division.

Un large éventail d'enquêteurs avaient été chargés des dossiers de plaintes du public qui ont été examinés. La qualité des documents d'enquête et de l'enquête dans son ensemble variait selon les dossiers. Un enquêteur en particulier, qui avait été affecté à une équipe chargée de l'application de la loi fédérale, a réalisé un nombre important d'enquêtes sur des plaintes du public en 2006 et en 2007. Cet enquêteur a réalisé 16 des 51 enquêtes sur des plaintes du public pour les années 2006 et 2007. La qualité des enquêtes réalisées par ce membre était très élevée, et les dossiers d'enquête étaient très bien documentés.

Même si ce membre n'était pas un enquêteur interne spécialisé, il a clairement fait preuve d'une aptitude pour la réalisation d'enquêtes. Les résultats positifs de son travail démontrent la valeur d'un enquêteur affecté aux affaires internes. Bien sûr, cela présuppose que l'enquêteur spécialisé serait compétent. Le fait d'avoir un enquêteur interne spécialisé compétent améliorerait à coup sûr la qualité globale et la cohérence des enquêtes sur les plaintes du public.

Dans le cadre de l'examen des dossiers dont elle fait état dans le présent rapport, la Commission a apporté une attention particulière à la possible existence de partialité fondée sur la race et a cherché à déterminer si un quelconque groupe était traité différemment des autres par la GRC. Rien ne donne à penser que c'est le cas. Bien au contraire, on a constaté des cas où la GRC avait déployé des efforts considérables pour communiquer avec des plaignants autochtones.

Participation des collectivités et des membres*

* La Commission a déployé des efforts considérables pour refléter de manière exacte la rétroaction fournie par les groupes et organismes communautaires consultés. De nombreux exemples anecdotiques ont été fournis, que la Commission n'a aucunement corroborés. Les opinions et les recommandations sont uniquement celles des intervenants.

La Commission a rencontré un certain nombre d'intervenants au Yukon pour évaluer leurs expériences avec la GRC et leur niveau de satisfaction et de confiance à l'égard de la Gendarmerie royale et du processus de règlement des plaintes du public.

Au cours de ses rencontres en personne avec les groupes et les organismes communautaires du Yukon qui fournissent des services au public, la Commission a posé six questions pour orienter la discussion et obtenir une rétroactionNote de bas de page 33. À chaque rencontre, les participants ont communiqué ouvertement et parlé avec franchise. Par le ton adopté, on a voulu donner l'occasion aux intervenants d'être entendus et d'offrir des idées concrètes pour améliorer les services de police au Yukon.

Pendant ces rencontres, on a remarqué certains thèmes récurrents. Parmi ceux-ci, le souhait de voir une police communautaire réintégrée au Yukon et l'amélioration de la participation des organismes communautaires par la GRC étaient très importants. Les membres de la GRC au Yukon étaient généralement décrits comme coupés des collectivités qu'ils servent. Par ailleurs, on considère que les membres de la GRC envoyés au Yukon sont trop jeunes et trop inexpérimentés et qu'ils comprennent très peu le milieu dans lequel ils devront travailler.

Il y a eu des plaintes au sujet du roulement constant des membres de la GRC, ce qui, selon un grand nombre des participants, mène à des niveaux inconstants de participation de ceux-ci dans la collectivité. La qualité des services de police dépend davantage, selon les participants, de la personnalité d'un membre individuel que des politiques et procédures de la GRC.

Tous les organismes participants ont recommandé que les membres de la GRC reçoivent une formation portant particulièrement sur le Yukon avant d'entreprendre leurs fonctions dans la collectivité. Les taux élevés de problèmes sociaux liés à la consommation d'alcool et aux problèmes de santé mentale sont considérés comme des défis de taille pour tout agent de police, et les participants étaient d'avis que la plupart des membres de la GRC au Yukon ne sont pas outillés pour y faire face. La plupart des organismes sont prêts à participer à la formation des nouveaux membres qui arrivent au Yukon. Plusieurs organismes ont fortement recommandé que la GRC «  arrête d'employer des membres inexpérimentés au Yukon ».

De nombreux clients des organismes qu'a rencontrés la Commission font apparemment très peu confiance au processus de plaintes. La crainte de « représailles » a été mentionnée à plusieurs reprises au cours des rencontres.

De plus, il est très rare qu'on distingue la Commission de la GRC. Les femmes à risque et les collectivités autochtones en particulier ont exprimé un très grand manque de confiance en la GRC au Yukon. Cela est en grande partie dû au mauvais traitement et au manque de respect dont les membres de ces groupes allèguent avoir été les victimes de la GRC.

Même si plusieurs organismes ont exprimé un certain scepticisme à l'égard de l'Examen, tous souhaitaient que des services de police efficaces répondent aux besoins uniques de la population au Yukon. Un bon nombre de participants considéraient l'Examen comme une occasion en or de provoquer des changements positifs.

Les collectivités des Premières nations

Introduction

Dans le contexte du présent examen, le personnel de la Commission a rencontré la grande chef et la responsable des programmes de justice du Conseil des Premières nations du Yukon, des représentants des Premières nations de Champagne et d'Aishihik, ainsi que des membres du personnel et des clients du Skookum Jim Friendship Centre.

Le Conseil des Premières nations du Yukon (CPNY) est l'organisme politique central pour les peuples des Premières nations du Yukon. Le CPNY existe depuis 1973 et répond aux besoins des Premières nations au Yukon et du delta du MacKenzie. Le siège social du CPNY est situé à WhitehorseNote de bas de page 34.

Les Premières nations de Champagne et d'Aishihik (PNCA) sont situées à Haines Junction et aux alentours de ce village. Les PNCA travaillent en vue de préserver et de mettre en valeur la culture et l'environnement des peuples des Premières nations dans la collectivité. Les PNCA comptent un large éventail des administrations autonomes qui mettent l'accent sur les initiatives de sensibilisation et d'information sur le bien-être social et sur la santé physique et mentaleNote de bas de page 35.

Le centre d'amitié Skookum Jim Friendship Centre (SJFC) est un organisme sans but lucratif qui vise à améliorer le bien-être spirituel, physique, affectif et mental des personnes issues des Premières nations. L'objectif de cet organisme est de favoriser l'empathie et l'amitié entre les gens. Le SJFC offre des programmes et de l'information sur la santé, les études, les loisirs et l'aide disponible. Le centre a été construit en 1962, à WhitehorseNote de bas de page 36.

Les PNCA ont exprimé beaucoup de cynisme et de scepticisme à l'égard du présent examen. Elles ont l'impression d'avoir déjà vécu tout ça sans que des changements aient été apportés. Par conséquent, elles font très peu confiance au processus. Toutefois, elles continuent d'espérer que cette initiative se distinguera des autres et elles voudraient que des changements à long terme soient apportés. L'organisme a exprimé le souhait de voir la GRC reconnaître et accepter la nécessité de mettre en œuvre des changements et il considère le présent examen comme une occasion d'améliorer les services de police communautaire. Selon l'organisme, la collectivité devrait avoir une influence plus importante en ce qui concerne ses services de police qui lui sont offerts.

Questions clés

Le système de plaintes du public

Le CPNY estime que les collectivités des Premières nations connaissent très peu les ressources disponibles pour déposer une plainte contre les services de police et qu'elles croient généralement qu'une plainte ne donnera lieu à aucune mesure concrète.

Par ailleurs, le CPNY est d'avis qu'il est absolument nécessaire d'améliorer la liaison avec la collectivité. On estime que la sensibilisation est essentielle pour faire comprendre aux membres des Premières nations qu'ils seront entendus s'ils font part de leur rétroaction. Une autre difficulté également mentionnée est que les membres des Premières nations ne doivent pas se plaindre, puisque cela va à l'encontre de leur éducation et des enseignements qu'ils ont reçus. Il est donc très difficile pour eux de déposer une plainte auprès d'un organisme comme la Commission ou la GRC. Le Conseil estime que le processus de plaintes n'est pas adapté aux besoins et aux pratiques des collectivités des Premières nations et que l'utilisation d'outils comme les cercles de justice améliorerait les relations et faciliterait le règlement de plaintes éventuelles.

Les PNCA sont d'avis que des différences culturelles empêcheront les collectivités des Premières nations de se plaindre en raison des craintes de représailles, entre autres choses. Tout comme les deux premiers organismes, le SJFC croit également que les peuples autochtones se réduisent au silence et ne se prévalent pas des processus de plaintes en raison de leurs craintes, d'une certaine résignation et d'un sentiment de désespoir. Par ailleurs, selon le sentiment qui domine dans les collectivités des Premières nations, il ne sert à rien de se plaindre contre la GRC, puisqu'il est impossible d'obtenir un examen impartial quel que soit l'endroit où on se plaint.

Le CPNY suggère que la GRC cherche à faire participer les Premières nations au processus de règlement de plaintes et recommande entre autres le recours à des processus disciplinaires non judiciaires comme les cercles de justice.

Le CPNY suggère également qu'une liste d'au moins dix observateurs indépendants civils provenant des collectivités des Premières nations soit préparée pour faciliter le règlement à l'amiable de plaintes. Une présence effective locale de la Commission au Yukon doit être envisagée. Elle devrait être indépendante de tout autre organisme yukonnais et être située dans un lieu accessible. Le CPNY et le SJFC sont d'avis que la présence de la Commission est nécessaire dans le territoire, sous forme d'un bureau des plaintes géré par une personne sur place, ce qui permettrait une communication en personne. Selon ces organismes, ce bureau satellite aurait la capacité de réaliser des évaluations et de rendre des décisions relativement aux plaintes.

Discrimination et racisme

Le SJFC reconnaît que, en général, la GRC est présente quand on a besoin d'elle et qu'elle compte de bons agents de police qui font observer la loi. Toutefois, la majorité des Autochtones craignent la GRC et ne veulent pas se retrouver en sa présence.

Le CPNY a dénoncé le fait que les familles, les plaignants ou les collectivités des Premières nations ne reçoivent pas de mises à jour adéquates sur les enquêtes. Le Conseil lui-même allègue ne jamais recevoir de mises à jour sur les enquêtes très médiatisées, comme celles concernant des femmes disparues; les affaires comme celle de l'agression sexuelle à Watson Lake ou le décès de Raymond Silverfox. Il indique que les collectivités des Premières nations, et plus particulièrement les aînés, cherchent à tourner la page sur les affaires qui concernent des membres de leur collectivité. C'est pour cette raison qu'ils ont besoin d'information sur l'état d'avancement des enquêtes.

Les PNCA ont également soulevé des préoccupations concernant le racisme perçu au sein de la GRC. Elles croient qu'il y a un problème au sein de la GRC, et qu'on refuse d'en parler ou même d'admettre que cette situation existe. Les participants ont été nombreux à dire que la GRC manque généralement de respect à l'égard des collectivités des Premières nations. Les PNCA ont également exprimé leur insatisfaction due au fait qu'elles ne reçoivent pas de mises à jour sur les enquêtes qui portent sur des préoccupations de la collectivité.

En ce qui a trait au SJFC, ses membres ont mentionné un manque perçu de connaissance de la culture autochtone de la part des membres de la GRC. Selon la perception générale, les Autochtones sont traités différemment. On estime que les règles traditionnelles ne s'appliquent pas aux membres des Premières nations et, de l'avis des participants, ils sont « considérés comme coupables jusqu'à preuve du contraire  ».

Certains participants ont affirmé que, si un Autochtone est victime d'un meurtre, il n'y a pas de «  véritable enquête », tandis que les enquêtes sur les victimes non autochtones sont « rigoureuses jusqu'à ce que l'affaire soit réglée ». On a également mentionné que, si un Autochtone compose le 911, des policiers sont envoyés en premier lieu pour évaluer l'incident. Les services d'ambulance arrivent ensuite, beaucoup trop tard. Selon les participants, cela semble être la procédure normale. Des membres du SJFC ont également souligné que, lorsque l'on compose le 911 pour signaler qu'il y a, dans la rue, une personne ayant les facultés affaiblies qui pourrait être un danger pour elle-même, la procédure normale semble être que le répartiteur demande s'il s'agit d'un Autochtone.

Selon les PNCA, des ateliers d'orientation pour les membres de la GRC qui arrivent dans une collectivité seraient utiles. Ces ateliers devraient comprendre une formation interculturelle dans laquelle la collectivité des Premières nations jouerait un rôle.

Recours abusif à la force

Les participants ont exprimé des préoccupations à l'égard du recours abusif à la force par des membres de la GRC lorsque des citoyens sont mis en état d'arrestation ou placés dans ce qu'on appelle généralement la cellule de dégrisement.

Certains jeunes ont fait valoir leur point de vue en ajoutant que la GRC use beaucoup trop rapidement de violence pour régler des problèmes qui concernent des jeunes. Ils prétendent que la plupart des jeunes ne sont pas prêts à en parler; cependant, ces interactions négatives avec la GRC mènent à des problèmes de longue durée en ce qui concerne la relation de confiance entre la GRC et les membres de la collectivité.

Problème de dotation

Tous les représentants ont exprimé des préoccupations concernant les problèmes de dotation à la GRC, qui sont liés à la rotation sur deux ans des agents de police qui sont affectés au Yukon. Cette rotation fait obstacle à des forces de police cohésives qui mettent l'accent sur la collectivité. La situation donne lieu à un manque d'engagement ou de continuité véritable au sein de la collectivité, et fait obstacle aux changements à long terme. Les PNCA ont affirmé qu'il faut des membres supplémentaires dans les détachements. La nécessité d'affecter des agents de police plus expérimentés est liée à ce problème, puisque les PNCA se sont dites préoccupées par le fait que les jeunes agents de police sont souvent incapables d'établir de bons rapports avec la collectivité. De plus, selon les participants, la GRC n'a pas le temps de mener le processus de plaintes à bonne fin. Le SJFC a souligné la nécessité d'une formation sur les problèmes particuliers au Yukon pour les agents de police. Les nouveaux arrivants devraient suivre cette formation avant et pendant leur séjour au Yukon.

Police communautaire

Tous les organismes consultés ont soulevé la nécessité de réintégrer une « police communautaire ».

Le SJFC a mentionné que la GRC ne participe pas aux événements communautaires, mais qu'une telle participation permettrait à ses membres de créer des liens avec les 23 jeunes. Sans aucun doute, cela mènerait à un changement de comportement. On a soulevé que, il y a quelque temps, un caporal à Carmacks participait à un grand nombre d'activités avec les jeunes et d'activités communautaires. Selon les participants, le taux de criminalité chez les jeunes a alors baissé. Les membres du Centre ont également cité en exemple un autre agent qui est parmi les plus respectés et les plus appréciés au Yukon. Même s'il n'est plus dans le territoire, pendant son affectation dans la collectivité, il a mis sur pied un club de jeunes écuyers auxquels la plupart des jeunes se sont joints. Le Centre était d'avis que les services de police communautaire dépendaient davantage de la personnalité et de l'approche d'agents individuels que d'une quelconque politique de la GRC.

Les PNCA ont également souligné ce point en ajoutant que la participation aux activités communautaires devrait faire partie de la politique générale de la GRC, plutôt que de relever du choix d'agents de police individuels. La collectivité souhaite ardemment que les membres des détachements de la GRC participent davantage aux activités communautaires, en vertu des politiques des détachements, et non uniquement en fonction de la personnalité du caporal de détachement.

Le SJFC a fait valoir que les collectivités des Premières nations veulent être traitées en conformité avec les traditions autochtones, qui mettent l'accent sur les valeurs comme l'équité, le respect, l'amour et l'égalité. Il y a toutefois un sentiment de désespoir qui domine, puisque les collectivités n'ont pas l'impression que la GRC les comprend; elle ne peut donc pas leur offrir des services de police appropriés. Pour changer une institution comme la GRC, il faudrait changer les convictions de base, ce qui est très difficile.

Police des Premières nations

Le CPNY a fait remarquer qu'un grand nombre de Premières nations du Yukon ont maintenant compétence en ce qui concerne les services de police. Toutefois, le CPNY a souligné qu'il ne participera pas aux négociations pour les prochains contrats de services de police.

Le CPNY était d'avis que le présent examen pourrait représenter une dernière chance pour la GRC au Yukon et qu'elle doit combler les lacunes de manière appropriée.

Les PNCA et le SJFC ont tous deux indiqué que les détachements de la GRC devraient compter au moins un membre de la collectivité au statut auxiliaire ou semblable, qui agirait à titre d'agent de liaison. Cela permettrait une continuité au sein de la collectivité après le départ des autres agents. Les PNCA se sont dites atterrées par l'abolition du rôle d'agent de liaison des Premières nations, ce qui a déjà existé au Yukon.

Services sociaux

Le SJFC a mentionné que le Yukon fait face à un certain nombre de problèmes sociaux, dont un manque important de services sociaux et de services de santé mentale. Un nouveau centre de traitement, par exemple, diminuerait le nombre d'Autochtones qui se retrouvent dans des cellules de la GRC et réduirait le fardeau qui pèse sur les membres de la GRC parce qu'ils doivent fournir des services sociaux. Les membres ont reconnu que la GRC est dépassée par l'énorme quantité de travail et le manque de services sociaux dans la collectivité. Néanmoins, le manque de formation et le nombre insuffisant d'agents de police ont également été mentionnés en tant que problèmes prédominants qui doivent être réglés.

L'organisme souhaite également que la GRC soit davantage en mesure de déterminer si une personne a besoin de soins de santé, plutôt que de « simplement la jeter dans la cellule de dégrisement ».

Un client du refuge de l'Armée du Salut, qui allègue avoir « passé de nombreuses nuits dans la cellule de dégrisement », se dit fortement préoccupé par la politique selon laquelle il faut apparemment qu'une personne reste dans la cellule pour une durée prédéterminée, quel que soit son taux d'alcoolémie. Il a allégué que le fait d'être enfermé dans une cellule pendant un sevrage alcoolique donne l'impression d'être un « animal en cage ».

Groupes de femmes

Introduction

Au cours de leur séjour au Yukon, les représentants de la Commission ont rencontré des membres du personnel et des clients de la maison de transition pour femmes, qui est également connue sous le nom de Kaushee's Place. La Commission a également beaucoup parlé avec une représentante du Conseil yukonnais de la condition de la femme.

Située à Whitehorse, Kaushee's Place fournit un refuge, des soins, des services d'approche, un appui et des services d'assistance judiciaire pour les femmes et les enfants qui ont été victimes de violence et de mauvais traitements. La maison de transition permet aux femmes et aux enfants d'échapper à des situations de violence et de repartir à neuf en leur donnant accès à un refuge de deuxième étape dans un lieu sûr, à un prix raisonnableNote de bas de page 37.

Le Conseil yukonnais de la condition de la femme (CYCF) est un organisme qui défend les droits des femmes et qui fait connaître les problèmes qui touchent ces dernières en plus de travailler en vue de garantir l'égalité des femmes par la recherche, la promotion des droits, l'information et les initiatives politiques.

Le groupe travaille avec divers autres organismes pour femmes au Yukon et a pu nous parler d'un large éventail de problèmes qui ont été portés à son attention. Il est important de souligner qu'un représentant du Conseil siège également au comité consultatif sur l'examen des services de police au YukonNote de bas de page 38.

Principaux enjeux

La violence à l'égard des femmes

Les représentants de Kaushee's Place ont exprimé leurs préoccupations concernant ce qu'ils perçoivent être un problème systémique dans le traitement des femmes par la GRC au Yukon, et plus particulièrement le traitement des femmes issues des Premières nations. Un représentant du CYCF a exprimé des préoccupations semblables.

Les représentants ont l'impression que les membres de la GRC ne comprennent pas la dynamique de la violence familiale ni le rôle d'une femme dans une relation où il y a de la violence conjugale. Ce constat est fondé sur l'expérience des femmes qui ont cherché refuge à Kaushee's Place. Selon la perception exprimée, la GRC a tendance à jeter le blâme sur les femmes qui se débattent et qui se défendent, plutôt que sur le comportement violent de leur conjoint.

Les représentants de Kaushee's Place allèguent que, dans le cadre de l'option d'atténuation de la peine pour violence familialeNote de bas de page 39, les conjoints violents appellent maintenant la police en accusant leur femme ou leur conjointe d'être en état d'ivresse et de les attaquer. Ils estiment que les membres de la GRC mettent plus souvent en état d'arrestation la femme victime de violence que son agresseur masculin. Selon l'allégation des représentants de Kaushee's Place, les conjoints violents ont appris exactement ce qu'il faut dire pour avoir la maîtrise de la situation au détriment des victimes réelles, à savoir les femmes. Dans de nombreux cas, les femmes subviennent financièrement aux besoins de la famille et, par conséquent, cette situation mène à la perte d'emplois et un stress financier, qui s'ajoutent à la situation de violence conjugale.

Une cliente de Kaushee's Place a déclaré qu'elle n'appellerait pas la police si elle était victime de violence conjugale parce qu'elle préférerait souffrir en silence que d'être arrêtée et accusée d'attaquer son agresseur en se défendant. Les représentants du CYCF ont décrit des incidents semblables et ont ajouté que les incidents de violence conjugale ne sont pas, la plupart du temps, déclarés.

Ce manque de confiance entre le refuge et ses clients, d'une part, et la GRC, d'autre part, a des conséquences négatives et potentiellement désastreuses. De nombreuses femmes appelleront la ligne d'écoute téléphonique du refuge, qui est en service 24 heures sur 24, avant d'appeler la police, car elles croient qu'elles seront mieux traitées. Le personnel du refuge a déclaré avoir même reçu des appels d'enfants, qui préfèrent interagir avec le refuge plutôt qu'avec la GRC.

Par ailleurs, l'agression sexuelle alléguée de Watson Lake a également beaucoup ébranlé la confiance des groupes de femmes. Cette situation a eu des répercussions négatives sur la collectivité, surtout sur les femmes et les organismes qui les représentent. La GRC doit travailler en vue de renforcer la relation de confiance entre ses membres et les organismes de femmes. Ces efforts sont nécessaires pour permettre aux membres de la GRC de remplir leurs fonctions de manière adéquate et avec crédibilité, que l'incident à la source de cette méfiance se soit produit ou non.

Le processus de plaintes du public

Selon la perception dominante chez les utilisatrices et les membres du personnel des refuges, les femmes seraient mal traitées et blâmées si elles déclaraient les incidents de violence.

Les femmes qui ont été consultées ont reconnu avoir déjà eu affaire à des agents de la GRC compatissants, et elles ont nommé plusieurs membres qui ont été en service dans des détachements locaux par le passé. Cependant, elles soulignent que certains membres portent beaucoup de jugements. Les membres du personnel allèguent qu'elles ont déjà été traitées de personnes qui haïssent les hommes par des membres de la GRC.

En raison de cela et pour préserver les relations entre la police et le refuge, les membres du personnel hésitent à se plaindre de la conduite de policiers. Ils considèrent que les interventions policières sont parfois trop importantes et que le fait de se plaindre nuirait à la relation et aurait des répercussions négatives.

Une représentante du CYCF indique qu'elle a entendu le récit de femmes qui avaient déposé une plainte à la GRC, soit pour elles-mêmes soit pour venir en aide à d'autres, et qui allèguent que, à la suite de la plainte, elles ont été harcelées par des membres de la GRC, dont certains « les suivaient dans la collectivité, effectuaient des contrôles routiers et inventaient des raisons pour justifier ces contrôles ».

Cette même représentante trouve que le processus de plaintes est compliqué, long et insatisfaisant. Elle est d'avis que la GRC a mal informé les gens du processus de plaintes, ce qui réduit le nombre de personnes qui déposent des plaintes contre la GRC.

Problèmes de dotation et de formation

Tout comme les autres organismes qui ont été consultés dans le cadre du présent examen, les organismes pour femmes ont soulevé le problème de la dotation des détachements de la GRC. Ils sont d'avis que la rotation sur deux ans des agents de police ne fonctionne pas au Yukon. Cela cause un manque de continuité des services de police communautaire et la perte de bons agents de police.

Kaushee's Place recommande que des ateliers soient organisés avec sa collaboration pour que les membres de la GRC comprennent mieux la violence conjugale ainsi que les activités et les priorités du refuge. Idéalement, cela favoriserait une communication ouverte et une meilleure relation entre la GRC et les clientes de Kaushee's Place. Par ailleurs, la maison de transition recommande que les membres de la GRC en service au Yukon reçoivent une formation de sensibilisation afin qu'ils soient mieux préparés à interagir avec la population.

En conséquence, Kaushee's Place croit que la politique de la GRC doit être modifiée afin de garantir que ses membres en service au Yukon suivent une formation appropriée sur les particularités du territoire. Une fois les membres formés et après qu'ils ont travaillé au Yukon pendant une certaine période, ils devraient pouvoir continuer leur travail dans le territoire après leurs deux années (à l'extérieur du détachement de Whitehorse) plutôt que d'être réaffectés ailleurs au Canada.

Services sociaux

Selon le personnel, le problème le plus important au Yukon est le manque de services sociaux et de logements. Cette situation influe sur le travail de la GRC, puisque ses membres sont appelés à offrir des services sociaux. Même si un plus grand nombre de services sociaux dans le territoire aiderait à régler certains problèmes, les membres de la GRC doivent également être formés afin qu'ils usent de compassion dans l'exécution de leurs fonctions.

Services sociaux et services de santé

Introduction

Dans le cadre de l'élaboration du rapport de la Commission, des membres du personnel de cette dernière ont rencontré des représentants de l'Armée du Salut, de l'hôpital général de Whitehorse, de la clinique de santé mentale, de la Fetal Alcohol Syndrome Society of the Yukon, de la Société d'aide juridique du Yukon et des services d'immigration du Yukon.

L'Armée du Salut, établie en 1882, est une organisation non gouvernementale chrétienne qui fournit des services sociaux aux membres de collectivités partout dans le monde. La succursale de Whitehorse offre des refuges, des maisons de transition, des groupes confessionnels et des friperies. Cette organisation vise à aider les groupes les plus marginalisés et les plus négligés de notre sociétéNote de bas de page 40.

Depuis 1901, l'hôpital général de Whitehorse (HGW) fournit des services de santé aux membres de la collectivité. L'HGW est dirigée par la Régie des hôpitaux du Yukon, qui garantit que tous les Yukonnais ont accès à des soins de santé de qualité. Cet hôpital fournit des services aux hospitalisés ainsi que des services externesNote de bas de page 41.

La clinique de santé mentale (Mental Health Clinic) fournit un large éventail de services aux personnes qui sont aux prises avec des problèmes affectifs et mentaux, ainsi que des problèmes de comportement et des programmes comme des thérapies individuelles, des thérapies en groupe, des services de counseling et des services d'évaluation. Le siège social est situé à Whitehorse, et les conseillers/thérapeutes se rendent régulièrement dans les collectivités à l'extérieur de la villeNote de bas de page 42.

La Fetal Alcohol Syndrome Society of the Yukon (FASSY) offre des services aux personnes qui sont atteintes de troubles causés par l'alcool du fœtus (TCAF), de même qu'à leur famille. La Society fournit un large éventail de services, des soins prénataux aux ateliers de prévention. La FASSY offre ses services à tous les Yukonnais, mais son siège social est situé à WhitehorseNote de bas de page 43.

La Société d'aide juridique du Yukon (SAJY) est un fournisseur de services d'aide juridique situé à Whitehorse qui permet aux personnes à faible revenu d'accéder à des services juridiques de qualité. La Société fait valoir que tout le monde mérite la justice et l'égalité. Par conséquent, ses services sont offerts sans frais ou moyennant des frais très peu élevés. Les personnes qui répondent aux critères d'admissibilité ont accès à huit avocats qui sont en service aux quatre succursales de la Société, à WhitehorseNote de bas de page 44.

Yukon Immigration Crossroads est une organisation non gouvernementale qui a été établie en 2005 pour fournir des services et des programmes, comme une formation linguistique et des services d'intégration sociale, aux nouveaux immigrants. La succursale, qui est située à Whitehorse, travaille en collaboration avec Citoyenneté et Immigration Canada ainsi qu'avec l'Association franco-yukonnaise. Ce programme encourage fortement les résidents locaux à aider les nouveaux immigrants à s'intégrer à la collectivité afin d'éliminer la discrimination et de promouvoir la diversité culturelleNote de bas de page 45.

Principaux enjeux

Professionnalisme et formation des membres

Le professionnalisme des membres de la GRC a été soulevé en tant que problème. Des représentants de l'Armée du Salut ont souligné que certains des membres de la GRC qui ont été affectés au Yukon au fil des ans étaient extrêmement compétents. Cependant, ces agents de police étaient généralement des membres assez âgés et expérimentés qui déployaient des efforts considérables pour venir en aide à la collectivité. Ils ont indiqué que, souvent, les nouvelles recrues n'ont pas les mêmes compétences. Par conséquent, il n'y a pas d'interaction entre la GRC et les clients du refuge, sauf lorsqu'on appelle la police pour obtenir de l'aide à l'égard de clients difficiles.

Les employés de la salle d'urgence et des unités d'admission de l'hôpital général de Whitehorse ont une relation de travail très étroite avec la GRC et estiment que cette dernière leur fournit de bons services. Ils reconnaissent que des membres individuels de la GRC peuvent contribuer au changement et que c'est souvent le cas.

La clinique de santé mentale n'a pas souvent affaire à la GRC. La plupart du temps, leurs interactions ont été très positives. Toutefois, on est préoccupé par les incohérences apparentes dans les interventions menées par le détachement de la GRC auprès de patients atteints de maladies mentales. Malgré l'existence de plans communautaires convenus pour les interventions auprès de patients atteints de maladies mentales, la GRC n'en fait parfois qu'à sa tête dans les mesures qu'elle prend à l'égard de ces personnes. On doit gérer les clients de la clinique de santé mentale d'une certaine manière pour désamorcer les situations problématiques.

Le personnel de la FASSY n'a pas directement affaire à la GRC, mais son impression des services de police est généralement positive. Cependant, ses clients se sont plaints au personnel de leurs interactions avec la GRC. Le personnel a affirmé qu'il y a eu (et qu'il y a) des agents de police exceptionnels, mais qu'il y en a beaucoup trop qui adoptent une approche de tolérance zéro à l'égard des gens qui sont atteints de TCAF ou des gens de la rue en général et qui ne les traitent pas avec dignité. La FASSY a également souligné que le taux de roulement des agents est très élevé, qu'il n'y a pas de police communautaire et qu'il y a un grave manque de connaissances, au sein de la GRC, sur ce qu'est la vie dans les petites collectivités du Nord. Les travailleurs de la FASSY ont également affirmé croire que la GRC les considère comme un ennemi. Par exemple, certains membres du personnel ont déclaré que des agents de la GRC les ont accusés d'«  encourager leurs clients ».

Les clients d'Immigration Crossroads ne se sont pas plaints de leurs interactions avec la GRC et n'ont pas fait état de préoccupations à ce sujet. Cependant, les représentants de l'organisation ont affirmé qu'un grand nombre de leurs clients n'étaient pas susceptibles de faire part de leurs préoccupations à la police par peur de voir leur visa révoqué.

Par le passé, les agents de police en service au Yukon participaient à une séance d'orientation à l'hôpital. Ces séances ont été interrompues pour des raisons inconnues; les représentants de l'hôpital croient qu'il serait utile de les reprendre, puisque les nouveaux policiers ont besoin d'une période d'adaptation lorsqu'ils arrivent à Whitehorse. La clinique de santé mentale s'est montrée d'accord et a ajouté qu'il serait avantageux de faire suivre un cours de premiers soins en santé mentale aux membres de la GRC en service au Yukon. Il existe un cours de premiers soins qui peut être suivi par les policiers et qui leur permet d'identifier les personnes qui ont des problèmes de santé mentale et qui leur enseigne comment leur prodiguer des premiers soins.

La FASSY a également indiqué qu'il existe un modèle de formation sur les TCAF et un programme offert par l'entremise du ministère de la Justice. Selon elle, ces programmes seraient utiles aux agents de police qui interagissent avec ses clients.

Le personnel de la FASSY a également allégué que les femmes qui sont victimes de violence conjugale sont mal traitées par les membres de la GRC. Les femmes font l'objet d'accusations au criminel pour des crimes liés à la violence conjugale même si elles tentaient seulement de se défendre contre leurs conjoints violents. Par conséquent, de nombreuses femmes hésitent à faire appel à la GRC pour obtenir de l'aide.

En outre, la FASSY croit que les membres de la GRC exercent une pression exagérée sur les clients accusés d'infractions criminelles, ce qui amène ces gens à plaider coupable de diverses infractions. Pour être admissible aux services offerts par le Tribunal communautaire yukonnais du mieux-être ou au programme d'option d'atténuation de la peine pour violence familiale, l'inculpé doit plaider coupable des crimes dont il est accusé. La FASSY est d'avis que ses clients se retrouvent donc dans une situation où ils doivent avoir un casier judiciaire, sinon, ils ne peuvent pas avoir accès à de l'aide.

Les organismes consultés étaient généralement d'avis que les membres de la GRC qui sont en service au Yukon reçoivent rarement une formation adéquate et nécessaire pour composer avec les particularités du Yukon et de sa population.

La FASSY a suggéré que les membres suivent une formation adaptée à la culture avant leur séjour dans le Nord et lorsqu'ils arrivent dans la région. Par ailleurs, la FASSY et la SAJY ont affirmé qu'il faut envoyer des agents plus expérimentés dans le Nord. La SAJY a également souligné que les membres de la GRC qui sont envoyés au Yukon sont trop jeunes et n'ont pas assez d'expérience pour assurer la cohérence des services de police dans le territoire. Le Yukon est un territoire unique qui pose des défis particuliers. L'organisation s'interroge également sur les coûts associés à la rotation constante des membres au Yukon.

La SAJY a également souligné que la nécessité d'offrir une formation aux membres de la GRC envoyés au Yukon doit être une priorité. Cette formation devrait mettre l'accent sur la sensibilisation aux cultures des Premières nations, sur les problèmes particuliers au Nord et sur la manière de gérer les crises. La FASSY a allégué que la plupart des membres de la GRC connaissent mal les TCAF, voire pas du tout, et qu'il serait utile de leur donner une formation particulière sur la manière de gérer les personnes atteintes de TCAF. Une formation en plusieurs étapes est nécessaire dans le Nord, surtout dans les régions où le taux de TCAF est très élevé.

La FASSY a indiqué que, lorsque des membres de la police interagissent avec une personne atteinte de TCAF, un représentant qui connaît et qui comprend les TCAF doit être présent pour que l'interrogatoire soit équitable, puisqu'il n'est pas facile pour les personnes atteintes de TCAF de soutenir une conversation normale.

En ce qui concerne Immigration Crossroads, ses représentants ont également mentionné qu'une meilleure compréhension des immigrants est nécessaire. Immigration Crossroads a recommandé que les membres de la GRC qui interviennent auprès de citoyens dont la langue maternelle n'est pas l'anglais parlent plus lentement, soient patients et tentent d'utiliser des termes différents pour communiquer. De plus, un francophone devrait être en mesure de recevoir des services en français.

En conclusion, selon la perception générale, les nouveaux agents de la GRC qui arrivent au Yukon devraient se voir offrir une formation approfondie. En raison de ses caractéristiques culturelles et géographiques, le Yukon soulève des préoccupations et des problèmes qui lui sont propres pour lesquels, selon les organismes consultés, les membres individuels de la GRC ne sont pas adéquatement préparés avant leur arrivée au Yukon.

Disponibilité des services sociaux

La SAJY est satisfaite des membres de la GRC au Yukon. L'organisation reconnaît que le Yukon a un problème bien ancré de consommation d'alcool et de drogues. Il s'agit également d'une destination pour les « vagabonds qui veulent tenter leur chance pour une dernière fois ». À ce titre, la SAJY a exprimé de l'empathie pour les membres de la GRC au Yukon en raison des défis que pose le territoire pour les services de police et a souligné que les policiers sont souvent appelés à fournir des services de taxi pour des personnes qui sont en état d'ébriété.

L'Armée du Salut a reconnu que le manque d'unités de logement est un problème encore plus important au Yukon, ce qui met à rude épreuve les diverses ressources de la collectivité, dont les services d'ambulance, les services de police et le refuge lui-même. Comme il y a seulement dix places à l'Armée du Salut, qui offre ses services uniquement aux hommes, la seule autre option pour les clients qui sont régulièrement en état d'ébriété est la « cellule de dégrisement » au détachement de la GRC. Même si les responsables du refuge comprennent que la GRC doit déterminer la priorité des appels qu'elle reçoit, ils indiquent que, en raison des interventions tardives, les membres du personnel sont souvent laissés à eux-mêmes pour tenter de gérer un client instable pendant un certain temps. En conséquence, ils n'appellent la GRC que lorsque la situation est extrêmement grave.

La FASSY reconnaît également que les membres de la GRC peuvent ressentir de la frustration et être las du problème de va-et-vient. Toutefois, elle indique que la solution n'est pas de regrouper tout le monde dans la catégorie des alcooliques. Dans le même ordre d'idées, la clinique de santé mentale rapporte un incident qui a eu lieu à Watson Lake, où un garçon atteint d'une maladie mentale a été placé dans la cellule de dégrisement alors qu'il aurait dû être amené à l'hôpital. Les représentants de la clinique de santé mentale sont d'avis qu'il y a un manque de connaissance, parmi les membres de la GRC, de la manière de gérer les personnes qui sont atteintes de maladies mentales. Même si certains membres font preuve de professionnalisme à l'égard de ces personnes, il y en a d'autres qui ne le font pas. Malheureusement, les collectivités rurales font beaucoup plus souvent appel aux services de police en raison du manque de services de santé mentale dans ces régions. Toutefois, jusqu'à ce que cette situation change, la police doit recevoir les ressources nécessaires pour gérer de manière adéquate les personnes qui ont des problèmes de santé mentale. Par exemple, la GRC pourrait avoir une formation d'une infirmière ou d'un infirmier qui travaille auprès de personnes atteintes de troubles mentaux.

Les représentants de la clinique de santé mentale reconnaissent également que le problème découle plus largement du manque de financement des programmes de santé mentale et que cette situation s'aggravera l'an prochain, puisque le financement temporaire du gouvernement fédéral pour le Programme de santé rurale prendra fin. La GRC aura peut-être à subir une grande partie des conséquences découlant de ce manque de financement.

Recours abusif à la force

Le représentant de l'Armée du Salut prétend que les membres de la GRC font preuve d'un grand professionnalisme dans leur interaction avec eux et avec les clients lorsqu'ils arrivent au refuge. Néanmoins, il a soulevé des préoccupations concernant des allégations de clients selon lesquelles ils sont parfois victimes d'un recours abusif à la force lorsqu'ils sont enfermés dans des cellules. Des clients ont montré aux membres du personnel des ecchymoses et des brûlures de TaserMD. Le personnel a constaté que les allégations de recours abusif à la force ont diminué au cours de la dernière année et qu'il n'a pas vu de marque de TaserMD au cours des trois dernières années.

La FASSY a donné quelques exemples de clients qui se sont plaints d'avoir été victimes d'un recours abusif à la force pendant qu'ils étaient enfermés dans des cellules. Les membres du personnel ont parlé d'un client qui est arrivé à la FASSY avec des coupures et des ecchymoses et qui a allégué avoir été battu dans sa cellule. Ce client n'a toutefois pas voulu se plaindre parce qu'il a allégué que les membres de la GRC l'avaient menacé en lui disant que la situation s'aggraverait s'il se plaignait.

Une autre cliente de la FASSY à Haines Junction, qui a été mise en état d'arrestation pendant qu'elle était en état d'ébriété, allègue qu'elle a été menottée et jetée brusquement dans un véhicule de police. Le membre de la GRC n'a pas bouclé sa ceinture de sécurité et, durant le trajet, il a sauté sur les freins, projetant la cliente contre la cloison en verre. Elle est ressortie de cet accident avec les deux yeux tuméfiés et ses lunettes brisées. Elle a refusé de déposer une plainte et s'était résignée à la situation.

Dans la collectivité de Pelly Crossing, les clients de la FASSY déclarent être maltraités et ridiculisés lorsqu'ils se présentent au détachement de la GRC en raison d'une condition de leur probation. Ils sont toutefois mieux traités lorsqu'ils sont accompagnés d'un membre du personnel de la FASSY. Par conséquent, les clients ne veulent pas se rendre au détachement et risquent donc de violer les conditions de leur probation.

Système des plaintes

La SAJY ne dépose pas de plaintes officielles à la GRC ou à la Commission au nom de ses clients, car elle utilise les plaintes au sujet de la conduite des policiers dans le processus de négociation de plaidoyer dans le système judiciaire. Les représentants de l'organisation estiment toutefois que les Autochtones hésiteraient à déposer une plainte à la Commission contre la GRC parce qu'ils croient qu'il existe une affiliation entre les deux organismes et que la Commission est trop détachée de leur réalité. Selon leur perception, la Commission « n'est qu'un autre bureau fédéral dans l'est ». Il y a un sentiment général de résignation dans les collectivités des Premières nations à l'égard de la GRC. Selon l'expérience de la SAJY, la GRC ne traite pas les membres des Premières nations et les non-Autochtones de la même manière. Les Autochtones ne sont pas portés à déposer une plainte à la GRC, puisqu'ils croient que le fait de se plaindre à l'organisme même qu'ils considèrent comme la source du problème ne donnera aucun résultat. Sans présence à Whitehorse, la Commission n'a aucune pertinence pour les gens du Yukon.

L'Armée du Salut affirme que ses clients n'envisageraient pas de présenter une plainte contre un membre de la GRC par crainte d'être victimes de la « justice de la rue » ou de « subir un traitement encore pire la prochaine fois ». Autrement dit, la peur des représailles est la raison principale pour laquelle leurs allégations ne font pas l'objet de plaintes officielles. L'Armée du Salut a souligné la nécessité de mettre en place un processus de plaintes indépendant qui aiderait à dissiper les préoccupations des clients selon lesquelles une plainte mènerait à des représailles.

La FASSY a déclaré que ses clients se plaignent de la manière dont ils sont traités par les membres de la GRC, mais qu'ils ne déposeraient jamais de plainte officielle de peur d'être victimes de mauvais traitements ou de représailles par la GRC.

Les représentants d'Immigration Crossroads n'étaient pas au courant de l'existence de la Commission ni du processus de plaintes.

Engagement communautaire

La FASSY a indiqué que la réintégration de la police communautaire, qui a déjà existé au Yukon, est nécessaire. Elle s'est dite préoccupée par le fait que les interventions policières dépendent entièrement de l'agent de police individuel plutôt que des politiques en vigueur dans l'ensemble de la Gendarmerie. Par conséquent, ils croient qu'il y a un manque de politiques concernant la conduite et les interventions des policiers. En outre, la FASSY avait organisé un atelier et invité la GRC à y participer, ce que la GRC n'a pas fait.

Le représentant d'Immigration Crossroads a souligné que la GRC a accepté de participer à des ateliers organisés par l'organisme; toutefois, ils ont ajouté qu'il n'y avait aucun autre lien entre la GRC et l'organisme.

En ce qui concerne l'hôpital, le personnel allègue que, par le passé, la Division « M » et l'hôpital collaboraient sous forme de rencontres régulières pour discuter de questions stratégiques et de préoccupations quotidiennes. Ces rencontres n'ont plus lieu pour des raisons que le personnel de l'hôpital ne connaît pas. Cela est d'autant plus important que plusieurs problèmes de politiques ont fait surface récemment, ce qui a causé de la confusion chez les travailleurs et mis en doute le partage des responsabilités entre la GRC et l'hôpital.

Par exemple, la GRC exige maintenant des ordonnances médicales écrites pour aider le personnel de l'unité de santé mentale à sécurité renforcée à immobiliser les patients qui doivent recevoir des médicaments. L'unité de santé mentale à sécurité renforcée accueille des résidents du Yukon qui ont besoin de soins psychiatriques. Cette nouvelle exigence a été mise en place soudainement sans que le personnel et les administrateurs de l'hôpital soient consultés.

Par ailleurs, des membres de la GRC ont demandé à être informés lorsque certains patients de l'unité de santé mentale à sécurité renforcée obtiennent leur congé. Le personnel n'a pas le droit, en vertu de la loi, de satisfaire à ces demandes en raison des lois sur la protection de la vie privée. Cela a donné lieu à un conflit. Les membres de la GRC ont exprimé leur frustration au sujet du manque d'information.

Ce qui jette de l'huile sur le feu, c'est que la GRC a, par moments, douté des évaluations médicales des patients réalisées par le personnel de l'unité de santé mentale à sécurité renforcée. L'unité n'accueille que les patients dont le congé est refusé en raison de problèmes de santé mentale. Par conséquent, lorsqu'un patient ne satisfait pas aux critères, il ne peut pas être admis à l'unité, ce qui oblige la GRC à placer la personne dans une cellule.

Les représentants de l'hôpital reconnaissent que les gens en état d'ébriété constituent un grand problème pour la GRC et que cette situation exerce une pression sur les services de santé et de police. Ils ajoutent qu'il y a un nombre insuffisant d'agents de police en service à Whitehorse compte tenu du déficonsidérable que représentent les problèmes récurrents liés à la consommation d'alcool. Cette situation est injuste aussi bien pour la police que pour la collectivité.

Les représentants de l'hôpital indiquent également que, lorsqu'une personne en état d'ébriété avancée est mise en liberté par la GRC, elle finit toujours par se retrouver à l'hôpital, ce qui augmente considérablement la charge de travail de la salle d'urgence.

De plus, le conseil de ville de Whitehorse a déjà eu un comité qui constituait un forum pour l'échange de renseignements au sein de la collectivité. Le conseil de ville, les services sociaux et les services de santé (y compris l'hôpital) ainsi que la police siégeaient au Whitehorse Area Police Advisory Committee. Ce comité constitué de nombreux membres était très utile pour la communication des préoccupations et la discussion de problèmes existants. Toutefois, le comité ne s'est pas réuni depuis 17 mois. Les représentants de l'hôpital ont hâte qu'il soit remis en œuvre.

Selon le personnel de l'hôpital, des rencontres de liaison régulières entre la Division « M » et l'hôpital général de Whitehorse seraient très profitables aux deux organismes et devraient être reprises. Les procédures et les rôles établis dans la Loi sur la santé mentale devraient être précisés d'un point de vue opérationnel. Dans ces rencontres de liaison, on doit également traiter des politiques et des procédures de la GRC relatives à la mise en liberté de prisonniers au taux d'alcoolémie élevé.

Par ailleurs, l'hôpital général de Whitehorse recommande que la GRC lui demande des suggestions et des conseils professionnels au moment d'évaluer la nécessité de services de santé. Une infirmière ou un infirmier pourrait, par exemple, être embauché pour travailler dans les cellules de la GRC.

Le personnel de l'Armée du Salut suggère l'établissement d'une relation de liaison continue entre la Division « M » de la GRC et lui, ce qui faciliterait l'interaction de la GRC avec les clients du refuge. Le personnel de l'Armée du Salut a souvent affaire à des clients qui, en hiver, s'aventurent dans de très grands froids pour chercher des amis perdus. En raison du danger de cette situation, les responsables du refuge aimeraient avoir accès à de l'information sur les personnes détenues dans les cellules de la GRC avec le consentement préalable des clients, qui signeraient des autorisations en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels.

Langue

Les responsables d'Immigration Crossroads ont soulevé des préoccupations à l'égard de l'interaction possible entre la police et leurs clients en raison du fait que l'anglais n'est pas la langue maternelle d'un grand nombre de ces derniers. Par ailleurs, ils se sont dits préoccupés par le fait que les immigrants ne connaissent pas bien les protocoles de la police et les lois applicables.

Les représentants d'Immigration Crossroads ont souligné que le Yukon accueille une population francophone grandissanteNote de bas de page 46 et, selon eux, il n'y a pas assez d'agents de police qui parlent français et qui peuvent interagir avec cette population.

L'organisme est ouvert à établir des liens avec la GRC afin de l'aider à éliminer les obstacles ou les contraintes qui touchent les collectivités non anglophones du Yukon.

Journalistes chevronnés

Selon des journalistes chevronnés au Yukon, la GRC n'est ni aimée ni détestée; elle est simplement acceptée. Ils n'affirment pas avoir entendu de nombreuses plaintes au sujet de la GRC et, même s'ils s'attendaient à ce que l'incident lié à Raymond Silverfox change la perception de la GRC, cet événement ne semble pas avoir eu d'effets. Même s'il existe une préoccupation généralisée selon laquelle la police dissimulerait toute inconduite, les citoyens appelleraient tout de même la GRC pour obtenir de l'aide.

Les journalistes allèguent que, par le passé, ils recevaient des plaintes directes au sujet du recours abusif à la force par la GRC. Cependant, ils ne reçoivent plus de plaintes de ce genre. Selon eux, cela est le reflet d'une amélioration du traitement que réserve la GRC aux collectivités autochtones. Ils indiquent que les problèmes de confiance envers la police se sont atténués; il existe néanmoins toujours des problèmes relativement au système judiciaire.

À l'égard de la GRC, c'est à Whitehorse que les gens ont le plus de difficulté à faire confiance à l'organisme. Dans les petites collectivités, comme à Old Crow, cette situation semble s'améliorer. Watson Lake demeure la source de préoccupations importantes pour des raisons passées et présentes. Selon les journalistes, le problème de confiance de la collectivité de Whitehorse découle du fait que la GRC ne joue aucun rôle dans la collectivité mis à part ses activités d'application de la loi. De plus, il semblerait que la GRC a beaucoup de difficulté à gérer les gens qui sont en état d'ébriété, mais que les relations de la GRC avec les médias se sont grandement améliorées.

En ce qui concerne le processus de plaintes du public, les journalistes croient que le processus est bien connu, mais qu'il existe un sentiment de résignation parce qu'on juge qu'aucune mesure positive ne résulterait d'une plainte. Par ailleurs, les membres de la population craignent véritablement des représailles et de l'intimidation de la part de la GRC s'ils se plaignent.

Membres de la GRC

La Commission était d'avis qu'il était essentiel de recevoir la rétroaction de membres de la GRC pour garantir l'intégrité de l'analyse du système des plaintes au Yukon. La Commission a entrepris un processus pour recevoir la rétroaction des membres par l'entremise du représentant des relations fonctionnelles (RRF). Le RRF a reçu la rétroaction d'environ dix membres de la Division « M » par courriel.

Certains des membres consultés ont exprimé des doutes à l'égard de ce processus et n'étaient pas convaincus que leurs réponses allaient avoir du poids.

À l'égard du processus de plaintes du public, les membres se sont dits frustrés par le fait que la population peut se plaindre au sujet de toute chose qu'elle considère comme «  mal », même si la conduite alléguée remonte à quelques années et qu'il n'y a pas de mécanisme pour empêcher cela. Par ailleurs, les membres ont soulevé le fait que la Commission se fie beaucoup trop aux coupures de presse et aux renseignements obtenus par des tiers plutôt qu'aux faits. Les membres sont également préoccupés par le fait que de nombreuses heures sont gaspillées en raison des enquêtes sur les plaintes, ce qui paralyse l'organisation.

Selon les membres de la GRC, la Commission utilise des moyens agressifs pour traiter les plaintes et ne reconnaît pas ou ne met pas en valeur le bon travail des membres de la GRC. Toujours selon les membres, la Commission doit en faire davantage pour appuyer publiquement les membres de la GRC et faire preuve d'une plus grande compréhension à l'égard de l'inconduite et des erreurs commises par les membres. Ils ont également mentionné que la Commission doit en faire davantage pour gagner la confiance des membres.

Un membre a affirmé que, dans les petites collectivités, des membres du public parlent directement au commandant de détachement et peuvent lui faire part de leurs plaintes. Selon ce membre, dans les plus grandes collectivités, les policiers ne connaissent peut-être pas les membres du public, ce qui fait en sorte que le public aura tendance à déposer ses plaintes à la Commission. Il a indiqué que ces deux processus mènent au même règlement et que les discussions en tête à tête sont plus favorables au règlement de conflits, sauf lorsqu'il s'agit de plaintes graves. Selon ce membre, les organisations policières sont les seules à avoir l'expertise nécessaire pour enquêter sur les plaintes déposées contre la police.

Dans le même ordre d'idées, un autre membre a affirmé que la Commission essaie de « construire un empire », plutôt que de se préoccuper du règlement des plaintes, puisqu'elle a indiqué que les plaintes devraient être déposées auprès d'elle. Il estime que toutes les plaintes qui peuvent être réglées à l'échelle locale devraient l'être. Selon ce membre, le fait de renvoyer des plaintes à la haute direction ou à la Commission nuit à la capacité du détachement local de régler les problèmes qui le touchent.

Les membres de la GRC étaient d'avis qu'un bureau permanent de la Commission dans le Nord améliorerait la manière dont la Commission offre ses services à la population du Yukon. Ainsi, ces membres du personnel de la Commission connaîtraient mieux la région, la culture et les problèmes qui touchent les services de police ainsi que le point de vue des personnes qui fournissent ces services au Yukon.

Les membres ont exprimé leur frustration à l'égard du fait que les plaintes qui sont considérées comme « fictives  », vindicatives ou sans fondement ne devraient pas être reçues ni faire l'objet d'une enquête. On a suggéré que des mesures soient prises pour diminuer le nombre de plaintes qui sont considérées comme fictives et pour réduire le nombre de plaintes déposées de mauvaise foi. Les membres ont affirmé subir un stress important lorsqu'ils font l'objet d'une enquête en raison d'une plainte du public, que la plainte soit fondée ou non.

Les membres de la GRC sont certains que la population n'hésite pas à utiliser le système de plaintes contre eux, et certains membres ont l'impression que le processus de plaintes, tel qu'il existe actuellement, est trop accessible.

Enfin, les membres de la GRC ont déclaré que la GRC au Yukon devrait, en priorité, donner aux agents de police les ressources nécessaires pour qu'ils fassent leur travail et arrêter de « leur demander de tout faire ».

Constats et conclusions des intervenants

La plupart des préoccupations exprimées par les intervenants consultés dans le cadre du présent examen concernent un manque de confiance entre les membres de la Division « M » de la GRC et le public. La méfiance à l'égard de la GRC n'est pas un nouveau phénomèneNote de bas de page 47, et un engagement sérieux sera nécessaire pour l'éradiquer. Les difficultés inhérentes au processus de plaintes et à la perception de partialité ont été soulevées par la Commission dans son rapport sur La police enquêtant sur la policeNote de bas de page 48.

La GRC gagne la confiance du public en se conformant à une norme élevée de transparence et de responsabilité. Cette norme dépend de processus comme la présente initiative d'examen, qui découle d'un partenariat entre la GRC, le gouvernement du Yukon et le Conseil des Premières nations du Yukon. La Commission félicite toutes les parties qui ont participé à cette initiative et espère que sa présentation contribuera à un dialogue continu, qui mènera à une relation plus positive entre la GRC et tous les Yukonnais.

Annexes

Annexe A : Lettre du gouvernement du Yukon et de la Division « M » de la GRC

(Disponible en anglais seulement)

Yukon
Office of the Minister
Box 2703, Whitehorse, Yukon Y1A 2C6

April 19, 2010

Mr. Ian McPhail
Interim Chair
Commission for Public Complaints Against the RCMP
Chair's Office
Service Bag 1722, Station B
Ottawa, ON KIP 083

Dear Mr. McPhail:

RE: YUKON CITIZENS CONCERNS REGARDING RCMP

We are writing in order to convey to you the concerns that some citizens of the Yukon have expressed regarding the members of the Royal Canadian Mounted Police (RCMP). As you are no doubt aware, policing in the Yukon is considerably different from policing elsewhere in Canada. The unique nature of policing in the Yukon calls for a strong relationship between members of the RCMP and the citizens of the Yukon. Police officers in small, isolated communities are called upon to perform a variety of services in the community that extend well beyond the customary understanding of law enforcement. The relationships that officers in small communities develop with municipal and first nations leaders, teachers, health care workers and others in the community are critical to them in carrying out their duties.

While the majority of RCMP officers provide a valuable service and carry out their duties to the highest ethical standard, a few high-profile incidents in the Territory have tested the confidence that some members of the public have in the RCMP. Some citizens are concerned that, from time to time, some RCMP members might be characterized as indifferent to the well-being of those who they serve. The public has expressed that RCMP officers do not always demonstrate the duty of care expected when a person is arrested and/or detained by police.

In an effort to maintain the trust and confidence of the citizens of the Yukon, the Yukon Department of Justice and the Commanding Officer of "M" Division will initiate a Review of Policing in Yukon. We would like to meet with you in order to discuss to what extent your office might wish to contribute to this review in order to ensure it has factually based findings that would assist the Government of Yukon and the "M" Division to respond to the citizens' concerns so as to continue to hold their confidence.

Yours very truly,

Marian C. Horne
Minister of Justice

Superintendent Peter Clark
Acting Commanding Officer
RCMP "M" Division


Annexe B : Critères d'évaluation

Formulaire d'évaluation des critères pour l'examen des dossiers [ Format PDF, 108Ko]

Annexe C : Aperçu de l'analyse des données

Au total, cent cinquante-cinq (155) dossiers de « plaintes du public » ont été examinés. Toutefois, seuls cent quarante-six (146) de ces dossiers ont effectivement été traités en tant que plaintes du public contre la Division « M  ». Parmi les neuf (9) dossiers restants, un (1) était un dossier d'une plainte du public déposée contre la Division « E », mais ayant fait l'objet d'une enquête par la Division « M »; deux (2) étaient des dossiers d'assistance d'autres divisions pour l'obtention des déclarations sur des plaintes du public déposées contre elles; un (1) était une réponse pour fournir de l'information à la CPP sur une enquête d'intérêt public concernant l'utilisation d'une arme à impulsions (taser) à la Division « M »; deux (2) ont fait l'objet d'un mode alternatif de règlement des conflits avec l'aide du bureau de réception des plaintes de Surrey de la CPP; un (1) contenait des conseils sur un enjeu qui n'était pas lié aux plaintes du public; un (1) concernait un règlement à l'amiable conclu à la suite d'un problème mineur (mais aurait pu être enregistré en tant que plainte du public) et un (1) n'était qu'un dossier d'information (mais aurait dû être traité comme une plainte du public).

Des cent quarante-six (146) plaintes du public réellement examinées, dix-sept (17) étaient toujours en suspens et faisaient l'objet d'une enquête. Par conséquent, cent vingt-neuf (129) dossiers de plaintes du public traités ont été examinés. Soixante (60) des plaintes du public avaient été déposées à la GRC et quatre-vingt-six (86), à la CPP.

Nombre de plaintes du public par année

Nombre de plaintes du public par année
Année Nombre Année Nombre Année Nombre
2005 21 2007 31 2009 20
2006 15 2008 30 2010 29

Plaintes du public par organisme ayant reçu la plainte – CPP ou GRC

Plaintes du public par organisme ayant reçu la plainte - CPP ou GRC
Année CPP GRC Année CPP GRC   Année CPP GRC
2005 10 11 2007 15 16   2009 16 4
2006 9 6 2008 14 16   2010 22 7

Plaintes du public par détachement

Plaintes du public par détachement
Détachement Nombre Détachement Nombre
Whitehorse 77 Pelly Crossing 3
Watson Lake 13 Teslin 3
Haines Junction 11 Mayo 2
Carmacks 10 Old Crow 2
Dawson City 7 Beaver Creek 2
Ross River 5 Stewart Crossing 1
Carcross 4 Général 1
Faro 4 Non précisé 1

Plaintes du public par résultat

Plaintes du public par résultat
PDP-CPP* Lettre de décision Règlement à l'amiable Retrait Clôture Enquête en vertu de la loi En suspens**
2 49 44 21 15 2 13

*Plainte déposée par le président de la Commission des plaintes du public
**Toujours sous enquête.

Plaintes du public par durée du traitement*

Plaintes du public par durée du traitement
<1sem. <1 mois 1-2 mois 3-4 mois 5-6 mois 7-8 mois 9-10 mois 11-12 mois 13-14 mois En suspens
8 29 47 21 12 3 5 2 2 17

*Cela ne comprend pas une plainte particulière qui a été laissée en suspens à la demande de l'avocat du plaignant, puis retirée.

Allégations

Allégations
Allégation Nombre Allégation Nombre
Attitude répréhensible 38 Usage incorrect d'un bien/de pièces 7
Conduite oppressive 36 Mort sous garde* 5
Négligence dans le devoir 35 Perquisition impropre 4
Recours abusif à la force 35 Communication injustifiée des renseignements 2
Arrestation injustifiée 14 Usage abusif d'une arme à feu 1
Procédure irrégulière 9 Parjure 1
Entrée illégale 8 Détention illégale 1
Saisie illégale 7 Falsification d'éléments de preuve 1

*Comprend plus d'une plainte sur le même événement. Au total, il y a eu trois décès sous garde.

Suffisance des renseignements

Suffisance des renseignements
Règlement à l'amiable – Renseignements insuffisants Retrait – Renseignements insuffisants Renseignements suffisants, mais dossier clos
4 8 8

Plaintes du public – examen de la CPP

Plaintes du public - examen de la CPP
Rapport final Rapport provisoire Cessation d'emploi non requise, conduite appropriée
9 2 5

Annexe D : Questions posées aux intervenants

  1. Comment votre organisation perçoit-elle la GRC du Yukon?
  2. Que disent vos clients, vos membres ou votre collectivité au sujet de la GRC du Yukon?
  3. Estimez-vous que la population fait confiance à la GRC du Yukon, de sorte qu'elle peut se plaindre auprès d'elle, au besoin?
  4. Que pensez-vous du processus de plaintes du public?
  5. De quelles questions la GRC du Yukon doit-elle faire une priorité?
  6. Que doit changer, le cas échéant, la GRC du Yukon dans sa façon d'offrir des services de police aux Yukonnais?

Annexe E : Politique nationale de la GRC – Plaintes du public

Politique nationale de la GRC [PDF Format, 398Kb]

Annexe F : Politique de la Division « M » de la GRC

Politique de la Division « M » de la GRC [Format PDF, 671Ko]
(Disponible en anglais seulement)

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